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EAN : 9782264053497
336 pages
10-18 (07/06/2012)
3.59/5   128 notes
Résumé :

Professeur dans une université du Connecticut, Jack Griffin est invité au cap Cod avec sa femme Joy, le temps d'un mariage. Le week-end, qui s'annonçait enchanteur, se révèle dévastateur. Il sonne le glas du couple, réveille les espoirs déçus, les conflits jamais résolus.

Joy regagne le Connecticut, tandis que Jack part pour Los Angeles. Un an plus tard, le mariage de leur propre fille scelle leurs retrouvailles. Elles sont d'autant plus mouve... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (32) Voir plus Ajouter une critique
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Deux mariages et des emmerdements.
Griffin s'apprête à vivre deux années bien compliquées, Entre Joy son épouse qui ressent le besoin de s'éloigner, les cendres de son père qu'il doit disperser au Cap Cod mais qu‘il recule de faire indéfiniment et une mère envahissante, désagréable et cynique, cela fait beaucoup pour notre anti héros qui supporte tout ça sans se révolter. Alors que le premier mariage devient un déluge de catastrophes, le deuxième celui de sa fille Laura sonne celui des explications. D'autant que Maman Griffin à rejoint son ex-mari dans le coffre de la voiture en vue d'une dispersion commune.
On retrouve tout ce qui fait le talent de Richard Russo. Entre humour vache et tendresse, une réflexion sur l'amour, sur le temps qui passe, sur les choix de vies. La lecture est toujours plaisante même si pour ma part mon attachement aux personnages c'est moins imposé qu'a l'accoutumée. Les incessants retours en arrière, pourtant essentiels m'ont empêché d'adhérer pleinement à son récit. Néanmoins, ça reste tout de même bien agréable, avec notamment une scène d'anthologie lors du deuxième mariage à ne pas rater. Drôle et cruel.
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C'est une histoire sur l'atavisme. Soit on traine son enfance comme un boulet dans sa vie d'adulte, soit, sans l'oublier, on vit sa vie d'adulte. C'est compliqué pour Griffin qui arrive toute doucement à la soixantaine. Il a toujours tout fait pour vivre le contraire de ses parents, pour être le contraire de ses parents. Et il s'aperçoit à ce stade de sa vie qu'il s'est trompé. Les souvenirs fusent, pas toujours chronologiquement, alors il faut suivre Griffin, s'accrocher dans ses souvenirs d'enfant, d'adulte. Il se rend au mariage de sa fille avec les cendres de son père dans le coffre de sa voiture. Il va les traîner longtemps les cendres… D'ailleurs les cendres de sa mère vont rejoindre le coffre . Et malgré toutes les demandes de ses parents pour qu'il les disperse à Cap Cod, l'endroit magique de leur vie, ils vont passer quelques temps dans leur nouvelle résidence, à nouveau réunis. Aura-t-il la force de disperser les cendres de ses parents, maintenant qu'il entend et écoute sa mère lui parler, lui donner des conseils ? Pas facile tout ça. de l'humour grinçant pour une histoire qui pourrait être pathétique. Je connais bien l'atavisme, la transmission familiale qu'on traîne comme des boulets.
Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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On ne choisit pas sa famille, dit l'adage. Jack, quant à lui, aurait aimé être le fils des Browning, même si « comme avait lâché sa mère, ils (n') enseignent (qu')au collège ». « Il lui avait suffi d'une semaine pour tomber amoureux, aussi improbable que cela paraisse, de toute la famille Browning et les jours passés en leur compagnie étaient merveilleux, y compris ceux où il pleuvait ». Mais il n'était que le fils des Griffin qui, eux enseignaient à l'université. Absents, égoïstes, négligents (surtout avec les affaires des autres), volages, méprisants et insatisfaits de leur vie, voici des personnages peu sympathiques. Oui, mais quand ce sont vos parents, que vous êtes leur enfant unique, il faut faire comme Jack, faire avec. Et puis, soyons justes, il y a toujours, dans toutes les familles, quelques bons moments. Pour Jack et ses parents, cela a toujours été leurs vacances d'été au Cap Cod, vous savez cet endroit magnifique que la bourgeoisie de Boston, imitant les Kennedy, envahit dès les beaux jours.
Richard Russo donne la parole à Jack Griffin, devenu prof d'université lui-aussi après avoir tâté de l'écriture ou plutôt de la réécriture de scénarii pour l'usine à rêves d'Hollywood. Autour de deux mariages, celui d'une amie de sa fille puis, un an plus tard, celui de sa propre fille, Jack va revenir à Cap Cod, repenser à son enfance, alors qu'il vient de perdre son père et qu'il ne va pas tarder à perdre sa mère, tout en constatant que son mariage bat de l'aile. Pour le lecteur, c'est un régal : le cadre, le milieu universitaire, les rapports familiaux et les dégâts qu'ils peuvent causer sur une vie de couple.
Comme d'habitude, les personnages secondaires de Richard Russo valent beaucoup mieux que ce qualificatif. On les croisera à l'un ou l'autre des mariages et, pour peu qu'on prenne le temps de poser son verre et de passer de table en table, on sera étonné de leur consistance. On aimera leur histoire personnelle et, si on en avait le temps, on les accompagnerait sur la plage pour les écouter encore un moment, car ils ont des choses intéressantes à dire.
Il ya, en particulier, Sunny, le fils d'immigrés coréens, ami d'enfance de sa fille, amoureux transi et silencieux, bon élève, bon camarade, qui passe à côté parce que trop bien élevé. Il épousera une Coréenne qu'il n'aime pas, pour faire plaisir à ses parents. Ou Marguerite, invitée avec son gros beauf d'ex-mari, qui voudrait vivre encore un peu avant de se faner définitivement. Elle est souriante, pétillante, mais au détour d'une phrase, on apprend qu'elle aussi a un passif avec ses parents.
Le père et la mère, égoïstes et absents mais envahissants même si l'un des deux est en maison de retraite quelque part dans l'Indiana et le second enfermé dans l'urne funéraire que son fils trimballe depuis presque un an dans le coffre de sa voiture dans le but de disperser ses cendres quelque part dans cet endroit qu'il aimait tant. Jack les fuit mais il ne réussit pas à les chasser de son esprit.
Il fuit aussi ses beaux-parents, chaque invitation est un supplice mais comment faire ? Ils aiment leur fille et voudraient la voir plus souvent, ce qui tombe bien mal parce que leur fille les aime aussi et voudrait leur rendre visite beaucoup plus souvent. Ca vous parle peut-être ?
Un mariage qui part en quenouille, peut-être à cause des parents, un collègue et ami proche qui voudrait être encore plus proche de sa femme, laquelle le sent et s'en défend à (grand) peine. Bref, comme parfois à Cap Cod quand la brume marine se lève et efface le paysage, Jack perd pied avant de découvrir, une fois qu'elle se sera dissipée, ce qu'il n'imaginait pas. Richard Russo est un magicien de l'ordinaire, il réussit à passionner son lecteur pour la vie de ses personnages sans drames, sans rebondissements imprévus, juste parce qu'il dépeint merveilleusement bien des choses et des sentiments ordinaires.
Il y a des scènes que nous avons tous, plus ou moins, vécues : l'achat (compliqué) du sapin de Noël, les vacances d'été dont une partie passe à rêver à l'acquisition d'une résidence secondaire, le retour en voiture de week-end en voiture avec le silence où chacun des conjoints laisse vagabonder ses pensées sans déranger l'autre ou sans oser lui parler. C'est subtil, délicat, souvent humoristique et terriblement prégnant parce que ce que raconte Griffin, ce qu'il pense, ce qu'il imagine ou redoute, oui, nous l'avons tous, un jour ou l'autre, vécu ou pensé.
J'ai même eu la chance, un jour, de franchir moi-aussi le Sagamore bridge pour découvrir Cap Cod, me promener au sommet de ses dunes, descendre sur ses plages et partir en mer admirer les baleines, et je n'ai qu'un regret : ne pas avoir lu plus tôt les Sortilèges du Cap Cod.
« Mon Dieu, non, ça n'avait rien à voir avec toi. C'est aux sortilèges du Cap Cod qu'on doit d'être restés ensemble si longtemps, That Old Cap Magic. Tu te souviens qu'on le chantait chaque fois qu'on traversait le Sagamore ? Puis elle se tourna vers Bartleby. "Un mois de rêve, tous les étés. Soleil, sable, mer, gin. Suivis de onze mois de calvaire." S'adressant de nouveau à Griffin, elle ajouta : "Mais ça vaut pour la plupart des mariages, tu verras."
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Richard Russo, né en 1949, est un écrivain et scénariste américain. Il a grandi dans l'Etat de New York, obtenu un doctorat de philosophie en 1979 et un Master of Fine Arts en 1980 à l'Université d'Arizona, puis été professeur de littérature avant de se consacrer à l'écriture. Il vit et écrit dans le Maine avec sa femme et ses deux enfants. Les Sortilèges du Cap Cod date de 2009.
Jack Griffin, professeur dans une université peu réputée du Connecticut après avoir été scénariste de sitcoms à Hollywood, ne peut que constater que son mariage depuis plus de trente ans avec Joy part à vau-l'eau. Invités au mariage d'une amie de leur fille Laura au Cap Cod, ce week-end entérine leur séparation. Jack retourne à Los Angeles tenter de reprendre son job de scénariste et Joy regagne le Connecticut. Un an plus tard, tous deux s'étant remis en couple chacun de son côté, ils se retrouvent pour un nouveau week-end de mariage, celui de leur fille Laura. Et si ces retrouvailles ponctuelles étaient l'occasion de renouer avec leur ancienne relation… ?
Je n'avais jamais lu cet écrivain car d'instinct je ne le « sentais » pas, l'occasion de confirmer ou infirmer cette prémonition m'en étant donnée, je me suis lancé en choisissant cet ouvrage parce que c'était le plus mince de ceux disponibles à la médiathèque.
Il s'agit d'un roman psychologique, sur l'usure des couples, la mémoire et le legs atavique de nos parents. Sur l'usure des couples, ici Joy et Jack, l'écrivain porte un regard acéré mais somme toute réaliste, enrobé d'un humour grinçant qui fait rire jaune. le personnage central étant Jack, c'est lui qui porte le fardeau le plus lourd car à la souffrance de voir son couple se déliter, s'y ajoute un méga problème psychologique issu de ses rapports avec ses parents. Rapports difficiles ce n'est rien de le dire.
Quand débute le roman, son père est décédé, incinéré, et l'urne contenant ses cendres attend sagement dans le coffre de sa voiture que Jack trouve l'endroit idéal pour les disperser. Son idée, profiter du week-end au Cap Cod pour les éparpiller dans la mer. Sauf, que ce geste ultime sera sans arrêt retardé pour mille raisons. Jack avait une relation difficile avec son père vivant, aujourd'hui il est dans le fond de sa bagnole attendant son heure ; quant à sa mère, qui ne souffrait plus son époux, ils vivaient séparés, elle encombre l'esprit de son fils, lui téléphonant à tout moment, vindicative et autoritaire, lui pourrissant la vie. Familles, je vous hais, comme disait l'autre. J'ai choisi un ton rigolard pour résumer cet angle du roman, Richard Russo la joue plus finement évidemment mais l'humour discret n'est jamais vraiment loin, non plus.
Reste la mémoire. C'est l'aspect du bouquin le plus complexe, Jack confronte ses souvenirs à ceux de sa mère, or tout ne colle pas, mais sa mère est âgée et Jack comme nous-mêmes savons que nous ne retenons du passé que ce que notre esprit veut retenir. de plus sa mère va lui révéler des choses qu'il ne savait pas. Et pour que tout ce micmac tourne gentiment à la prise de tête, l'écrivain mêle passé et présent étroitement ; si vous n'êtes pas très attentif à ce que vous lisez, vous serez obligé de retourner quelques lignes en arrière pour comprendre à quel moment de l'histoire vous êtes. La construction est savante et ne manque pas de talent.
Mais cette construction ne s'arrête pas là, Richer Russo a recours à un autre effet, l'effet miroir. Toutes les situations et rapports humains ont un double. le week-end du mariage au début du livre trouve son double à la fin quand s'en ouvre un autre pour le mariage de Laura, dans l'un Jack et Joy se séparent, dans l'autre peut-être vont-ils se réconcilier ? Lors du premier, Jack transportait l'urne funéraire de son père dans son coffre, dans le second il y entrepose aussi ( !) celui de sa mère maintenant décédée. Enfant, Jack était tombé « amoureux » d'un couple, voisins de vacances, adultes plus aimable que ses parents, aujourd'hui un jeune homme d'origine asiatique est « amoureux » du couple Jack/Joy…. Etc. etc.
Le livre est dense, les flashs de souvenirs interviennent sans crier gare, il y a de l'humour basique (par exemple la séquence du choix du sapin de Noël) et de l'humour noir ou grinçant, de la mélancolie et un sentiment général d'amertume, de tristesse assumée, inexorable car ainsi va la vie…
Conclusion difficile, l'auteur a du talent mais j'ai été partagé entre amusement gentil et ennui parfois. Reviendrai-je vers Richard Russo, honnêtement je ne le pense pas, mais ce n'est pas une raison pour que j'en dégoûte les autres.
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Dans les AIR 2011, cela fait parti des livres à lire, tout comme Necropolis, naissance d'un pont et Rosa Candida. Je m'y suis donc pliée avec plaisir. J'avais déjà lu un recueil de nouvelles de cet auteur.

Son roman présente certaines caractéristiques de ses nouvelles. Il y est question de l'enfance, des relations parents / enfants, des affres d'un homme autour de la quarantaine, de professeur de littérature. On y retrouve la même écriture. Ce n'est pas désagréable mais cela sent la recette bien maitrisée… Il n'y a pas de vraies surprises pourtant l'idée est bonne.

Un homme marié depuis plus de trente ans se rend au mariage d'une amie de sa fille au Cap Cod. Il transporte dans le coffre de sa voiture les cendres de son père. Pendant ce voyage et ce mariage il va faire le bilan de sa vie conjugale et se remémorer son enfance ainsi que le mariage / divorce de ses parents où le Cap Cod joue un rôle déterminant.

Est il heureux, malheureux, il ne le sait pas lui-même ?

Il semble mettre tous les problèmes sur le fait que la famille de sa femme ait été envahissante ou pour le moins ait influencé sa vie maritale. Mais sa propre famille l'envahit d'une autre façon, plus insidieuse…

Son enfance remplit des pages. Il est la recherche d'une autre vie possible s'il avait fait d'autres choix… Il retrouve sa femme pour finalement une dispute qui va mener à leur séparation. On les retrouve un an plus tard, c'est le mariage de leur fille. La mère de Jack (sa seule famille) est morte, ses cendres comme celles de son père sont dans le coffre de la voiture. Les retrouvailles de la famille de son ex femme sont à la fois explosives, hilarantes mais aussi douces amères.

C'est un livre sur les choix, sur les possibles, sur l'impact parental, sur les préjugés, sur le cynisme.

Il y a un petit coté à la fois egocentrique et exhibitionniste. Un peu à la Emmanuel Carrère mais avec plus d'humour de d'auto dérision que Carrère.
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critiques presse (1)
Lexpress
05 juillet 2012
Mêlant amertume et humour grinçant, Richard Russo signe un conte cruel sur les affres de la transmission familiale, dans les coulisses de la middle class américaine.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (38) Voir plus Ajouter une citation
C'était au sujet de l'endroit où ils passeraient leur lune de miel qu'ils avaient connu leur premier vrai désaccord. Elle penchait pour les côtes du Maine où elle allait en vacances quand elle était petite. Chaque été, la famille louait la même vieille baraque à moitié en ruines non loin de l'endroit où sa propre mère avait grandi. Les huisseries laissaient passer les courants d'air, la charpente craquait, et le parquet était tellement voilé que si un pion des petits chevaux tombait de la table de la cuisine, on courait après jusque dans le salon pour le récupérer. Mais ils y étaient habitués, et il y avait assez de place pour loger les parents, les cinq enfants et les éventuels visiteurs du week-end. Joy se souvenait des dîners en famille et des excursions le soir vers un parc d'attraction de la région, des parties de Monopoly et des tournois de Cluedo qui duraient la journée entière quand il pleuvait. Même après la mutation de son père dans l'Ouest, ils retournaient passer le mois de juillet dans le Maine, malgré les plages de galets et l'eau trop froide pour s'y baigner. Joy était allée jusqu'à suggérer de louer cette même maison pour leur lune de miel. Ce qui appelait la Grande Question numéro un : pourquoi Griffin l'avait-il convaincue d'aller au cap à la place ? Puisque l'opportunité leur était donnée de suivre les traces d'un mariage heureux - celui des parents de Joy l'avait été, sans l'ombre d'un doute -, pourquoi choisir l'exemple misérable donné par ses propres parents ?
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Pour Griffin, qui avait maintenant cinquante-sept ans - à peu près l'âge de ses parents lorsqu'il avait épousé Joy -, les noms de localités du cap avaient gardé toute leur magie : Falmouth, Woods Hole, Barnstable, Dennis, Orleans, Harwich. Ces toponymes le ramenaient à son enfance, au siège arrière de la voiture familiale, où il avait passé une bonne partie de sa jeunesse, sans ceinture, les bras posés sur les sièges avant, à tendre l'oreille pour attraper des bribes de ce qu'ils se disaient sans jamais essayer de l'inclure dans leurs conversations. Non pas qu'elles l'aient intéressé tant que ça, mais il était conscient que se prenaient là des décisions ayant des conséquences directes sur sa vie, et, s'il les interceptait assez tôt, peut-être aurait-il l'opportunité de donner son avis. Malheureusement, le simple fait que son menton soit posé sur l'appuie-tête semblait l'exclure d'emblée. Dans l'ensemble, les informations qu'il glanait ne valaient pas tant d'efforts. "Wellfleet, disait par exemple sa mère, le nez dans un atlas routier. Pourquoi est-ce qu'on n'a jamais essayé Wellfleet ?" L'année où Griffin entra en seconde, celle de leur dernier séjour au cap, ils avaient déjà ratissé les locations saisonnières de la région. Chaque été, au moment de rendre les clés à l'agence, on leur demandait s'ils envisageaient de revenir l'année suivante. Ils répondaient toujours par la négative, et Griffin commençait à douter que cet endroit rêvé existe pour de bon. Il finit par conclure que le chercher leur suffisait peut-être.
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Pas de doute, ses parents étaient des locataires dans l'âme. Les demeures d'enseignants titulaires étaient luxueuses, et leurs loyers bas, du moins jusqu'à ce que la rumeur se répande que les Griffin n'avaient aucun respect pour ce qui ne leur appartenait pas. Un professeur qui rentrait d'un congé sabbatique en Europe avait découvert que son service en porcelaine pour dix couverts n'en comptait plus que sept, un autre que son fauteuil Queen Anne préféré avait été remisé dans le sous-sol humide avec un pied en moins. "Quand on est partis pour Paris, il y avait un mixeur sur le plan de travail de la cuisine." Et la mère de Griffin de répondre : "Ah, le tas de ferraille", comme si son propriétaire devait la remercier d'avoir fait un sort à cette machine diabolique. Mais le pire avait été cette magnifique maison victorienne qu'on leur avait prêtée. La seule exigence de la vieille dame à qui elle appartenait était qu'ils veillent à ce que les canalisations n'éclatent pas pendant l'hiver. Si la température tombait au-dessous de zéro, leur avait-elle expliqué, il leur faudrait ouvrir le robinet de la cuisine avant d'aller se coucher. Ce scénario semblait l'obséder car, ayant appris que l'hiver était rude, elle avait appelé deux fois d'Italie pour s'assurer que tout allait bien. "Cette vieille peau ne se rend même pas compte qu'elle projette sa frigidité!" avait dit la mère de Griffin en raccrochant. "Les canalisations, mon cul, avait ajouté son père. Elle voulait surtout nous en mettre plein la vue avec sa Toscane alors qu'on est coincés dans ce putain d'Indiana." Cette nuit-là, des vents de l'Arctique balayèrent la région. Les canalisations avaient éclaté, et le lendemain matin, tout le rez-de-chaussée était inondé.
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_ "Qu'est-ce que c'est que tout ce boucan ? voulut savoir sa mère.
_ De la musique. Je suis au mariage, maman.
_ Quel mariage ? Tu m'as dit que tu allais disperser les cendres de ton père.
_ Je t'ai dit plusieurs choses. Tu n'en as retenu qu'une.
_ Quelque part dans le Nord, je crois. Sandwich, peut-être.
_ Ce n'est plus tout à fait le cap, rectifia Griffin. Tu détestais Sandwich. Tu ne veux pas qu'on le jette dans le canal, pendant que tu y es ?
_ Qui ça, on ? C'était une suggestion. fais comme tu l'entends.
(..)
_ Maman, il faut que je retourne au mariage.
_ Tu ne m'as pas dit ce que tu en pensais.
_ De quoi ?
_ North Shore. Même si je dois reconnaître que ton idée du canal commence à me plaire.
_ En quoi ça t'intéresse ? Tu veux bien me le dire ?
_ Parce que si tu le disperse dans le Nord, tu pourras me mettre dans le Sud.
_ Maman, on a eu beaucoup de conversations absurdes, mais celle-ci bat tous les records.
_ Je serais plus à l'aise de savoir que nous avons le cap entre nous, ton père et moi, chacun son côté."
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Toutes les deux semaines, Laura recevait un e-mail et elle attendait quelques jours avant de répondre pour ne pas qu'il se méprenne sur ses intentions, même si elle aimait avoir des nouvelles de sa famille, de ses cours, de ses petits boulots. Elle apprit aussi à lire entre les lignes, et à interpréter la modestie de Sunny (il n'était pas "bon" en cours, mais excellent), son optimisme (l'état de son père n'allait pas "vers une amélioration", mais se dégradait), son stoïcisme ("il s'entendait bien avec plusieurs de ses professeurs", ce qui voulait dire qu'il n'avait pas d'amis). Il y avait beaucoup de jeunes filles belles et intelligentes dans ses cours, admettait-il, mais la plupart étaient prises et de plus, sa mère tenait à tout prix à ce qu'il épouse une Coréenne qu'il ferait venir aux Etats-Unis. Cette perspective ne l'enthousiasmait pas, certes, mais tant qu'il ne rencontrerait pas quelqu'un qui l'aimerait en retour, il ne voyait pas l'intérêt de faire de la peine à sa mère en rejetant l'idée d'un mariage arrangé.
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