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Citations de Céline Minard (279)


La gorge de Josh s’était nouée quand il avait vu partir les bœufs. On ne pouvait donc rien retrouver dans ce monde, ni personne, sans qu’une perte vienne aussitôt poindre son nez. Le scalp de l’Indien, il l’avait jeté aux cochons. Ça ne lui avait rien rapporté, mais ça l’avait soulagé d’un poids. Parce que cent grammes de relique, il en avait fait l’expérience, peuvent à l’occasion écraser leur homme.
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N'est-ce pas ce que nous faisons tous ? Rêver à un nid de bulles enfin stable, accroché peut-être à une feuille dérivante ou une lentille d'eau capricieuse mais un nid de bulle douillet, qu'il ne s'agirait pas de refaire chaque matin, de regonfler chaque soir. Une illusion.
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L'environnement que j'ai choisi est celui qui me convient. Qui me procure, par l'extérieur, en frottant et raclant l'enveloppe de mon corps qui résiste et s'adapte, la forme nécessaire de ma vie. Ce monde d'isolement, de vide, de grands froids, de grosses chaleurs, de roche dure, de silence et de cris animaux, laisse peu de choix. C'est un guide précis. La situation dans laquelle je suis est pensée, calculée pour établir un entraînement maximal. Je l'ai soigneusement choisie. Je lui ai accordé mon assentiment le plus profond.
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Sur quels pitons, avec quel grigri, sur quelle corde arrimer la marche d'une vie ? (...)
Être vigilant, se placer où il faut dans les conditions optimales. Ni en danger ni hors de danger.Les nuages, la pluie, la roche, les semis, les bois, les corps, sont des guides savants.
Je ne me suis pas détachée par erreur, ni par lassitude, ni par aveuglement. Je travaille à mon détachement. Je suis en pleine santé. (p.36)
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-Une menace est efficace tant qu’elle n’est pas exécutée.
-Et quelques secondes après, dit la Brune.
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On n'apprend à s'amuser vraiment qu'après la quarantaine, sans réserve, avec cet appétit inchangé, développé par le temps perdu qu'on n'a plus l'heur de gaspiller et qu'on dépense d'autant plus généreusement qu'il nous en reste moins. Sauf à être un arriéré monacal, personne passé quarante-cinq ans ne reste plus le cul sur sa chaise quand il y a bal. Il y en a si peu. La peur du ridicule qui phagocyte les jeunes gens platement immortels n'a plus de prise. Disons que la vulgarité de la mort est une chose acquise. Ainsi que l'indécence naturelle du corps – acceptée – qui n'empêche pas l'élégance, qui la fonde.
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Il m'est arrivé ainsi une fois, en relisant Ada quinze ans après une première lecture stupéfiante, de trouver plus qu'intact, redoublé, l'étonnant toucher de trois pétales d'orchidée. Sous les doigts du narrateur surpris qui croyait la fleur artificielle, sous les miens non moins surpris qui croyais la page dans La Recherche, la sensation déplacée et replacée, fulgurante, le petit choc du contact inattendu se fit écho à lui-même et transperça l'épaisseur des textes et des temps à travers mon souvenir égaré et précis, comme si lui et moi étions en train de vivre exactement la même expérience : le baiser de la vie. Les fleurs de papier de la littérature sont vigoureuses.
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Elie descendait l'escalier et Isle le regardait pour la première fois. Elie n'en avait pas conscience, mais il descendait directement dans son coeur. Alors qu'il avait encore une vue plongeante sur la salle, il vit soudain au bar une beauté limpide, dorée comme la bière qu'elle buvait, douce, les bras chauds, le cou ployé, une merveille. Il ne la reconnût pas, mais il sentit en touchant la marche suivante, qu'il avait changé d'élan et qu'il évoluerait désormais dans sa lumière.
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Comme il suffirait d'une parole capable de changer ses représentations mentales-du passé, du présent, de l'avenir immédiat, de sa place dans le monde-pour que disparaisse la détresse. (p. 11)
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De la même façon qu'elle était sans peuple, Eau-qui-court-sur-la-plaine était sans maison, elle en avait plusieurs. Pas tout à fait des tanières, des caches.
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On fit pour l'occasion percer maints tonneaux de vin clairet et vin de Beaune. Furent embrochés et mis à rost quinze moutons et trente gourretz de laict en saulce à beau moust et faicts cent platz de gelée à la Tayllevent comprenant vingt et un poussins, six lapereaux, quatre cochons, trente gigotz de veau, quatre pintes de vinaigre blanc, six aulnes de toille, gingembre, graines de paradis et quatre quarterons de mesche mis dans vingt pots de terre et six jattes. Aussi quelques douzaines de ramiers et oiseaux de rivière et gros poissons mis en leschefricte et arousé de bouyllon de beuf. Et tartes bourbonnaises et tartes de pommes et pastés de poires crues et cerises au sucre.
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Malgré la profonde vexation causée par le cambriolage, il se sent une certaine affinité avec le ou les pillards qui ont si judicieusement sorti les bouteilles sans grand intérêt, et choisi de boire un chambolle-musigny et un romanée-conti de 1969, hors du monde, dans les bras tièdes de ses fauteuils grand confort tendrement enfoncés à vingt mètres sous terre.
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- C'est une très belle cuvée. Il est possible que ce soit mon dernier vers, mais je le trouve magnifique. On devrait toujours boire comme ça.

- Comment ? demande la Bombe.

- Je ne sais pas. Conscient. Nu. Dévalisé.
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Ce n'est pas une question de focale, c'est une expérience. Comme celle de voir les gens rajeunir, toujours plus. Le permis voiture, par exemple, semble maintenant être accordé dès douze ans. On entre à la faculté à peine sevré. Au XIXe les étudiants étaient de petits messieurs portant le costume et la pipe. Il y a cinquante ans, l'attaché-case en droit, le froc en lettres. Maintenant, ils arrivent tous en poussette. Et c'est cela qu'on appelle le vieillissement.
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Je me suis étendue sur la couchette pour regarder le plafond. Ne rien faire est aussi une occupation que j'ai prévue. Elle est importante. Et difficile. Allongée les yeux ouverts, je me suis efforcée de seulement percevoir le courant d'air qui passait par l’œil-de-bœuf comme un visiteur délicat. Il était à peine plus froid que le mélange dans lequel j'évolue tous les jours quand je suis à l'intérieur, mais il avait quelque chose de plus vif, de plus fringuant, de salé. Il faisait vibrer très bas une corde de mon violoncelle en passant. Je l'entendais, loin au bout de la pièce, un son très doux, infime, un son qui n'aurait pas été audible sans la caisse de l'instrument. Je croyais l'entendre.
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Les fleurs de papier de la littérature sont vigoureuses. Elles peuvent s'ouvrir à quinze ans de distance d'un texte dans un autre, changer de pot, de terreau, de terrain, se faire oublier et resurgir par hasard au coin d'une page avec la netteté d'une incision. Quelque chose ne meure qui est sensiblement, comme de tout corps celle d'une fleur, la fragile présence.
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La grand-mère hurlait encore et avait hurlé ce soir-là jusqu'à ce que le visage de la gamine s'encadre dans l'ouverture du chariot. Alors, elle avait fermé la bouche et avancé la main vers les cheveux noirs de l'enfant. Elle les avaient touchés de ses doigts cassants, elle avait tiré la langue et s'était endormie d'un coup.
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Et une contrebasse était un violon de la taille d'une armoire dont on jouait debout en le serrant contre soi.
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On ne sait pas généralement combien il est troublant de clore un livre. De fermer la porte d'une maison aimée dont on a refait la toiture tout l'été, dans laquelle on a vécu jour et nuit et que l'on quitte, soulagé et fourbu, séparé mais pas encore dépris. Ce sentiment complexe, cette fatigue repérée, délicieuse et triste comme le travail accompli, me servira bientôt. Alors, de l'avoir déjà vécu tant de fois, ce rendu, ce don à rebours des dernières feuilles habitées, l'exil me sera plus poignant et plus léger.
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Mais je ne t'ai pas laissé crever mon Innocent, mon dit X, mon Didi, tout au contraire, je t'ai taillé, je t'ai insufflé, je t'ai porté comme un gant de chair au sommet du pouvoir, comme un masque, comme une forme de ma volonté sur l'estrade du grand cirque. Tu étais laid et je t'ai paré, tu étais pauvre et je t'ai enrichi, tu étais mol et je t'ai bandé. Sans moi, mon autorité, tu serais resté un petit nonce avachi, un monseigneur-je-ne-peux-pas, un plutôt-pas, un prélat-non-merci, une résistance d'inertie, sans moi rien du tout Didi mais avec moi en robe blanche, en pourpre, tragique, poudré à l'os, gonflé de goutte et d'hydropisie par mes oeuvres, animé par mon fluide, mon éclat, tu as été la plus grande reine de l'Etat. Une merveille de potence, un aigle ma grosse colombe, un loup sous sa louve.
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