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Janine Matillon (Traducteur)
EAN : 9782226215123
320 pages
Albin Michel (01/09/2010)
2/5   2 notes
Résumé :
Dubravka Ugresic n'est pas seulement l'exceptionnelle romancière que l'on sait. Elle excelle aussi à croquer notre époque d'une plume toujours acérée, tantôt ironique, tantôt furieuse, tantôt amoureuse, lorsqu'il s'agit de rendre compte des ravages de la marchandisation du monde sur la culture, de la mise à l'écart de ceux qui n'ont plus rien à vendre que leurs souvenirs, ou du plaisir de jardiner, de penser que l'on pourrait tout aussi bien vivre heureux ici-bas. <... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Après la lecture de « L'hiver des hommes » de Lionel Duroy, l'envie de prolonger le voyage en littérature serbo-croate s'est fait ressentir, et notamment de (re)découvrir la trentaine de billets qui composent « Il n'y a personne pour vous répondre » de l'écrivaine croate contemporaine Dubravka Ugresic.

Au détour d'anecdotes et d'épisodes autobiographiques, Dubravka Ugresic porte un regard sans fard sur notre époque contemporaine, une sorte de journal de bord qu'une voyageuse exilée écrit au gré de ses nombreuses escales dans les grandes villes de la planète, New-York, Paris, Amsterdam, Moscou…
Des notes prises sur le vif, révélant toute l'acuité d'observation de son auteure et occasionnant maints constats désopilants sur l'état de notre monde.

Dans ce recueil d'instantanées, colorés ou noircis selon son humeur, elle nous fait part de ses impressions, de ses questionnements et de ses sentiments face aux choses et au monde qui nous entourent.
Des différences entre le monde d'hier et celui d'aujourd'hui, des modifications subtiles ou brutales que la chute du communisme a entraînées, des méfaits des stéréotypes, des questions sur l'identité nationale ou sur la culture de masse, l'auteur, d'une plume incisive, peint un tableau au vitriol de la scène mondiale, de cette grande nation que l'on nomme l'Europe, des distinctions entre l'Ouest et l'Est, ou bien encore de l'édulcoration du rêve américain, qui s'étiole peu à peu à mesure que les produits marchands envahissent les étals des marchés de Belgrade ou Zagreb.
Son regard de voyageuse se fait plus tendre lorsqu'il s'agit de décrire les beautés des villes visitées, notamment Amsterdam où elle réside depuis quelques années, une ville qui l'enchante et dans les rues de laquelle elle aime à se perdre comme dans un labyrinthe.

Contrainte à l'exil en 1993 pour avoir osé dénoncer le nationalisme à outrance qui sévissait en ex-Yougoslavie, ce thème reste au centre de ses préoccupations.
Dubravka Ugresic garde au fond d'elle cette impression d'être sans cesse en transit, d'habiter partout et nulle part à la fois, de n'être d'y d'ici ni d'ailleurs, avec cette mémoire d'exilée qui s'attache à certains objets liés à ce bannissement forcé : une vieille valise, une maison aux oiseaux…
Malgré tout, elle porte un regard peu amène, voire très critique, sur ses compatriotes auxquels elle reproche la façon éhontée de s'ériger sans cesse en victime, comme une revendication d'un droit au malheur, comme une volonté de stigmatisation de leur histoire collective. Son ton devient féroce lorsqu'elle évoque les politiques de son pays, le nationalisme devenu trop radical, la vénération des anciens chefs de guerre et la réécriture de l'histoire de la nation.

Dubravka Ugresic aborde également des concepts plus généraux, le bonheur, les origines, la célébrité, l'Histoire… Elle émet ses craintes sur le devenir de la culture, bradée, dévalorisée, et particulièrement sur celui de la littérature à l'ère de la marchandisation du tout et n'importe quoi et du capitalisme, qui a repris à son compte certaines des théories idéologiques de base du communisme, tel le travail, pour devenir somme toute aussi totalitaire - bien que d'un totalitarisme détourné - que ne l'était le communisme.
Enfin, en s'interrogeant sur la littérature serbo-croate et comment elle est perçue par le reste de l'Europe, elle ne cache pas son amertume et sa déception devant le constat que pour être reconnu en tant d'écrivain, il faut encore et toujours porter une étiquette et s'en référer sempiternellement au passé communiste ou au conflit yougoslave.

Au final, « Il n'y a personne pour vous répondre » n'est pas un livre que l'on aura envie de lire d'une traite.
Il se compulsera plutôt un peu à la fois, comme des nouvelles, au gré des humeurs du jour, avec cette impression d'écouter une vieille amie vous donner son sentiment sur l'état du monde et avec qui l'on échangerait des idées, des réflexions, des impressions. Un livre intéressant, qui pousse à réfléchir, à se questionner sur notre époque, ses contradictions, ses failles, ses faiblesses, son devenir…
Pour autant, qui répondra à toutes les interrogations de la croate Dubravka Ugresic ? A l'heure actuelle, personne sans doute…
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[Dubravka Ugresic : Le ministère de la douleur]
Dans les locaux de la Fondation Deutsch de la Meurthe à la Cité Universitaire Internationale de Paris, Olivier BARROT présente le roman de Dubravka UGRESIC "Le ministère de la douleur". Dans ce livre, l'écrivain croate traite de la question de l'exil et du rapport à la langue maternelle dans un pays étranger.
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