Poisson d'amour, ça fait penser à « poisson d'avril ». L'amour serait-il une vaste blague, un canular d'une journée qu'on ferait miroiter aux yeux des merlans frits qui ne demandent qu'à y croire ?
Poisson dans son bocal ou piranha de l'Orénoque, le narrateur passe de l'un à l'autre malgré lui, par la grâce d'un coup de foudre dans une salle des ventes : Philippe, videur de salles de concert est harponné chez Drouot par Béatrice, visiteuse de prison-basketteuse, à moins que ce soit Béatrice qui se laisse prendre dans les filets de Philippe. On a vu plus vraisemblable, mais ça aurait rendu le roman ennuyeux.
Coup de foudre peut-être pas si spontané, peut-être un brin calculé, puisque l'une attend de l'autre qu'il l'aide à réaliser son rêve, et que l'autre espère que l'une le sorte de sa vie étriquée. Parce que, à y regarder de plus près, on voit que les deux sont prisonniers de leurs bocaux respectifs, de leurs familles, de leur inertie. Béatrice l'opportuniste embarque Philippe l'attentiste dans une aventure amazonienne et libératoire. Une parenthèse exotique, vivifiante et rocambolesque, mais une parenthèse néanmoins, qui fiche un peu le blues quand on la referme.
Un petit roman agréable, facile, léger sans être superficiel, excentrique, naïf, drôle et touchant. Une petite brise caribéenne dans le bocal d'eau grise du quotidien.