La chute finale. Essai sur la décomposition de la sphère soviétique

La chute finale est un chef d'oeuvre. Il s'agit probablement de mon livre d'histoire préféré. À un moment où je commençais à me lasser de l'histoire à cause de la façon dont elle était enseignée à l'université, cet ouvrage m'a redonné foi dans la matière que j'enseigne aujourd'hui. Comment expliquer un tel miracle ? Par le fond, et par la forme.

Sur le fond, vous le savez déjà, la version jeune, perspicace et inventive d'Emmanuel Todd (il a conservé deux des trois adjectifs que je viens de citer) nous offre un essai de prospective qui a touché dans le mil. C'est donc vrai, il a bel et bien écrit dès 1976 que l'URSS allait s'effondrer dans les 5 à 30 années qui viennent (il laissait à cette organisation politique 5 à 10% de chance de se réformer pour éviter l'éclatement). Avait-il accès à des archives particulière ? Non, il n'avait d'ailleurs jamais mis les pieds là-bas (juste un voyage étudiant en Hongrie communiste). Il s'est contenté d'analyser le système soviétique avec une méthode historique rigoureuse : à partir d'indices démographiques (par exemple la hausse du taux de mortalité infantile), de la balance commerciale, de quelques lois en apparence étranges (l'interdiction de se suicider...), de la science fiction russe et beaucoup d'autres éléments que je ne veux pas vous spoiler, Emmanuel Todd a réussi à poser son célèbre diagnostique.

Mais en plus d'être un essai incontestablement brillant sur le fond, La chute finale est aussi un vrai plaisir à lire. La plume limpide, agréable et judicieusement dosée en humour de son auteur était déjà présente en 1976.

Je n'ai plus qu'à vous souhaiter bon courage pour trouver cet ouvrage, car même les différentes rééditions sont en rupture de stock au moment où j'écris ces lignes.

Le premier livre de E Todd, écrit à 25 ans et difficilement trouvable aujourd'hui (merci Internet). Il y prévoit la fin du régime soviétique bien avant les autres (en 1976!)
Il a vieilli, mais le style de Todd s'y voit déjà. Certains arguments notamment démographiques, seront développés par la suite, d'autres plus littéraires (analyse des thèmes de la science fiction russe au fil de l'histoire et de la dégradation de cette société) seront abandonnés.
On y a gagné en rigueur sans doute, mais perdu en fraicheur.
Pour les inconditionnels ou les historiens, car ce livre est quand même daté.