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Citations de Baronne Emmuska Orczy (30)


Mais elle appartenait à une race qui n’avait jamais compté la lâcheté parmi ses nombreux défauts. Durant ces courts instants où elle savait que sa vie ne tenait qu’à un fil, elle n’avait ni crié, ni perdu connaissance. Soudain la portière fut violemment ouverte et elle put distinguer vaguement des formes humaines qui s’agitaient. Elle demeura sans bouger, mais quand elle se sentit brusquement saisie au poignet elle dit calmement, avec un léger frémissement dans la voix :
– Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ? Un rire brutal fut la réponse.
– Qui nous sommes, ma charmante dame ? s’écria celui qui lui avait saisi le poignet et se trouvait maintenant à moitié hissé dans la voiture, nous sommes ceux qui trimons toute notre vie, sans jamais manger à notre faim, tandis que des gens comme vous voyagent dans de belles voitures et mangent plus qu’ils n’en peuvent. Ce que nous voulons ? Mais simplement le spectacle d’une si charmante dame comme vous, renversée dans la boue comme le sont nos mères et nos femmes, quand il leur arrive de se trouver sur le passage de votre voiture. N’est-ce pas cela, mes amis ?
– Oui-da ! répondirent-ils avec convoitise. Dans la boue, la demoiselle ! Sors-la, Adet ! Laisse-nous voir de quoi elle aura l’air, la figure dans la boue ! Vite, sortons-la !
Mais l’homme qui avait été ainsi apostrophé n’obéit pas immédiatement. Tenant toujours le poignet de la jeune fille, il l’attira contre lui et soudain lui jeta un de ses bras rude et barbouillé de poussière autour de la taille ; soulevant de l’autre son capuchon, il lui maintint son fin visage à hauteur du sien.
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– Mais Sir Percy t’aimait, Margot ?
– M’aimait ? Oui, Armand, il m’aimait, oui, à un certain moment, ou sans cela je ne l’aurais pas épousé. Je suis persuadée – elle parlait très vite comme si enfin elle était heureuse de se décharger d’un poids qui l’écrasait depuis
plusieurs mois – je suis persuadée que toi-même, comme tous les autres, tu pensais que j’épousais Sir Percy à cause de sa fortune, mais je t’assure, mon ami, qu’il n’en était rien. Il paraissait m’adorer avec une telle intensité de passion, que je me suis laissé toucher. Je n’avais jamais aimé personne, comme tu le sais ; j’avais vingt-quatre ans et j’en concluais qu’aimer n’était pas dans ma nature. Mais toujours il m’avait semblé que
ce devait être délicieux que d’être adorée aveuglément, passionnément, complètement... et le fait même que Percy était lourd et bête était une attraction de plus pour moi, car je pensais qu’il m’en appartiendrait davantage. Un homme intelligent aurait d’autres préoccupations, un homme ambitieux d’autres espoirs... Je croyais qu’un idiot m’adorerait et que là se
bornerait son horizon. J’étais prête à répondre à sa passion, Armand ; je me serais laissé aimer et j’aurais donné en retour une affection sans bornes...
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- Oh mon amie, vous n’y pensez pas, morbleu ! Quel est l’audacieux qui a osé vous toucher, hein ?
Lord Antony chercha à intervenir, mais il n’en eut pas le temps, car le jeune vicomte avait déjà fait rapidement quelques pas en avant :
– Monsieur, fit-il en mauvais anglais, après avoir commencé son petit discours par un salut profond, ma mère, la comtesse de Tournay de Basserive, a offensé madame qui, à ce que je vois, est votre femme ; je ne puis vous faire des excuses pour ma mère ; ce qu’elle fait est bien fait à mes yeux. Mais je suis disposé à vous offrir la réparation coutumière entre
hommes d’honneur.
Le jeune homme redressa sa taille élancée autant qu’il le put et il paraissait très énergique, très fier et très enflammé en contemplant les six pieds de somptuosité extravagante que représentait Sir Percy Blakeney.
– Mon Dieu, Sir Andrew, s’écria Marguerite, avec un de ses rires contagieux, regardez ce joli tableau ; le dindon anglais et le coq français.
La ressemblance était parfaite, le dindon anglais regardait du haut de sa grande taille avec effarement le joli petit coq français qui voltigeait autour de lui d’un air menaçant.
– Oh ! monsieur, dit enfin Sir Percy, en dévisageant le jeune Français à travers son lorgnon d’or avec un étonnement non déguisé, où, par le nom
du coucou, avez-vous appris à parler anglais ?
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– Tu serais en tous les cas ma courageuse sœur, tu te souviendrais que ce n’est pas au moment où la France est en péril que ses fils doivent la fuir.
Il parlait encore et sur le visage de sa sœur réapparaissait un sourire doux et juvénile, d’autant plus émotionnant qu’il semblait noyé dans les larmes.
– Oh ! Armand ! Je souhaiterais quelquefois que tu ne possèdes pas tant de vertus sublimes... Quelques vices mignons sont beaucoup moins dangereux et gênants, je t’assure. Mais tu seras prudent ?
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– Percy, dit-elle brusquement, je ne puis plus supporter cette existence d’angoisses continuelles. Pendant le mois qui vient de s’écouler, vous êtes allé deux fois en France. Vous jouez avec votre vie comme si elle n’appartenait qu’à vous seul. Quand donc renoncerez-vous à ces folles aventures et laisserez-vous les gens en péril se tirer d’affaire eux-mêmes ?
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Le moulin rouge conduit le bal
À peu près à la même heure de la soirée, le citoyen Lacaune, procureur syndic de la commune de Choisy, passait par une épreuve beaucoup plus pénible que celle de son subordonné de Manderieu.
Il avait eu deux heures de joie sans mélange lorsque le capitaine Cabel s’était présenté à l’hôtel de ville porteur de nouvelles fantastiques : il avait réussi à capturer cet abominable espion anglais, le Mouron Rouge, et l’avait amené à Choisy ficelé, en croupe de son sergent, blessé et presque mort
après un combat terrible où Cabel et son escorte avaient fait des prodiges de valeur. Le brave procureur faillit en avoir une attaque d’apoplexie.
Il donna l’ordre de porter l’espion ligoté dans son bureau.
On le jeta dans un coin comme un ballot de chiffons et il contempla avec un étonnement extrême cette forme inanimée qui semblait celle d’un misérable ivrogne. Son premier sentiment fut de douter que ce déchet d’humanité fût
l’extraordinaire aventurier dont le nom seul était redouté par la France tout entière
.
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– Lâche ! lâche, lâche !...
Ces mots retentirent, clairs, stridents, passionnés, dans un crescendo d’ardente indignation.
Le jeune homme, tremblant de rage, s’était dressé d’un bond. Penché au-dessus de la table de jeu, il essaya encore de crier l’insulte à l’homme qui lui faisait face afin que tout le monde l’entendît. Mais les sons refusaient de sortir de sa gorge contractée et, tout en ramassant d’une main frémissante les cartes éparpillées, comme s’il voulait les jeter à la figure de son interlocuteur, il parvint seulement à répéter d’une voix étranglée :
– Lâche !...
Autour d’eux, les parties de pharaon et de lansquenet s’étaient interrompues. Des mouvements divers se produisirent parmi les spectateurs de la scène. Les plus âgés essayèrent de s’interposer, mais les jeunes se contentèrent de rire. Ils savaient qu’à une querelle de ce genre, une seule conclusion était possible et attendaient ce qui allait suivre. Conciliation, arbitrage étaient hors de question. Delatour aurait dû savoir qu’il ne fallait point parler irrespectueusement d’Adèle de Montlhéry devant le jeune vicomte de Marny, dont l’engouement pour cette trop célèbre beauté défrayait depuis des mois les conversations de la cour et de la ville.
Adèle avait, sans contredit, beaucoup de charme ; elle n’avait pas moins d’habileté et d’artifice. Les Marny étaient riches, le petit vicomte très jeune, et le bel oiseau de proie était occupé pour l’instant à plumer ce pigeonneau frais émoulu du colombier ancestral.
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Il avait choisi cette voie. Ce qui au début n’avait été que le goût de l’aventure et du risque était devenu maintenant une obligation : aider les autres, aider ceux qui comptaient sur lui, réparer les injustices. Ce qu’il avait fait une fois, dix fois,
vingt fois, il le referait encore aussi longtemps qu’il y aurait des malheureux, d’innocentes victimes du cataclysme révolutionnaire.
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Il gardait toujours le silence vis-à-vis des siens. Seul son père était au courant. Le vieux meunier voyait de sombres nuages traverser le front de son fils et surprenait les imprécations qui échappaient à Pierre, pendant qu’il travaillait
pour le seigneur qu’il abhorrait.
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Le silence n’avait duré que quelques instants ; le moment d’après Pierre fut debout, et un cri, semblable à celui d’un boeuf égorgé, sortit de ses
entrailles.
– Au nom de Dieu ! hurla-t-il, cessons ces vaines palabres. N’avons-nous pas assez discuté pour satisfaire nos consciences angoissées ? L’heure a sonné de frapper ces damnés aristocrates, qui ont fait de nous ce que nous
sommes : des ignorants, misérables, écrasés, de pauvres diables vidés de tout sens, juste assez bons pour user nos doigts jusqu’à l’os et nos corps jusqu’à l’épuisement, pour qu’eux puissent se vautrer dans leurs plaisirs et leur luxe.
Frappez ! répéta-t-il, tandis que ses yeux lançaient des flammes et que sa respiration devenait haletante. Frappez ! comme les hommes et les femmes ont frappé ce fameux jour de juillet à Paris. Pour eux, la Bastille représentait la tyrannie – et ils l’ont abattue comme on décapiterait le tyran, et le despote, intimidé et tremblant, a cédé, il a eu peur de la juste fureur du peuple ! Ce qui est arrivé à Paris doit arriver à Nantes ! Le château du duc de Kernogan est notre Bastille ! Attaquons-le ce soir, et si cet arrogant aristocrate se défend, nous raserons sa demeure. Le jour, l’heure, tout nous est propice. Toutes nos dispositions sont prises, les voisins sont prêts. Frappons
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Au-dehors, la vie continuait dure et mauvaise. Des hommes se haïssaient, s’entre-déchiraient. Mais ce salon vieillot aux soieries passées formait à lui seul un univers, séparé du reste du monde et dont rien ne troublait l’atmosphère de paix et de parfaite beauté
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– Ah ! monsieur, il en est une précieuse entre toutes : celle du pauvre enfant prisonnier au Temple.
– Vous le plaignez, mademoiselle ?
– Comme toutes les Françaises de cœur. Ah !
s’écria-t-elle joignant les mains et fixant sur Armand ses yeux brillants, si votre valeureux Mouron Rouge pouvait seulement délivrer ce pauvre innocent, je le bénirais dans mon cœur, et si je pouvais lui être utile je l’y aiderais de toutes mes forces.
– Soyez bénie vous-même pour ces généreuses paroles, mademoiselle, dit Armand qui se laissa glisser à ses pieds. Je commençais à perdre confiance dans ma patrie égarée, à juger tous les Français abjects et les Françaises insensibles.
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- Il nous faut penser à l’avenir plutôt qu’au présent, mon cher, dit-il d’un ton net. Que sont quelques vies humaines auprès du but que nous nous proposons.
– Le retour à la monarchie, oui, je sais, murmura Saint-Just, mais en attendant...
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– ... J’ai entendu la lecture du nouveau décret que la Convention vient de voter. Les agents d’exécution du Comité de sûreté générale dont Héron est le chef ont, à dater de maintenant, toute latitude pour effectuer des visites domiciliaires et pleins pouvoirs pour agir contre «les ennemis du bonheur public ». Cette formule n’est-elle pas d’un vague admirable?
Nul n’est à l’abri de leurs soupçons. Qu’un homme dépense trop d’argent ou n’en dépense pas assez, qu’il rie aujourd’hui ou qu’il pleure demain, qu’il prenne le deuil d’un parent guillotiné ou qu’il se réjouisse de l’exécution d’un ennemi, en voilà assez pour le rendre suspect. Il est un mauvais exemple pour le peuple s’il est vêtu avec soin, il en est un autre s’il porte des vêtements sales et déchirés. Les agents de la Sûreté générale apprécieront eux-mêmes par quoi se reconnaît un ennemi du bonheur public et toutes les prisons s’ouvriront à leur ordre pour recevoir ceux qu’il leur plaira d’y envoyer. La loi leur donne en sus le droit d’interroger les prisonniers à part et sans témoins et, toute formalité supprimée, de les envoyer directement au Tribunal. Leur devoir est clair : «rabattre du gibier pour la guillotine». Ils doivent fournir à l’accusateur public des dossiers à dresser, aux tribunaux des victimes à condamner, à la place de la Révolution des spectacles tragiques pour distraire le peuple, et chaque tête en tombant leur rapportera trente-cinq livres. Ah ! si Héron et ses semblables travaillent ferme, ils pourront se faire de jolis revenus. Voilà ce qu’on appelle le progrès, ami Saint-Just.
- Mais c’est l’enfer déchaîné! s’exclama Saint-Just. Les gens de cœur ne s’uniront-ils pas pour renverser un gouvernement capable de telles iniquités et sauver tant de vies innocentes menacées ?
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En réponse à l’interrogation du jeune homme,
– C’est-à-dire, mon bon Saint-Just, que les deux hommes que vous voyez là, consultant paisiblement le programme de la soirée et prêts à
goûter les vers de feu monsieur Molière, se valent autant par leur ruse que par leur cruauté.
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« (…) je connaissais tous les détails de ce meurtre comme si je l’avais commis moi-même. Je dois même dire que je ne l’aurais pas mieux commis, quoique j’étudie l’art du crime depuis des années…"
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Le cœur d'une femme est un problème si compliqué à résoudre ; il n'est pas jusqu'à son possesseur qui ne soit souvent incapable de trouver la solution de cette énigme.
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Qu’à travers cette épreuve, elle eût pu connaître la joie et la douceur d’être aimée, c’était plus qu’elle ne méritait, et le souvenir des baisers brûlants que Delatour avait posés sur sa main était une compensation ineffable pour tout ce qu’elle aurait à souffrir.
(p. 120, Chapitre 18, “A la prison du Luxembourg”).
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Juillet, août, septembre avaient changé de nom ; on les appelait à présent : messidor, thermidor, fructidor. Mais, sous ces nouvelles appellations, ils continuaient à faire don à la terre des mêmes fleurs et des mêmes fruits. Messidor couvrait toujours les haies d’églantines sauvages, thermidor revêtait les champs dénudés d’un manteau étincelant de coquelicots écarlates, fructidor rougissait les hampes de l’oseille sauvage et mettait la première teinte vermeille sur les joues pâles des pêches mûrissantes.
(p. 41, Chapitre 5, “Une journée dans les bois”).
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Il s’interrompit brusquement. Inutile d’en dire davantage. Ils se comprenaient à demi-mot, ces hommes qui, si souvent, avaient bravé la mort ensemble, dans cette valeureuse Ligue du Mouron Rouge dont le but, en ces temps tragiques, était de secourir les innocents et les faibles. Les deux qui se trouvaient là, près du chef, dans cette mansarde obscure et misérable, étaient ses lieutenants les plus chers. Les autres n’étaient pas loin, éparpillés dans les environs, déguisés, occupés à quelque travail mercenaire afin d’entrer en contact avec les gens du pays ; se cachant dans des cabanes ou dans les bois, épiant, observant, tous aux ordres de Blakeney et prêts à répondre à son appel.
– Tenez, dit Sir Percy après avoir réfléchi un moment, voici, je crois, comment il vaut mieux opérer. La première chose à faire est d’aller trouver Hastings et Stowmaries afin qu’ils avertissent les autres et leur disent que notre centre de ralliement sera la ferme abandonnée des Quatre-Chênes, à un quart de lieue à droite de la route, avant d’arriver à Laragne. Trois de nos camarades s’y rendront et attendront là les instructions que je leur enverrai ultérieurement par Foulkes. Foulkes va partir tout de suite avec moi, car il faut que je sois de bonne heure à Laragne de façon à commencer demain matin le travail que le sieur Martineau m’a donné à faire dans son bois, à côté du ruisseau. Tony, je compte sur vous pour monter la garde autour des Amandiers, dès la première heure, demain matin, afin d’être au courant des faits et gestes du détachement, et vous viendrez me prévenir dès qu’il se mettra en marche. Foulkes me servira d’agent de liaison.
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