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Frank Reichert (Traducteur)
EAN : 9782743609351
195 pages
Payot et Rivages (30/04/2002)
3.81/5   66 notes
Résumé :
Shuggie Atkins est un adolescent solitaire et obèse. Sa mère l'appelle son "petit coeur". Son père le traite de "gros lard" et le force à s'introduire au domicile de grands malades pour y voler les "drogues" qui leur sont prescrites. Shuggie accepte, pour l'amour de cette mère qui ne cesse de le provoquer sexuellement sans avoir l'air de s'en rendre compte. Tout cela est supportable jusqu'au jour où Jimmy Vin Pearce, un grand et bel homme, surgit dans le paysage au ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (21) Voir plus Ajouter une critique
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Son père, Red, le surnomme affectueusement Gros lard ou Gras du bide tandis que sa maman, Glenda, lui préfère Mon petit coeur. Entre les deux, Shuggie Atkins, surnommé Shug, 13 ans, adolescent solitaire et obèse, va vite savoir vers qui il doit se tourner s'il souhaite un tant soit peu d'attention digne de ce nom. Mais entre un père alcoolique, violent, qui l'entraine dans des combines foireuses, à savoir dépouiller les malades de leurs médicaments susceptibles de lui rapporter, ainsi qu'à son pote Basil, un moindre réconfort et une mère protectrice autant qu'elle le peut, aguicheuse et allumeuse envers les hommes, même son propre fiston, accro à sa "tisane" maison, mélange de Coca et de mauvais rhum qu'elle s'enfile à longueur de journée, rêvant d'une vie bien meilleure que celle que lui offre son compagnon, Shug a bien du mal à trouver sa place. Il s'occupe de l'entretien du cimetière près duquel ils habitent tous les deux, Red étant souvent parti en cavale Dieu sait où. C'est dans cette grande bâtisse, aux couleurs improbables, au cours de cet été suffocant du Missouri, dans l'attente et l'espoir d'une vie meilleure qui pourrait prendre la forme de ce Jimmy, venu de nulle part, que Shug va faire ses armes...

L'un donne des coups, l'autre l'embrasse. Shug, garçon obèse, mal dans sa peau, est tiraillé entre la haine qu'il porte à son beau-père et l'amour inconditionnel, voire malsain, qu'il éprouve envers sa mère. Les liens familiaux sont indéfectibles, quelque soit leur nature. le jeune garçon l'apprendra bien vite. L'on est plongé dans une ambiance glauque (le cimetière dans lequel vit la petite famille en est une preuve), l'air est plombé et étouffant, les relations pas vraiment saines entre ces trois personnages, Glenda qui semble subir sa vie plus qu'elle ne la vit, Red, beau-père aux moeurs douteuses et Jimmy, ce sauveur improbable. L'écriture est savoureuse et directe, du franc-parler et des expressions vivantes. Woodrell sait merveilleusement captiver le lecteur tant ces âmes cabossées sont touchantes et cette atmosphère bouleversante.

Assistez à La mort du petit coeur...
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Mais pourquoi suis-je venu au monde ?

Cette question, Shuggie Atkins, adolescent de treize ans appelé Shug, a dû se la poser un bon nombre de fois depuis sa naissance.

Pour quelles raisons, vous me direz-vous ?

Disons que le pauvre garçon part avec quelques handicaps dans la vie, que je résumerais en trois hic :

►Commençons par sa mère Glenda, le premier hic qui rime avec éthylique…

Pourtant belle femme, Glenda appelle son fils « Mon petit coeur » mais adore encore plus que tout siroter la « Tisane », non pas le pisse-mémé qui infuse mais le mélange rhum - Coca qui diffuse. Et pardessus le marché, disons que Glenda a tendance à allumer les hommes sans même sans rendre compte… même son fils.

►Poursuivons par le pseudo père de Shug appelé Red, le second hic, pas vraiment éthique…

Même après avoir purgé une peine de prison, Red, toujours fourré avec son pote Basil (rien à voir avec la bande), exerce le métier pas vraiment honnête de trafiquant en tout genre.

Coté famille, Red bat régulièrement sa femme Glenda et insulte sans arrêt Shuggie de gros lard. Pire encore (si on peut dire), Red l'oblige à participer à des vols plutôt étranges, le vol de médicaments.

Choisissant ses proies dans un état souvent proche de la mort, Red utilise Shug, déguisé en vendeur de Grits, pour dérober les boites de médicaments des malades.

►Terminons par le lieu de résidence de Shug, le cimetière, le dernier hic pas franchement idyllique...

Dans la pratique, Shug doit supplanter sa mère au travail consistant à entretenir le cimetière dont leur maison bariolée et en piteux état, fait partie tenante. Désherber, tondre, nettoyer les allées et les tombes devient le quotidien de ce pauvre adolescent désabusé et plutôt solitaire.


En résumé, vous connaissez désormais l'univers impitoyable dans lequel se débat le jeune Shug entre violence conjugale, délinquance et alcoolisme. Hic, hic, hic...

Néanmoins, il est assez étonnant de noter que Daniel Woodrell réussit à instaurer une relation tendre entre cette mère et son fils alors que tout ce qui les entoure les enferme dans une misérable existence.

Sans user d'une intrigue comme dans un policier classique, l'auteur nous embarque dans une histoire sordide qui m'a rappelé « Rage noire » de Thompson, en moins cru et dans un tout autre contexte. Dans un style américain tout aussi remarquable…

Pour conclure, j'ai largement apprécié ce court roman volontairement elliptique qui juxtapose des situations dont on ne connait pas forcément le début ou la fin de l'histoire. Au lecteur de s'imaginer les parties manquantes.

Et « cerise sur la tisane », un final de roman qui m'a surpris, interpellé et bouleversé. Que demander de plus ?

Un autre Woodrell assurément…
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" Gros lard, gros tas, pov' brêle ", je suis pas loin de penser qu'en me surnommant ainsi, beau-papa Red me porte pas vraiment dans son coeur.
S'il y en pourtant un à qui l'on fait appel régulièrement pour se faufiler dans les maisons alentour histoire de rafler tous les médocs capables de faire planer très haut Red et son pote Basil, c'est bien cette " grosse merde " de Shuggie Atkins, pour vous servir.
Oh il est pas méchant le Red. Un peu alcoolo sur les bords, légèrement accro aux barbituriques et au jeu, régulièrement violent et ordurier mais sinon, c'est pas le mauvais bougre. On a tous nos p'tits travers.
Celui de Glenda, ma mère, c'est son mec, Red. Sinon, belle à damner un saint, elle dit tout le temps que je suis son petit coeur et moi je la crois.
On habite pas un château et on croque pas au bonheur tous les jours mais tant qu'on reste ensemble, rien peut nous arriver. Tout comme rien ne dure vraiment...

Non, Woodrell ne fait pas dans le détail. Les familles unies, sans histoires et nageant béatement dans le bonheur, c'est pas son truc. Il l'avait déjà prouvé dans Un Hiver de Glace, il récidive ici avec La Mort du Petit Coeur.
Inutile de sortir confettis et cotillons, pas l'ombre d'une occase festive à se mettre sous la dent. Au menu et à volonté, de la bonne grosse désespérance de compétition. de celle qui vous prend aux tripes en vous laissant augurer d'une fin sordide, plombante à souhait, finalement logique au regard de tous ces destins traçant à tombeau ouvert sur une voie sans issue.
Le style Woodrell est puissamment évocateur et ne saurait laisser indifférent.
Tenter l'expérience Woodrell, c'est appréhender l'humain dans ce qu'il a de plus minable.
Si les débuts sont régulièrement maussades, les épilogues sont invariablement bien pires.
Vous voilà prévenus...
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Poursuivant le rattrapage de mes lacunes en classiques américains, je ne pouvais passer à côté de Daniel Woodrell et de la mort du petit coeur, traduit par Franck Reichert. Pensez-donc : un livre dont le grand Lehane écrit dans sa préface qu'il est « l'un des chefs-d'oeuvre littéraires de ce dernier quart de siècle » et plus loin « je ne connais personne qui ait lu ce roman sans se sentir bouleversé et profondément ébranlé », nécessite que l'on y regarde de plus près. C'est donc chose faite et c'est remarquable de noirceur et de simplicité.

Le pitch est d'ailleurs simple : Shug vit avec sa mère Glenda et son père – même si le doute est suggéré – Red, dans un coin paumé et rural des monts Ozark dans le Missouri. Enfin ils vivent… ils survivent plutôt. Red est alcoolique, drogué, violent, cavaleur et subsiste à coups de petits larcins qui lui offrent quelques jours de visibilité financière pour partir en bordée. Glenda fait ce qu'elle peut, entre soumission opportune et protection de son fils qui prend comme elle son lot de beignes quand Red n'est pas d'humeur. Tout cela finira mal, lorsque l'enfant grandit…

Ce trio infernal est connu, et Earl Thompson ou Donald Ray Pollock l'ont tour à tour pris comme base de leur propre chef d'oeuvre, Un jardin de sable et le diable tout le temps. Mais Daniel Woodrell choisit lui la concision et fait de la mort du petit coeur un court roman ou une longue nouvelle. En 200 pages, tout est posé et dit : cette atmosphère si particulière des Ozarks, où la misère imprègne jusqu'à l'air que l'on respire ; où l'espoir de jours meilleurs est maigre sauf à s'engager ou à monter dans une Thunderbird sur un coup de tête pour suivre un homme meilleur ou un peu moins mauvais ; où le passage de l'enfance à l'âge adulte se fait parfois d'un coup, sans prévenir.

On tremble avec Shug, on a mal avec Shug, on se fait oublier avec Shug, on espère avec Shug. Et on vit avec Shug cette relation fils-mère avec Glenda, magnifique et dérangeante, désespérante et fataliste.

C'est désespérément noir ; c'est désespérément beau !
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Vraiment roman noir de l'Amérique profonde, ce livre n'est pas à mettre entre toutes les mains. Remarquablement bien écrit, oscillant entre émotion et humour, le thème de fond n'en est pas moins dérangeant.

Shuggie, 13 ans, a le choix entre un "père" qui n'est qu'insulte envers lui et le pousse à commettre des délits pour s'approvisionner en came, et une mère insatisfaite et borderline qui joue les vamps avec lui. Shuggie est donc sans arrêt pousser par l'un à être l'inverse de ce que l'autre voudrait.

Roman assez court, l'histoire et les personnages sont bien amenés, analysés et comme je le disais plus haut, les quelques 200 pages sont largement assez pour vous perturber.

Ce roman m'a fait pensé à Arrive un vagabond de Robert Goolrick, car l'enfant se trouve également ici complice de choses qu'il n'aurait pas souhaité...
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
« Shug, tu ne connaissais pas la fille qui était assise derrière nous ?
- Sans plus, elle était dans ma classe.
- J’ai l’impression, mon petit cœur, qu’elle faisait de son mieux pour que tu la remarques.
- Je l’ai vue.
- Quand les filles s’intéressent à toi, trésor, tu devrais leur rendre la politesse.
- Les filles ne s’intéressent pas à moi. En plus, je m’en fiche.
- Elle se trémoussait comme si tu lui plaisais.
- Elle devait avoir envie de pisser et n’avait pas envie de rater une scène. »


Conversation entre Glenda et son fils Shuggie à la sortie du cinéma.
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- De quoi tu rêverais si t'avais le choix ?
- Oh j'en sais rien. De toute façon ce qu'on appelle les rêves, c'est la plupart du temps des envies. Entre rêve et envie, il y a une grosse différence. Je ne sais même pas lequel des deux risque d'être exaucé en premier.
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Je me suis abandonné un instant à l'un de mes espoirs préférés, celui d'être enterré dans une boîte de conserve. Demander aux médecins de me réduire aux dimensions de petites pépites, grosses comme des graines, pour me glisser ensuite dans une vieille boîte de conserve, celles avec le couvercle déchiqueté encore accroché au bord, et la clouer tout en haut d'un arbre pour que les oiseaux puissent se nourrir de moi puis battre des ailes, prendre leur envol, parcourir le globe et me chier sur la tête de toutes les créatures vivantes.
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- J'ai toujours l'impression de posséder tout ce qui m'entoure dans le rayon d'un jet de pisse, a fait Red.
- Alors tu devrais boire plus de bière.
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Nous savons beaucoup de choses sur ceux que nous aimons... beaucoup de choses que nous refusons néanmoins de croire.
Elias Canetti
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Videos de Daniel Woodrell (6) Voir plusAjouter une vidéo
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Official Trailer: Tomato Red
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