Walter Tevis nous livre dans
l'oiseau moqueur un roman de science-fiction bien construit, écrit en 1980, il présente un caractère prémonitoire puisque les quatre décennies que nous venons de vivre portent en eux des germes ( consumérisme débridé, mondialisation excessive et non durable, espoir déraisonné dans les anciennes NTIC aux mains de superpuissants telles les GAFA qui abêtissent puis normalisent de-facto et sans débat nos sociétés) qui pourraient crédibiliser le scénario choisi par l'auteur pour décrire l'univers arrivé à son crépuscule d'ici quatre siècles. Univers déshumanisé, gouverné par un seul robot Bob Storfforth, multicentenaire, unique exemplaire de l'apogée technologique en la matière. L'ensemble du système se déglingue inexorablement.
l'espèce homo sapiens s'éteint puisqu'aucune naissance n'est plus possible en raison de l'ingestion imposée universellement de drogues aux effets secondaires contraceptifs.
Les robots eux mêmes n'y croient plus, ils dysfonctionnement pour la plupart y compris celui qui représente le summum, l'apogée de la technologie : Bob Stofforth, robot multicentenaire, qui gouverne seul le monde et qui n'aspire qu'à la mort qu'il ne peut pas se donner !
Les derniers humains drogués et éduqués dans des internats pour éviter toute souffrance, tout souci, sont incapables de sursaut d'humanité.
Quelques petites centaines d'années après notre ère, il ont donc suivis la trajectoire déjà bien entamée en notre temps présent ! Et oui c'est au fond une évolution tendancielle et fond plausible, ce que je soulignais supra, que décrit
Walter Tevis
La rédemption toutefois s'amorce avec Paul Bentley, qui redécouvre la lecture, puis l'écriture, puis l'amour, ce qui va ensemble et a été perdu de vue dans l'univers déshumanisé , parce que se voulant au départ éliminer tout souffrance, tout travail pénible, ce qui a entraîné la perte de la liberté et conduit à la ruine, que seule la nature digère tranquillement. Au crépuscule et juste avant l'extinction de son espèce Paul mène un combat à l'issue contingente et incertaine, dont toutes les étapes sont fort bien détaillées, le lecteur ne s'ennuie pas !
Je ne vous en livre pas plus, des résonances bibliques à la fin du roman viennent au secours d'un avenir possible.. Puissance du Verbe toujours … Est ce que les derniers insoumis peuvent vraiment ouvrir une nouvelle voie ? Pour une troisième Alliance ?
A vous de voir, pessimistes et encore plus optimistes s'abstenir ? J'arrête cette critique juste à temps, avant de glisser dans des métaphores douteuses sur notre franchouillarde campagne présidentielle actuelle !
Et puis, « seul
l'oiseau moqueur chante à l'orée du bois » pour reprendre un mantra de ce roman -américain - très réussi, j'ai insisté sur sans doute trop sur la trame, en fait c'est la grande richesse chatoyante des motifs qui en fonde l'intérêt.
Bonne lecture ou relecture de ce classique..