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Citations de Carmen Posadas (79)


Elle doit en revanche se préoccuper de ce qui hante les hommes
lorsqu’ils sentent leur mort proche. Chacun réagit à sa manière.
D’aucuns consacrent le temps qui leur reste à faire la paix avec
Dieu et leurs êtres chers. D’autres préfèrent la mise en scène et
planifient leur départ dans les moindres détails, allant jusqu’à
choisir la musique de leurs obsèques (Mendelssohn pour l’introït,
Beethoven pour la fin…). Les non- croyants sélectionnent
les vers (de Benedetti ou de Lorca et, presque toujours,
de Jorge Manrique) qu’ils souhaitent qu’on récite devant leur
tombe couverte de fleurs. Certains se découvrent une vocation
de médium et laissent des lettres qui ne seront ouvertes que
lorsqu’ils seront passés de l’autre côté. Pour sa part, Olivia ne
compte rien faire de tout cela, car son projet concerne moins
l’au- delà que l’ici- bas et verra le jour avant sa mort et non après.
Comment organiser une mort ? Comment planifie- t-on son
assassinat ?
Elle a l’intention de s’y prendre comme elle l’a toujours fait,
en tirant des ficelles et en manipulant les êtres à la manière
d’un bon marionnettiste. « Et pour ça, je dois d’abord inviter
mes meurtriers potentiels à passer quelques jours avec moi,
envoyer cinq ou six cartons en prévision de ce sabbat particulier.
Il en reste quelques- uns je n’ai pas encore fini d’écrire.
Où les ai- je mis ? »
Elle gagne son bureau placé devant la fenêtre, de sorte qu’en
écrivant elle peut voir le jardin qui descend jusqu’à la mer bordée
de pins.
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Olivia allume une cigarette, la deuxième de la matinée, et
regarde autour d’elle. Elle n’a jamais été encline à la nostalgie,
mais songe que si sa mort n’avait pas été programmée
pour bientôt, il lui aurait fallu renoncer aux choses qu’elle
adore, à commencer par cette maison à Andratx, dans l’île de
Majorque, qu’elle a conçue pièce par pièce comme une oeuvre
d’art. Elle aurait dû déménager dans un logement infiniment
plus modeste, davantage « en accord avec sa nouvelle situation
». En d’autres termes, à quarante ans et des poussières,
elle repartirait de zéro et mènerait une vie médiocre dans une
conjoncture catastrophique.
« Bon, on dit que partir, c’est mourir un peu », pense- t-elle
en recrachant lentement la fumée de sa cigarette, comme pour
se persuader du bien- fondé de cette maxime.
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– Olivia, pour l’amour de Dieu ! Programmer ton propre
meurtre, mais quelle drôle d’idée ! Et puis, qui voudrait te
tuer ? Tout le monde t’aime. Je sais que tu adores te donner
des airs de tireuse de cartes et de prophétesse, mais là, malgré
tous tes efforts, tu feras chou blanc parce que personne ne
sait quand il va mourir. C’est une des rares consolations que
nous ayons dans cette vallée de larmes. « Veillez donc, car nul
ne connaît ni le jour ni l’heure. »
Si elle avait été présente, sa soeur Ágata aurait sans doute prononcé
ces mots (les mains jointes comme pour prier). Pauvre
petite Ágata, de deux ans sa cadette, mais qui en faisait quatre
ou cinq de plus. « Veillez donc, etc. » Érudite de la famille et
professeur de langue, Ágata se débrouillait aussi bien en littérature
qu’en philosophie, excellait à parler d’art et même d’histoire
sainte, ce qu’elle n’aurait pas manqué de faire dans ce cas
précis. Mais elle avait beau être savante, elle n’était ni observatrice
ni nuancée dans ses propos. Cette lacune avait été son
principal souci dans la vie, d’où sa situation. Si la gentille Ágata
avait été là, à essayer de lui démontrer que personne ne sait
quand il va mourir, Olivia lui aurait rétorqué qu’elle se trompait
et que le verset de la Bible qu’elle venait de citer lui donnait
raison. Il suffisait de l’analyser pour se rendre à l’évidence.
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« Je trouve vraiment curieux, se dit Olivia en souriant, qu’à
une époque où tout le monde consacre son imagination et des
sommes astronomiques à l’organisation des moments importants
de sa vie – anniversaire idiot, mariage, baptême ou toute
autre date commémorative –, personne à part moi n’ait songé
à préparer avec le même soin la mise en scène d’un événement
crucial, à savoir sa mort. »
– Ou plutôt mon assassinat, ajouta- t-elle à voix haute.
Elle sourit de nouveau, puis songea que l’un de ses plus
grands mérites dans cette vie ayant consisté à tout agencer
comme dans une pièce de théâtre (ses cinq mariages, ses amitiés
et plus d’un amour clandestin), elle allait aussi planifier
sa sortie sans omettre aucun détail.
« Qui a dit que l’assassinat est l’un des Beaux- Arts ? »
Dans son cas, ce serait vérifié. À coup sûr.
– Santa Madonna, Oli ! C’est fou ce que tu aimes faire ton
intéressante. Personne ne fête sa mort et encore moins son
assassinat. Ce petit discours provocateur est bien de toi ; à ce
que je vois, tu es encore prête à tout pour choquer l’assistance.
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"Il avait la moustache [...]si raide qu'une mouche aurait pu marcher dessus avec l'aisance d'un repris de justice sur le pont d'un navire de pirates"
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C'est vrai que les hommes qui ont l'air distingué et les cheveux gris fascinent les femmes, mais en revanche ils ne sont guère sympathiques aux maris, surtout quand ceux-ci sont chauves.
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La haine ouplutôt le mépris sont de puissants neutralisants de toute autre passion.
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La meilleure façon d'oublier des caresses coupables est de les noyer dans mille autres caresses,car pour oublier un pêché, le mieux est de le vider de tout contenu en le commettant mille fois.
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Il est incontestable que les fourneaux sont de bons alliés pour les confidences.Que devant un chaudron de sirop bouillant dans lequel flottent par exemple, des fleurs d'oranger ou peut-être aussi, des morceaux de potiron et autres délices,on finit par révéler à un ami ou à un maître ses secrets les plus intimes,comme le ferait un jeune barde en présence d'un druide.
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Mon Dieu, mourir d'un cancer, c'est malheureux, mais enfin c'est une chose qui guette plus ou moins le cinquième de l'humanité;périr congelé sur la Costa del Sol, en revanche,c'est carrément idiot.
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C'est toujours la même chose : l'un raconte ce qu'il croit que l'autre désire savoir de la famille, et l'autre écoute en faisant les commentaires aimables qu'il suppose qu'on attend de lui, et voilà comment tout le monde se condamne à l'ennui.
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[...] parfois, dans la vie, il vaut mieux ne pas poser de questions, surtout quand on soupçonne que la réponse ne vous conviendra pas.
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On lui avait donné une table dans un coin près de l'escalier en colimaçon, entourée d'une profusion de plantes. Une feuille de kentia lui chatouillait la nuque s'il se penchait du côté gauche, et par la spirale des marches montaient des odeurs mêmées de chili con carne, de gnocchis aux quatre fromages et de soufflé à la mandarine, mais, au moins, on ne l'avait pas condamné aux régions antarctiques, à la salle d'en bas soit, en d'autres termes, aux ténèbres où les maîtres d'hôtel relèguent les parias.
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Savoir de quel pied boite l’ennemi est toujours utile au moment de l’affronter.

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Une dame riche ayant des amants est une grande dame ; une femme pauvre et volage n’est en revanche qu’une garce.
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On m'assure que ce sera une mort sans douleur. Il paraît qu'il suffit de fermer les yeux et d'attendre dix à douze secondes. J'entendrai d'abord le sifflement de la lame, puis un bref souffle d'air et, enfin, un coup sec, rien de plus. Nous avons répété hier dans les moindres détails le comportement à adopter avant de monter à l'échafaud. Car là où je me trouve à présent, dans la prison de la Force, à Paris, nous mettons notre mort en scène.
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Ils pourront dire ce qu'ils voudront, on a déjà raconté tellement sur mon compte...
Je ne regrette rien.
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