Citations de Arcadi Strougatski (124)
On peut imaginer tout ce qu'on veut. La réalité n'est jamais telle qu'on l'imagine.
Il étudiait sur des stalkers estropiés des maladies, des difformités et des traumatismes inconnus jusque-là ; il se faisait payer en gloire : la gloire du premier médecin de la Terre à être spécialiste des maladies inhumaines chez les humains.
Soudain, il sourit et me tapota le dos : histoire de dire, n'aie pas peur, avec moi tu t'en sortiras et même si tu claques, de toute façon on ne meurt qu'une fois.
Les découvertes ont parfois des destins étranges.
Tout est exact. C'est simplement vous, Privalov,
qui n'êtes pas au courant. Les personnes qui figurent entre le numéro quatre et le numéro vingt-cinq inclus sont admises au travail de nuit à titre posthume. En raison de leurs mérites passés. C'est clair maintenant? J'étais légèrement ahuri, j'avais tout de même du mal à me faire à tout cela
La vieille n'était pas là. Le chat Vassili avait disparu. Dans le puits quelqu'un chantait à deux voix, c'était lugubre et déprimant. Une ennuyeuse petite pluie succéda à l'averse. La nuit tomba
"Il y a eu un vaisseau plus grand que le tien, maintenant il s'est recroquevillé, mais avant il avait été très grand. (…) Ensuite c'était comme ça.
Un fracas et un craquement à fendre l'âme éclatèrent dans l'intercom, et aussitôt un bébé hurla désespérément, sur la note la plus aiguë. À travers ce hurlement, à travers le fracas qui s'apaisait, les chocs, le tintement du verre qui se cassait, une voix d'homme suffocante appela, rauque :
– Marie… Marie… Ma… rie…
Le bébé criait à tue-tête, et pendant quelque temps on n'entendit rien d'autre. Puis parvint un bruissement, un gémissement étouffé. Quelqu'un rampait sur le sol parsemé d'éclats et de débris, quelque chose roula en
tintant.
– Choura… Où es-tu Choura… J'ai mal… Que s'est-il passé ? Où es-tu ? Je ne vois rien, Choura.. Mais réponds-moi ! Comme j'ai mal ! Aide-moi, Choura, je ne vois rien…
Et tout cela à travers les cris ininterrompus du bébé. Puis la femme se tut ; au bout de quelques minutes, le bébé se tut aussi. Je repris mon souffle et découvris que mes poings étaient serrés, mes ongles profondément
enfoncés dans mes paumes, mes mâchoires engourdies.
– Ça a duré un long moment, prononça solennellement le Petit. Je suis devenu fatigué à force de crier. Je me suis endormi. Quand je me suis réveillé, il faisait noir comme auparavant. J'avais froid. J'avais faim. Je voulais tellement manger et être au chaud que ça s'est fait."
- D'où est-ce que ça vient? demanda le Petit. Qu'est-ce que c'est, les rêves?
- Des combinaisons inexistantes d'impressions existantes, débitai-je d'un trait.
C'est à peu près dans cet esprit que je me mis à exposer à Maïka mes considérations, mais à ce moment nous remarquâmes que Wanderkhouzé était présent, probablement déjà depuis quelque temps, dans la cabine. Il se tenait debout, appuyé contre un mur, triturait ses favoris de lynx et nous observait avec l'expression méditativo-distraite d'un chameau.
Ce n'était pas le silence cotoneux d'un laboratoire acoustique qui fait bourdonner les oreilles ; pas non plus cet admirable silence d'une soirée terrestre à la campagne, rafraîchissant, baignant tendrement l'esprit, celui qui nous apaise et nous met en communion avec ce qu'il existe de mieux dans l'univers. Ce silence-ci était particulier - strident, transparent comme le vide, tendant tous les nerfs - le silence d'un monde immense, complètement désertique.
- Il y a ici beaucoup de traits communs avec la Terre, mais ce n'est pas la Terre. C'est là l'ennui avec les mondes de type terrestre. On se sent constamment trompé. Volé. Néanmoins, on peut s'y habituer (...)
Rien ne m'intéresse. Je m'amuse. Je ne suis ni dieu ni le démon. Je suis le chevalier Roumata d'Estor, un joyeux gentilhomme, accablé de caprices et de préjugés, habitué à la liberté dans tous les domaines. Vous vous rappellerez ?
Aucun État ne peut se développer à l'écart de la science, ses voisins l'anéantiraient. Sans arts et sans culture, un État n'est plus capable de pratiquer l'autocritique, il commence à encourager des tendances erronées, engendre à chaque seconde des hypocrites et des crapules, développe chez ses citoyens l'instinct de consommation et la présomption, pour finir, quand même, victime de voisins plus intelligents.
Non, ces visiteurs sont quand-même des gars corrects. Il est vrai qu’ils ont fait plein de saloperies, mais ils en ont déterminé eux-mêmes la limite. Parce que même le « duvet brûlant » ne vient pas de la Zone sur notre côté, jamais de la vie, bien qu’on voie que le vent le balade dans tous les sens…
Pour moi c’est autre chose : qu’est-ce que j’irais chercher chez vous en Europe ? Votre ennui ? On se crève dans la journée, on regarde la télé le soir, la nuit vient, on couche avec une nana odieuse pour engendrer des avortons. Vos grèves, vos manifestations, votre putain de politique… Je m’en tape de votre Europe de merde.
Tout le malheur réside dans le fait que nous ne voyons pas les années passer, pensait-il. Non, les années c’est de la foutaise, nous ne remarquons pas les changements. Nous savons que tout change dès l’enfance, on nous apprend que tout change, nous avons vu tout changer, de nos propres yeux, plusieurs fois, et cependant, nous sommes parfaitement incapables de saisir le moment où le changement se produit.
Elles ont peur, les grosses têtes… Comme il se doit. Ces savants doivent même avoir plus peur que nous tous, les gens simples réunis. Parce que nous, nous ne comprenons rien à rien, tandis qu’eux, au moins, ils comprennent à quel point ils ne comprennent rien. Ils regardent dans cet abîme sans fond et savent qu’inévitablement ils doivent y descendre. Mais comment descendre, qu’est-ce qui se trouve au fond et, surtout, pourra-t-on remonter après ?…
Il savait que des milliards et des milliards de gens ignoraient tout et ne voulaient rien savoir, et que, même s’ils l’apprenaient, ils auraient peur pendant une dizaine de minutes et reviendraient aussitôt à leur petit train-train.
"Tu dois créer le bien à partir du mal, car c'est le seul moyen pour le faire "
Robbert Penn Warren
" C'est ça les SIC?
- Oui, dit Akimov. SIC. Système d'Investigateur Cybernétique. En fait, ce sont des centaures. Ils sont beaux?"
Elle chuchota :
" Ils sont beaux! Tu sais à quoi ils ressemblent? A des mantes religieuses.
(L'épreuve du "SIC")