Dans le Top 3 des choses que je hais viscéralement, il y a :
- Les enfants qui vagissent comme des veaux qui agonisent
- Ces enculés qui abandonnent leurs beaux matous, leurs gros toutous, en passant par Montélimar (hop, petite réf' pas piquée des hannetons)
- Les gens qui se plaignent alors qu'il n'y a pas lieu d'être.
Tu te doutes bien que je vais parler de la troisième catégorie.
Car c'est clairement de ça dont il s'agit.
Tu veux un rappel de l'histoire ?
Dans ma grande générosité, je m'en charge. Voici de quoi rafraîchir ta mémoire qui flanche.
Cécile a 17 ans, elle vient de rater son bac. Mais son père est super sympa, donc ils partent en vacances dans le sud, vers Cannes, je crois.
(J'aurais raté mon bac, je ne suis même pas sûre que mon père m'aurait autorisée à manger à table avec lui. Mais bon, je pose ça ici, tu en fais ce que tu veux.)
Son père, il a la quarantaine, il est pas mal physiquement. le truc, c'est qu'il s'appelle Raymond. Et Raymond, ça me fait penser à mon voisin qui a une grosse moustache qui lui sert de garde-manger, et que tu dois embrasser parce que c'est un ami proche, et que du coup tu es dégoûté parce que tu sens les morceaux de cabillaud coller sur ta joue.
Mais bon, c'est pas tellement grave, j'imaginais Raymond comme Clark Gable, donc il a quand même du style, même s'il a un prénom de vieux grand-père qui sucre les fraises.
Donc, Raymond Gable, il part en vacances avec Cécile, et aussi sa maîtresse, Elsa. Elsa, elle est jolie et en plus elle s'entend super bien avec Cécile.
Cécile, quant à elle, elle vit sa meilleure vie, alternant plage, mondanité, et amourette.
Bah ouais, dix-sept ans, c'est l'âge des amours, et donc son petit coeur frétille pour un garçon de vingt-six ans. le garçon, hélas, ne s'appelle pas Lazare (Lazare et Cécile, tu m'as compris tu m'as) mais Cyril. Tant pis pour lui, au pire il peut se confier à Raymond Gable qui connaît aussi les chagrins d'un prénom mal choisi.
le truc, c'est que Raymond Gable décide d'inviter la copine de feu sa femme, Anne, qui est aussi super jolie. Et là, paf, il se rend compte qu'il l'aime autant qu'Ugolin en pince pour Manon des Sources, et que cet amour est réciproque. Donc ça part en demande en mariage.
Cécile, elle trouve ça cool, tant que ça change pas sa complicité avec son daron et qu'elle peut continuer à flirter avec Cyril-Lazare.
Tu te doutes bien que ce n'est pas le cas.
Anne, elle va faire en sorte que Cécile puisse repasser son bac, et l'obtenir.
Et donc Cécile, sous prétexte qu'Anne veut lui faire faire des cahiers de vacances, elle décide de se rebeller en fomentant un complot délirant mettant en scène Cyril-Lazare et Elsa, la maîtresse bafouée.
le truc, c'est que ça finit en suicide.
Pas cool.
- Mais en quoi Cécile se plaint-elle ?
J'aime beaucoup quand tu me poses ces questions bien tournées.
Exemple tout con : l'Amour.
Cécile dit être éprise de Cyril-Lazare. Genre vraiment. Elle a envie de ses bras, de ses caresses, de ses petits bisous et tout le bordel rose-guimauve que j'abhorre presque autant que les gosses.
Cécile explique bien qu'elle est amoureuse. Et puis en fait non. Ah mais en fait si. Nan, en fait c'est sûr que non.
Insupportable. J'ai envie de la gifler.
Pauvre petite fille riche, contrainte de faire ses cahiers de vacances dans sa chambre pendant qu'Anne fume ses clopes.
Regarde les autres, bordel à queues.
Regarde Monsieur Kerdoncuff qui marche, courbé par le chagrin parce qu'il vient de perdre sa tendre épouse.
Regarde le fils Monroy qui se meurt d'une leucémie à l'âge de trois ans.
Regarde mon chat Maurice qui vient de perdre une patte et qui tente désespérément de sauter sur mes genoux.
Monsieur Kerdoncuff ne pleure pas. Il se contente d'avancer, portant toute sa peine sur ses épaules chétives en attendant de rejoindre sa chère.
Le fils Monroy qui meurt sur son lit d'hôpital affronte avec courage son cancer. Pourtant il sait qu'il va mourir. Mais il ne dit rien.
Maurice, lui, traîne sa patte atrophiée comme un boulet, en me regardant avec désespoir.
Ce soir, quand il se couchera, Monsieur Kerdoncuff sait qu'il ne verra pas le lendemain matin, et qu'il va retrouver sa femme. Pour la première fois depuis six mois, il se couche le coeur léger.
le fils Monroy va mourir aussi. La fin d'une souffrance qui martyrisait son petit corps, et le début d'une autre pour ses parents, qui, eux, restent. Mais le fils Monroy s'en flagelle les amygdales, puisqu'il jouera aux Playmobil avec le Petit Grégory.
Quant à Maurice, une fois qu'il a compris que sa patte ne repousserait pas, il a cessé de miauler comme âme damnée. Après tout, n'en reste-t-il pas une autre pour emmerder Philippe?
Alors, la vie est-elle si mauvaise ?
Bah non, Cécile. Cesse de te plaindre. Certes, le monde s'embrase, les gens sont malheureux, mon père a voté pour Bardella et
Yann Arthus-Bertrand a fait sponsoriser son film par Total, mais ça pourrait être pire.
Allez, Cécile, tu écris tes chagrins de petite adolescente. Je comprends.
D'ailleurs tu écris bien. C'est toujours ça de pris, non ?