Je « souris quand
Pagnol » écrit dans «
Le temps des secrets » :
« il y avait là-haut les rats qui dévoraient peut-être les innombrables captures de nos pièges. »
Tel est pris qui croyait prendre, ces rongeurs laissent songeur.
Sam Savage nous raconte l'histoire d'un rat, animal méprisé peu ragoûtant, mais ici bien sous tous rapports. Bien que circulant au ras du sol, il prend de la hauteur pour se rassurer sur son existence faite de révolte et de tristesse, mais sans pour autant se montrer rabat-joie.
Ce petit rat n'habite pas à l'opéra, il se veut « libre et rit » quand il dévore avec rapidité les volumes des étagères, car c'est un rat de bibliothèque.
Firmin, c'est son nom, fur-man prononcé à l'anglaise, l'homme à peau de bête. En effet, il est bien plus humain qu'animal, bien que rongé et ravagé par son dégoût de la bêtise humaine.
Mais pas rat d'égout, plutôt rat de laboratoire, toujours à la recherche de ragots colportés par les lecteurs rabougris et radoteurs adeptes de racontars en rafales.
Rat d'hauteur, oui, quand, sur le balcon il surplombe sans rappel mais avec ravissement le crâne de Norman, le propriétaire du bureau des livres rares.
Rat d'auteurs aussi, quand il raffole des pages de grands écrivains, tels Racine et
Rabelais. Car il est raffiné et apprécie aussi la musique, Cole Porter, Gershwin et les rapides rhapsodies de Rachmaninov.
Et quand la librairie se ramasse et quitte le rafiot, les ramettes sont proposées gratis. C'est alors que les racailles radines qui n'étaient qu'un ramassis de vauriens font avec un rare raffut une razzia sur les ouvrages, des rapines de rapaces.
Avec un humour ravageur,
Firmin ravale sa colère jusqu'au raz-de-marée qui suit. Après les ravages de l'incendie, les dégradations de la destruction entraînent des gravas sous lesquels des hordes de rats se rassemblent pour se rassurer.
Puis c'est l'exode pour éviter le racisme et les ratonnades. Scélérats !
Impossible de se ravitailler, ils ne se sont pas taillés ravis, mais aimeraient juste se rassasier.
« Quand on ne veut pas revivre sa vie, c'est qu'on l'a ratée ».
Sans faire de raccourci radical, disons que
Firmin est un raton laveur de conscience.
« Sec et froid était le monde, merveilleux les mots ».