J'ai découvert
Valérie van Oost avec son premier roman
Hurler sans bruit qui m'avait particulièrement touchée par sa justesse et son écriture. Je n'hésite donc pas quand elle me propose de découvrir son deuxième roman.
Ce roman est l'histoire d'une famille et d'une adoption, celle de Sacha, il y a presque 17 ans, que Juliette et son mari, Antoine, étaient allés chercher à Astrakhan, au sud-est de la Russie, sur les bords de la Volga. Avant une échéance de la dernière chance pour le jeune homme, ses parents et lui-même s'embarquent pour un voyage sur le fleuve, de Moscou à Astrakhan sur les traces de ses origines mais aussi de celles de la famille qu'ils forment pour que Sacha, en perdition, découvre enfin d'où il vient et à travers elles, redécouvre ses parents et donne un sens à sa vie.
"Personne ne comprend cette face de lui trop obscure, effrayante, hideuse, alors il leur jette à la gueule. Il n'y a que sa mère pour lui dire qu'il est beau, qu'il a bon fond, qu'il est intelligent, qu'il a tout pour réussir sa vie. Mais c'est sa mère, comment pourrait-il la croire. (p157)"
Valérie van Oost, fait monter à bord du bateau une famille au bord du cahot : ils ne se comprennent et ne s'entendent plus, que ce soit le couple formé par Antoine et Juliette ou qu'il s'agisse de Sacha, déscolarisé, fugueur, délinquant et dont la justice possède sur lui un dossier qui commence à s'épaissir et qui lui a fait une proposition de la dernière chance.
A travers les villes-étapes qui les mèneront de Moscou à Astrakhan, l'auteure retrace les chemins parcourus depuis leur première rencontre à l'orphelinat mais également les déroutes de Sacha, les basculements qui se sont opérés depuis son arrivée et la vie de la famille et la sienne mise en péril par ses dérives.
C'est un roman d'apprentissage d'une famille avec ce qu'elle peut avoir parfois de maladresses, de trop de pressions et d'amour, d'étouffements mais également les écueils, les changements qui s'opèrent au fil du temps. Chacun va apprendre à découvrir ou redécouvrir l'autre et le tout au son d'une bande son rap (qui est pour moi, comme pour Juliette, un style musical totalement étranger) dont j'ai découvert, grâce à elle, les textes parfois d'une grande beauté et reflétant le mal-être dans lequel l'adolescent se noie.
Je ne savais pas dans quel voyage j'allais me lancer et au fil des pages j'ai aimé que l'auteure confronte deux mondes, celui de la famille avec des racines normandes et versaillaises, la façon dont chacune recevra cet enfant venu d'ailleurs, mais aussi celui de deux pays avec leurs "folklores" et traditions, tellement différentes avec parfois un choc culturel auquel Sacha ne s'attendait pas.
L'enfermement de Sacha dans son monde, écouteurs vissés aux oreilles, la détresse de Juliette qui voudrait retrouver le lien qui s'était installé dès sa rencontre avec le nourrisson et qui ne comprend plus le délinquant qu'il est devenu et Antoine, assez effacé, qui est au bord de quitter le navire familial qui lui devient étranger et où il ne trouve plus sa place.
J'ai trouvé parfois qu'il y avait abondance de détails, sur les lieux, devenant parfois presque un guide touristique mais qui, au final, sont nécessaires pour imprégner le récit de paysages, de contrastes, d'atmosphères comme le sont les rencontres faites au cours de la navigation. Oui c'est cela, on navigue et là il s'agit parfois d'eaux troubles dans lesquelles Sacha s'enfoncent, où sa seule bouée de sauvetage il la trouve dans le rap, musique générationnelle dans laquelle il se reconnaît, s'identifie.
Ce roman révèle l'autre face d'une adoption, où tout n'est pas rose, doux, où chacun n'a pas forcément les clés pour ouvrir certaines portes, les démarches, les attentes, les rencontres de psychologues et de juges pour trouver un moyen de se reconnecter, comme une nouvelle naissance, une nouvelle rencontre.
Comme pour son précédent roman,
Valérie van Oost, évoque avec justesse et originalité par le cadre choisi, le thème de l'adoption, ses rouages, les bonheurs mais aussi les difficultés qui peuvent survenir au fil du temps, malgré l'amour et parce que dans les gènes il peut rester une trace de l'âme slave et que
Les garçons russes ne pleurent jamais et n'ont pas toujours les mots pour s'expliquer.
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