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Critiques de Cécile Ladjali (223)
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Shâb ou la nuit

Née à Lausanne en 1971, de mère iranienne, Cécile Ladjali est agrégée de lettres modernes. Elle vit à Paris, où elle enseigne la littérature dans le secondaire ainsi qu'à la Sorbonne nouvelle.

Ce livre est la quête d’une identité à travers les mots, l’écriture, son autobiographie. Le titre, Shâb, est le mot persan qui signifie la nuit. La nuit dans ce roman, c'est le secret…

Le secret qu’elle devine tout au long de sa vie. On lui a toujours dit qu’elle était née dans une grande maison en Suisse. Qu'il y avait des enfants qui naissaient dans les ventres et d'autres dans les grandes maisons…



Un très beau roman sur l’adoption, sur les origines, sur les conséquences des non-dits. (Ses parents, un couple franco-algérien voulant la protéger.)

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Aral





La mer d'Aral dans les années 70 et 80, se désèche, s'évapore ,n'étant plus alimentée en eaux. C'est au bord de celle-ci que vivent deux enfants; Alexeï et Zéna. Cécile Ladjali nous fait sentir la tragédie de cette mer, qui n'en n'est plus une, pour les gens aux alentours, les pêcheurs, les chantiers navals, la vie s'en va. Une terrible histoire, un grand roman !
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Les vies d'Emily Pearl

Roman surprenant qui commence comme un roman de Jane Austen, mais on est rapidement détrompé: il y a une certaine perversité, un pessimisme voire un fatalisme dans ces personnages qui sont parfois difficiles à cautionner. Mais on comprend peu à peu que la fuite de sa sœur la laisse extrêmement malheureuse, avec un intense sentiment d'abandon face à sa condition, à ses parents rustres et à son amant et amour impossible. Écriture sérieuse, un peu maniérée parfois. J'ai cependant apprécié ce moment.
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Les vies d'Emily Pearl

L'Histoire:

Ce roman se passe en Angleterre à la fin du XIXe siècle.

Emily Pearl est fille d'ouvriers et son avenir ne lui offre pas beaucoup d'espoirs.

Elle est embauchée comme préceptrice du fils de Lord Auskin, s'installe dans ce manoir et commence alors à rédiger son journal.

Elle y parle des autres employés, de son attirance pour Lord Auskin, de son existence qui ne lui convient pas...

Car sa condition ne lui permet pas d'avoir de contrôle sur sa vie alors ce journal, qu'elle va volontairement laisser trainer, va lui servir à manipuler celle des autres.

Emily Pearl reçoit aussi régulièrement des lettres de sa soeur, Virginia, partie faire sa vie à Londres puis aux Etats-Unis.

Elle est admirative et envieuse de cette soeur libre, engagée et apparamment heureuse.

Dans son journal, elle va donc introduire des passages de ces lettres au milieu du récit de son existence si terne.

Et c'est à travers le regard d'Emily, qu'on va suivre la vie de ces protagonistes et cela réserve bien des surprises...



Mon avis:

Le récit avance, et la lectrice que je suis se fait prendre dans la toile tissée par Emily Pearl(...)


Lien : http://www.livr-esse.com
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Les vies d'Emily Pearl

Angleterre, 1898. Emily Pearl entre au service de Lord Auskin en devenant la gouvernante de Terence, un garçon de 7 ans dont la mère est morte à sa naissance. De nature rêveuse et insatisfaite, elle rédige un journal dans lequel elle dépose ses frustrations, ses correspondances, ses souvenirs, comme un flux monocorde, sans ponctuation, mais avec de fausses accusations.



***************

Nul n'a omis de remarquer le style victorien de cette histoire, tragique histoire (je cite de mémoire Malice et Lou, mais j'en oublie - il faudrait que quelqu'un se dévoue pour réaliser une page qui présenterait tous les billets de lecture sous les titres des livres appréciés...!).



Les prénoms des personnages féminins : Emily (Brönte ?) , Virginia (Wolf ?), y donne une touche très époque victorienne... Que de clins d'oeil en effet. Emily se raccroche à sa soeur, véritable bouée de sauvetage dans la mare d'ennui dans laquelle elle patauge.

"Mon ennui est d'un seul bloc, comme une pierre que l'on jette au fond d'un puits."



Seul Terence semble important, car faible : il a besoin d'elle. Au début, elle se méfie d'Alec Auskin, le père, qui lui semble intouchable, question de rang.



Puis ils deviennent amants, un rapport très trouble les lie, une sorte de perversion de l'interdit. Mais Emily ne peut se satisfaire. Elle pense rejoindre sa soeur, émigrée en Amérique. Mais elle se marie avec un garçon qui l'indispose. Le mariage a lieu le même jour que le remariage de Lord Auskin avec Anne. Anne n'aime pas les hommes et passe son temps à folâtrer avec ses maîtresses. C'est le côté comique du livre, car il y en a.



A travers le journal, on découvre Virginia, la rebelle, partie à Londres gagner son indépendance en travaillant à l'usine. Virginia tombe amoureuse d'un pasteur, ils émigrent en Amérique. Ils s'installent à Salem où ils déclenchent l'hostilité des autochtones et réveillent les esprits des sorcières.



Partout l'eau est présente : mare, pluie, neige, océan, orage, la plage, la pêche, la baignoire.



Une sorte de symbole purificateur, un désir de baptême, de renouveau.

"Souvent je pense aux vagues. Je les associe à ma soeur. C'est à cause de leur façon de caresser la plage, avec leur grands bras qui se replient et laissent sur le sable un film brillant. (p.139)"



Emily raconte dans son journal des petites anecdotes de la maisonnée, parfois fausses. Elle découvre qu'en médisant, en laissant traîner son journal à la lecture d'Alec, elle va déclencher des règlements de comptes, condamner des innocents à être mis à la porte. Son comportement ira même jusqu'à occasionner la mort. Drôle de puissance pour une frêle jeune femme qui se dit victime. Une victime qui se défend avec des mots, des armes invisibles mais pas moins efficaces.

Puis Emily se réveille.

"Je reviendrai à mon cahier. A tout ce qu'il y a de faux et de vrai écrit à l'intérieur. Je n'y écrirai plus que mon bonheur, ma joie d'être là et d'être juste. Je renoncerai à voyager. Je renoncerai à suivre les plumes, les trains, les bateaux. Virginia comprendra. Ma vie de femme et de mère est ici. Je l'ai admis. Je ne suis plus la même. J'ai changé. Je suis celle que je veux être. Enfin. (p.181)"



Un an passe. Terence dépérit. Il souffre même. Emily décide d'abréger ses souffrances. Raté. Elle provoque l'indignation de son amant qui la chasse. Ce sera le signal de départ pour Ellis Island, Virginia l'y attend.



Un livre désiré (cette formule n'est-elle pas un gage en soi ?) après la lecture du billet de Holly qui pourtant ne racontait pas l'histoire (mais quand Holly estime un livre, c'est qu'il a quelque chose de plus).



Un livre dévoré en quelques heures, je suis parfois exigeante avec les dénouements ! Néanmoins l'histoire me laisse sur ma faim. Je m'explique. Un style magnifique, certains paragraphes sont "trop beaux" comme disent les jeunes aujourd'hui. A en pâlir d'envie. Avec un talent pareil, j'aurai fait une héroïne admirable, or je trouve qu'elle "craint".



D'elle, on ne sait rien de réel au fond. Même le journal ne reflète -peut-être pas- la réalité.

Emily reste à la surface, elle y flotte, comme si elle avait peur d'être elle-même. Elle ne se voit qu'au travers de sa soeur, qui semble si insouciante. Ah ! quelle contrariété ai-je eu quand les sœurs se manquent de quelques jours autour de la tombe de leur parents !



Mais je dis que je reste sur ma faim, c'est que j'aime les histoires qui finissent bien. Je vais finir par croire que j'ai un fond romantique !

Tant qu'à faire, je vous livre ma version. Rien n'empêche qu'Emily soit parmi les survivants, non rien ne l'empêche !
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Aral

Adoré ! Ce roman singulier et puissant serait un coup de coeur sans les pages très dures du milieu.

Il nous fait vivre dans chacune de nos cellules l'effacement de la mer d'Aral, le dénuement du pays (Kazakhstan) et l'effacement d'Alexeï. Les 2 effacements sont intéressants et obéissent chacun à des raisons propres.

Heureusement, Alexeï a la musique et l'amour pour survivre à des conditions de vie difficiles (familiales, écologiques, économiques, politiques) et contrer l'effacement. Quel vibrant hommage à la musique, l'art et l'amour ! Par ailleurs, l'écriture est belle, envoûtante, hypnotique parfois.

Bref, voilà un livre fort qui va me hanter longtemps.
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La fille de personne

Une narration particulière pour ce livre, faite de flash back réguliers, heureusement clairement identifiés.

Le premier chapitre est finalement une sorte d’épilogue, et c’est à partir de cette date Paris, la nuit du 1er au 2 avril 1951 que nous allons effectuer un parcours rétroactif.



Luce Notte, fille de personne, fille née de père inconnu, élevé par le compagnon de sa mère qu’elle affectionne particulièrement, rêve d’écrire une thèse mais de basse extraction, ses chances de devenir docteur ès lettre sont minces. Etudiante enragée, grâce à ses excellentes notes au baccalauréat, elle obtient une bourse et part étudier à Prague. Bien qu’elle soit boursière, elle doit travailler pour réussir à payer ses études. Et c’est ainsi qu’elle débarque comme jeune fille au pair dans la famille de Kafka. Elle se lie d’amitié rapidement avec Franz, jeune homme de son âge et lui aussi plus intéressé par les études littéraires que par un travail de gratte papier dans une compagnie d’assurance.



On retrouve Luce 40 ans plus tard à Paris. Elle a réalisé sa thèse, a ouvert une librairie dans laquelle, un soir, par hasard, elle rencontre Sadegh Hedayat, écrivain iranien, fuyant la censure de son pays.



Voilà grosso modo la trame du roman.



Parce que finalement cette histoire n’est qu’un prétexte pour écrire de merveilleuses pages sur les affres de la création, la douleur des auteurs obligés de travailler le jour pour gagner de quoi vivre, et tenter d’écrire le soir, la nuit, pour se réaliser réellement dans ce qui est leur vraie vie, la littérature.



C’est un roman totalement inclassable, tant l’autrice nous parle avec fougue et justesse de la difficulté d’écrire, de l’incompréhension des proches, de la douleur de la censure, du doute qui assaille les auteurs, qui parfois en viennent à brûler leurs manuscrits persuadés qu’ils ne valent pas la peine d’être lus.

C’est un texte foisonnant, complexe, écrit dans une langue riche. Elle nous fait entrer dans la psyché des auteurs, il m’est arrivé de relire certains passages plusieurs fois pour m’imprégner totalement de leur détresse, j’aurais pu noter des pages entières d’extraits tant j’ai été happée par ses mots.

J’ai repensé à ma découverte l’an dernier d’Antonin Artaud par le biais du livre de Justine Levy, son fils.



J’ai redécouvert la vie de doute et de souffrance de Franz Kafka, j’ai totalement découvert celle de Sadegh Hedayat dont je n’avais jamais entendu parler, inutile de préciser que j’ai maintenant une furieuse envie de le lire.



Je n’avais jamais entendu parler de Cécile Ladjali, je l’ai découverte par l’intermédiaire de l’excellente émission de Cécile Coulon : la source, sur France Inter. Je ne peux que vous recommander de vous intéresser à elle et de la découvrir, sa plume ne vous laissera pas indifférent.

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Illettré

Beaucoup d'incohérences dans ce roman où Léo censé avoir une très bonne mémoire perd l'usage des mots et de la lecture en l'espace de 3 ou 4 ans.

Sur un sujet délicat et émouvant, l'auteur s'empêtre dans un style verbeux qui impatiente le lecteur.

Décevant !
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Illettré

Tout le monde aura compris de quoi parle ce livre, et tout le monde aura compris que c'est un beau thème tragique et méconnu. Je ne reviendrai donc pas sur le parcours de Léo, illettré. (Malgré les années passées sur les bancs de l'école, malgré son excellente mémoire, malgré son assiduité en classe malgré son désir de bien faire, malgré son travail dans une imprimerie: il s'agit de bien comprendre que l'illettrisme peut être vu comme une sorte de fatalité qui n'arrive pas qu'aux autres.) Non, je suis au regret de constater que c'est le style si abondamment loué de l'auteure qui m'insupporte. Je vais me contenter d'une citation (et croyez bien que j'aurais pu piocher n'importe où) et j'espère que certains me comprendront: "Peinte sur le biscuit de la figure, une fraise boudeuse laisse fuser les politesses attendues au début d'un dîner entre riverains bien disposés." Léo a invité à dîner Sybille (qu'il aime) et sa fille Violette. C'est de celle-ci qu'il est question dans la phrase que je cite. Quel maniérisme, quel emploi abusif de la métaphore, et pour quel résultat: une fraise boudeuse et des politesses qui fusent malgré tout! On croit lire un pastiche des frères Goncourt au sommet de leurs prétentions. (Franchement, ce n'était pas mieux "Bonsoir, m'sieur, dit la fillette qui paraissait déjà s'ennuyer ferme." ?)
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Illettré

Premier chapitre énigmatique : Léo suit une prostituée pour une étreinte courte dont il se sent honteux. C’est la première fois.

Léo a vingt ans, vit seul dans la cité Gagarine, dans le nord de Paris. Il travaille dans un atelier d’imprimerie. La presse à papier est passée sur sa main droite, lui écrasant deux doigts qu’il faut amputer. Cet accident lui est arrivé car il n’a pas lu le panneau « ATTENTION DANGER ». Ce n’est pas de l’inattention : Léo ne sait pas lire.



Une enfance dans un mobile home, ruinée dès l’âge de six ans par la fuite de ses parents. Une jeunesse protégée par une grand-mère analphabète, Adélaïde, qui lui fait suivre l’école où il parvient à apprendre par cœur des textes de théâtre ; puis au collège où il perd la quasi-totalité de ce qu’il savait. A vingt ans, Léo vit seul avec un iguane, Iggy, il écoute de la musique à tue-tête dans ses écouteurs. Son seul copain au boulot est Bébel, délégué syndical ne sachant ni lire ni écrire, mais que l’accès à la culture par une porte dérobée a rendu redoutable pour son patron. Dans son immeuble, Mme Ancelme, la gardienne aux cheveux décolorés et reflets changeants. Et Sybille, infirmière élevant seule sa fille Violette. Sybille, si belle … Léo est beau aussi, très beau, mais ne le sait pas. Sybille a pitié de Léo, le soigne, l’aide, l’invite, le désire… Léo aussi désire Sybille mais reste prisonnier de son sentiment d’infériorité et de la honte ressentie lors de sa première étreinte.



Léo affronte un monde qui ignore l’analphabétisme. Comment voter (on est en mai 2002) ? Comment travailler ? Comment aimer ? Léo peut-il oublier ses deux doigts coupés ? Peut-il vaincre son illettrisme ? Tout le livre narre ce combat, de victoires en défaites, entre compassion et affection, de désir en frustration… Illettré, ce n’est pas seulement ne pas savoir lire, c’est « chaque matin, commencer par un blanc qui lui donne le sentiment de devoir repartir à zéro. Si la veille et le temps des rêves il a roulé sa pierre, à l’aube celle-ci a chu et il faut recommencer le même travail absurde. La hisser au sommet d’un mont triste, en sachant qu’elle reviendra toujours à la source de la sueur et des larmes sans que l’effort n’ait permis au bonheur la moindre ascension. » (pages 58-59). Camus imaginait que Sisyphe était heureux, Cécile Ladjali sait que Léo ne le sera jamais….



Cette pierre à hisser est décrite au fil des événements qui seraient anodins s’ils ne concernaient que ceux qui sont peu ou prou intégrés à la société. Pour Léo, chaque échec, comme d’être déclaré inapte au service national, est le signe humiliant de son handicap. Mais il a des dons que la société ne valorise pas car les mots lui manquent. Il décrypte ce que ceux qui savent lire ne voient pas, comme les hiéroglyphes égyptiens. « Il décèle la beauté là où les hommes ordinaires ne la remarque pas. ». Devant le cercueil d’Adélaïde, ce constat : « Les choses ne suffisent pas. Léo veut les mots. Tous les mots. Afin qu’ils enserrent les moments et les rendent plus présents comme ils enjoindraient à ce qui est mort de recouvrer la vie. ». Et cette indestructible réalité : « Hors des livres, il a le sentiment physique d’être le jouet d’une mauvaise fortune, d’un malin hasard. Avec les mots, il serait le maitre de son destin. Il pourrait aimer. Les livres sont l’examen de la vie. Un miroir où se voit, par lequel on se connait, où l’on apprend à nommer et cesse de subir. ». Belle définition de la lecture… et âpre définition de l’illettrisme.



Ce récit est interrompu plusieurs fois par un dialogue dans le cimetière de St Ouen entre Léo et un autre – son autre ? Un mort ? Les deux peut-être ? Dialogue sec et intense fait de questions sans réponses : « J’aime être seul sous le ciel gris au coin d’une tombe. C’est tout. ». Et qui finit ainsi « Je suis l’auteur et le destinataire comblé de mon propre envoi. Personne n’a tenu le stylo à ma place. J’ai écrit le vide, j’ai posté le vide, et j’ai signé toute ma vie. » Léo se sent-il mieux parmi les morts ?



Cécile Ladjani n’a pas écrit un simple témoignage ou une enquête sur l’illettrisme, problème social souvent méconnu. En l’incarnant dans le personnage de Léo, elle lui donne une force romanesque et une intensité qui permet d’appréhender ce qu’est l’illettrisme et ses conséquences, mais aussi dépasse la seule explication sociale et psychologique pour en faire une figure littéraire à la fois vraisemblable et mythique. Et pose la question, non seulement des critères de réussite dans notre société, mais aussi celle de la part laissée à l’inexprimé … C’est très fort !
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Illettré

En évoquant le combat douloureux et perdu de Léo, vingt ans, contre l’illettrisme, Cécile Ladjali a écrit un texte extrêmement violent.



Pourquoi ?



Parce que l’auteur met en scène la vie de Léo, dans sa cité de la porte de Saint-Ouen, avec des mots recherchés et un style souvent flamboyant qui sont comme la démonstration du pouvoir et de la supériorité de la littérature et qui loin de nous faire ressentir l’inadéquation au monde de Léo ne font que renforcer chez le lecteur un sentiment de malaise.



Faire de Léo un conducteur de machines dans une imprimerie et souligner de manière récurrente la naïveté et le caractère solaire du personnage, sa « présence aux autres » relève d’une forme de condescendance.



Non pas qu’il eût fallu décrire la vie semée d’obstacles d’un illettré avec un style pauvre, mais dire que Léo est « la preuve incarnée que l’ignorance préserve sa pureté originelle à l’être humain… » est un peu dérangeant, surtout quand on considère l’issue du roman. Et le décrire regardant des fenêtres de son immeuble-barre « les signes bleus [qui] pâlissent dans le vide lactescent » est légèrement décalé…



A lire toutefois pour la beauté de l’écriture et pour la remise en question de toute une société.





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Illettré

Illettré raconte l’histoire de Léo, un jeune homme de vingt ans qui habite dans une cité de la région parisienne et pointe chaque matin à l’usine. L’illettrisme dont il souffre le hante, gâche sa vie et ses relations avec les autres. Comme une maladie honteuse, ce handicap transpire par les pores de sa peau et l’empêche même d’aimer sa jolie voisine Sibylle. Tout au long du récit, on suit l’itinéraire de ce jeune homme perdu qui tente chaque jour de dissimuler ou de s’accommoder de ne pas savoir lire et écrire : impossible de comprendre les itinéraires du métro, les pancartes de danger, les bulletins de vote lors des élections … Abandonné par ses parents à la naissance, privé du langage qui est la charnière d’une vie, il reste persuadé qu’il est incapable d’aimer. Et au fil des chapitres, on suit Léo vers un destin tragique et implacable.

Les mots de Cécile Ladjali sont ceux de Léo, ceux qu’il ne peut dire, écrire, lire. Ce récit poignant est porté par une écriture poétique, maîtrisée et sensible. L’auteur sait disséquer les errements, les pensées d’un homme en proie à une détresse profonde. Les phrases que l’on lit sont les pulsations du cœur du héros et aussi nos propres pulsations de lecteur.

Ce livre aborde l’illettrisme, ce mal qui touche une frange de la population le plus souvent silencieuse. Dans notre société envahie par les écrans, beaucoup d’enfants, de jeunes, éprouvent une réticence envers la lecture, activité obsolète, pour peu, d’un autre temps. Pourtant même, l’image nécessite un décryptage, une lecture a posteriori pour comprendre le monde dans lequel on vit.

Lire nous entraîne dans l’imaginaire et nous permet d’appréhender aussi la réalité. Le destin de Léo montre bien que les mots sont la clé pour ouvrir les portes de la vie, ces mots qui disent les pensées les plus brouillonnes, les sentiments les plus profonds, qui évitent de sombrer dans la violence envers soi-même et les autres, qui permettent de tracer son chemin, son histoire
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Illettré

Léo vingt ans est illettré, abandonné enfant par ses parents aux bons soins de sa grand-mère analphabète. N'arrivant rien à assimiler, il quitte le collège pour un apprentissage dans une imprimerie et perd alors le peu de connaissances acquises lors de sa scolarité

Ses seuls soutiens sont deux de ses amis et sa concièrge Madame Ancelme qui lui lit son courrier

Jusqu'au jour où sa route croise celle de sa voisine Sybille

Mais comment affronter le regard de l'autre face à ce handicap Pour Léo la honte dresse alors un énorme barrage entre eux qui lui semble infranchissable

Un beau roman sur la différence dans lequel pourtant la souffrance ne laisse pas beaucoup de place à l'espoir

Un questionnement aussi sur notre mode éducatif peut être pas toujours adapté aux enfants en difficulté
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Illettré

Léo ne sait pas lire ni écrire et pourtant il avait appris... brisé par l'abandon de ses parents à l'âge où l'on apprend, il a abandonné à son tour ses savoirs. Léo jeune adulte tombe amoureux, mais peut-on vivre l'amour sans savoir ni lire ni écrire ?

Le roman de Cécile Ladjali manie la langue avec vigueur, celle que son personnage ne sait pas déchiffrer, et dans ce paradoxe elle trouve les moyens de décrire sensations, émotions, quotidien et préoccupations d'un "illétré" dans un monde de signes et de mots.
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Aral

Magnifique livre que nous livre ici Cécile Ladjali, aux confins du Kazakhstan, au bord de la mer d'Aral agonisante.



Alexeï et Zena s'aiment depuis l'enfance. Dans leur village de Nadezjda, ils observent la mer se retirer lentement à cause du détournement de ses affluents par les communistes. Alexeï est sourd mais un musicien hors pair. Il compose, sur son violoncelle, pour Zena, l'Aral et pour la huitième note, celle qu'il cherche à travers les vibrations de son corps...



Autour de sujets tels que la création, le silence, la solitude, la nature mais l'amour aussi, Cécile Ladjali nous embarque pour un voyage au coeur du monde, celui de l'Aral, mais aussi au sein du monde particulier d'Alexeï et de sa quête personnelle.

Le style est incroyable d'intensité, et ne s'adresse pas à tous les lecteurs. Assez exigeant en effet, il ne s'agit pas de lecture "facile", mais qui donne à réfléchir et surtout qui plonge dans une ambiance très particulière. On s'y croirait, au bord de l'Aral, à regarder la mer disparaître petit à petit, bercés par le violoncelle d'Alexeï, à la fois douce et lancinante, angoissante et apaisante, vibrante.
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Shâb ou la nuit

« Shâb ou la nuit » de Cécile Ladiali est un livre autobiographique qui raconte l'histoire d'une jeune fille iranienne adoptée et choyée par ses parents adoptifs. Elle est brune à la peau mate. Elle aura un parcours scolaire assez difficile puisqu'elle sera placée dans un internat d'oû elle sera ensuite renvoyée. Elle partira à la recherche de sa mère biologique après la mort de ses parents.



Je trouve que ce livre est très beau pour plusieurs points. Il est écrit d'une manière très sensible et on peut sentir une part d'intimité dans les mots, ce qui est touchant quand on sait qu'il est autobiographique. Il raconte une histoire assez difficile et douloureuse qui est celle de l'adoption et nous permet de changer de vision sur ce sujet. Ce n'est jamais facile d'être adopté, car on est toujours dans la recherche de sa véritable identité. On ne sait pas qui on est et où l'on va. Suivre à travers ce livre l'histoire d'une enfant adoptée est juste magique. Le fait que tout le roman tourne autour d'une jeune fille qui veut répondre à des questions, nous permet de nous ancrer dans sa vie et de nous sentir proches du personnage principal. Ceci est très judicieux de la part de l'auteur puisqu'on arrive à mieux ressentir le message qui a voulu être passé. Je ressens ce texte comme une sorte d'hommage pour ses parents adoptifs. Je ne saurais expliquer ce que j'ai ressenti à la lecture du livre : je me suis senti extrêmement proche de la narratrice, j'ai eu l’impression de me retrouver dans certains passage. J'ai envie de relire ce livre et pas qu'une fois, par ce que c'est une leçon de vie. Belle histoire d'adoption, très touchante et très bien écrite, vous allez adopter le livre !



Si je devais retenir une phrase, une citation de ce roman je choisirais la première du livre car elle représente beaucoup dans l'histoire des enfants adoptés : « Très tôt on m'expliqua que j'étais née dans une grande maison en Suisse. » Cette phrase n'a pas été écrite en premièr par hasard car c'est pour la plupart des gens adoptés le premier mensonge qu'on leur fait pour les préserver. On ment sur la base de ce que l'on est vraiment, sur ses origines, et la phrase a bien trouvé sa place en tant que première du roman.



Prix du Roman Métiss en 2013.



C.V
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Lexik des cités illustré

Panégyrique de l'éloquence et du beau langage à l'époque des sms et de la langue de la rue.

Cécile Ladjali est romancière et essayiste , elle enseigne le français à l'université et au lycée, c'est une amoureuse du français, des mots et de la richesse du langage et de la liberté qu'il procure à ceux qui savent le manier. Elle prône une éducation classique, de laquelle l'étudiant peut si il le souhaite s'éloigner mais en connaissance de cause. Elle s'insurge de l'indigence vers laquelle se dirige notre langue et n'y voit qu'un grand vide.

Elle aimerait que ses élèves préfèrent le langage à la force physique, à ce retour à la loi du plus fort qui l'inquiète. Sans être réactionnaire ou rétrograde elle prêche pour un enseignement de qualité qui ne rime pas avec facilité, le beau étant tout sauf complaisant, il doit s'apprendre avec patience et obstination.

Elle déplore la transformation des enseignants en éducateurs, mais reste optimiste et veut croire en une possibilité d'amélioration si elle est faite avec passion, se refusant à la facilité en nivelant par le bas l'instruction.

Livre d'une passionnée qui fait un état des lieux de l'apprentissage du français aujourd'hui et donne ses solutions pour revitaliser ce qu'elle estime être le plus important, le langage.
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Shâb ou la nuit

Sublime autofiction sur le thème de l'adoption.

L'écriture est parfaite, la langue est belle, le livre est émouvant sans tomber dans le pathos et on arrive à revivre le parcours difficile de son auteur qui est passé par une multitudes de stades pour arriver à pardonner et à se pacifier avec son histoire.

Livre sur le non-dit, la vérité, différente pour chacun, les façons plus ou moins habiles de parler avec son enfant adoptif, avec la femme qui nous a abandonné, avec ses parents adoptifs...

Le parcours de l'auteur vers l'écriture n'a rien eu de logique ni de facile, elle explore alors les liens de l'inné et de l'acquis en surmontant les préjugés.

Ses parents adoptifs vivent en France, elle est née à Lausanne de parents iraniens, joli métissage mais ingrédients difficiles pour une quête identitaire.

Un livre magnifique sur une histoire de vie pas si simple sans tomber dans les écueils de la facilité.
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Aral

un récit prenant dans une atmosphère lourde ...

une mer d'Aral qui disparait et qui revient comme l'amour passionné entre Alexeï et Zena ; la musique omniprésente et d'autant plus perceptible qu'Alexeï devient sourd; les horreurs environnementales de l'ex Empire soviétique et ses conséquences désastreuses dans la population ...

Un roman intime qui touche au plus profond de nous-même .
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Ordalie

"L'ordalie venait d'autoriser ma passion."

L'ordalie, jugement de Dieu au Moyen âge et titre de ce roman, ne m'a pas semblé vraiment adéquat car le héros du livre (à part certaines conversations philosophiques avec sa cousine "ma princesse" idolâtrée, ce couple qui représente Ingeborg Bachmann et Paul Celan de parfaits inconnus pour moi, le contexte du roman qui débute sur la chute du Mur de Berlin et un sauvetage in-extrémis d'une noyade) est athée. Bon, je m'interroge encore, à moins qu'il ne s'accorde lui même le pardon de quelque pensée honteuse.

A part ce détail, somme toute sans importance, L'ordalie de Cécile Ladjali (romancière suisse enseignante de lycée et d'Université), fort bien écrit, rentre tout de suite dans le vif du sujet:la passion non partagée de Zak (orphelin recueilli par son oncle et sa tante, élevé jadis au son des "jeunesses hitlériennes", fantasmant sur les photos de la "pépée" d'Hitler, entretenant une relation sadomasochiste avec Rachel et devenu un photographe reconnu) pour Ilse sa cousine philosophe qui aime Lenz un "poète apatride" juif. Le récit des souvenirs que relate Zak se situe à Berlin en 1948 dans une Allemagne encore entachée par la Shoah.

Le portrait psychologique fort de Zak, ce pervers (pitoyable et odieux à la fois) qui se repait (entre deux gifles à sa petite amie soumise Rachel) dans la souffrance et l'envie d'épier le "bonheur égoïste" puis les déchirements du couple Ilse/Lenz ne m'a pas vraiment enthousiasmée, par contre j'ai apprécié l'ambiance du milieu artistique. Cécile Ladjalie a su capter le mouvement créateur du photographe, qui transcrit par image intermédiaire son propre monde intérieur (à savoir ici la mise en scène du vide, de la vacuité,du renoncement au bonheur et la mort d'une partie affective de la personnalité), sublimée dans la photo.

Rien que pour ça L'ordalie qui autorise l'amour platonique incestueux vaut le détour.
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