Combattantes

On parle beaucoup de la violence infligée aux femmes, moins de celle perpétrée par les femmes. Combattantes, ouvrage collectif dirigé par l'historien et professeur à l'Université Paris 8 Martial Poirson, et préfacé par Christiane Taubira, est un essai psychologique, sociologique et historique sur les figures féminines offensives. Un « beau livre », de 264 pages grand format, que j'ai pris plaisir à parcourir, m'attardant sur les chapitres qui m'interpelaient le plus.

L'ouvrage a pour toile de fond notre société occidentale en perpétuelle évolution, mais dans laquelle les femmes ont dû et doivent encore se battre, combattre, pour échapper à la domination du sexe « fort », faire valoir leurs droits ou celles d'autres minorités, ou tout simplement exister.

Bien que L Histoire ait été écrite par et pour des hommes soucieux de perpétuer le mythe de l'innocence féminine, ces femmes « fortes » ont une place dans l'inconscient culturel : figures antiques, mythiques, abondamment représentées dans les textes anciens et dans la peinture. Mais selon l'auteur, elles ne sont pas suffisamment célébrées dans l'histoire plus contemporaine.

À côté des violences féminines domestiques, secrètes ou déviantes qui ne leur donnent pas la part belle, les femmes se sont aussi illustrées, quoi que plus discrètement que leurs homologues masculins, par des actions de groupe au sein de l'espace public. Ce sont ces actions pour le bien collectif que l'ouvrage se propose de mettre en lumière. Combattantes réhabilite ces femmes au rang d'héroïnes, et leur rend hommage. Les exemples sont nombreux, et bien documentés.

Pour élargir encore le débat, j'ai envie de mettre Combattantes en parallèle avec deux autres ouvrages : Les Combattants, de Jean-Michel Billioud, et Sorcières de Mona Chollet.
Les titres parlent d'eux-mêmes : dans Les Combattants, il est question de 15 femmes et 15 hommes (stricte parité, mais même s'il s'était agit de 29 femmes et d'un homme, le masculin « l'aurait emporté » dans le titre) qui ont bravé l'ordre établi pour défendre une cause collective.
Dans son ouvrage, Mona Chollet examine quant à elle la figure de la sorcière à travers les époques, victime d'injustes discriminations. Elle prend au contraire le parti de la présenter comme une allégorie positive, et érige un tableau de la sorcière « moderne », combattante elle aussi.

Cet ouvrage collectif retrace à travers les siècles le sens politique des femmes qui considèrent le recours à l'action parfois violente comme nécessaire et qui s'engagent dans des insurrections bousculant l'ordre social.
Il comprend plusieurs chapitres présentant des femmes combattantes, à travers les siècles, dans toute leur diversité :
- Les femmes grecques ne sont pas des Amazones : des actions collectives visant à défendre des rites ou à lutter pour acquérir ou conserver un statut.
- Les arts martiaux au féminin : la représentation des femmes dans les livres de combat
- Femmes combattantes ou femmes battues ? Les voix féminines de la révolte en France au Moyen Age
- Amazones, Preuses, Sibylles et autres franches tireuses. L'utilisation des figures de guerrières au temps de l'invention de la loi salique
- Résister, se défendre, agir. Les femmes du XVIIIème siècle en milieu populaire
- Les femmes contre l'esclavage. de la lutte au quotidien à l'héroïsme révolutionnaire
- La pétroleuse. La déni et l'exacerbation de la violence politique des femmes sous la Commune de Paris
- Les vitrioleuses, des criminelles passionnées ? Des femmes se vengent de leurs anciens compagnons, de 1870 à 1930, en leur projetant au visage de l'acide sulfurique
- le coups de force des suffragettes. L'action directe au service du droit des femmes
- Aventurières, déclassées, brutes ? Retour sur les surveillantes SS des camps de concentration nazis
- Armée française et bordels militaires de campagne. Algérie, France, Indochine (1930-1962)
- le sexisme au bout du stylo. Regards médiatiques sur les militantes de groupes révolutionnaires armés en France et RFA (1970-1989)
- “Sauvageonnes” ? Les mineures violentes (XX – XXIème siècles)
- Femmes terroristes à l'heure de la mondialisation, qui remettent en cause des valeurs et normes sociales
- Guerrières aux seins nus. Les habits neufs du féminisme ? La nudité féminine apparaît comme une arme politique ambiguë.
Cette cartographie des mouvements des femmes se concentre sur les actions commises en groupe, avec une attention particulière sur la désobéissance civile.
Cet ouvrage, richement documenté et illustré, nous donne les moyens de prendre conscience de l'évolution de la représentation de ces femmes combattantes, à travers les termes employés pour les désigner, la retranscription d'événements manquant l'Histoire en Occident ainsi que le décryptage d'une image à la fin de chaque chapitre. Il met en lumière la violence de femmes, quelle que soit la motivation sous-jacentes, que l'on évoque rarement en raison de la domination du modèle patriarcal et à une perception féminine parcellaire. Sa trame chronologique permet de rapprocher ces violences, qu'elles soient domestiques, militaires, politiques ou idéologiques, au contexte économique, politique et social ainsi qu'à la condition féminine de cette période.
Ce livre rend justice à ces femmes d'actions qui ont combattu la résignation ou refusé le consentement, loin des clichés sexistes aussi bien que victimaires. Toutes ces femmes n'inspirent pas l'admiration mais reprennent leur place dans la sphère publique et illustrent le rôle moteur qu'elles ont eu dans le cours de l'Histoire.


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Livre reçu grâce à la masse critique, merci Babelio !
Que dire de ce livre qui est impressionnant tant par ses nombreuses recherches, un sujet traité en profondeur et au fil du temps mais aussi par sa beauté en tant que livre.

Ne vous arrêtez pas à la préface qui rappelle les mauvais souvenirs des mémoires, travaux de fin d'études et autres. le reste du livre n'est pas écrit de la même manière.

Comme dit à la page 14, "l'ouvrage se concencentre sur des actions commises en groupe, avec une attention particulière pour la désobéissance civique. Il y sera par conséquent plutôt question de guerrières ordinaires que de figures d'exception, de combattantes au quotidien que d'héroïnes occasionnelles, d'activistes persévérantes que d'aventurière d'un jour."

Chaque chapitre se concentre sur un sujet précis à une époque donnée, ne voici quelques-uns :
- Les femmes grecques ne sont pas des Amazones
- Résister, se défendre, agir. Les femmes du XVIIIe siècle en milieu populaire
- Les vitrioleuses, des criminelles passionnelles ?
- Femmes terroristes à l'heure de la mondialisation
- ...

Ce livre est très bien documenté avec des faits historiques, des liens avec des livres ou des films et on apprend énormément de choses sur la place de la femme et le combat que certaines ont du mener sans jamais avoir la reconnaissance des hommes (par temps de guerre) ou l'aval des hommes (reconnaissance de droits ou autre) car la société est dirigée, vue et construite par les hommes. Cet ouvrage apporte un regard nouveau sur de nombreux moments historiques.

N'hésitez pas à prendre votre temps et lire juste un chapitre de temps en temps, vous en profiterez d'autant plus.

Un documentaire extrêmement dense sur la place des femmes dans notre Histoire, la violence dont elles sont capables pour défendre leurs droits, leur famille, se défendre elle-même.
Au delà des faits, ce sont aussi les légendes qui sont creusées, celles des guerrières, les représentations dans les tableaux, les femmes dans d'autres civilisation.
Ce n'est pas un livre qu'on lit d'une traite mais qui se feuillette à l'occasion, chapitre par chapitre, un évènement historique à la fois. Un livre qu'il est bon d'avoir sous la main dans sa bibliothèque quand on s'intéresse à la place des femmes dans le monde et à leur invisibilisation.
Ce livre veut briser le tabou de la femme combattante, abattre le cliché de la femme douce et vertueuse, incapable d'user des armes "masculines" encore aujourd'hui c'est impensé, on préfère parler de "crise de masculinité" un acte violent commis par une femme c'est une triple transgression à la "loi du genre" :
1. C'est lui reconnaître une place dans la sphère publique
2. C'est lui reconnaître une capacité d'autonomie d'action
3. C'est la considérer comme déterminée et sans concession
L'idée n'est pas de relever les cas de violences domestiques ou privées mais les actions de groupe, les désobéissances civiques, l'activisme : c'est un hommage à celles qui ont refusé de ployer l'échine.

Les quatre vagues du féminisme (note pour mémoire)
1. Début XXème (égalité homme/femme dans une conception universaliste)
2. 1968 (liberté de corps, de lutte, politique)
3. 1990 (LGBTQI)
4. #ME TOO

Combattantes
Collectif.
269 P.
Merci à la Masse Critique BABELIO !
Livre magnifique de par ses illustrations. C'est surtout un livre documentaire dense , sur la place des femmes dans notre Histoire. Il n'est pas à lire mais à consulter , régulièrement, à feuilleter , à découvrir par- ci , par là. Nous entrons dans le monde de la violence faite aux femmes dans plusieurs civilisations.
A chaque chapitre , nous découvrons un fait historique suivi d'un témoignage.
Un livre à conserver dans sa bibliothèque !