AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070142286
112 pages
Gallimard (30/11/-1)
3.75/5   194 notes
Résumé :
Dans ce récit autobiographique bref et lumineux, Patti Smith, qui a été distinguée par le National Book Award, revient sur les moments les plus précieux de son enfance, les convoquant avec un réalisme saisissant qui confine au fantastique. L’auteur mêle l’évocation de la petite fille qu’elle était à des souvenirs à la fois authentiques et imaginaires de sa jeunesse new yorkaise, passée parmi les cafés de la rue MacDougal. Glaneurs de rêves, dont l’écriture a été ach... >Voir plus
Que lire après Glaneurs de rêvesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (46) Voir plus Ajouter une critique
3,75

sur 194 notes
5
21 avis
4
7 avis
3
11 avis
2
2 avis
1
0 avis
Pas évident de se concentrer cette semaine sur quelque lecture que ce soit ! L'actualité aussi prégnante que poignante étouffe dans l'oeuf toute tentative d'évasion romanesque.
L'écoute d'une playlist à forte dominante rock, habituellement le meilleur rempart à un début de vague à l'âme, s'impose.

D'abord Amy Winehouse puis les deux Eric, Burdon et Clapton, avant que n'arrive Patti Smith avec les titres d'anthologie : “Free Money”, “Space Monkey”, “Because the night”, “Cartwheels”...
Cet intermède musical pour le moins énergisant appelle à la découverte de “Glaneurs de rêves”, cadeau d'un Père Noël particulièrement bien inspiré.

Après la savoureuse autobiographie “Just Kids” parue en 2010, Patti Smith régale une fois de plus ses admirateurs en rééditant des écrits de 1991 qu'elle agrémente de belles photos en noir et blanc.
A l'époque quarantenaire, Patti était d'humeur mélancolique. La disparition de Robert Mapplethorpe deux ans auparavant avait réactivé tant de souvenirs...

Comme il est doux et réconfortant de se remémorer sa prime jeunesse, l'insouciance des années 50 au coeur du New Jersey !
A dix ans Patricia est une petite fille attachante qui n'aime rien tant que gambader à perdre haleine aux alentours de la maison familiale. Alors d'épuisement elle se laisse tomber sur un lit de verdure et contemple à loisir le ciel dont les nuages changeants invitent à la poésie.
La nuit, avant que le sommeil ne vienne, elle rabat le tissu de la fenêtre et scrute le monde des ténèbres. Invariablement son esprit vagabonde et virevolte au-dessus des champs endormis où s'apprêtent à sortir les petits lutins : les “Glaneurs de rêves”.

Patti Smith n'a pas connu ses deux grands-mères décédées assez jeunes, l'une jouait de la harpe et l'autre de la mandoline. Dans les veines de ses aïeules coulaient déjà la poésie et la musique.

Ce petit livre gorgé de fraîcheur et d'onirisme est par les temps qui courent une véritable aubaine. A des années-lumière de la folie destructrice des hommes, il permet de constater avec soulagement qu'existent encore en ce bas monde des îlots de beauté.
Commenter  J’apprécie          723
Patti Smith a beaucoup compté pour moi durant mon adolescence, elle peuplait mon univers musical, elle devint pour moi une sorte d'égérie, simple, attachante, fidèle et vagabonde à partir du moment où j'ai posé sur une platine ce vinyle flamboyant que fut pour moi l'album "Horses". J'aimais son rock chaleureux et endiablé, sans en comprendre encore toutes les subtilités.
C'est donc en territoire conquis que je suis venu vers ce texte, ce n'était d'ailleurs pas la première fois que je découvrais Patti Smith autrement que par sa musique.
Par la grâce échevelée des mots, Patti Smith nous invite ici dans le New Jersey de son enfance. J'ai eu l'impression d'entrouvrir la vieille porte d'une maison abandonnée en pleine campagne, du lierre et des belles-de-jour grimpaient aux murs fissurés, tandis que les herbes trop hautes du jardin, agitées par un vent d'automne, me rappelaient les chemins de ma propre enfance.
Une mélancolie sourde m'a tout de suite envahi, comme celle qui a sans doute envahi l'autrice, écrivant vers l'âge de quarante-cinq ans ce récit de quelques tranches de sa vie.
Glaneurs de rêves pourrait ressembler à un conte de fées tant l'enchantement est présent, mais tout ce que contient ce récit est cependant vrai, ce qui n'empêche pas la féérie de s'inviter dans ces pages.
Elle nous raconte l'histoire d'une petite fille pleine d'imagination qui trouvait de la magie en toutes choses.
Dans ses yeux étonnés, l'infime devenait splendide ou monstrueux. Parfois elle disparaissait brusquement de l'autre côté du paysage, tout en demeurant là bien présente pour les autres, les siens.
L'écriture de Patti Smith m'a tout de suite empli d'une joie singulière, indicible.
M'entraînant dans un royaume sans roi, elle convoque des personnages bien réels, sa famille, des voisins et puis cet homme étrange et familier, qui vend des appâts pour la pêche en rivière, il est seul ou presque depuis que sa femme est décédée, ce presque est juste là pour rappeler qu'elle est enterrée dans son jardin et qu'il veille sur elle comme peut-être elle veille sur lui...
Les lieux de son enfance sont présents, bruissent et scintillent dans ces pages. On pourrait entendre le bruit du vent, la respiration des étoiles.
Des fleurs sauvages, une vieille grange noire peuplée de chauves-souris... Patti Smith a cette façon presque irréelle de faire glisser la lumière sur les mots.
Cette lecture oblige à la lenteur et cela m'allait bien aujourd'hui.
Sous le reflet d'une lune bienveillante, la lumière de ce livre m'est devenue fraternelle comme le fut la musique de son autrice, jadis.
Patti Smith porte une relation sensuelle avec les souvenirs de son passé, qu'elle porte en elle comme des talismans. J'ai senti à sa façon de prier, même de manière profane, que le sacré la reliait à ce passé si cher et si intime même lorsqu'elle le fait revenir aussi dans ses chansons, dans ses dessins, une manière incertaine de rechercher quelque chose de plus grand qu'elle en ouvrant une vieille porte couverte de lierre et de belles-de-jour...
Ce livre est un hymne à la vie.
Des photos parfois venues de son album de famille illustrent les textes.
Patti Smith maîtrise cette qualité d'écriture qui rend ces pages si lumineuses.
Mais qui sont ces Glaneurs de rêves ?
Allongée dans les herbes, contemplant le ciel où se tisse le mouvement des nuages, tandis que les blés sauvages d'un champ égrènent sans relâche les gestes de mains invisibles, Patti Smith convoque ce peuple féérique qui réinvente l'imaginaire de l'enfance.
D'où vient cette magie du paysage ? À qui appartiennent ces mains invisibles qui façonnent les versants opposés qui se parlent ? L'endroit et l'envers.
Alors le vieux monsieur qui vend des appâts pour la pêche en rivière lui souffle un jour l'idée : ce sont les glaneurs de rêves.
J'ai été touché par son émotion palpable, cette joie simple et inouïe, mais parfois le chagrin n'est jamais loin lorsqu'un chien traverse une route, tandis que ses yeux savent déjà qu'il va mourir... Au loin un camion roule vite, trop vite et la petite fille sait déjà que c'est trop tard... Elle n'a pas pleuré, moi si...
Se reconnectant aux souvenirs de son enfance, Patti Smith fait de ce texte autre chose qu'une simple autobiographie : c'est une constellation d'étoiles qui nous donne peut-être simplement envie de cultiver la bonté du coeur.
Soudain, au détour d'une page je découvre une photo qui m'est familière et je me dis tiens je connais cette tête-là, ces yeux à la fois innocents et effrontés, c'est celle très célèbre d'Arthur Rimbaud. Lui aussi fait presque partie de la famille tant il est intime avec l'autrice.
La poésie de Rimbaud, elle l'a découverte quand elle avait quinze ou seize ans, fascinée par sa langue, l'espace qu'il avait créé, volant d'ailleurs un jour dans une librairie le recueil de poèmes Illuminations tout comme Jean Genêt vint à Proust en volant lui aussi un de ses livres. Rimbaud était son arme secrète, lui donnant confiance en elle, c'est peut-être là que tout a commencé.
Il y a quelque chose de sacré dans la poésie, dans le vent, dans l'échancrure des nuages, dans les blés qui flottent comme des vagues dans le vent, dans les fous rires d'un enfant, dans les yeux d'un chien qui sait qu'il va mourir, quelque chose qui nous élève plus haut que nous, nous mettant en accord pour certains avec la nature et pour d'autres avec le divin, chacun trouvant son compte.
Rimbaud est toujours à ses côtés, dans sa musique, dans ses vers, dans ses dessins, dans ses photographies, dans ses pas...
Il y a quelques temps, Patti Smith a racheté la maison d'enfance d'Arthur Rimbaud pour en faire prochainement une résidence d'artiste...
« J'ai fouillé les nuages en quête d'augures, de réponses. Ils se mouvaient à toute vitesse, trame délicate, en forme de dôme. le visage de l'art, de profil. le visage du déni, béni. »
Lire ce livre m'a fait un bien fou.
Commenter  J’apprécie          5825
L'esprit virevoltant au-dessus des champs de son enfance, en compagnie des glaneurs de rêves, ou allongée dans la verdure en pleine contemplation du ciel, là où « il était possible d'entendre une graine se former, d'entendre l'âme se replier comme une nappe blanche »…Patti Smith invite le lecteur à une délicieuse et très personnelle rêverie poétique.
Ce livre achevé précisément le jour de ses quarante-cinq ans, en 1991, alors qu'elle souffre « d'une mélancolie terrible et inexprimable », comme elle prévient le lecteur en début d'ouvrage, lui a permis de sortir de son étrange torpeur.
En se reconnectant à son enfance, en rendant la lumière à sa vie imaginaire, elle a sans nul doute retrouvé des sensations bienfaisantes, une joie évidente et claire.

Mêlant la grâce et le merveilleux d'un conte au réalisme d'un récit autobiographique, ce petit bouquin, agrémenté de photos et d'illustrations personnelles, se savoure avec lenteur et jubilation.
Nul doute que l'artiste est inspirée et sait « arracher une pensée fugace, telle une touffe de laine, au peigne du vent. »
Jeune et déjà profondément artiste, elle était « attirée par la vie des rêveurs », et s'imaginait « surveillant un troupeau, récoltant la laine dans une sacoche de cuir, et contemplant les nuages. »

Alors oui, ce petit livre m'a vraiment « empli d'une joie vague et singulière » selon le voeu de l'écrivain. Chapeau l'artiste !
Commenter  J’apprécie          642
Patti Smith a su garder vivante au fond d'elle-même toute la magie de son enfance où des êtres bruissaient autour d'elle, qu'elle devinait l'accompagnant, jusqu'à aller questionner un vieux vendeur d'appât qui veille en bordure d'un champ où elle imagine qu'ils se réfugient. Il lui répondra « C'est les glaneurs de rêves… »
« Et, nous dit-elle, l'image des glaneurs de ce champ endormi me plongeait à mon tour dans le sommeil. Et je me promenais parmi eux, dans les chardons et les épines ; ma tâche n'avait rien d'exceptionnel : arracher une pensée fugace, telle une touffe de laine, au peigne du vent. »
Elle pioche dans sa mémoire, comme dans l'espèce de baluchon qui lui sert de sac où elle transporte des objets recueillis le long de sa route, pour retrouver et nous offrir une part de ce trésor qui représente le flux de sa vie et cela donne un petit livre magique, d'une grande poésie dédié à son père. Un livre réussi dont la lecture, comme elle le souhaite dans son adresse au lecteur, emplit « d'une joie vague et singulière »
Commenter  J’apprécie          480
Petit récit autobiographique, où, la petite fille d'autrefois, laisse entrevoir son imagination.

Illustré de quelques photos en noir et blanc.

Traduit de l'anglais par Héloïse Esquié.

(p.69)
Je rêvais d'être peintre, mais j'ai laissé l'image glisser dans une cuve de pigments et de crème pâtissière pendant que je sautais de temple en décharge en quête du mot. Une bergère solitaire qui ramassait des bouts de laine arrachés par la main du vent au ventre d'un agneau. Un nom. Une nonne. A rouge. O bleu. Des fils gazouillants pris dans les épines d'une branche glacée. Courant sur place, fantôme dans une étendue vague, j'ai ouvert les bras aux arbres souverains et me suis soumise à leur étreinte pure, profane".

Un envol dans un îlot de toute beauté sous des yeux étoilés.

Elle titube les mots
Alors,
s'envolent et luisent
telles des lucioles
dans l'herbe tendre
la lumière et la joie !

Dans la pénombre du jour qui tombe,
l'âme poétique de Patti Smith
m'a apportée une douce quiétude.
Commenter  J’apprécie          371

Citations et extraits (66) Voir plus Ajouter une citation
Le destin a voulu que je suive un chemin fort éloigné de celui de mes ancêtres, et pourtant leurs façons étaient aussi les miennes. Et dans mes voyages, lorsque je vois une colline constellée de moutons ou une équipe d’ouvriers agricoles qui se reposent à l’ombre des noisetiers, je suis prise d’un désir nostalgique de redevenir celle que je n’ai pas été.
Commenter  J’apprécie          540
Quadrille

L'esprit d'un enfant est pareil à un baiser sur le front - ouvert et désintéressé. Il virevolte comme virevolte la ballerine au sommet d'un gâteau d'anniversaire avec ses étages de glaçage toxique et sucré.

L'enfant, dérouté par l'ordinaire, entre sans effort dans l'étrange, jusqu'à ce que la nudité l'effraie, le confonde ; là il cherche une certaine protection, un certain ordre. Il entrevoit, il glane, assemblant un fol édredon de vérités - des vérités sauvages et nébuleuses, dont c'est à peine si elles frolent en fait la vérité.
Commenter  J’apprécie          211
J'avais un rubis. Imparfait, splendide comme du sang à facettes. Il venait d'Inde, où ils s'échouent sur le rivage. Des milliers de rubis --- les perles du chagrin. De petites gouttelettes devenues on ne sait comment des joyaux ramassés par les mendiants qui les échangent contre du riz. A chaque fois que je contemplais ses profondeurs j'étais submergée, car dans mon petit joyau il y avait plus de malheur et d'espoir qu'on ne saurait le concevoir. p 40 41
Commenter  J’apprécie          180
Les billes étaient la seule activité dans laquelle j’excellais. (..)
Je n’avais jamais l’impression que la capacité de vaincre venait de moi. Il me semblait toujours qu’elle se trouvait dans l’objet lui-même. Un éclat de magie animé par mon toucher. De cette façon, je trouvais de la magie en toutes choses…
Commenter  J’apprécie          270
Par certaines nuits spécialement claires, il m’arrivait de voir du mouvement dans les herbes. Au début, je pensais que c’était l’envol de la chouette effraie ou les grandes ailes pâles d’un papillon lune qui se déployaient et se repliaient tel un habit médiéval. Mais j’ai compris une nuit que c’étaient des êtres comme je n’en avais jamais vu, vêtus d’étranges costumes et de coiffes archaïques. Je pensais alors que je pouvais voir le blanc de leurs bonnets et, par instants, une main, en train d’attraper quelque chose, illuminée par la lune et les étoiles ou les phares d’une voiture.
Commenter  J’apprécie          110

Videos de Patti Smith (32) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Patti Smith
A l'occasion de la sortie de "Arthur Rimbaud : Une saison en enfer", aux éditions Gallimard, Augustin Trapenard a rencontré Patti Smith à Chuffilly-Roche, dans la maison où Arthur Rimbaud a écrit "Une saison en enfer". L'artiste américaine se confie à l'animateur sur son lien avec le poète, ce qu'il lui a appris, ce qu'il représente pour elle, encore aujourd'hui et depuis son adolescence. 

Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
autres livres classés : autobiographieVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (424) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1226 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..