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EAN : 9781090272126
Éditions Les Autanes (17/12/2014)
3.5/5   4 notes
Résumé :
Paris, le 26 juin 1908. Se tient le Congrès des droits civils et du suffrage des femmes. Une conférencière, Héra Mirtel, intervient en tant que directrice du journal l'Entente, sur le thème des carrières accessibles aux femmes. Une intervention étonnante de modernité.
Parisienne à cette date, elle appartient à une célèbre famille lyonnaise, les Grouès. Durant sa vie, de 1868 à 1931, elle fut Marie Louise Victoire Grouès pour sa famille ; Louise Jacques, du n... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Louise Grouès est née 1868 d'un père né dans une petite commune des Hautes-Alpes trente-neuf ans plus tôt et d'une mère née en 1835 à Grigny au sud de Lyon. le père meurt en 1887 et la mère en 1911. Louise reste en nourrice un nombre de mois ou d'année qu'on aimerait bien connaître, elle vit très mal cette séparation avec une femme attentive à elle car elle trouve après une femme d'une "hautaine condescendance" (ce sont les mots même de Louise).

L'ouvrage nous conte la vie d'une féministe de la Belle Époque, issue d'un milieu d'artisans très catholiques. Elle réside à Lyon jusqu'en 1894 et fera des séjours au Mexique de 1895 à 1900 puis de 1914 à fin 1916 car son frère et son oncle s'y sont faits commerçants.

De la Révolution mexicaine, Louise ne voit que les effets désastreux sur la prospérité du groupe dit des Barcelonnettes, ces Alpins (souvent issus des alentours de la vallée de l'Ubaye) qui sont partis faire fortune au Mexique.

Aujourd'hui, malgré en particulier un rapport "Carrières accessibles et ignorées des femmes" qu'elle présente sous son nom de plume Héra Mirtel en 1908 au Congrès national des droits civils et du suffrage des femmes tenu à Paris en 1906, une oeuvre plus journalistique que littéraire si Louise a une place dans l'histoire c'est celle du faits divers. En effet devenue Louise Weissmann-Bessarabo, elle assassine son second mari (avec plus ou moins la complicité de sa fille issue d'un premier mariage) fin juillet 1920. le corps est retrouvé dans une malle qui a fait le voyage de Paris à Nancy par le train le 4 août. Il semblerait que Louise ait voulu prévenir le risque de voir sa fille tomber dans les bras de son mari. Ce dernier est un israélite originaire vraisemblablement des environs de Bucarest.

Comme le premier mari de Louise est mort officiellement de suicide en mars 1914, une enquête est diligentée afin d'établir s'il ne s'est pas agi là en fait d'un meurtre, on conclut au non-lieu. Il semblerait que la presse se déchaîne contre cet "assassin, spirite, féministe (…) graphomane" mais Luce van Torre ne donne qu'un exemple, et encore sans citer le journal en question. Condamnée à vingt ans de prison et quitte la prison Saint-Lazare pour celle de Rennes où elle séjournera neuf ans avant de mourir. de fin mars à début avril son cercueil est bloqué en la gare d'Antibes, aucun cimetière ne veut l'accueillir, une fin qui n'est pas sans rappeler que Georges Bessarabo (né en fait Ismaël Weissmann) a passé plus d'une semaine dans un coffre avant d'être enterré.

Faute de prendre les moyens d'expliquer le passage de Louise dans le camp des jusquauboutistes, Luce van Torre condamne (en dressant d'ailleurs un portrait de la France de 1917 plus caricatural qu'historique) Louise Grouès pour entre autre son absence de solidarité avec Hélène Brion. Outre le fait qu'elle en aurait appris plus sur Hélène Brion et donc évité d'écrire des choses peu appropriées sur elle (voir plus bas), Luce van Torre aurait pu lire page 108 de "Combats de femmes 1914-1918" aux éditions Autrement sous la plume de Michelle Zancarini-Fournel:
« Dans leur majorité, les féministes ont développé un patriotisme et un civisme à toute épreuve et ont participé activement à l'Union sacrée. (…) (Hélène Brion est) jugée en conseil de guerre en mars 1918 pour "défaitisme" dans le cadre de son activité syndicale ».

La présentation fait très amateur pas éclairé. Les notes de bas de page ne sont pas numérotées, un astérisque les signale, elles sont d'une présentation toute personnelle ; on les trouve en annexe 6 (il y a 8 annexes) alors qu'elles devraient suivre le corps du texte. Je n'ai pas trouvé de table de matières. L'annexe 4 des noms cités propose un classement par prénom et comme l'auteure n'a pas fait l'effort de trouver quelques prénoms comme celui du général puis président de la république mexicaine Oregon, ou le personnage est connu sous un pseudonyme avec un seul mot, on a un classement bouleversé. Ainsi se suivent : Mme Gustave Goldschmidt, Mme Vincent, Myrtle Gonzales, Murtle Reed, Myrtle Stedman, Nelly Roussel, Obregon, Olympe de Gouge, Pancho Villa. On remarquera que pour un livre abordant la question du féminisme, un personnage féminin cité peut être présentée uniquement avec le nom et le prénom de son mari.

Il va sans dire, mais c'est mieux en le disant que l'on n'a aucun renvoi à la ou les pages où sont cités des gens célèbres. C'est d'autant plus regrettable, que Luce van Toeer a fait un très louable effort de proposer en général de deux à six lignes sur chacun des personnages en question. Même si plus elle fait long, plus elle va dans des affirmations douteuses, dire qu'Hélène Brion est accusée de collaboration avec les Allemands (et non "les allemands") est totalement inapproprié à la situation de 1917 et au contenu des accusations portées alors contre l'institutrice pantinoise. Dans le texte même, on retrouve parfois des approximations regrettable, ainsi page 173 Marcel-Edmond Naegelen est présenté en 1913 comme député socialiste alors qu'il le deviendra près de trente ans plus tard et du Bas-Rhin qui n'existe plus en 1913 puisque nous sommes en Alsace-Lorraine.
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Dans l'épilogue Luce van Torre s'interroge :

« Et au nom de quoi devint-elle criminelle ? Au nom de la suprématie de la femme sur l'homme ? Et qui tua-t-elle ? Cet homme qui de par son existence, ses prétentions de mâle, la niait ? Ou l'image d'elle-même qu'elle lisait dans son regard, et qui la révélait femme vaincue, impuissante, qui avait subi, accepté cette violence masculine qu'elle prétendait combattre et qui s'était reniée, cette femme idéale qu'elle n'avait pas du être ? Par orgueil, ambition, vénalité. Tuant Georges Bessarabo et se détruisant elle-même ». (page 235)

En vérité si Louise Grouès (de son nom de jeune fille) intéresse aujourd'hui ce n'est pas seulement pour une histoire de malle, mais aussi pour son action de féministe contre le mâle dominant et en conséquence de femme de plume (plus journaliste qu'écrivaine). Louise Grouès nous amène à Lyon où elle passe l'essentiel de son premier quart de siècle (ponctuellement elle se rend dans les Basses-Alpes où résident ses grands-parents paternels), au Mexique de 1895 à 1900 et de 1914 à 1916, à Paris à la Belle Époque, dans la seconde partie de la Première Guerre mondiale et au début des Années folles. Cela permet de découvrir le milieu clérical lyonnais, les troubles révolutionnaires au Mexique que Louise Grouès ne comprend pas (car ils vont à l'encontre des intérêts des émigrés français d'origine alpine, milieu auquel elle appartient), le féminisme à la Belle Époque et le crime d'une femme trompée et inquiète de voir sa fille d'un premier mariage devenir la maîtresse de son second mari (un juif originaire de Roumanie Ismaël Weissmann se faisant passer pour Georges Bessarabo).

Au n°3 du square La Bruyère à Paris le 30 juillet 1920, eut lieu l'"affaire Bessarabo" ; un homme d'affaires est assassiné par son épouse une femme de lettres, fer de lance du féminisme radical dans les années qui précèdent la déclaration de guerre d'août 1914. Si le livre n'est pas centré sur cet évènement, il consacre une place négligeable à lui et à ses conséquences.

Il s'agit là d'un livre qui permet d'aborder de façon un peu superficielle à la fois le personnage et l'époque Louise Grouès vit. Qu'on en juge page 203 où on n'apprend strictement rien sur le contenu de l'ouvrage "De la Patrie à la Matrie" publié en 1920 alors qu'est porté un jugement négatif sur celui-ci :

« Elle reprend la plume pour de nouveau affirmer la suprématie du matriarcat. Un système de pensée obsessionnel, qu'elle ne critiquera jamais. Une pensée fossilisée qui n'évolue pas et ne s'adapte pas. Elle écrit un texte, en 1917, de la patrie à la Matrie et l'autoéditera en 1920 avec une tendre dédicace à sa petite-fille Marie-Louise Benavides ». (page 203)

Il faut se reporter aux pages 157 et 158 pour inférer très vaguement une partie du contenu possible du livre. L'ouvrage généraliste de Christine Bard "Les filles de Marianne : histoire des féministes 1914-1940" nous en dit bien plus page 115 sur les idées portées par le livre et l'état d'esprit dans lequel se trouve Louise (Héra Mirtel de son nom d'écrivaine) peu avant qu'elle ne passe à l'acte :

« Ainsi la poétesse Héra Mirtel, qui publie en 1920 aux éditions de la Matrie "De la patrie à la matrie ou du bagne à l'éden", où elle évoque l'âge d'or révolu du "temps de la Matrie, qui précéda de plusieurs siècles la Patrie où régna la Mère, qui précéda de plusieurs siècles la Patrie où règne le Père, chaque femme croyait enfanter des frères et des soeurs aux enfants des autres femmes". L'enfer patriarcal est symbolisé par une femme dépravée qui séduit les hommes rn leur ôtant toute volonté. La spectatrice de cette décadence crée une colonie matriarcale fondée sur des règles saines. Elle oppose la maternité, symbole de la régénération morale, à la sexualité, assimilé à l'"ordure", avec quelques images antisémites à l'appui».

En résumé, on est dans une biographie qui prend des contours qui s'approchent plus du roman historique que d'un livre d'historienne. Bref ce n'est pas certain qu'avec ce livre la pensée de Louise Grouès retrouvera la place non négligeable qui devrait être la sienne dans l'histoire du féminisme à la Belle-Époque. Toutefois le grand public trouvera un plaisir à la lecture du récit d'une vie aventureuse et les féministes ainsi que les historiens auront envie de faire des recherches complémentaires afin de mieux comprendre les idées qu'elle véhiculait et qui semblent servir pour partie de socle aux féministes radicales.
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Reçu dans le cadre masse critique .

Je suis perplexe , très perplexe.

Tout commence avec l'avertissement page 11 : l'auteur explique avoir fait une recherche avec des éléments vérifiés, fiables, exacts, puis enchaine en disant qu'elle a introduit des scènes de fiction...

Je pense qu'il y a un choix à faire. Un auteur a le droit d'être un romancier , il peut alors s'emparer d'un personnage historique et raconter son histoire comme il le souhaite, comme il le peut ou comme ce personnage lui permet de le faire. Et le lecteur dans ce cas sait qu'il a une approche d'un personnage, une approche et une vision. Si le lecteur veut en savoir plus il peut lire d'autres oeuvres des romans ou des biographies. Par exemple, Richelieu vu par Dumas n'est pas Richelieu vu par d'autres auteurs, mais qui est Richelieu ? Au lecteur de faire sa recherche si la question l'intéresse.


Sur le personnage de Louise Grouès, alias Louise Jacques (premier mariage) ,alias Hera Mirtel ( nom de plume ), alias Louise Weissmann-Bessarabo ( second mariage) , il aurait pu y avoir un travail intéressant à construire, soit de recherche bibliographique, soit d'épopée romanesque. Mais j'ai trouvé , pour ma part ,que cette recherche manquait de cohérence, on ne peut pas faire les deux en même temps.

Et, de plus, j'ai trouvé qu'il y avait une confusion entre deux notions : coupable et victime.
Certes cette femme a été victime de son milieu, condamnée à se marier la première fois pour prendre son indépendance et,sans doute , condamnée d'avance lors de son procès pour avoir été une activiste féministe et avoir eu une liaison par le passé avec un homme marié, qui a divorcé pour elle .
Mais la victime du meurtre est un homme qui a reçu une balle dans la tête et dont le corps a été dissimulé dans une malle. Même si l'auteur semble justifier ce meurtre par des très mauvaises intentions que cet homme aurait eu , il n'en demeure pas moins qu'il est la victime d'un meurtre.

Concernant les éléments biographiques, certains m'ont laissé perplexe .
Par exemple, la soeur ainée de Louise Grouès a épousé leur oncle, demi frère de leur père, avec qui elle avait 8 ans d'écart ...
Louise Grouès était la tante de l'abbé Pierre ...
En annexe nous avons toute la généalogie de la famille sur plusieurs générations...
Pourquoi ces informations ? Pourquoi les mentionner ? Quelle analyse en fait l'auteur ? Qu'est ce que cela apporte à la compréhension du personnage ? de son histoire ? de l'époque et de la place de la femme de lettre féministe dans une société encore figée dans un modèle patriarcal ?

Bref tout ça pour dire que je ne peux pas recommander cette lecture que j'ai trouvé personnellement très décevante



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Louise Grouès est la nièce de Henri Grouès, alia l'abbé Pierre. Rien ne semble les lier directement dans cette biographie. Mais il fallait que ce fut dit.
Biographie, ce livre en est une, mais non exhaustive et c'est un choix ; si tant est qu'elle eut été possible. La 4ème de couverture annonce ce qui nous attend des errements de la vie de cette femme. Vie d'abord jalonnée de déboires avant de l'être de succès et de retournements. Elle est à elle seule un véritable roman. "Tout un ciel bleu, tout un ciel noir."
C'est aussi ce que l'auteure s'est attachée à faire. Romancer les ponts qui relient les passages de la vie de Louise Grouès. Autant de ponts et de chemins empruntés qui nous conduisent de Lyon à Paris, de Barcelonnette au Mexique. La flamme qui la rongeait s'éteindra à la prison de Rennes. Elle reposera finalement dans un petit cimetière de l'Ubaye.
Peut-être aurait-elle préféré être appelée définitivement Héra Mirtel, nom qu'elle choisit comme femme de lettres et de combat pour les bonnes et les mauvaises causes. Le lecteur en découvrira les raisons. La contradiction est profondément humaine. Il ne faudra donc pas s'étonner de la rencontrer dans des luttes d'avant garde pour les droits de la femme mais aussi dans des combats contre l'abolition de la peine de mort.
Nous ne vivons pas à cette époque et nous n'avons pas eu sa destinée, alors ne la jugeons pas mais lisons plutôt ce bel ouvrage. J'aurais préféré que Luce van Torre s'étende sur d'autres moments de la vie de son héroïne et laisse certaines citations un peu redondantes. Mais là aussi, comment juger une femme qui écrit sur une autre et s'identifiera à elle nécessairement. Luce aura refait le parcours de Louise, parce qu'elle aussi est une femme et un écrivain.
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Quelques coquilles oubliées dans le texte mais une belle écriture fluide remplie d'émotion. Et surtout la découverte d'une femme de lettres et d'une féministe de la Belle époque, au destin tragique, fort dérangeante pour la société machiste de l'époque et pour son milieu familial, conservateur, catholique et bien pensant.
Et même si l'auteur, Luce van Torre, ne fait que l'évoquer, l'existence du lien familial de Louise Grouès avec l'Abbé Pierre dont elle est la tante paternelle, nous fait mieux comprendre le silence dont son histoire fut entourée. Pas toujours facile d'avoir dans sa famille un "cadavre dans son placard".
Bravo aussi pour les notes en annexe qui m'ont donné envie de mieux connaitre cette période de la Belle époque!
A lire absolument et à faire partager.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Louise ne peut s’empêcher de sourire. Son frère. Un visage avenant, tellement sérieux, un homme jeune posé et déterminé qui a très tôt entrevu ses responsabilités. Et qui est prêt à les prendre.
- Prêt, se murmure Louise, à les assumer pleinement. Une âme de chef de famille !
Antoine, le seul garçon, la coqueluche de la famille, adoré par sa mère et par ses soeurs, sans exception. Il a occupé et occupe toujours une place centrale dans l’amour des siens.
Les liens avec son frère ont été forts jusqu’à présent, durant toutes ces années difficiles à Lyon. Des liens d’affection, de complicité et de soutien, quand le père allait mal, que les affaires devenaient catastrophiques, quand la mère, dépassée par toutes les difficultés du quotidien, se repliait sur elle-même, se retirait de la lutte.

Et il n’y eut jamais de trêves. Pour être près de son père, de plus en plus défaillant, Antoine, dont l’éducation s’est faite dans un établissement religieux, sous la tutelle de son oncle paternel, jésuite, arrête ses études. Il vient travailler auprès de son père.
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Peut-on trouver parcours de femme plus alourdi de contradictions ? Plus enchevêtré ? Plus complexe ? Plus pathétique ? Si peu exemplaire ?
Alors, pourquoi en parler ? Pourquoi ne pas suivre ce que d’aucun aurait souhaité : l’oublier, l’abandonner, fermer derrière elle toutes les portes, ne jamais lui tendre une main secourable, la maudire, la faire disparaitre ? Tout faire pour qu’elle n’existe plus ?

Mais comment masquer cette évidence ? Son existence, comme toute existence, en aucune manière, ne peut être niée. Elle fut et continue d’être. Heureusement trahie par les traces ténues et intemporelles de ses mots, ses pensées, ses rêves.

Comment ne pas être interpellé par cette vie faite de naïveté et de machiavélisme, d’amour et de haine, de bonheur et de souffrance ? Par cette ultime déflagration qui termina son chemin ? Qui fit de la vie de ses familiers et de ceux qui l’approchèrent un tel enfer qu’ils refusèrent d’affronter l’indicible, imposant le secret, enkystant au plus profond d’eux-mêmes le silence mortel du non-dit, gangrénés par la honte et la culpabilité.
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Le départ de Portofirio Diaz et la dictature de Huerta, entrainent le pays dans une succession de coups d’état, d’assassinats et de répressions, de luttes sanglantes entre Pancho Villa, Zapata, Carranza, Obregon. Héra Mirtel craint par-dessus tout pour ses biens. Elle veut récupérer tout ce que son mari a laissé derrière lui, entre les mains d’associés en qui elle n’a pas vraiment confiance.

Partir. Avec ses filles, Paule et Louise. Peut-être pour longtemps. Laisser derrière soi l’incompréhension, le désenchantement, les trahisons. Oublier ses propres trahisons. Tenter d’effacer la douleur des regrets.
Paule et Louise, près d’elles, dans leur couchette. Confiantes en leurs rêves d’adolescentes. Endormies dans la respiration saccadée du navire, dans l’enveloppement des vagues.

Héra Mirtel veille. Comme chaque nuit. Le long poème des Vesprées entre ses mains. Elle ne le lit pas. Ce n’est pas nécessaire. Tous les mots sont inscrits en sa mémoire, en sa chair. Elle les déplie, les rythme, les murmure.
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Louise comprend intimement son silence et sa tristesse. Parce qu’elle perçoit intuitivement tout ce qui, brutalement, s’est détaché de sa mère. Elle prend conscience de l’ampleur de la rupture entre cette vie qu’elles viennent, toutes les trois, d’abandonner et ce qui se met en place, qu’elles n’osent même pas imaginer.

Mais elle ! Elle !

Tant de choses se bousculent en elle : excitation, impatience, bonheur, gravité, curiosité…Elle se sent vivante comme jamais elle ne l’a été. Le vent puissant, le bateau qui va vers l’inconnu, la fureur de l’océan, les passagers qu’elle croise et avec lesquels elle plaisante, le soleil au lever du jour, l’acier des étoiles…Tout s’inscrit en elle, tout la traverse, tout la fait vibrer.
Elle a vingt-six ans. Il lui semble naître, enfin, à la vie.
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Et au nom de quoi devint-elle criminelle ? Au nom de la suprématie de la femme sur l'homme ? Et qui tua-t-elle ? Cet homme qui de par son existence, ses prétentions de mâle, la niait ? Ou l'image d'elle-même qu'elle lisait dans son regard, et qui la révélait femme vaincue, impuissante, qui avait subi, accepté cette violence masculine qu'elle prétendait combattre et qui s'était reniée, cette femme idéale qu'elle n'avait pas du être ? Par orgueil, ambition, vénalité. Tuant Georges Bessarabo et se détruisant elle-même.
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