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Citations de Aurélien Delsaux (84)


La chanson de l’harmonica on dirait qu’elle arrache la tapisserie pourrie, qu’elle pousse les murs, qu’elle écarte tout, qu’elle invite le vent dans la chambre, et le soleil, et que c’est plus l’hiver ici, il faut bien bon.
Ça dure pas, mais il fait bien bon.
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Longtemps elle attendit, reste d'espérance humaine attaché au fond d'elle comme un morceau de beurre brûlé au fond de la poêle, qu'un inconnu entre chez elle sans frapper, qu'il la reconnaisse, l'appelle par son nom, l'apprivoise, la caresse, qu'il fasse chez elle sa demeure. L'attendit comme la plaine attend la neige.
Maintenant elle ne sait plus. Elle n'attend plus personne. Elle n'attend plus rien maintenant. Et les seuls hôtes qui prennent ici leurs aises sont les quelques fantômes qui peuplent ses nuits, dont elle reconnait par éclairs les figures.
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"La nouvelle tomba en moi, avec ce son mou du galet jeté dans la mare. Dans le silence de la vase une fois leur obscure retraite atteinte, y remuent des bêtes étranges".
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Il poursuivit à mi-voix :
Fais gaffe à tous ceux-là, mon garçon -
Le sculpteur distribua un regard nerveux sur la foule.
Sont gentils, ne sont pas des brutes, mais sont quand même des bêtes. Pas des méchants : des bêtes. Comme nous autres - en plus coriace, en moins dégrossi ! A la longue, ils t'auront à la bonne. En attendant -
Gottschalk fit la moue ; et moins fort encore :
En attendant ce sont des bêtes je te dis. des vraies : pas des fauves, des petits gorets qui couinent et et qui mordent. -
( p 183)
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Elle relève la tête et jette un coup d’œil à ce qui reste visible du miroir et qui lui semble d'abord une autre eau, verticale.
Quelqu'un est là.
Elle y reconnaît la vieille. Encore là.
Elle la regarde dans les yeux. Elle en a peur. Elle a peur de cette présence furtive, qu'elle croise ici tous les jours, sans jamais vraiment s'y attendre. Après persistera l'impression que quelqu'un habite avec elle, la suit, d'un pas à peine, moins que d'un pas, que quelqu'un habite au-dedans d'elle, la suit, comme une ombre intérieure.
Elle a peur de ce regard qui, dès qu'elle passe là, dès qu'elle relève la tête, la regarde et la reconnaît.
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En vérité, quand ils se seront débarrassés d'elle, quand recommencera la guerre, quand tous se saigneront les uns les autres, ils s'endormiront dans les larmes, ceux-là qui chassaient l'araignée de leur séjour, mais dans leur cœur hébergeaient des scorpions. (page 110)
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Elle regarde le fond de la cuvette et s'y reconnaît, comme au lavabo. Elle s'agenouille, se caresse la joue. Elle appelle par l'épais tuyau les bêtes des égouts, où tout se rejoint, s'agglomère, où dorment les cauchemars de la ville.
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Elle pose sa paume contre la vitre froide, une buée légère s'imprime autour de ses doigts, qui s'efface rapidement. Elle aimerait que la nuit déjà revienne, et la toucher. Elle rêve au premier flocon de neige, qu'elle verrait seule, la première, sous quoi tout disparaîtra. Mais le ciel demeure une plaque grise ,sans aspérité, sans nuance, et que rien ne semble pouvoir crever.
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"Mon fils croyait en la Trinité et ma fille, en l'amour mâtiné d'un rapport harmonieux à l'argent. Ces phénomènes pouvaient être assimilés à des passages obligés de leur développement psychologique. Ils me donnaient l'impression d'une sortie de route ou d'un coup d'arrêt - d'un échec en tout cas, de mon terrible échec".
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En vérité, je ne craignais ni un attentat ni une agression. Je craignais plutôt une rencontre, un simple regard. Je craignais que, dans la masse des inconnus, dans notre promiscuité, un de ces étrangers furtivement croisés me regarde, me regarde vraiment. Il y avait peu de risques, ce genre de choses n'arrivait plus guère, me semblait-il, mais je n'aurais su comment réagir. Hors cadre familial et professionnel, je ne savais plus très bien comment
entrer en contact avec un être humain.
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Il laisse retomber ses épaules, il s'allongea, il ferma les yeux, et au puissant soleil lui sembla pour la première fois voir la couleur de ses paupières, la lumière à travers sa peau fine ça fait quelque chose de rose, comme une baignade les yeux ouverts dans un bain de quoi ? Sucre, roses, barbapa ?
Et puis juste il se dit C'est la couleur à l'intérieur de moi et ça l'étonne, c'est plus doux que ce qu'il croyait.
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Aurélien Delsaux
Je craignais plutôt une rencontre, un simple regard. Je craignais que dans la masse des inconnus, dans notre promiscuité, un de ces étrangers furtivement croisés me regarde, me regarde vraiment. Il y avait peu de risques, ce genre de choses n’arrivaient plus guère, me semblait-il, mais je n’aurais su comment réagie. Hors cadre familial et professionnel, je ne savais plus très bien comment entrer en contact avec un être humain. Page 53
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Tout va bien ? demandai-je dans un grand sourire.
Blanche dit aux enfants d’aller dans leur chambre. Ils se levèrent aussitôt, et Laetitia se colla contre moi, tendrement. Je ne voulais pas qu’elle sentît trop ma transpiration ni mon chagrin, alors je la repoussais doucement et doucement lui dis Obéis à maman la chérie.
Je m’assis face à Blanche.
Tout va bien ? redemandai-je en vain.
Blanche ne savait vraisemblablement pas comment commencer. Le mot cancer clignotait en moi. J’aurais voulu lui prendre la main, mais elle gardait les siennes sous la table.
Elle prit une grande inspiration. Je crus qu’elle allait me quitter, réclamer une pause en m’annonçant qu’elle avait rencontré quelqu’un –, et je me blâmais déjà de n’avoir pas vu le coup venir. Mais elle dit, tout à trac, J’ai très peur, j’ai besoin d’être protégée, alors j’ai pris un chien.
Quelle race ? m’inquiétai-je sans comprendre.
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C’est en sortant du tunnel que j’entendis la présentatrice interrompre le programme pour m’annoncer à voix basse la mort de Jean-Jacques Goldman.
La nouvelle tomba en moi., avec ce son mou du galet jeté dans la mare. Dans le silence de la vase, une fois leur obscure retraite atteinte, y remuent des bêtes étranges.
J’éclatai en sanglots, mais doucement, le pus doucement possible, pour ne déranger personne, pour ne pas dévier de ma trajectoire. Je coupai la radio et mon portable.
Le trafic s’était soudain densifié. Tous les phares et tous les lampadaires s’étaient allumés. La nuit et la ville nous avaient avalés.
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Incipit :
Les vacances étaient terminées jusque-là tout s’était bien passé. Je me souviens des chiffres d’alors, je voudrais les saluer : il allait bientôt être dix-huit heures. Blanche, ma femme chérie, somnolait à mon côté, nos deux enfants dormaient à l’arrière, je roulais sur la flambant neuve A89, j’avais quarante-cinq ans, j’avais enregistré sur le régulateur la vitesse maximale autorisée, le tableau de bord annonçait quarante degrés à l’extérieur.
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Lesélieux était pas le pire des profs quand même. Abdoul avait hésité quand au début de l’année il avait proposé de s’inscrire aux quatre sorties théâtre – facultatives, il avait dit. Mais bon, le car était payé, la place on la payait avec la carte Région Jeune, ça faisait une occasion de sortie. Faudrait être con quand même. [...]
C’était la toute première fois de sa vie qu’Abdoul allait au théâtre. C’était la toute première fois de sa vie qu’Abdoul allait à Lyon en fait. Il s’était pas fait spécialement beau, mais en s’habillant le matin il avait pas choisi ses habits les plus moches. Il avait même mis du gel discrétos. [...]
D’abord il était pas à l’aise parce que l’ouvreuse en regardant son billet lui a dit En face monsieur, parce que le billet que le prof lui avait donné dans le car portait un numéro impair, et que là c’était l’entrée pour les numéros pairs.
Il a regardé l’ouvreuse qui lui faisait un grand sourire, qui lui a montré l’escalier symétrique.
Traversant le hall, il a vu comme les gens autour de lui sont sapés, en mode super classe, comme ils sont beaux, comme ça sent bon les vrais parfums, pas juste le déo. Lui en fait il a presque fait son max mais il trouve que ça fait tache à côté. Quand même : il est content d’être là, au milieu de ces gens. Ça le rend fier.
C’est quand il a monté les marches de l’escalier qu’il s’est senti justifié.
Y a eu une sonnerie. Il a senti le flux qui se pressait un peu autour de lui, au bas de l’escalier. Il s’est laissé porter. Il a monté les marches poussé par tous les autres, comme si les marches le montaient. Appuyé contre la rambarde, il a pu se retourner, montant, regarder le grand hall, sa lumière, son rouge et or, les mosaïques au sol, c’était vraiment la classe. Il s’est senti encore plus fier. Comme s’il était le premier à monter cet escalier. Le premier à se faire beau pour le théâtre. Le premier à aller au spectacle. Il avait gagné ça. Comme s’il était là pour tous les autres avant qui avaient pas pu y aller, qui avaient pas eu droit.
C’était carrément sa place aussi.
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Le prof a fini par répondre, la regardait droit, pas méchant : triste, mais pas triste pour lui, triste pour elle, genre condoléances. Il a avalé sa salive.
Non, je ne suis pas juif, je pleure juste parce que je suis français, n’est-ce pas, quand comme ça si horriblement on meurt en France je pleure, quand on meurt en France comme ça sous des mains françaises je pleure, je pleure, et alors oui je suis juif, je suis juif ou autre chose, ou tout ce que vous voulez, alors je suis de ceux qui meurent parce que je suis français, vous comprenez, n’est-ce pas, j’espère que vous comprenez, il faut absolument que vous compreniez ça.
Sa phrase longue elle a atterri avec une voix vraiment douce et tremblante, de nouveau c’était plus le prof qui parlait, c’était comme un secret super important, c’était comme un bout du cœur intime de sa vie qu’il leur confiait.
Il les a tous regardés.
Je suis sûr que vous comprenez.
Selima savait plus où se foutre, Léonie non plus, et aucun élève en fait. On sentait que la classe voulait maintenant juste prendre le prof dans ses bras.
Un enfant qui meurt est un enfant qui meurt, il a dit. C’est un vers d’une chanson, vous savez ? Mais personne savait, personne connaissait la chanson, il a pas osé chanter, il pouvait pas, ses yeux seraient redevenus deux grosses gouttes d’eau.
Il a attendu un peu. Là, Selima a rien dit.
C’était y a pas un siècle, et déjà ça recommence, vous comprenez, n’est-ce pas ?
Un long silence, mais un peu, un tout petit peu plus chaud, un silence un peu, un tout petit peu plus humain, un petit peu plus un silence d’homme, ils ont senti ça autour d’eux.
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Il aurait bien aimé raconter aussi bien que pépé racontait. Les tirer par les mots comme pépé faisait pour lui. ça faisait comme quelqu'un qui vous prend par la main, qui vous fait juste faire trois pas avec quelques phrases, et plouf! devant vous c'est un nouveau pays, et vous avez envie d'y demeurer un peu
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Sa voix, la voix du vieux, elle était dynamique, sautillante, marrante parfois, comme si elle était restée jeune, bien emmitouflée dans un vieux corps plus mou, moelleux peut-être, confortable pour une voix.
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