Citations sur Conscience contre violence (116)
(Castellion)
Comme son prédécesseur, Erasme, il sait à quel point chaque vérité terrestre et divine est multiforme, susceptible de nombreuses interprétations, et ce n'est nullement par hasard qu'une de ses principales oeuvres porte ce titre caractéristique : De arte dubitandi ( l'art de douter).
(p. 170)
Il sait que chaque époque se choisit un groupe de malheureux sur qui elle puisse déverser la haine qu'elle a accumulée.
(p.175)
... Mais l'infortuné pousse encore plus loin sa folle et provocante audace. A peine arrivé, Servet se rend à l'église, un dimanche, où toute la communauté calviniste est réunie. Mieux encore - nouvelle folie - parmi toutes les églises de la ville il choisit justement Saint Pierre, où prêche Calvin... Servet agit sous l'empire d'un hypnotisme psychique qui échappe au raisonnement...
(p.136)
Malheureusement, c'est à Calvin que l'aveugle accorde sa confiance. C'est au réformateur le plus hardi et le plus radical ...qu'il s'adresse pour exposer son interprétation plus sévère et plus osée encore de la Bible...une correspondance s'établit entre eux par l'intermédiaire d'un libraire de Lyon...Avec une insistance et même une indiscrétion inouïes, il s'éfforce de gagner Calvin... Tout d'abord Calvin ne répond qu'en essayant sur un ton doctrinaire de le faire changer d'idée ... mais finalement il s'indigne tant contre la thèse hérétique que contre la façon arrogante dont il l'expose... mais il se refuse à disputer et à perdre son temps avec un inguérissable brouillon de ce genre... Pourtant le malheureux Don Quichotte s'obstine au lieu de se rendre compte à temps contre quelle muraille de fer il est allé se jeter avec sa frêle lance. C'est précisément celui qui ne veut rien savoir de lui qu'il veut gagner à tout prix à son idée et rien ne le détournera de son entreprise...
(pp.119-121)
...Servet n'est nullement ce "contempteur cyclopéen de l'Evangile" que décrira plus tard Calvin, ni le libre penseur et l'athée qu'on célèbre parfois aujourd'hui. Il est toujours resté dans le cadre de la religion...
(p.123-124)
Presque toujours il en est ainsi dans la vie : ceux qui savent ne sont pas ceux qui agissent et ceux qui agissent ne sont pas ceux qui savent.
(p.20)
L'histoire n'a pas le temps d'être juste. Pour elle, seul compte le succes, et encore il est rare qu'elle l'apprécie selon une mesure morale.
(p. 25)
... il répond aux sophismes du même Calvin en lui jetant à la face ce mot immortel : " Brûler un homme, cela ne s'appelle pas défendre une doctrine, mais commettre un homicide."
(p.22)
La défense de l'orthodoxie, de la vraie foi supprime, d'après Calvin, tous les liens du sang, tous les commandements de l'humanité ; même ses proches parents, si Satan les poussaient à nier la "vraie" religion, il faudrait les anéantir.
NDL : derrière "l'hérésie" de Michel Servet qui l'a conduit à être brûlé vif ( le calvaire a duré une demi heure ), il y a Jean Calvin qui pousse les juges du Conseil de Genève.
Servet, Protestant comme Calvin, n'était pas d'accord avec celui-ci seulement sur un point de détail théologique : Servet niait la Sainte Trinité... Il a expié sur le bûcher.
« Qui donne ses heures aux autres vit à jamais » .
Tuer un homme, ce n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme
"Chercher la vérité et la dire, telle qu'on la pense, n'est jamais criminel. On ne saurait imposer à personne une conviction. Les convictions sont libres" Sébastien Castellion (p.123)
Pour élever le plus haut possible le divin au-dessus du siècle, il rabaisse le terrestre le plus bas possible ; pour donner à l’idée de Dieu la dignité la plus haute, il réduit la dignité de l’homme
Puisque la violence réapparaît à chaque époque sous de nouvelles formes, il faut constamment reprendre la lutte contre elle. Que les hommes de pensée ne reculent pas devant cette lutte sous prétexte qu'on ne peut opposer à la violence la seule force des idées. Car on ne dira jamais trop ce qu'il est nécessaire de dire, on ne criera jamais trop souvent la vérité. Même quand elle ne triomphe pas, l'idée n'en manifeste pas moins son éternelle présence, et qui la sert en une heure aussi critique montre par là qu'aucune terreur n'a de pouvoir sur une âme libre, et que même à l'époque la plus inhumaine on peut faire entendre la voix de l'humanité.