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Citations de Chantal Delsol (196)


L’œuvre de [Paul] Celan est l’expression poétique d’un double combat acharné : contre l’oubli, puisque sa poésie se constitue en témoignage de l’histoire ensanglantée de la Shoah mais également contre la langue corrompue « des bourreaux », qui est aussi sa langue maternelle. Le choix du poète polyglotte de ne pas abandonner l’allemand, formulé clairement pendant l’exil viennois, détermine l’orientation de sa poétique : dès son premier livre, Der Sand aus den Urnen (Le sable des urnes), paru à Vienne en 1948, la réflexion sur la langue est pour lui indissolublement liée à l’interrogation sur les ténèbres de l’Histoire. Celan se retrouve face à un paradoxe douloureux : la définition de l’art implique le sine qua non de la transfiguration du réel et du plaisir esthétique accompagnant le processus de réception ; or, les deux sont incompatibles avec la souffrance inouïe des victimes. Le philosophe Theodor W. Adorno met en cause, de manière radicale, la possibilité de tout acte de culture après la Shoah (« Écrire un poème après Auschwitz est barbare »). L’œuvre de Celan poursuit de manière incessante un questionnement similaire, centré sur les conditions de possibilité, la nature et la fonction de la poésie dans le monde façonné par l’inimaginable horreur du génocide.
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La plupart de études de [Eugen Simion] sont consacrés, néanmoins, aux écrivains roumains contemporains (voir les quatre recueils d’essais critiques publiés sous le titre Scriitori români de azi (Écrivains roumains d’aujourd’hui, 1974-1989). Ses prises de position théoriques envisagent une sorte de « critique totale », suivant pour l’essentiel l’École de Genève avec à sa tête Jean Starobinski. Rejetant le « fanatisme des méthodes », son option s’oriente vers un pluralisme des perspectives mis au service d’une herméneutique complexe de l’œuvre.
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Ma thèse est par conséquent la suivante : l’islam, que les Européens ont longtemps négligé et laissé pousser comme une mauvaise herbe dans un champ de blé, n’est pas au cœur de la crise identitaire européenne, il n’en est qu’un symptôme. La crise est beaucoup plus profonde et endogène. C’est la crise du politique dégénéré en impolitique. C’est la crise de l’ État-nation dénationalisé. C’est la crise d’une Europe déchristianisée. C’est la crise d’un christianisme désincarné. C’est la crise d’une laïcité dévoyée. C’est la crise d’une modernité désorientée. C’est la crise d’un humanisme déshumanisé et dépouillé de toute transcendance divine. C’est la crise d’un mondialisme hédoniste et autocentré. C’est la crise d’un consumérisme consumé. C’est la crise d’une civilisation épuisée. De cette constellation de crises, l’islam n’en est que le révélateur, n’est que la partie visible, et bien visible, de l’iceberg. De toutes ces crises intrinsèques à la modernité occidentale, l’islam n’est que l’élément catalyseur.

Mezri Haddad
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En historien, Alain Besançon rappelle la constitution des frontières européennes au haut Moyen Âge à partir de l’Empire carolingien, ce « massif central » de l’Europe. Il insiste sur la christianisation et le féodalisme comme principe constitutif, ainsi que sur les caractères propres à la civilisation de l’Europe : les innovations agricoles, les inventions techniques avec les progrès de l’outillage, les procédés de construction, le développement de la métallurgie, et, de façon plus visible, les ordres architecturaux comme l’art gothique qui se déploie de l’ouest à la Finlande, aux Pays Baltes, à la Pologne, la Hongrie, la Croatie et la Slovénie, ce qui délimite la frontière actuelle de l’Europe des Vingt-Cinq.
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Dialoguer n’est pas se dissoudre dans les thèses de l’adversaire, et on n’a pas besoin de cesser d’exister pour être tolérant – c’est même le contraire. Ici transparaît chez les catholiques à la fois la méconnaissance totale de ce qu’est un libéralisme sain, et en même temps, le désir ténébreux et probablement inconscient de disparaître, de se fondre, de ne plus avoir à se défendre ni à revendiquer sa propre existence.
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Chantal Delsol
Nous sommes tombés dans un tel abîme de culpabilité devant nos fautes passées que nous devenons capables d'oublier les exigences élémentaires de la politique. Comme si gouverner un pays consistait à expier les fautes passées plutôt qu'à travailler pour les générations présentes et futures.
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Chantal Delsol
Il est possible que l'Occident ait fini par attirer la détestation à force de vouloir imposer un modèle si différent des autres. Il est possible aussi qu'il soit extrémisé au point de se rendre insupportable à certains, puisqu'il suscite de vastes révoltes en son sein même. Une culture peut-elle apprivoiser les temps à venir quand elle éveille partout où elle passe des courants non contemporains ? Nous nous trouvons en tout cas devant un conflit, non pas des civilisations, mais des paradigmes anthropologiques. Ce sont l'individualisme et l'holisme qui se dressent l'un contre l'autre. Et nous avons probablement d'abord à nous interroger nous-mêmes.
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L’époque moderne sait, d’une manière plus ou moins consciente et plus ou moins avouée, que le programme d’émancipation des Lumières se déploie en ces deux siècles par toutes sortes de moyens, et singulièrement, que les totalitarismes communistes et apparentés sont des réalisations (ou plutôt des tentatives de réalisation) violentes de ce même programme. Mais le sentiment encore diffus d’analogie et de fraternité entre les démocraties modernes et le totalitarisme émancipateur, n’apparaît qu’au moment où le Mur de Berlin s’effondre. Alors, les deux mondes auparavant séparés se regardent face à face : et ils se voient semblables. Il n’est pas surprenant d’observer que la plupart des écrivains qui ont perçu cette ressemblance troublante entre le communisme et l’Occident postmoderne, sont des écrivains dissidents de l’Est et du Centre-Est européen. Ceux-ci ont ressenti l’analogie non dans le concept, mais dans la chair de la société, sa réalité crue, son existence du matin au soir. Souvent cela se passe quand, après de longues années d’obscurité, ils surgissent dans ce qu’ils espèrent être la lumière occidentale. Et ils sont affreusement déçus. Car le monde qu’ils trouvent ressemble obstinément au monde qu’ils ont laissé.
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Il comprit finalement pourquoi on lui avait confié ce travail de répertoire : les enfants attiraient la convoitise et risquaient l'enlèvement. Tout bien compté et décompté ce n'était pas moins de vingt mille enfants que la guérilla avait rejetés hors de ses frontières, et en Tchécoslovaquie les autorités avaient permis au parti grec de les installer dans les Sudètes, à la place des Allemands disparus. Sur tout le territoire depuis l'Elbe jusqu'à Tachkent des dizaines de milliers de pères et de mères cherchaient leurs fils et leurs filles dans les dédales de l'administration paperassière. (P. 182)
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On l'a remarqué : dès qu'un leader politique est traité de populiste par la presse, le voilà perdu. Car le populiste est un traître à la cause de l'émancipation, donc à la seule cause qui vaille d'être défendue. Je ne connais pas de plus grande brutalité, dans nos démocraties, que celle utilisée contre les courants populistes. La violence qui leur est réservée excède toute borne. IIs sont devenus les ennemis majuscules d'un régime qui prétend n'en pas avoir. Si cela était possible, leurs partisans seraient cloués sur les portes des granges.
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Après la fin du communisme, [Milan] Kundera s’est tenu à une distance ombrageuse des événements académiques et mondains de sa première patrie. Considérant qu’un écrivain n’est pas la propriété de sa nation, ni condamné à une seule langue, il fait publier ses livres écrits en tchèque au ralenti alors qu’ils ont connu une diffusion massive dans le monde entier.
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Le prosateur bilingue franco-roumain [Dumitru Tsepeneag], qui se donnait lui-même le nom d’« exilé dans l’exil », fait un geste rédempteur et compensatoire à la fois, fondé sur la déconstruction parodique et les reconstructions successives, toujours sceptiques, de sa patrie stylistique et imaginaire, comme dans la massive trilogie romanesque Hôtel Europa, Ponts des Arts et Au pays du Maramureş.
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Le message de l’écrivain était que la liberté n’avait pas de couleur politique, qu’elle avait toutes les couleurs et qu’elle était un éventail de pluralité et de différences, et non d’unicité idéologique. L’écrivain Paul Goma fut le seul intellectuel roumain à lancer une telle initiative, fondée sur l’idée qu’un intellectuel doit exprimer librement ses convictions, encourageant la différence d’opinion, quel que soit le contexte politique ou idéologique. Sa démarche singulière a mis en évidence l’absence des intellectuels en tant que défenseurs de la cité, qui critiquent le pouvoir et qui encouragent les réflexes civiques. L’absence des intellectuels dans les mouvements pour les droits et libertés illustre un certain caractère défaitiste récurrent dans le comportement individuel et communautaire, visible dans l’attitude et le discours des Roumains concernant l’histoire récente.
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Radio Europe Libre représenta une alternative viable pour informer les Roumains et un moyen d’attirer l’attention de l’opinion publique internationale sur le caractère totalitaire du régime communiste à Bucarest, sur la violation des droits de l’homme et des communautés (notamment les communautés religieuses) et sur la politique interne en général.
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Après 1985, l’ouverture manifestée sur le plan externe par le nouveau leader soviétique, Mikhaïl Gorbatchev, a privé le régime de Bucarest de son atout principal dans sa relation avec l’Occident : la politique d’indépendance par rapport à Moscou. Ceaușescu n’a plus été capable de s’adapter aux nouvelles réalités des années 80. Il s’est situé progressivement sur des positions de plus en plus conservatrices, dogmatiques, s’érigeant comme un des derniers défenseurs du système communiste dans l’Europe de l’Est. Sur le plan interne, par la politique de paiement accéléré de la dette externe, il a exposé la population à des privations économiques graves et prolongées. De plus en plus isolé dans la politique internationale, soumis à des pressions convergentes de l’Est et de l’Ouest, coupé de son peuple, le régime de Ceauşescu a été renversé suite à la grande révolte populaire de décembre 1989.
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[...] le phénomène « Piața Universității » considéré comme « le discours anti-communiste le plus radical et le plus moral de la société civile, en Roumanie après la chute de la dictature de Nicolae Ceaușescu ».
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Les traditionalistes soutiennent la priorité de l’identité spirituelle nationale et les modernistes le modèle occidental, c’est-à-dire l’accélération du progrès économique, social et politique occidental, l’imitation des valeurs et les structures modernes de l’Occident, même s’il existe aussi des penseurs qui cherchent un équilibre entre les deux positions contraires (Eugen Lovinescu).
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L’un des grands pays de départ est la Roumanie, l’une des causes imputables à cet exil franco-roumain semble relever de l’histoire culturelle qui lie les deux pays, résumée dans l’image de la Roumanie comme « sœur cadette » de la France.
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L’exil littéraire vers l’espace francophone au cours du second vingtième siècle (1939 à nos jours) est avant tout un exil vers la France, si bien que l’espace francophone semble souvent se réduire à ce pays dans les œuvres des auteurs. Il faut cependant noter que certains exils se font vers la Suisse (Biro, Kristóf) ou encore le Canada (Verboczy). En outre, ce mouvement de ralliement de l’espace français s’inscrit dans un mouvement plus large d’exil littéraire : par exemple dans le monde anglophone (Škvorecký, Manea) ou germanophone (Müller).
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Le mythe de Dracula se construit à partir d’un noyau historique, par une succession de métamorphoses mythiques qui appartient, en grande partie, à l’imaginaire central-européen et occidental. Vlad III (1431-1476), surnommé Tepes (l’Empaleur) est peut-être le plus « célèbre » des Roumains. Il naquit à Sighisoara en Transylvanie. Son père, Vlad II, prince régnant de Valachie, faisait partie de l’Ordre du Dragon (lat. Societas Draconistarum, allem. Drachenorden), société chevaleresque militaire et religieuse créée par Sigismond de Luxembourg, afin de s’opposer à l’expansion ottomane. Quand Vlad III est devenu à son tour prince de Valachie, il a pris le nom de Draculya (fils de Dragon – « diable » en roumain). Son bref règne sur le trône de la Valachie, se partage entre ses luttes célèbres contre les Turcs et l’opposition à l’hégémonie politique de la Hongrie.
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