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Michel Bibard (Traducteur)Jean-Marie Saint-Lu (Préfacier, etc.)
EAN : 9782020239288
160 pages
Seuil (15/03/1995)
3.82/5   377 notes
Résumé :
Juan Pablo Castel est artiste peintre et meurtrier. C'est son histoire qu'il va dépeindre depuis sa cellule. Un autoportrait tout en taches sombres, bardé par endroit de couleurs violentes, d'éclairs de lucidité, que ni sa conscience ni les faits ne peuvent contenir. Un autoportrait au fusain, noir et gris, avec du rouge. Ce rouge qui prendra bientôt plusieurs significations, au fil de son témoignage et de sa volonté de se comprendre : le rouge de la passion et le r... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (45) Voir plus Ajouter une critique
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« Toute notre vie ne serait-elle qu'une suite de cris anonymes dans un désert d'astres indifférents? »
Avec cet intense roman de la solitude, de l'incommunicabilité, Ernesto Sabato projette son lecteur dans le tunnel des pensées flippantes de son narrateur, Juan Pablo Castel, et ce n'est pas de tout repos! On s'enfonce dans ce récit d'une relation amoureuse orageuse, au rythme des oscillations amour/haine (la demi-mesure, chez Castel, ça n'existe pas), dans les affres d'une jalousie infernale, dévorante, destructrice.
Le narrateur est en prison, mais ça ce n'est rien à côté de l'enfermement morbide dans l'incessante activité de raisonnement, d'interprétation, d'échafaudage d'hypothèses, opérée par son esprit, se saisissant du moindre silence ou d'un « vestige de sourire » pour nourrir ses soupçons, s'emmurant dans une logique délirante qui l'éloigne de la seule personne qui, selon lui, pouvait le comprendre:
« j'arrivai enfin à formuler mon idée sous cette forme terrible mais indiscutable : Maria et la prostituée ont une expression semblable ; la prostituée simulait le plaisir ; Maria simulait donc le plaisir ; Maria est une prostituée. » CQFD!
Le lecteur se retrouve dans une position particulière, pas forcément très confortable. On est invité à pénétrer dans les dédales de cette pensée folle du narrateur, séduisante par son énergie, touché par ce sentiment que Juan a de vivre sa vie dans un tunnel obscur et solitaire loin de « la vie agitée que mènent ces gens qui vivent au-dehors, cette vie curieuse et absurde où il y a des bals, et des fêtes, et de l'allégresse, et de la frivolité. ». Mais on est bien obligé de se dégager de cette proximité, de s'en distancier quand les signes de dérapages, de paranoïa deviennent trop évidents.
C'est fort, mais on est plutôt soulagé que Sabato ait opté pour la brièveté!
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Juan-Pablo Castel est un peintre estimé et misanthrope : il n'aime rien ni personne, jusqu'aux critiques dont les louanges le hérissent... Incompris, il est prisonnier de sa solitude jusqu'au jour où il tombe amoureux fou de Maria qu'il finira pourtant par tuer, ainsi qu'il l'annonce dès les premières pages de son récit écrit en prison.
C'est le récit d'une passion dévorante et exclusive, une passion éprouvée par la jalousie, la vanité, la misanthropie et l'égocentrisme du peintre : Juan-Pablo ne profite jamais de son bonheur mais passe son temps à décortiquer les instants de bonheur qui lui sont accordés afin d'y trouver la preuve de la perfidie, de l'hypocrisie ou de l'infidélité de Maria. Il se sent incompris, persuadé que le reste de l'humanité ne lui arrive pas à la cheville. C'est un homme profondément seul, incapable de voir le bon, le beau sans y soupçonner quelque chose de mesquin ou de sale... et sa solitude le conduira jusqu'à la jalousie dévorante et la folie meurtrière.
Le récit implacable et minutieux d'une névrose pathologique et meurtrière.
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Il suffira de dire que le tunnel est un court roman sur l'immense solitude de l'homme moderne, et de considérer qu'ainsi la critique en est faite. En réalité, si tout ceci peut être dit, il faudrait rendre justice à ce livre en le décrivant un peu plus. Salué par les auteurs européens comme un écho sud-américain de l'existentialisme qui interrogeait les philosophes à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le roman analyse précisément cette solitude à l'aune de la relation amoureuse.

Juan Pablo Castel, célèbre peintre, a été condamné pour le meurtre de Maria Iribarne. Il se propose d'écrire ses confessions qu'il espère publier, afin que quelqu'un, dit-il, le comprenne. Car Juan Pablo Castel a tué la seule personne qui l'ait jamais compris. Ainsi commencé, le roman propose un chemin littéraire hasardeux au lecteur. Ce dernier pense lire un roman policier dans lequel il s'agira de découvrir l'auteur du crime ; en vérité, il bascule dans un roman noir aux profondes motivations philosophiques.

Juan Pablo Castel a vu Maria devant l'un de ses tableaux durant un vernissage. A la différence des critiques qu'il exècre, Maria a remarqué un détail a priori insignifiant mais cela démontre, aux yeux de Juan Pablo, que Maria est comme lui. Juan Pablo n'aime pas la compagnie des hommes ; il les méprise, les trouve vils et pense que le monde est une horrible chose. Alors Maria devient rapidement une obsession pour Juan Pablo ; durant des mois, il cherche à la revoir.

Il y parvient et noue avec elle une relation amoureuse. Mais à peine établie, cette relation est ternie par les sombres pensées de Juan Pablo. Sans cesse à se torturer l'esprit, il tente d'obtenir de Maria des réponses claires sur ce qu'elle est, sur ce qu'elle éprouve pour lui. Tout au long du roman, l'ambiguïté est maintenue sur les sentiments de Maria et sur la vie qu'elle mène. En effet, Juan Pablo découvre qu'elle est mariée à Allende, un aveugle, et qu'elle se rend souvent dans l'estancia du cousin de son mari, Hunter, avec lequel Juan Pablo pense que Maria entretient une relation.

Le tunnel est la métaphore de la solitude. Juan Pablo évolue comme dans un tunnel, coupé du monde, isolé à jamais sauf à de rares instants où, par une fenêtre, il peut être vu. Juan Pablo croit que les tunnels peuvent parfois se croiser, ou peut-être ne le peuvent-ils pas. C'est là le paradoxe de nos sociétés – et la théorie de Sabato vaut encore plus à l'heure actuelle – qui idolâtrent la communication, cependant que les hommes et les femmes demeurent désespérément seuls. La jalousie, et notamment la jalousie amoureuse, n'est que la peur panique qui prend les êtres lorsqu'ils sont confrontés à la plus terrible solitude, celle qui succède aux plus tendres passions.
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Le récit d'une névrose meurtrière annoncée !

N'avez-vous jamais eu l'impression (que ce soit fondé ou non) d'être né(e) au mauvais endroit ? Voire pire, au mauvais moment, concernant les possibilités de rencontres amoureuses dans votre vie ??
On arrive toujours trop tôt, ou trop tard. Parfois on arrive en même temps, mais la synchronisation est de courte durée..

Dans ce livre, Sabato se met dans la peau de Juan Pablo Castel, un artiste peintre qui enfermé dans sa cellule, balance comment il en est arrivé à tuer la seule femme qu'il a aimé. Maria !
Aperçue lors d'un vernissage, Maria ne quitte plus ses pensées, c'est LA femme, sa moitié, son complément. Son âme soeur !
Juan erre à sa recherche dans les rues de Buenos Aires avec la conviction de la retrouver !
Il la retrouve, Maria est mariée !

Le tunnel fait référence à l'isolement affectif & physique de Castel par rapport à la société & envers lui même. Un roman noir & désespérant qui transmet tout le mal-être des personnes suspicieuses, obsessionnelle & habitées par la jalousie !
Bien que le livre date de 1948, j'ai été saisi par la modernité & le côté intemporel de l'histoire ! Un sujet toujours d'actualité: "La confiance dans l'amour de l'autre" où comment sombrer dans le doute qui conduit à la folie & par la suite à commette l'irréparable !
Dans le tunnel, ce ne sont pas des contraintes externes qui empêchent cet amour de s'épanouir, mais ce désir absolu de posséder complètement l'autre !

J'ai aimé ce livre, comme on aime un air de piano qui s'échappe d'une fenêtre ouverte un soir d'été !
Un livre qui m'a maintenu en éveil jusqu'aux heures les plus obscures de ma nuit !
Mais où partent les mots d'amour après l'amour ?
Et puis cette absurdité qu'a le coeur de s'accrocher à l'infiniment improbable ! Au final, connaît-on peut être l'amour que lorsqu'on l'a épuisé, quand il n'en est plus, à peine on l'a saisi, voilà qu'il s'évapore.
Un peu comme la vie !

Un roman très salué par Camus qui fait écho sud-américain à son existentialisme européen !
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Un court mais grand roman ! dès la quatrième de couverture, on sait que le narrateur Juan Pablo Castel, artiste peintre a assassiné sa maîtresse Maria Iribarne, mariée à Allende, un aveugle.
Juan Pablo est fou amoureux de Maria mais d'un amour exclusif. Au fil des pages, on assiste à sa passion dévorante, à sa jalousie morbide qui l'enferme dans une solitude intérieure insurmontable (référence au tunnel).
Le thème de ce récit est intéressant car il décrit avec beaucoup d'intensité la montée en puissance de cette jalousie destructrice, la possession maladive, le manque de confiance en soi et en l'autre.
L'artiste se triture l'esprit avec des suppositions tirées de son imagination, il psychote, il ressasse, il exige des preuves d'amour mais ne communique pas vraiment avec Maria.
j'ai aimé ce livre bien que l'atmosphère soit souvent étouffante et oppressante
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critiques presse (1)
Actualitte
29 mai 2019
Le Tunnel est un roman dont l’énergie et la violence psychologique garde notre attention en constant éveil […] une œuvre qui mérite d’être remise à sa juste place : celle des grands, et de ceux qu’on n’oublie pas.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (72) Voir plus Ajouter une citation
Pendant qu’une part de moi-même m’inspire une belle attitude, l’autre en dénonce le mensonge, l’hypocrisie, la fausse générosité; pendant que l’une m’incite à insulter un être humain, l’autre le prend en pitié et m’accuse moi même de ce que je dénonce chez les autres; pendant que l’une me fait voir la beauté du monde, l’autre me signale sa laideur et le ridicule de tout sentiment de bonheur.
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" ... il n'y avait qu'un seul tunnel, obscur et solitaire : le mien, le tunnel où j'avais passé mon enfance, ma jeunesse, toute ma vie. Et dans un de ces passages transparents du mur de pierre j'avais vu cette jeune femme et j'avais cru naïvement qu'elle avançait dans un autre tunnel parallèle au mien, alors qu'en réalité elle appartenait au vaste monde, au monde sans limites de ceux qui ne vivent pas dans des tunnels. Et peut-être s'était-elle approchée par curiosité d'une de mes étranges fenêtres et avait-elle entrevu le spectacle de mon irrémédiable solitude, ou peut-être avait-elle été intriguée par le langage muet, l'énigme de mon tableau. Et alors, tandis que je continuais à avancer dans mon étroit couloir, elle vivait au-dehors sa vie normale, la vie agitée que mènent ces gens qui vivent au-dehors, cette vie curieuse et absurde où il y a des bals, et des fêtes, et de l'allégresse, et de la frivolité. Et parfois il arrivait que, lorsque je passais devant une de mes fenêtres, elle fût là à m'attendre, muette et anxieuse ( pourquoi m'attendait-elle ? et pourquoi muette et anxieuse ? ); mais parfois il lui arrivait de ne pas arriver à temps ou d'oublier ce pauvre être emprisonné et alors, le visage écrasé contre le mur de verre, je la voyais au loin, insouciante, sourire ou danser, ou encore, ce qui était pire, je ne la voyais nulle part et l'imaginais en des endroits interdits ou infâmes. "
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Je me suis mis à regarder par la fenêtre tandis que le train filait vers Buenos Aires. Nous passames près d'une petite masure; une femme, sous le auvent, regarda le train. Il me vint une pensée stupide: "Je vois cette femme pour la première et la dernière fois. Je ne la reverrai plus de ma vie" Ma pensée flottait comme un bouchon sur un fleuve inconnu. Elle continua de flotter un moment près de cette femme sous son auvent. Que m'importait cette femme? Mais je ne pouvais m'empêcher de penser qu'elle avait existé un instant pour moi et qu'elle n'existerait jamais plus; de mon point de vue, c'était comme si elle était déjà morte: un léger retard du train, un appel qui l'aurait fait rentrer chez elle, et cette femme n'aurait jamais existé dans ma vie.
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Il m'est arrivé parfois de me retourner brusquement avec la sensation qu'on était en train de m'épier, de ne voir personne et de sentir pourtant que la solitude qui m'entourait était un fait tout récent, que quelque chose de fugace avait disparu, comme si un léger frisson continuait à vibrer dans l'atmosphère.
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Je regardai anxieusement son visage dur, son regard dur. "Pourquoi cette dureté ? me demandais-je, pourquoi ?" Elle sentit peut-être mon anxiété, mon besoin de communion : l'espace d'un instant, son regard s'adoucit et parut jeter un pont entre nous ; mais je sentis que c'était un pont provisoire et fragile suspendu au-dessus d'un abîme.
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Video de Ernesto Sabato (4) Voir plusAjouter une vidéo

Ernesto Sabato : Avant la fin
Depuis le Centre culturel de "La Recoleta" à Buenos Aires, Olivier BARROT présente le livre d'Ernesto SABATO "Avant la fin".
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature espagnole et portugaise>Romans, contes, nouvelles (822)
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