Le coeur lourd

Est-ce Amy qui a le coeur lourd? et pourquoi?

Le titre anglais est "Blaming", faire des reproches, critiquer, blâmer. Serait-il alors question de culpabilité, de remords, d'amertume, de colère, d'une sourde dépression teintée de rancune? Une forme de mélancolie, un regret des choses passées....?

Ces émotions sont le sujet même du roman, décrites subtilement par une romancière qui les met en scène pour nous a travers des personnages ordinaires et des situations banales. Un couple en voyage, une dame qui reçoit ses enfants pour un repas de famille, une demande en mariage un peu pathétique, deux fillettes qui se demandent si les poissons morts vont au ciel.
Ce qui n'est pas banal, c'est le ton mi-grave, mi-ironique du récit. C'est le choix des situations, des détails qui tuent, des dialogues pleins d'ellipses qui laissent le lecteur libre de compléter avec le non-dit que l'on devine.
L'humour est toujours en filigrane. Et il ne masque pas la tristesse ou la cruauté.
Elizabeth Taylor n'a écrit que onze romans. Je la considère comme une vraie femme de lettres.

Elizabeth Taylor écrit un drôle de roman en ce sens qu'il est un peu policier, ce qui tranche dans son oeuvre.
Pourtant, une fois cette mise en scène acceptée, Taylor revient à ses démons, dénoncer les petitesses, les hypocrisies, les mesquineries. Elle le fait ici avec, je pense, encore plus de lucidité et de cruauté (mais dans un gant de velours ouaté et satiné).
La tragédie qui se prépare dès le début du roman se déroule, survient, alors, avec une surprise peu habituelle chez cette auteure.
Un roman qui débute avec de l'eau de rose et qui se termine en noir de noir. Très habile, très bien construit.

Ce livre n'a rien de super, de terrible, mais curieusement on va jusqu'au bout. Pourquoi ? Mystère.