Dans le prologue de
Sentinelle du climat,
Heïdi Sevestre fait un bref mais nécessaire rappel de la naissance de l'univers, de la vie, de l'humanité et du temps très court d'une vie humaine. Temps très court mais avec beaucoup de conséquences sur la Nature. Une humanité qui a toujours connu les glaciers qui "ont permis au climat de se stabiliser et à notre civilisation de se développer".
Devenue glaciologue, l'autrice, partant du constat que nous faisons tous (enfin tous peut être pas) du changement climatique, nous explique comment la diminution des glaciers influe sur toute la vie terrestre et la nôtre en particulier, non pour culpabiliser mais afin que la prise de conscience sauve les glaciers et nous-mêmes qui en dépendons si étroitement.
"Se réveiller, se mettre debout est une acceptation, c'est-à-dire l'intégration de la réalité dans la conscience. L'acceptation délivre du chagrin et libère l'énergie pour sauver ce qui peut l'être".
Passionnée par la nature, les animaux sauvages, qui entourent et peuplent sa région natale de Semnoz dans les Alpes, l'autrice qui doit son prénom à la petite Suissesse Heïdi dont elle découvre les aventures qui lui ont donné le goût de la lecture, dévore ensuite les livres de
Roger Frison-Roche puis des explorateurs polaires : Scott, Amundsen...
L'exemple de ces alpinistes et hommes de sciences, puis les encouragements de sa mère, elle-même alpiniste et amoureuse des glaciers (comme la grand-mère d'Heïdi et son arrière grand-mère, prise en photo sur la Mer de Glace encore imposante) vont montrer à l'autrice la voie quelle suivra : devenir glaciologue.
Dans son livre, passionnant,
Heïdi Sevestre présente ses études universitaires, ses voyages d'études dans des conditions souvent difficiles, au Svalbard en Norvège, au Népal, au Groenland, en Antarctique, en Colombie et surtout elle nous explique comment la disparition des glaciers amène au changement climatique que nous connaissons mais sans savoir (en ce qui me concerne en tout cas) tous les enchaînements qui y conduisent.
Elle participe à une série de documentaires scientifiques pour la télévision qui la contacte afin de montrer les solutions trouvées par les experts de chaque pays touché par des situations extrêmes : tremblements de terre, pluies abondantes, grande sécheresse, déserts, volcans... Elle part au Japon, en Islande, au Costa Rica, au Chili, aux Emirats arabes unis. de la recherche scientifique et de l'étude des glaciers, elle passe à la communication. Mais un manque de reconnaissance la pousse à arrêter l'émission.
Elle poursuit le but de sauver les glaciers qui peuvent encore l'être et ralentir la disparition des autres. Pour cela, elle alerte sur les conséquences et pousse à l'adaptation. C'est le but de ce livre.
Consciente du paradoxe que constitue d'une part l'étude scientifique des glaciers et l'impact de leur diminution/disparition sur le climat, l'économie et toute notre vie et d'autre part de l'empreinte carbone que la recherche entraîne en amenant les scientifiques sur place par avion, hélicoptère, etc.
Heïdi Sevestre et quelques collègues femmes décident d'une expédition que je vous laisse découvrir et de "pratiquer une autre science, plus propre".
Je ne vous fais qu'une présentation succincte de tout ce que referme ce livre, très instructif et bien que scientifique, à la portée de tous. Les enjeux politiques et économiques sont aussi abordés.
Le vocabulaire se fait poétique quand il s'agit de décrire les merveilles de la Nature.
Ce livre alerte, tant qu'il en est encore temps sur la nécessité de changer nos comportements en matière d'émissions de CO2 et de gaz à effet de serre.
"Sauver la glace et nous sauver, cela ne dépend que de moi, que de vous en 2023, 2024, 2025, 2026...
Les vieilles recettes ont abîmé la Terre, les relations sociales et humaines ont séparé les hommes de la Nature d'une façon qui les a séparés d'eux-mêmes. Elles ont abîmé les rêves de bonheur en les confondant avec les standards de consommation.
Elles ne sont plus acceptables. Elles ne fonctionnent plus. Elles sont périlleuses. Elles sont arrivées au bout d'elles-mêmes.
Exprimer doutes et inquiétude dans un groupe, se former, réfléchir collectivement, enfin mettre en place des actions ponctuelles, inventer des solutions là où l'on est, c'est cesser d'attendre dans l'angoisse et créer une nouvelle voie. C'est aussi se réparer soi-même."
A la fin du livre, une "petite histoire géologique et climatique de la Terre", très bien faite, montre si besoin était, à quel point l'homme a tout bouleversé en si peu de temps .
Au milieu du livre, des photos de la famille de l'autrice et des paysages et des personnes rencontrés pendant ses voyages renforcent le côté humain de cet ouvrage.
Quelques répétitions assumées jalonnent le livre. Assumées afin d'insister sur le message "Sauver les glaciers c 'est nous sauver nous-mêmes", alerter tant qu'il en est temps afin de passer à l'action avant de tout perdre.
Je remercie Babelio et les Editions Harper Collins pour l'envoi de ce livre lors de la Masse critique Non fiction de juin. Un livre à mettre entre toutes les mains, à diffuser autour de nous. Un livre qui n'est pas un simple constat mais qui explique.
"Aujourd'hui, au seuil d'une transition monumentale, nous n'avons que le temps du courage qui est celui de regarder les choses en face, et le temps de notre action immédiate sur notre vie. Liés les uns aux autres, dans l'espace et le temps, liés à tous les phénomènes de la nature, nous sommes chacun une semence d'espoir. Plantons la et aidons la à germer et à croître."