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Citations de Baptiste Morizot (159)


Osons ici le mode "slogan de manif" : il ne s'agit pas de faire converger fin du mois et fin du monde. Mais bien de précipiter la fin du moi pour activer la fin de l'immonde. Et d'ouvrir ainsi à une faim du monde, une soif de s'y inscrire en complice, en tisseur, en convive. Il est donc temps de changer les banderoles, camarades, et d'y graffer : Fin du moi - faim du monde : même combo !
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C'est peut-être un invariant de la rencontre animale : quand on croise un animal sauvage par hasard dans la forêt, une biche qui lève les yeux vers soi, on a l'impression d'un don, un don très particulier, sans intention de donner, sans possibilité de se l'approprier. C'est ce qu'en phénoménologie on appelle un don pur : personne n'a voulu donner, personne n'a rien perdu en donnant, et le don ne vous appartient pas, il pourra se donner à d'autres. On sent monter dedans une improbable gratitude. Juste l'envie de rendre grâce pour cet imprévu aussi beau qui en cet instantexiste et se donne aux yeux.
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Car les animaux ne sont pas seulement dignes d'une attention infantile ou morale : ils sont les cohabitants de la terre avec lesquels nous partageons une ascendance, l'énigme d'être vivant, et la responsabilité de cohabiter décemment. Le mystère d'être un corps, un corps qui interprète et vit sa vie, est partagé par tout le vivant : c'est la condition vitale universelle et c'est elle qui mérite d'appeler le sentiment d'appartenance le plus puissant.
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Par "crise de la sensibilité", j'entends un appauvrissement de ce que nous pouvons sentir, percevoir, comprendre, et tisser comme relations à l'égard du vivant. Une réduction de de la gamme d'affects, de percepts, de concepts, de pratiques nous reliant à lui. Nous avons une multitude de mots, de types de relations, de types d'affects pour qualifier les relations entre humains, entre collectifs, entre institutions, avec les objets techniques ou les œuvres d'art, mais bien moins pour nos relations au vivant. Cet appauvrissement de l'empan de sensibilité envers le vivant, c'est-à-dire des formes d'attention et des qualités de disponibilité à son égard, est conjointement un effet et une part des causes de la crise écologique qui est la nôtre.
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Les pollinisateurs font littéralement, ce que nous appelons, candides, "le printemps", comme si c'était un cadeau de l'univers, ou du soleil : non, c'est leur action bourdonnante, invisible et planétaire, qui appelle chaque année au monde, à la sortie de l'hiver, les fleurs, les fruits, les dons de la terre, et leur retour immémorial. Les pollinisateurs, abeilles, bourdons, oiseaux, ne sont pas posées comme des meubles sur le décor naturel et immuable des saisons : ils fabriquent cette saison dans ce qu'elle a de vivant.
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Il y a quelque chose de triste dans le fait que les dix chants d’oiseaux différents qu’on entend chaque jour ne parviennent pas au cerveau autrement que comme bruit blanc ou au mieux évoquent un nom d’oiseau vide de sens : c’est comme des langues anciennes que plus personne ne parlerait et dont les trésors sont invisibles. (p. 18-19)
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Baptiste Morizot
Car les loups, à part dans les fables, ne se vengent pas des bergers, et c'est du fait de leur panique que les brebis dérochent: parce qu'elles sont incapables de se défendre face au loup, de lutter ou fuir intelligemment comme le faisaient très bien leurs ancêtres les mouflons sauvages. Et si elles sont folles de terreur face au loup, au point de sauter dans le vide, c'est parce que les bergers les ont rendues inoffensives depuis des milliers d'années, par la domestication, pour pouvoir plus facilement les diriger, les tondre, et les manger. De sorte que haïr le loup lorsque des brebis sautent dans le précipice, c'est oublier dans cette affaire la responsabilité des hommes qui les ont désarmées pour leur propre intérêt.
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Un premier symptôme de cette crise de la sensibilité, peut-être le plus spectaculaire, est exprimé dans la notion d'"extinction de l'expérience de la nature" proposée par l'écrivain et lépidoptériste Robert Pyle : la disparition de relations quotidiennes et vécues au vivant. Une étude récente montre ainsi qu'un enfant nord-américain entre 4 et 10 ans est capable de reconnaître et distinguer en un clin d’œil expert plus de mille logos de marques, mais n'est pas en mesure d'identifier les feuilles de dix plantes de sa région. p18
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Baptiste Morizot
Notre culture hérite d'un dualisme qui sépare l'humain et les autres animaux. Pourtant, depuis Darwin, on sait que toutes les formes de vie sont apparentées, mais cette thèse n'a finalement jamais été menée à son accomplissement philosophique. Qu'est-ce que cela change d'intérioriser cette ascendance commune ? Qu'est-ce que cela implique pour nos relations envers les autres êtres vivants ? C'est l'une des raisons pour lesquelles nous faisons face à tant de crises écologiques.

Science et vie n°1233
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Un seul ours debout peut faire se lever le vivant tout entier derrière lui.
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Baptiste Morizot
Quand le loup revient, il faut changer sa manière de travailler, il faut s'adapter, alors même que la profession est déjà dans une situation économique compliquée à cause de la mondialisation, qui fait que chez nous, l'agneau anglais ou néo-zélandais, transport compris, est moins cher en supermarché que celui élevé dans la prairie derrière le supermarché.
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Le pistage comme manière d'arpenter donne à voir les limites insoupçonnées de nos pratiques familières de randonnée. Par contraste avec la forme d'attention développée par le pistage, le randonneur apparaît parfois comme un personnage insensible aux autres vivants, un voyageur qui ne verrait que lui en traversant pourtant les habitats enchevêtrés des autres, érigés en son terrain de jeu personnel et de ressourcement spirituel.
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Rendre visible, ou inventer, le fait que le vivant est la matrice insubstituable de l'existence terrestre, et par là de la vie humaine, est un projet philosophique du politique, parce qu'il travaille contre la dévaluation invisibilité du monde vivant en “nature“bon marché d'un côté, et en “nature“ victimisée de l’autre.
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L’attente est solide, la crête palpite, un seul épicéa l’habite, et personne ne s’y profile. Je me souviens alors de la première fois que j’ai vu un loup, c’était un loup noir sur une crête, c’était son profil sur l’air bleu qui me l’avait fait saisir, alors que sa couleur dans le crépuscule le faisait se confondre avec les buissons de sauge de la Lamar Valley dans le Montana.
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Mais c'est aussi une crise d'autre chose, de plus discret, et peut-être de plus fondamental. Ce point aveugle, j'en fait l'hypothèse, c'est que la crise écologique actuelle, plus qu'une crise des sociétés humaines d'un côté, ou des êtres vivants de l'autre, est une crise de nos relations au vivant. p16
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Les simples, ce sont les plantes sauvages médicinales, aromatiques ou nutritives qu’on trouve partout dans les friches, les forêts, les interstices de béton et les prairies. Des chercheurs ont découvert à El Sidron les restes d’un jeune Néandertalien, mort il y a quelque cinquante mille ans, dont le tartre dentaire montre qu’il mâchait des bourgeons de peupliers dont les propriétés antalgiques et anti-inflammatoires ont été récemment découvertes par les biologistes. (p. 156)
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À l'aube, partir juste pour rencontrer, sans savoir qui ni quoi. C'est un nom possible de la vie.
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La machine qui pérennise ces pratiques s’appelle la PAC : “Politique agricole commune“. Avec ses 60 milliards d'euros distribués par an, c'est le dispositif de subvention international Ie plus massif pour piloter les relations au vivant en contexte agricole.
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« Car ce que nous force à penser la crise écologique, ce n’est pas le retour d’une Nature qui dicte leurs lois aux humains, comme dans le mythe moderne dont la démocratie moderne revendique de s’être émancipée. Il s’agit de tout autre chose : c’est l’appel des interdépendances qui indiquent ses limites à la gamme des possibles que le collectif démocratique humain peut explorer. Les limites écologiques ne sont pas des contraintes extérieures au politique humain, mais les lignes de vie intérieures qui dessinent notre condition humaine de tissé : tissé aux autres formes de vie qui composent le milieu, dans un ubuntu des vivants. » (p. 274)
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On voit comment l'histoire complexe de notre rapport au vivant obscurcit qu'on peut faire du sens de nos interactions concrètes avec l'animal : ici le "surplus killing". néanmoins, si l'on ressaisit les acquis de l'enquête, il appartient que c'est la sélection artificielle qui est en grande partie la cause de l'asymétrie éco-éthologique dans la relation entre loups et brebis, à l'origine du surplus killing. Le loup et la brebis domestiquée sont des systèmes éthologiques qui ne se composent pas en équilibre, mais se décomposent mutuellement. Reste que les éleveurs actuels ne peuvent ni ne doivent être tenus pour responsable des effets du pastoralisme néolithique : nous avons fait des brebis sans défense, il faut les aimer ainsi. Conséquemment, il faut trouver des solutions adaptées pour une cohabitation effective avec le loup. Certaines espèces de moutons rustiques, pourtant, se défendent mieux face aux loups. Et les parcours techniques agropastoraux, lorsqu'ils sont intelligemment pensés pour être adaptés à la présence du loup (troupeaux plus petits, gardiennage accentué, parcage nocturne,dispositifs de défense....), sont capables, grâce à dix mille ans d'expériences accumulées, de rendre la prédation tolérable pour le pastoralisme, et de détourner massivement l'attention des loups vers les proies sauvages. Ce sont ces techniques, négligées depuis l'éradication des loups au 20° siècle, qui méritent d'être exhumées, pour repenser un pastoralisme résilient. L'éthologue Jean Marc Landry conclut : " Face au loup, il est nécessaire d'instaurer un système de prévention qui casse ce comportement de surplus killing afin de limiter les dégâts" (Landry, 2006, p207). Des expérimentations d'éthologie diplomatique qui trouveraient le moyen de limiter ce phénomène réduiraient en effet significativement les pertes liées au loup, et leur inflation émotionnelle. C'est l'archétype d'une mission diplomatique. (p83)
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