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Citations de Benoît Vitkine (178)


Le Maïdan avait été un cri de colère contre la corruption, l'injustice... Les habitants du Donbass partageaient ce cri, mais ils n'avaient que faire du discours nationaliste et chauvin qui l'accompagnait.
La menace d'enlever au russe son statut de langue officielle n'avait fait qu'accroître cette crispation. Seulement, personne n'était prêt à écouter. Alors ceux de l'Est s'étaient tournés vers ce qu'ils connaissaient : pendant que Kiev choisissait l'Europe et s'illusionnait en songeant à un avenir meilleur, le Donbass avait regardé vers Moscou et cherché refuge dans le passé.
L'ancienne mère patrie n'attendait que cela.
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Elle joue à la perfection. Les Occidentaux qui l'observent ne voient que son large sourire, ses mains ouvertes en signe d'amitié. Les autres, ceux qui connaissent les rites de la violence, voient parfaitement la lueur sauvage au fond de ses yeux bleus, plus meurtrière qu'une rafale de kalachnikov.
Le Technocrate réplique en prenant une voix tout aussi mielleuse :
- Le délai entre l'élection présidentielle et l'investiture est si long ! Il s'y passe toutes sortes d’événements inattendus. Je ne m'étais jamais rendu compte à quel point ces misérables trente jours pouvaient durer une éternité... J'espère vivement que nous pourrons assister tous les deux à ce moment si important pour le pays.
Ses cheveux sont d'un noir foncé, probablement teints et huilés, ramenés en arrière à l'aide d'une bonne couche de laque. Il pourrait être beau : des pommettes hautes, un nez aquilin, des lèvres fines, des yeux clairs... Un faux air de Pierce Brosnan, mais la conscience de sa supériorité s'affiche trop nettement sur son visage, le rend repoussant. Olena est heureuse que ce soit lui son ennemi le plus mortel. Parmi Les Loups, il est sans doute le plus intelligent, mais il l'a toujours sous-estimée. Sous leurs allures barbares, les autres ont au moins eu le bon sens d'accepter qu'une femme puisse jouer dans leur cour, les concurrencer, chasser le même gibier qu'eux. Lui, qui se prétend pourtant le plus européen de tous, ne l'a jamais compris.
- C'est aussi une période favorable à l'introspection, répond Olena. Chacun à la chance et le temps d'évaluer ses actions, de rectifier ses erreurs? De réfléchir aux amis qu'il s'est choisis...
Elle s'interrompt en voyant l'ambassadeur danois s'approcher du petit groupe qui s'est formé autour d'elle et du Technocrate. Résolument, elle tourne les talons et montre son dos à l'oligarque. Elle prend une profonde inspiration et d'un mouvement brusque du haut du corps elle projette sa poitrine vers l'avant en même temps qu'elle qu'elle tend une main chaude au diplomate scandinave.
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Henrik ressentait toujours le même creux dans l'estomac quand il pénétrait sur les terres de son enfance,si désespérément vides.La région avait fourni à l'URSS le charbon qu'on utilisait dans tout l'empire.Elle produisait plus d'acier que la Ruhr.Tout cela, l'industrialisation massive et éclair des années trente, l'héroïque déménagement des usines devant l'avancée nazie,il l'avait appris à l'école, les yeux emplis de fierté. En ce temps-là,la gloire du Donbass rejaillissait sur les mineurs et les métallos, ruisselait sur leurs enfants. Les entrées des mines et des usines étaient marquées par des fresques grandioses, des sculptures d'ouvriers aux muscles saillants, des étoiles écarlates. Tout s'était écroulé en quelques années. Le pays tout entier, et avec lui les mines,les usines. Le siècle nouveau renonçait à la houille,la Chine déferlait sur les marchés. (p.73)
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Il faut arrêter de dire que l'Ukraine est à deux heures de Paris, c'est faux, un abus de langage, désagréable pour ceux qui veulent y aller, un théâtre sanglant de guerre empêche, la montre est cassée, le maître des horloges s'appelle Vladimir Poutine ; ce temps là est mort pour l'instant..
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Ce n'est pas l'obus qu'on entend tomber qui nous tue. C'est celui d'après, celui qui va arriver ensuite...
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Levon représentait à lui seul la pointe avancée de la modernité de la ville, l'avant-garde du capitalisme à la sauce ukrainienne. Il n'y avait qu'à voir les Nike Air immaculées qu'il arborait pour l'enterrement du petit Sacha. Henrik suivait la progression du groupe d'Izmaïlov à la croissance du ventre de son vieil ami et à l'évolution de ses chaussures. Au milieu des années quatre-vingt-dix, il l'avait vu troquer ses grosses bottes de moujik contre des mocassins en croco verts ou rouges que même les mafieux de Las Vegas n'auraient osé porter. L'entrée de son patron dans le monde du business légal avait conduit Levon dans celui des Berluti, tout aussi luxueuses mais moins tape-à-l'oeil. Il sacrifiait à présent à la vague hipster en portant des baskets en toute occasion.
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Laissés sans surveillance et sans usage, les usines, les voies ferrées, les châteaux d'eau se sont affaissés, lacérés par les ronces. L'avidité des hommes a fait le reste. Tout ce qui pouvait être vendu -métal, briques, machines - l'a été. Les désespérés des villes et des villages voisins ont fini le travail, mettant à bas ces vestiges qui les narguaient, ces bâtiments dans lesquels ils avaient travaillé toute leur vie avant de se voir envoyés au rebut, perdant dans la même seconde leur travail, leur pays, leur dignité.
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Vous savez, l'Union soviétique a constitué un bond en avant pour les femmes, elles ont pu devenir ingénieures, scientifiques, ou même cosmonautes, tiens ! Mais dans l'intimité des foyers, dans les mentalités, ces changements étaient plus limités qu'ils n'en avaient l'air.
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Tout avait valdingué. Le Donbass s’était retrouvé d’un coup comme une baleine échouée sur le rivage, rouillé, inutile, trop grand pour le pays nouveau et inconnu auquel il appartenait désormais. Ses habitants avaient assisté au dépeçage de l’outil industriel. Les oligarques achetaient et vendaient les usines comme des jetons de poker, pendant que les maraudeurs en arrachaient le métal pour le revendre sur des marchés noirs de misère.
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On disait que les femmes slaves donnaient le meilleur d’elles-mêmes quand leurs hommes étaient à la dérive. En prison, à l’hôpital… Elles pouvaient accomplir des exploits, renverser des montagnes. Elles étaient pour eux l’épaule la plus solide et la plus douce qui soit.
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Il n'y avait alors plus de place pour les tièdes et les nuances. Des questions nouvelles étaient apparues et subitement tout le monde se devait d'avoir un avis: se sentait-on russe ou ukrainien ? Monde slave autoritaire ou Occident décadent ? Oligarques aux commandes ou gay prides sur les boulevards ? La haine était au coin de la rue, dans chaque cage d'escalier ; on formulait ces réponses avec de plus en plus de prudence ; les passages à tabac étaient monnaie courante... Plus tard, la guerre avait en quelque sorte remis les compteurs à zéro. On avait enterré les grandes idées et les espoirs fous, les questionnements, les identités tourmentées. On avait cessé de se disputer puisque seuls les bombes étaient capables de se faire entendre. On espérait plus que la survie. (P.146)
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Alors ceux de l'Est s'étaient tournés vers ce qu'ils connaissaient : pendant que Kiev choisissait l'Europe et s'illusionnait en songeant à un futur meilleur, le Donbass avait regardé vers Moscou et cherché refuge dans le passé.
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Ces vieilles femmes qui trompaient la mort en croquant de grosses parts de tarte avec leurs dernières dents accentuaient sa peine. Malgré leur enthousiasme un peu enfantin, malgré leur obstination à préserver dans la guerre l’illusion d’une vie normale. Elles étaient des survivantes. Le quartier était rempli de ces veuves impassibles. Le pays pouvait bien s’étriper, elles continueraient à fabriquer des confitures et à mariner des champignons. Leurs maris s’étaient agités toute leur vie, puis leurs cœurs avaient lâché, fatigués de tant donner à des corps trop massifs, à des vies trop brutales. Elles, elles restaient. Elles vivaient quinze ans, vingt ans de plus que leurs hommes. Et pendant vingt ans, elles enfilaient chaque jour les mêmes chaussons, les mêmes robes de chambre. Elles accomplissaient consciencieusement la routine de leurs petites vies. Elles y déployaient même une force surprenante.
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Le policier essaya de deviner si l'on distinguait dans ce regard les traces d'une folie à venir, d'un
traumatisme ,mais il ne voyait rien d'autre que la fatigue et cet air faussement bravache que tous les soldats arboraient pour masquer la peur.(p 164)
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C'est à la vulgarité qu'on juge le pouvoir [...] le luxe est un combat, une victoire, qu'il convient de célébrer avec bruit et fureur. Avec du champagne et de la vodka, pas avec de la camomille.
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Car celui qui frappe est meilleur.
Celui que l'on frappe et ligote, moins bon.
Ivan IV le Terrible
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Le pouvoir est une conquête qui ne s'arrête qu'à l'écrasement de l'adversaire.
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Il s'était surpris une fois, à se dire qu'il préférait le jaune et le bleu scintillant du drapeau ukrainien au si sérieux blanc-bleu-rouge russe.Que c'est comme ça, en réalité, qu'il avait choisi son allégeance à l'Ukraine. Que les Ukrainiens bordéliques et fantasques lui plaisaient plus que les russes soumis (...)( p.85)
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Il comprenait trop bien ce que la jeune femme disait de la guerre,.Quand il était rentré d'Afghanistan, il lui avait fallu plusieurs années pour ne plus ressentir la fadeur de la vie civile. Là-bas,à la guerre, tout était plus éclatant, les sentiments,les joies,les peines,la mort...même l'horreur. C'est pour cela qu'il s'était engagé dans la police, pour tenter de retrouver un peu de cette lumière crue qui exacerbait chaque sensation. (p.51)
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Que les cimetières, qu'ils soient soviétiques ou ukrainiens, étaient toujours le pire lieu du monde pour les mères.
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