Citations de Alain Robbe-Grillet (88)
Partout où il y a une distance, une séparation, un dédoublement, un clivage, il y a possibilité de les ressentir comme souffrance, puis d'élever cette souffrance à la hauteur d'une sublime nécessité. Chemin vers un au-delà métaphysique, cette pseudo-nécessité est en même temps la porte fermée à tout avenir réaliste. La tragédie, si elle nous console aujourd'hui, interdit toute conquête plus solide pour demain. Sous l'apparence d'un perpétuel mouvement, elle fige au contraire l'univers dans une malédiction ronronnante. Il n'est plus question de rechercher quelque remède à notre malheur, du moment qu'elle vise à nous le faire aimer.
La chair des phrases a toujours occupé, sans doute, une grande place dans mon travail. Même si je ne suis pas à ma table, leurs figures mouvantes ne cessent de me hanter. Je répète des mots, des rythmes, j'essaye des sonorités, j'organise des échos et des ruptures. C'est en moi comme les mouvements ressassés, prévisibles, sans cesse imprévus, de l'eau profonde qui enlace, gifle, submerge, met à nu d'un seul coup jusqu'aux pieds, puis caresse doucement les roches de granit rose, ruisselantes, polies par les remous frangés d'écume.
a. Choisissez la phrase la plus probable.
[...]
3.Un complet est
-un vêtement masculin.
-un petit déjeuner français.
-de la lingerie féminine.
[...]
6. Des broderies se trouvent surtout
-en mécanique moderne.
-en musique baroque.
-sur des vêtements anciens.
p.149/150
a. Répondez aux questions suivantes sans reproduire le texte exact.
1. Qui parle, dans ces dernières pages?
[...]
6. Djinn est-elle certainement une vraie femme? Est-elle peut-être autre chose?
[...]
11. Comment finit le roman?
p.149
Plus tard, je veux faire des études pour devenir héroïne de roman. C’est un bon métier, et cela permet de vivre au passé simple. Tu ne trouves pas que c’est plus joli ?
Mais, de temps à autre, l'homme qui marche en tête se retourne sans crier gare et l'ivrogne, saisi d'effroi, recule d'un pas pour se mettre hors de portée; puis, aussitôt que le danger lui semble moins grand, il reprend sa course avec obstination, essayant à nouveau de rejoindre son compagnon et même parfois de s'accrocher à lui pour le retenir - ou bien le dépassant d'une enjambée, pour se voir, une seconde plus tard, trottinant à nouveau loin par derrière - comme s'il cherchait à rattraper le temps.
Si l'on prolonge à l'infini, dans les six directions possibles, les trois côtés d'un triangle quelconque, on constitue un plan. Dans ce plan infini, les trois sommets du triangle déterminent un cercle, qui contient le triangle entièrement. Les trois cotés de celui-ci sont tangents à un second cercle commun, qui est entièrement contenu à l'intérieur du triangle. Les bissectrices intérieures des trois angles se coupent au centre de ce second cercle, tandis que les médiatrices des trois côtés - admettant elles aussi un point commun - se rencontrent au centre du premier. Quand ces deux points sont confondus (cercles concentriques), on dit que le triangle est équilatéral.
D'une façon générale on l'a peu aimé, du reste, Evelyne... Ce n'est d'ailleurs pas pour ça qu'il se tue. Qu'on l'ait peu aimé, ça lui est égal. Il se tue pour rien - par lassitude.
Je ne suis pas choqué par les contradictions à l'intérieur de l'homme. Je suis choqué par le monolithisme. Je ne crois pas à la vérité de l'interprétation littéraire. Je peux exprimer des choses avec une conviction totale sans les croire vraies : je les crois seulement intéressantes, excitantes. Je suis un scientifique de formation. C'est important. Le scientifiques modernes ne croient pas à la vérité de la science. Ils misent seulement sur son efficacité, et c'est très différent.
Raconter semble pour Balzac un travail naturel et innocent. Flaubert est sans doute un des premiers écrivains du XIXe siècle à avoir ressenti avec violence combien rien ne pouvait être naturel dans l'écriture. Et les sociologues actuels n'ont pas manqué d'établir un parallèle entre cette perte de confiance du romancier dans la naturalité de sa parole et la perte de confiance de la bourgeoisie dans la légitimité de ses pouvoirs.
Ces réserves d'autre part étaient sommaires, hâtives, insuffisantes. Ou bien j'admets que le roman "représente" le monde et Nathalie Sarraute, dans ces conditions, a parfaitement le droit de représenter telle partie du monde qu'elle aura choisie pour objet, par exemple ces mouvements fluides d'agression, de soumission, de capture qu'elle observe chez les êtres humains. Ou bien je lui refuse cette fonction de représentation (à Nathalie Sarraute en particulier, mais donc aussi au Nouveau Roman dans son ensemble) et on voit mal, alors, au nom de quelle innocence je pourrais prétendre, de mon côté, rendre compte de cette "dureté" ou "présence" du monde dont je parle ici.
Cependant ces répétitions, ces infimes variantes, ces coupures, ces retours en arrière, peuvent donner lieu à des modifications […] entraînant à la longue fort loin du point de départ.
Rien c’est n’importe quoi mais ce n’est pas rien pour autant.
Le long de la chevelure défaite, la brosse descend avec un bruit léger, qui tient du souffle et du crépitement.
Dans un silence se fait entendre le bruit d'un verre que l'on repose sur la petite table.
Après une intense réflexion intérieure, elle finit par dire, cachant son émotion : "Je la comprends."
Mais, dans bien des cas, c'est la petite femelle en rodage que cela excite le plus.
L'idée me traverse l'esprit qu'il pourrait s'agir en fait d'une morgue où mon corps sans vie a été transporté après un accident...
J'aimais lire les manuscrits, le moment où ils arrivent par la poste, tout frais, quand on les ouvre avec l'impression qu'il peut s'agir aussi bien d'un immortel chef-d'oeuvre.
Peut-on nommer cela, comme on parle de Nouveau Roman, une Nouvelle Autobiographie, terme qui a déjà rencontré quelque faveur ? Ou bien, de façon plus précise - selon la proposition dûment étayée d'un étudiant - une "autobiographie consciente", c'est-à-dire consciente de sa propre impossibilité constitutive, des fictions qui nécessairement la traversent, des manques et apories qui la minent, des passages réflexifs qui en cassent le mouvement anecdotique, et peut-être en un mot : consciente de son inconscience.