Alexandre Poussin

Peut-être finit-on par arriver à ses buts à force d’avancer doucement ? À force de patience, à force de lenteur ?

Ce n’est pas nous qui marchons, c’est la marche qui marche en nous.

La pauvreté peut être noble et digne, tandis que la misère est toujours une indigence physique et morale.

A l’aube, on entend les arbres pleurer les dernières gouttes de leur chagrin de pluie.
(Sylvain Tesson)

Voilà ce qu'il faut éviter : le ressentiment et la doléance. Car c'est ainsi que l'on risque vite de ne plus voir la montagne, mais la côte à gravir, le coucher de soleil, mais le froid qu'il annonce, la fin de l'horizon, mais le temps qu'il reste avant la halte.

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Voyager, c'est être en quête perpétuelle de ces secondes de quatrième dimension.
Donner du sens à sa vie et de la vie à ses sens.

La marche magnifie et embellit tout quand la voiture banalise et falsifie tout. La voiture choisifie le monde. Elle est un stade intermédiaire entre la télévision et la réalité, juste un peu moins confortable. La marche apporte un autre regard, en prise directe ; ce n'est pas l'objet qui change, c'est la façon de l'aborder. Elle ne rend pas les choses plus authentiques, elle nous les rend plus réelles, plus sensibles.

Il y a vraiment un dieu pour les marcheurs. C’est insensé comme les
choses arrivent quand on se met en situation de les laisser arriver. Il s’agit
d’être attentif, de les reconnaître, et d’y répondre. La vie nous porte autant
que nous la menons. Foncer tête baissée c’est aller dans le mur, se laisser
porter c’est aller nulle part, ce n’est pas vivre, c’est vivoter. Entre les deux,
il y a l’Aventure. Et l’Aventure est à l’angle de chacun de nos jours. C’est
plus un état d’esprit qu’un état de fait. Il suffit de lui laisser de la place. De
ne pas tout prévoir. Certains appellent ça de l’insouciance, les autres à qui
rien n’arrive appellent ça de la Chance et en font un nouveau dieu,
fantasque et impitoyable. Une fois là, une fois pas là. Nous préférons y voir,
dans le doute et en secret, une bonne volonté immanente des choses, qui
conspire à nous aider. Très discrètement. Mais présente et permanente.
Spirituelle. Et qui aime bien se marrer.

La vie nous porte autant que nous la menons.

La marche magnifie et embellit tout quand la voiture banalise et falsifie tout. La voiture chosifie le monde. Elle est un stade intermédiaire entre la télévision et la réalité, juste un peu moins confortable. La marche apporte un autre regard, en prise directe; ce n’est pas l’objet qui changé c’est la façon de l'aborder.

La vie est toujours plus inventive que les rêves.

La marche à pied demande un effort jusqu'à l'ultime pas.

C'est une bien grave erreur de croire que les choses sont finies sous prétexte que l'on s'approche du but et que l'on sent les prémices de l'arrivée.

Nous repartons à l'aube, le soleil dans le dos, derrière d'interminables ombres. Elles s'étirent devant nous, secouées de spasmes convulsifs : elles n'aiment pas se faire piétiner. Elles nous tiennent compagnie, nos ombres!

La promesse des aubes de bivouac, c'est la chaleur et la lumière du soleil, qui se répandent doucement dans la montagne.

Le chant des feuilles mortes éparpillées sous nos pas crépite sous la nef de notre "église verte".

La vallée s'ouvre comme les lignes d'une main. Nous prenons la ligne de la chance.

A 6 heures, le muezzin entonne sa prière vers La Mecque, aussitôt couvert par les vrombissements tonitruants des psalmodies bouddhistes diffusées par le haut-parleur dans la ville. Islam, hindouisme et bouddhisme se tolèrent ici dans la plus joviale cacophonie.

Solitude et silence : les deux mamelles du voyage intérieur...

Mais ce qui nous drogue, surtout, c'est l'horizon sans bornes. L'immuabilité des panoramas.