Amélie C. Astier

Je suis de ceux qui pensent que l’image et le son peuvent remplacer n’importe quelle parole. Les discours sont devenus tellement éphémères de nos jours.

Et peut-être que lorsque les gens ignorants arrêteront de donner leur avis sur tout et rien, on aura une chance de survivre dans cette jungle de "bons sentiments".

Les journalistes ne se rendent pas compte de ce que c'est pour une victime de revivre chaque jour la douleur endurée pendant des années, de revivre un cauchemar. On nous demande de guérir, d'apprendre à vivre avec ce passé, mais, quand on nous le balance à la figure sans aucune autre forme de protection, c'est difficile.

Le monde est four, les gens sont cons, et l'univers est injuste.

L'amour fait mal, c'est ce que les livres nous apprennent.

Ce n’est rien, je déclare d’une voix douce, il ne se passe rien. La maison, c’est l’endroit au monde où tu es le plus en sécurité, même quand je te fais à manger. 

Nous ne sommes pas inséparables Tristan, je poursuis avec calme. Nous sommes retrouvables.

Je ne suis pas prête à poursuivre une existence sans ce fou dont je suis raide dingue.
Je pourrais le faire, je pourrais vivre sans Tristan, parce que j’ai déjà vécu sans lui, je vis sans lui quand il n’est pas là, je ne suis pas dépendante mais je n’ai pas envie de ça. Je n’ai pas envie de vivre sans lui. 

Puis, je me dirige vers mon bureau pour dénicher une feuille vierge, une enveloppe timbrée, ainsi qu’un stylo, en espérant qu’il marche. J’en ai une grande collection, Dario appelle ça « le cimetière de l’écriture ». 

Je t’ai fait à partir de rien, alors prend soin de toi.
C’est ce qu’il me dit avant chacune de mes expéditions à l’étranger.  

Je n’ai rien dit à Vic, comment lui dire de toute façon ? Je ne peux pas la regarder et lui dire : « Je t’aime dans cette horreur. Je t’aime même lorsqu’il te fait mal, je t’aime lorsque tu pleures, lorsque tu es faible, lorsque je te réconforte, lorsque tu me fais rire, que tu m’émeus, et que tu me rends plus fort. Je t’aime lorsque tu me soutiens, lorsque tu me parles pour ne rien dire, lorsque le temps avec toi semble défiler plus lentement. Je t’aime lorsque tu me fais oublier où nous sommes, ce que nous vivons. Je t’aime surtout quand il n’y a que toi et moi, loin de tout, et de cette réalité qui nous bouffe, petit à petit. Je t’aime et je suis idiot de ne pas réussir à le dire. »

Je me fige, et perds le peu d'amusement qu'il avait réussi à créer. La colère, la rage, la déception s'en vont, quelque chose de plus profond s'installe, en l'espace de quelques secondes.
La peur.

Le courage, ce n'est pas seulement savoir manier une arme et aller affronter l'ennemi au combat, le courage, c'est aussi accepter sa propre réalité en assumant ses conséquences. C'est s'ouvrir au monde, même si on préférerait rester enfermé dans le sien. C'est savoir accepter la main qu'on nous tend, même si ça nous coûte.

Tu es plus forte que moi et tu sais pourquoi? Parce que tu parles. Quand quelque chose te blesse et qu'on te fait mal tu le dis. Quand les images autour de toi te choquent, tu l'avoues. Tu confies tes peurs et ta souffrance. Quand tu aimes, tu te relèves sans peur, même si c'est un plongeon en chute libre.

Dans ces pays qui souffrent, il y a des innocents qui souffrent aussi, persécutés par des monstres qui ne s'en soucient pas. N'oublie jamais ce que tu veux faire là-bas. Tu me l'as dit toi-même: témoigner.

Tu lui imposes déjà ta vie en étant ce que tu es, reprend Kolman. Elle n'a pas besoin d'être protégée. Ces femmes-là sont fortes, elles peuvent entendre. Même ça, même ce qu'il nous est arrivé. Elles gardent les secrets mieux que personne. Elles sont l'exutoire que tu n'auras plus jamais. Beaucoup disent qu'on trouve du réconfort auprès de personnes qui comprennent sans vivre ce que nous vivons. C'est vrai. L'étreinte et les mots qu'elles peuvent nous apporter en nous écoutant valent tout le reste. Elles nous permettent de ne pas devenir fous quand ça devient compliqué à gérer. Quand le passé devient présent.

Parfois on rencontre une personne, et on sait qu'il se passera des choses. On sait que nos deux corps s'appellent et ressentent cette alchimie. C'est ainsi, on n'a pas besoin de la comprendre. Certaines rencontres sont le fruit du hasard et ne durent qu'un instant et d'autres amènent à plus. Les coups de coeur peuvent être ainsi, ils peuvent se poursuivre l'espace d'une nuit et parfois toute une vie.

Queen a l'air de fonctionner comme moi, des "oui" et des "non", mélangé à des "parce que" qui finissent par des "mais".

Un coup la peine, puis la colère, suivi des larmes et du chagrin. On rembobine et on recommence. Voilà comment je suis ce soir, une cassette qu'on enclenche, qu'on laisse se visionner avant de la rembobiner pour qu'à nouveau, elle passe sur grand écran, exposant ses images. J'expose mes sentiments aux yeux de Dead comme une cassette, et il est le spectateur de ce film.

- Le mot magique ?
- Bouge ton cul.