The Dream of Another World - Volume 1 : The Tower of Hope
By Anne Plichota and Cendrine Wolf
- Aahh, ma petite Oksa... Je vais te confier un secret que peu de gens connaissent.
- Un de tes parents était un lièvre, c'est çà? lança Oksa avec sa spontanéité habituelle.
C'était un moment très particulier. Délicieux... Elle glissa sa main dans celle de Tugdual et leurs doigts s'entrelacèrent.
- Embrasse-moi..., se surprit-elle à demander.
- A tes ordres, P'tite Gracieuse.
Avait-elle déjà connu un moment aussi intense ?
Aussi parfait ?
Ce garçon était fabuleux. Du bout des lèvres, il murmura le refrain d'une chanson à l'oreille de la jeune-fille.
"We're flying high
we're watching the world pass us by
Never want to come down
Never want to put my feet back down
On the ground"
- Le jour où j'ai su que j'avais tous ces dons naturellement, j'ai cru que mon but était atteint. Et puis, ce sentiment de puissance m'a très vite étouffé. Je l'ai enfermé en moi et je ne l'ai plus jamais exprimé.
- Mais pourquoi ?
- Parce que la puissance, P'tite Gracieuse, c'est le danger à l'état pur. Quelqu'un qui n'a peur de rien est invulnérable, rien ne peut l'arrêter. C'est la peur qui rend les hommes faibles. Mais c'est aussi ce qui fait d'eux des hommes. des humains, je veux dire...
- Et toi ? Tu as peur parfois ?
- Pas vraiment... C'est le problème... reconnut Tugdual en baissant la tête.
À tous ceux qui ont fait de nos vies ce qu'elles sont.

— Salut P'pa ! Salut M'man !
Marie et Pavel Pollock étaient assis à la table de la cuisine, sobre et fonctionnelle. En entendant leur fille, ils levèrent en même temps le nez de leur tasse de thé fumant et demeurèrent bouche bée.
— Oui, je sais, soupira Oksa. Je suis méconnaissable...
— Ben... à part ta p'tite tête, effectivement ! dit son père en la dévisageant avec curiosité. J'ai du mal à croire qu'il s'agit de l'intrépide ninja que je connais. Mais je dois dire que ce changement de style est... charmant. Radical, mais charmant.
— Ça, pour être radical, c'est radical... marmonna Oksa.
Ses parents laissèrent échapper un rire en voyant sa mine dépitée. Elle tenta de leur lancer un regard qui se voulait lourd de reproches et leur répliqua d'un ton vif :
— Ma vie vient de basculer et ça vous fait rire ? Non, mais vous avez vu de quoi j'ai l'air !
— D'une authentique collégienne anglaise ! répondit sa mère d'un ton léger en reprenant une gorgée de thé. Et ça te va plutôt bien, je trouve !
Sceptique, Oksa s'observa une nouvelle fois en grognant. Qui aurait pu penser qu'un jour elle serait capable de se montrer en public avec une jupe plissée, une chemise blanche et une veste blazer bleu marine ? Pas elle, en tout cas...
— Si on m'avait prévenue que je devrais porter un uniforme pour aller en cours, j'aurais refusé de venir en Angleterre, marmotta-t-elle en desserrant rageusement la cravate marine et bordeaux aux couleurs de son futur collège.
— Oh, s'il te plaît, Oksa... soupira sa mère en la contemplant de ses jolis yeux noisette. C'est juste pour les cours ! En dehors, tu peux mettre tes jeans et tes grosses baskets autant que tu veux !
— Bon, d'accord, d'accord ! capitula Oksa, les deux mains levées. Je n'en parlerai plus... Mais je n'oublierai jamais que vous m'avez sacrifiée sur l'autel de votre carrière. Et de la part de parents qui disent aimer leur fille unique, c'est pas joli-joli... Vous ne viendrez pas vous plaindre si j'ai de graves séquelles psychologiques.
- mais je fait la proposition de se délecter de filets de poisson et de petits pois à proximité de treize heures. Ah ! le lave-vaisselle a fait sa sonnerie, le préparation est aboutie !
- La lave-vaisselle ? s'étonna Oksa.
Tout le monde se tourna pour suivre des yeux la petite créature rebondie qui ouvrait le lave-vaisselle pour en sortir une boîte en plastique. Le Foldinguot ouvrit le récipient et un nuage de vapeur s'en échappa - ainsi qu'un délicieux parfum de poisson !
- Ne me dit pas que tu as cuit le poisson et les petits pois DANS le lave-vaisselle ! s'exclama Oksa.
- Jeune Gracieuse, le lave-vaisselle entraîne à la perfection des cuissons à l'étuvée, la certitude est savoureuse.

Dès que la porte s'ouvrit, le Foldingot se planta devant eux et se courba dans une révérence grotesque - mais sincère -, faisant des moulinets avec ses longs bras et inclinant son corps potelé.
- Oh, petite-fille et fils de ma Gracieuse, votre présence dans cette masure est la bienvenue !
- Masure ? s'étonna Oksa.
- Tu sais, Oksa, intervient son père, les Foldingots lisent absolument tout ce qui leur passe sous les yeux : le journal, le dictionnaire et les livres de Dragomira, bien sûr. Mais aussi les consignes sur les flacons d'entretien, la composition des aliments, les étiquettes sur les vêtements, rien ne leur échappe. Ce sont des lecteurs compulsifs qui font un usage assez particulier des mots qu'ils rencontrent ! Notre ami Foldingot a dû lire ce mot, il lui a plu et maintenant, il l'utilise. De façon un peu saugrenue, certes, mais les Foldingots sont des êtres saugrenus ! expliqua Pavel.
- Oh, fils de ma Gracieuse, vous êtes tellement magnanime ! s'exclama la créature, visiblement folle de joie d'être ainsi qualifiée. Le fils de ma Gracieuse attribue une louange qui engloutit mon cœur dans la délectation !
- Tu vois ce que je veux dire ? dit Pavel à sa fille en lui faisant un clin d’œil.
- J'a-do-re ! murmura Oksa en articulant exagérément.
- Bonjour jeune Gracieuse ! Bonjour ami de notre Jeune Gracieuse ! Bonjour Vieille Gracieuse !
- Ooohhh, voila qui n'est pas très élégant...s'indigna Léomido. Veux-tu bien les excuser Dragomida? Je suis navré.
Nullement vexée, Dragomida riait de bon coeur.
- Ne t'inquiète pas, mes créatures m'appellent désormais ainsi, elles aussi...
- Tu es sûr que l'armoire est là ? demanda-t-elle au Culbu arrêté en vol stationnaire.
- Certain, ma Gracieuse ! clama-t-il. Elle est à deux mètre quarante, à vingt-sept degrés sur votre gauche.
- Avec ou sans le mur ?
Si tu penses que tu peux le faire, Oksa-san, c'est que tu peux le faire. Sinon, oublie. (p470)