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EAN : 9782350874333
206 pages
Editions Héloïse d'Ormesson (11/01/2018)
3.17/5   38 notes
Résumé :
Avec impertinence et humour, L’Enlèvement des Sabines démonte la mécanique des rapports de force et opère une libération, aux confins du meurtre et de la folie.
Pour son pot de départ, Sabine reçoit une sex doll. Stupéfaite, la jeune femme rentre chez elle accompagnée de sa poupée aux seins démesurés
et au visage figé de manga. Un renversement s’opère face à cette étrange colocataire convoitée et confortablement installée.
D’un naturel effacé, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Ce livre est complètement déjanté et loufoque au possible.
Impossible de vous en restituer mon ressenti tant je ressors déboussolée par cet étrange livre. Moi qui ai tant aimé les deux derniers romans d'Emilie, Lunch-box et le prince à la petite tasse, j'avais envie de découvrir ses anciens opus.
Me voilà donc à lire L'enlèvement des sabines.

Une poupée gonflable en guise d'au-revoir pour Sabine qui quitte son entreprise pour se lancer dans la poésie, c'est original comme cadeau. Ça devient surtout très gênant quand il faut voyager dans le train avec cette poupée sexy.

À côté de cette autre Sabine parfaite il y a un petit monde qui gravite. Tous cinglés. La mère de Sabine qui m'a bien fait rire tant elle est maboule à s'exciter sur la boîte vocale de sa fille à tout bout de champs. 2' pour laisser un message à sa fille alors qu'un condamné à mort a tout le temps qu'il veut pour son dernier message. Pauvre mère.

Puis il y a le mari de Sabine, Hans, metteur en scène. On ne sait pas trop ce qu'il fait là ni à quoi il sert mais bon les présentations sont faites.

Ce roman s'articule autour de multiples formes de narration: des dialogues scènettes pour Hans et Sabine, un monologue déjanté quand c'est la mère qui gueule, des lettres que Sabine écrit à sa poupée, et bien d'autres formes.

Bref, c'est un roman qui m'a semblé très brouillon sans fil conducteur avec un mic mac de style en tout genre. J'ai retrouvé certes avec plaisir l'humour singulier de cette auteure. Mais c'est à peu près tout. Ses derniers romans sont bien plus aboutis selon moi. Encore heureux.
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« L'enlèvement des Sabines » est un roman assez surprenant qui se lit facilement. Il est moderne dans sa construction et dans les sujets qu'il aborde mais ne me semble pas entièrement abouti.
Émilie de Turckheim raconte l'histoire de Sabine une jeune femme de 40 ans qui vit avec un célèbre metteur en scène. Elle a choisi de ne pas avoir d'enfant et bien que tout l'oppose à sa soeur Fanny, elle apprécie sa nièce prénommée Kassaline.
Car Sabine est une mal aimée.
Aux yeux de sa mère Fanny, sa soeur aînée, est une femme parfaite. Elle est avocate et a une vie de famille équilibrée. Sabine elle, est réservée et son travail consiste à fabriquer de faux livres pour la décoration.
Pourtant, quand elle a quelque chose à dire ou à faire elle ne fait pas semblant. C'est ce que lui reproche sa mère en permanence en lui laissant des messages sur son répondeur téléphonique. On ne sait pas si c'est à cause du harcèlement téléphonique de sa mère ou de la vie avec Hans son mari qui a quelque chose du pervers narcissique mais Sabine ne va pas très bien, elle voit des mouches qui sont de plus en plus nombreuses.
Pourtant elle décide de prendre sa vie en main en démissionnant de son travail pour écrire des poèmes. Alors quand ses collègues lui offre une poupée gonflable prénommée également Sabine elle est surprise mais n'ose pas refuser. Un cadeau c'est un cadeau, même encombrant. Et puis, la Sabine siliconée va devenir son objet transitionnel, sa confidente au quotidien.
Pourtant cette histoire qui commence comme une comédie va basculer dans le drame, miroir acide et cruel de notre société.
La particularité de ce roman en dehors de son sujet un peu étrange c'est le mélange des modes de narration. Ce doit être la mode car en ce moment je ne lis que des romans qui utilisent des constructions originales en multipliant les styles : le dialogue, le monologue, la troisième personne du singulier, des fragments de discours, une interview... mais au final je n'ai pas vu le rapprochement avec L'enlèvement des Sabines, le tableau de Poussin évoquant la domination des femmes par la violence.


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La femme et la poupée
Émilie de Turckheim nous revient avec un roman aussi original que dérangeant, aussi gonflé que la poupée qui y joue un rôle prépondérant.

La vie de Sabine n'est pas des plus joyeuses. Entre un compagnon tyrannique, un travail décevant, une mère qui n'a que peu de considération pour elle, elle esaie de faire bonne figure. Avant de toucher le fond, elle décide de démissionner pour se donner un peu d'air. Pour son pot de départ une surprise l'attend. Ses collègues ont choisi de lui offrir une poupée qui porte le même prénom.
Cette seconde Sabine mesure 1,58 m pour 40 kg. Fabriquée par une entreprise familiale située au Mans, elle est faite en élastomère thermoplastique «avec toucher effet peau et finitions réalistes».
Son premier réflexe est de revendre cet encombrant cadeau: «Ayant passé l'âge de jouer à la poupée, je la revends sans y avoir touché. Prix proposé: 6 999 € ». Sauf que Sabine a quelques atouts. Elle est silencieuse, calme et toujours présente.
Elle ne téléphone pas de manière intempestive comme le fait la mère de Sabine en se plaignant que le répondeur n'accepte pas de messages plus longs que deux minutes. Des messages qui montrent tout à la fois que cette ancienne mannequin à une bien piètre image de sa fille et une préférence affirmée pour sa soeur Fanny, une avocate «responsable et bosseuse».
La poupée Sabine écoute avec un sourire gentil sa nouvelle «propriétaire», bien loin de ce que lui fait subir Hans, son mari metteur en scène prompt à la dévaloriser ou même à l'humilier.
Émilie de Turckheim a eu la bonne idée de proposer entre les chapitres quelques dialogues éclairants qui viennent alterner avec le long monologue de la narratrice. Des discussions qui illustrent la difficulté à dialoguer de manière apaisée, des débuts qui ne seraient sans doute pas importants, s'ils ne s'accompagnaient de préjugés blessants.
« L'époux. — L'humanité entière sait pourquoi tu ne conduis pas ! Tes grands-parents sont morts dans un abominable accident de voiture! Grillés dans les flammes! Pauvre petite fille ! Tout le monde perd ses grands-parents, Claire ! Et c'était il y a vingt-cinq ans !
L'épouse. — Ils sont morts sous mes yeux! J'ai passé un mois en réanimation à l'hôpital! J'ai eu des greffes de peau! J'ai failli mourir!
L'époux. — Moi j'ai failli mourir d'une intoxication à la salmonellose en colonie de vacances. Tout le monde a failli mourir une fois dans sa vie. On n'a pas tous des chauffeurs pour autant.
L'épouse. — Inculte.
L'époux. — Qu'est-ce que tu racontes ?
L'épouse. — Quinze jours de vacances et tu n'emportes pas un seul livre.
L'époux. — Tu vas encore me faire chier avec cette histoire de livres? En vacances, je me repose! Je ne fais rien! Je me vide la tête!
L'épouse. — Il n'y a rien à vider! Ta tête est déserte! Même Dieu n'est pas dans ta tête! Tu n'as pas de Dieu! Tu ne vois pas Dieu! »
Et tandis que la situation empire, un petit miracle se produit : Sabine aide Sabine à s'émanciper… allant même jusqu'à transformer les sarcasmes de son mari en jalousie. Dès lors le roman prend une toute autre dimension. La violence sourde et le machisme rampant viennent se fracasser sur la solidarité nouvelle entre la femme et la poupée. le rôle de l'homme et de la femme au sein du couple sont remis en question et vont finir… mais vous le découvrirez par vous-mêmes !
Ce roman est sélectionné pour le prix Anaïs Nin 2018 qui récompense «une oeuvre qui se distingue par une voix et une sensibilité singulières, l'originalité de son imaginaire et une audace face à l'ordre moral». Inutile d'ajouter que L'Enlèvement des Sabines répond parfaitement à ces critères.

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Emilie, c'est moi, Alexandra, une des premières lectrices de L'Enlèvement des Sabines.

Dites-donc, vous ne faites pas dans la dentelle, je vais avoir deux minutes pour énoncer l'extase souriante et cynique que m'a procurée cette lecture.

Alors, comme ça, Sabine en a soupé de son boulot et décide de tout plaquer pour écrire de la poésie. N'en rêvons-nous tous pas ? de sortir des griffes du quotidien, de ce que l'on subit tous les jours, cinq jours sur sept. Mais beaucoup d'entre nous sommes déjà si honteux d'admettre s ‘ennuyer au travail… Alors on se tait, et on continue notre sale besogne.

Sabine ne va pas partir les mains vides, puisqu'elle reçoit en cadeau de départ une jolie poupée, grandeur nature, au nombril déformé et à la cicatrice de varicelle sur le visage. Histoire de se donner bonne conscience sur les critères trop souvent élitistes des canons de beauté.

C'est avec un humour corrosif et dénué de compassion que vous nous exposez toute la violence des qu'en-dira-t-on. Vous nous plongez dans l'absurdité que nous bénissons, malgré nous, de l'incandescence folle de la recherche de la perfection : avoir un gendre idéal, représenter le couple parfait, pour le meilleur et pour le pire, mais surtout pour le meilleur, puisque nous fermons tous les yeux sur le pire, former une famille, car avoir des enfants n'est-il pas le dessein de toutes femmes ? Ne pas en vouloir, ou ne pas pouvoir en avoir, ferait-elle de nous des sous-femmes ?

Réussir, faire rire, toujours avoir le bon propos, avoir un travail honorable et être l'épouse et la mère parfaites.

Emilie, vous faites voler en éclats tous ces dogmes qui font de nous des moutons de Panurge. Et nous, les femmes, les objets de convoitise et de violence chez les hommes. Sabine, en protégeant sa poupée, tente de protéger toutes les femmes, du désir de propriété des hommes. A commencer par elle-même.

Toute cette violence insidieuse nous appartient et nous entoure. On joue les saintes Nitouche, et les hommes se jouent d'autant plus de nous.

Toutes ces cérémonies de pacotille, ces apparats de bienveillance ne sont que de la poudre aux yeux.

Sabine l'a bien compris et tente de s'extirper, non sans mal, de ces diktats en se voilant le regard de mouches sur les yeux. Ces mouches qui bourdonnent sur la réalité, la vérité, qu'elle-même semble être la seule à voir !

Entre la décrépitude de son couple et de son compagnon égocentré, Hans, les exigences extravagantes de sa soeur perfectionniste, relayées par sa mère déployant toutes les forces possibles à la rabaisser, il aura fallu une poupée en plastique, l'autre Sabine, pour révéler la vraie Sabine. L'aider à s'arracher des regards lubriques des hommes, aux équations logiques et résolues des vies qu'on cherche à tracer sans bavures.

Entre monologues désopilants laissés sur le répondeur de Sabine par sa mère, des dialogues incisifs entre Sabine et Hans, metteur en scène qu'on crie au génie, et les confidences de l'héroïne auprès de son double sur ses amours et la violence des hommes qui ne voient que des chiennes, Emilie, vous décapez la littérature dans le fond, comme dans la forme.

Je ne sais pas si ma chronique a dépassé les deux minutes, mais relevez que L'Enlèvement des Sabines m'a fait sourire, exploser, jubiler, rire, m'interroger, et finalement penser que la réussite absolue réside dans un seul précepte : être ce que l'on veut être. Et avoir le courage de l'être.
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Je referme ce livre avec un sentiment mitigé...
J'ai aimé le rythme de l'écriture d'Emilie de Turckheim, tout comme dans "Pop Corn Melody" sorti en 2015. Ici, le changement de style narratif appuie encore sur cette instabilité de souffle; comme si l'on passait du sprint à la course de fond et inversement. Comme si on percevait les battements de coeur tantôt affolés, tantôt léthargiques de l'héroïne, prénommée Sabine.
L'intrigue tourne autour de cette quadragénaire qui n'a jamais réussi à avoir d'enfant, qui souffre de ne pas être la préférée de sa mère et qui décide de quitter son boulot pour se mettre à écrire de la poésie.
C'est d'ailleurs à l'occasion de son pot de départ que le cadeau de ses collègues, une poupée gonflable, prénommée elle aussi Sabine, que l'incongruité de sa place au coeur de la société va se révéler. En effet, Sabine est une femme que l'on a toujours qualifiée d'effacée, à tel point qu'elle se sentirait presque invisible. le monde qui l'entoure se révèle violent, agressif pour une personnalité aussi éteinte. Tout l'émeut; y compris cet espèce de double en plastique...
Mais c'est là où le bât blesse: où donc veut nous amener l'auteure? J'avoue ne pas encore avoir compris... Est-ce une réflexion sur la femme dans la société? Sur la violence qui nous entoure? Sur la folie?
Vraiment, je demeure perplexe...
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Sabine. — Je ne sais pas. Je deviendrais folle si j’écoutais les messages de ma mère.
Hans. — Elle n’était pas à la répétition aujourd’hui. Hier non plus. Voyou est mon œil. Elle ne se contente pas de regarder. Elle voit la faille et le génie.
Sabine. — Ton œil passe ses journées dans les bras de Tiago, le moniteur d’auto-école. Il paraît qu’ils vont vivre ensemble.
Hans. — Une femme exceptionnelle avec un singe frisé de bêtise.
Sabine. — Ça sort du micro-ondes. Ne te brûle pas avec l’assiette.
Hans. — Voyou saccage le peu de temps qui lui reste avec un pédé frisé. Il lui faut un homme fort. Il lui faut un esprit.
Sabine. — Un homme comme Hans Meyer ?
Hans. — Ta mère a la peau très douce.
Sabine. — La peau devient toujours douce, à la fin.
Hans. — La peau des cuisses.
Sabine. — Mange pendant que c’est chaud.
Hans. — Qui d’autre t’a appelée ?
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On n’aime jamais pour la première fois. On aime une chose qu’on a déjà criblée d’amour. On aime ce qu’on est sûr d’avoir perdu. C’est la douleur du souvenir qui anime l’amour.
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Noma Takeshi : journaliste au Nikkan Gendai.
Gidayū Takemoto : en couple avec Sayana depuis un an.

L’entretien a lieu à Hiroshima, chez M. Gidayū, dans un appartement
d’une seule pièce, au 9e étage d’une tour.

Noma Takeshi Est-ce qu’on doit chuchoter ? Je vois qu’elle se repose…
Gidayū Takemoto Non, non… on peut parler normalement. Sayana est une poupée, elle n’entend pas.
N. T. Pour vous, Sayana est bien plus qu’une poupée… Vous la considérez comme votre compagne, je crois…
G. T. Oui, Sayana est ma compagne. Je partage ma vie avec elle.
N. T. Et elle ? Est-ce que Sayana partage sa vie avec vous ?
G. T. Bien sûr. Nous partageons tout. Je vais fermer le store si ça ne vous dérange pas, avec ce soleil qui entre il fait très chaud.
N. T. Ils ont annoncéde grosses chaleurs pour aujourd’hui et apparemment, ce sera pire demain. Monsieur Gidayū, racontez-nous une journée typique avec Sayana.
G. T. Rien de spécial… On se réveille à 5 h 50, on se lave, après on mange en tête-à-tête à cette table. Sayana est toujours assise de votre côté, à votre place. Elle n’est jamais assise ailleurs. Tous les couples ont leurs habitudes… Je lui sers son tamago kake gohan et des tsukemono, même si elle ne les mange pas. Je lui parle de ce que j’ai dans la tête… les soucis… ma mère… Je vous ai dit au téléphone que ma mère était malade… Et aussi les problèmes à l’usine… Ou parfois on mange en silence. Et puis je l’embrasse avant de partir au travail. Je lui dis : «À ce soir, Sayana. Passe une bonne journée». Et le soir, je la retrouve exactement à la même place, assise là.
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Sabine, c’est moi, c’est maman. Je n’ai pas dormi de la nuit… c’était couru d’avance… On ne peut pas dormir dans ces conditions… Je suis épuisée… J’ai fini par appeler ta sœur à 5 h 15 du matin… Je m’en voulais de la réveiller, mais je n’avais pas le choix… j’étais angoissée, j’avais le cœur qui battait à cent cinquante à l’heure… Tu ne vas pas en croire tes oreilles : ta sœur était déjà levée! À 5 heures du matin! Elle a une audience très importante à 11 heures… elle était plongée dans son dossier… Elle reprenait tous les points, un par un, pour son client… Si un jour tu commets un crime… si tu étrangles Hans… prends ta sœur pour te défendre… Tu sortiras du tribunal innocente comme un bébé au sortir du ventre sa mère… Bref je lui explique que tu es sur le point de laisser tomber ton travail sur un coup de tête et que ça serait bien qu’elle prenne un moment pour te parler… J’avais un peu honte de l’embêter avec cette histoire… elle qui est tellement responsable et bosseuse… elle a d’autres chats à fouetter… et là je réalise qu’elle est déjà au courant… Non seulement elle sait que tu démissionnes, mais elle le sait depuis des mois… Mets-toi à ma place, Sabine! Je passe pour quel genre de mère? C’est tout à l’honneur de ta sœur… Fanny est une tombe. Quel que soit le secret qu’on lui confie, elle gardera la bouche cousue.
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J’aime bien te donner le bain. Ton corps, on y croit à peine. Ma mère aussi avait un corps difficile à croire. Elle était mannequin. Ils l’ont repérée sur une plage de Normandie quand elle avait quatorze ans. Son nom de famille lui allait si mal et si bien qu’il est devenu son surnom: Voyou. Tout le monde l’appelait Voyou. Au collège, ses cahiers étaient des torchons. Elle avait l’écriture désinvolte des enfants dont le talent rayonne, qui n’ont rien à prouver, rien à embellir, personne à amadouer. Elle arrivait en retard en cours, souriante, aussitôt excusée, première dans toutes les matières. Elle avait inventé un personnage de prostituée qui se plaignait chaque jour d’un nouveau mal inexplicable: la syphilis, les morpions, un enfant dans le ventre, un coup de couteau dans le dos. Un croissant se formait autour d’elle dans la cour.
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Videos de Emilie de Turckheim (29) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Emilie de Turckheim
L'émission intégrale : https://www.web-tv-culture.com/emission/emilie-de-turckheim-lunch-box-52661.html
Comme elle le dit elle-même, d'aussi loin qu'elle s'en souvienne, la vie d'Emilie de Turckheim s'est toujours construite dans les livres et les histoires, celles qu'on lui racontait comme celles qu'elle s'inventait.
Parallèlement, les souvenirs de sa petite enfance sont liés à ces quatre années pendant lesquelles sa famille s'était expatriée professionnellement aux Etats-Unis.
De retour en France, ses études de droit, de socio ou de sciences politiques n'ont jamais fait dévier la jeune femme de son objectif premier, elle serait écrivain.
A 24 ans, elle publie « Les amants terrestres » suivi rapidement de « Chute libre », « le joli mois de mai » ou « Héloïse est chauve ». Autant de titres, certains primés, qui installent durablement Emilie de Turckheim sur l'étagère des auteurs qui comptent.
Son nouveau roman, qui signe son entrée chez Gallimard, confirme tout le bien qu'on pendait déjà d'elle.
Avec « Lunch box », ses souvenirs d'enfance ne sont pas loin. La lunch box, c'est cette petite boite métallique dans laquelle, chaque matin, toute bonne mère de famille américaine prépare le pique-nique de son enfant, y glissant entre deux tranches de pain de mie et un blanc de dinde, tout son amour et sa tendresse.
Nous sommes donc au milieu des années 80, dans une petite ville cossue de la côte est des Etats-Unis, là où sont installées de nombreuses familles françaises, souvent expatriées pour le business. Dans ce petit monde clos, au nom de la légendaire amitié franco-américaine, on se reçoit avec force effusions mais bien souvent les sourires restent de façade et ne traduisent qu'une partie des sentiments. C'est dans ce décor qu'évolue Sarah, une jeune professeur de musique qui, dans l'école bilingue de la petite ville, est la coqueluche des enfants et de leurs parents car, derrière son côté fantasque, elle n'a pas son pareil pour mettre sur pied les spectacles de fin d'année. Sarah a un coup de coeur pour David, à qui elle donne des cours de piano. Mais il est marié à Solène et leur fille, Laëtitia, est aussi l'élève de Sarah. Bref, rien n'est simple. Pourtant, dans ce décor rêvé de l'american way of life, Sarah a envie d'y croire. En attendant, deux fois par semaine, dans son van, elle accompagne six enfants du quartier à l'école, dont la petite Laëtitia. Mais, comme inévitable, le drame arrive, les sourires s'effacent et le quotidien de cette communauté éclate en mille morceaux.
Habilement construit, en deux temps, après et avant le drame, avec un enchainement implacable que je me garderai bien de vous dévoiler, le roman d'Emilie de Turckheim est une réussite, tant sur l'intrigue que sur la qualité de l'écriture, une histoire cruelle et féroce abordant entre autres les thèmes du deuil, du déracinement, de la fatalité et de la culpabilité.
Les personnages se fissurent au fil des pages, se laissant envahir par la mélancolie et le mal de vivre. Et cette Amérique idéalisée devient un enfer inextinguible où le destin tire les ficelles inexorablement.
« Lunch box » d'Emilie de Thurckheim est publié chez Gallimard.
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