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Citations de Charline Effah (57)


Elle le disait quand même sachant que c’était ce genre de remarque qui pouvait mettre son mari en colère. Elle avait compris que la résignation était une route impraticable pour son âme séditieuse.
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Les tragédies communes ne rendaient pas les hommes plus solidaires. Une sorte de haine de l’autre, ancrée, faisait qu’ils s’enviaient, se détestaient et se combattaient. Les tragédies communes n’autorisent pas les élans de fraternité. Au contraire, la cohabitation au sein du camp avait révélé un lot d’hostilités tapies sous une étoffe de colères suspendues, de désirs refoulés, de paroles amputées et d’horizons bouchés.
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Mais j'avais toujours souhaité à ma mère de devenir autre chose que la femme-lambeaux, en miettes, la femme-fragmentée, la femme en-pièces-détachées, que j'avais vue se lever dans le désordre de notre appartement. Je lui pardonnais d'être partie. On peut haïr une femme. Mais on ne peut haïr une femme battue.
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Jean est venu me voir avec l’ambition, je crois, de me sortir de ma solitude. Je lui ai tout raconté de mon pèlerinage à Bidibidi, les soirs où nous dînions ensemble. Le jour, il allait travailler et, la nuit, j’attendais avec impatience la chaleur de ses bras. Quand revenait la rage, la colère de voir ce que l’humanité avait fait du corps des femmes, les mains de Jean m’apaisaient. J’aimais le sentir les glisser le long de mes épaules, de mon dos et de ma taille. Je bougeais mon bassin, je desserrais mes jambes, je l’accueillais en moi, tremblante de désir. Je m’accrochais à lui, aux mouvements de ses mains, à son corps, et le plaisir de nos étreintes me libérait des épreuves que j’avais traversées ces derniers temps.
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Minga,
Je me fais vieille. C’est horrible. Je ne sais comment te l’expliquer. Je ne parviens plus à porter mon corps. Dans ma tête, je me suis toujours sentie comme une enfant, j’ai rêvé comme une enfant, j’ai voyagé comme une enfant, m’émerveillant des lieux et des gens que j’ai rencontrés sur mon chemin. J’ai espéré. Maintenant, je ne suis qu’une vieille femme qui a vu les années passer comme on égrène les perles d’un collier de cauris. Des années vides, en réalité, vides de toi. Mes tiroirs, eux, sont plein de matériel de travail, de médicaments, de courriers administratifs, mais pas une seule lettre de toi. Je me demande si tu as reçu les miennes. Je sais, j’imagine, ton père m’avait dit qu’il s’arrangerait pour que je ne te revoie jamais. Mais j’ai toujours pensé que le temps éroderait ses colères, qu’il le délesterait de toutes ses épines. Ce n’était qu’illusion.
Si je te disais qu’en parlant justement du temps, je l’avais laissé s’écouler parce que la joie du retour était sans cesse annulée par la peur d’affronter ton regard. Et puis, qu’allait t’apporter réellement mon retour dans ta vie ? Parfois il est mieux que tu ne laisses pas certaines choses revenir. Le passé par exemple.
Il n’y a que la pluie après les longs mois de saisons sèches, l’éclosion des fleurs au printemps, les couchers de soleil, le sourire d’un enfant malade, l’odeur du quatre-quarts qui cuit dans le four, le Canon en ré majeur de Johann Pachebel, le goût du café à une terrasse parisienne, qui peuvent revenir. Mais il n’est pas bon que le passé revienne sous la forme d’un ancien président déchu, d’une femme battue, d’un soldat amputé, d’un blessé de guerre. Tous ces êtres pleins d’échardes.
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Des années plus tard, je m’interroge encore sur la transmission, sur les armes qu’on lègue aux filles. Que leur dit-on de leur traversée de la puberté et de leur vie de femme en général ? Quels conseils leur prodigue-t-on au sujet des troubles féminins dont elles pourraient hériter ?
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Minga,
Ton père disait que je n’étais pas une femme bien qui accepte la correction de son mari et n’essaie pas de le contester. Mais je ne voulais pas être une femme bien qui a toujours peur. Oui, je te parle de la peur des femmes. Elles ont toujours peur, malgré les lois qui stipulent que maintenant elles ont le droit de voter, de travailler, d’avorter. Bien qu’on leur ait claironné qu’elles étaient libres, les femmes ont peur depuis l’origine des temps. Sexe faible, condamné à trembler sous le joug du patriarcat. Je te parle de survie. Ce chemin solitaire. Toutes ces errances que j’ai rencontrées ici à Bidibidi.
Il y a des chemins dans lesquels on s’engouffre. Ce ne sont pas les nôtres. Mais on s’y engouffre quand même, sans doute parce qu’ils nous rappellent nos vides. Ces bifurcations nous disent que, dans le fond, nous n’avons rien fait de notre vie, que nous nous sommes contentées de tourner en rond autour d’elle. C’est la triste réalité de nos rêves amputés par notre solitude et nos féminismes dissonants. Nous, les femmes, nous sommes douées dans l’art de la contradiction.
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Le soleil souligne des scarifications sur le visage de Jane. C'est une femme marquée, comme la plupart des femmes nuer, de toutes les femmes. Joséphine Meyer, Rose Akech et les autres. Je me demande ce que Jane ressentirait si, avec mes doigts, je parcourais ces balafres qui se ramifient jusqu'à l'infini, des labyrinthes, des tourbillons, des tranchées.
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Ma mère avait sauvé sa propre vie en y laissant une incisive, des ongles arrachés et des litres de larmes qui s'étaient déversés dans l'appartement familial et dont les traces semblaient bouger le soir dans la lumière du salon. Son désespoir avait hanté les murs même après son départ. Elle n'avait pas imaginé que , bien des années plus tard, elle allait trouver ce qu'elle avait fui et qu'elle avait tenté d'oublier dans les yeux des femmes qu'elle soignait..
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Leur grâce et leur élégance sont troublantes, rendant mes certitudes coupables. Je n'ai jamais rencontré de femmes aussi belles, aussi fières, bras tendus, et aux pas aussi légers que résistantes- comme si chaque mouvement de leurs corps écrasait l'âpreté de leurs conditions de vie.
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Mais le courage ne se clame pas quand quand tout va bien. Il faut affronter les tempêtes. Le courage, c'est savoir recommencer les choses plusieurs fois.
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Je crois que chaque secrêt d'une mère envers sa fille est en réalité l'aveu d'une impuissance.
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Le pardon, comme l'amour, a la force de la pluie sur la terre sèche. Le pardon guérit. Il permet de poursuivre sa vie, au-delà de l'amertume.
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Sauf que la solitude que je vis est assez bizarre. Elle est la liberté dans la crainte. Elle est la douceur de la bise matinale et le calme inquiétant d'une nuit sans fin.
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Charline Effah
Oui je suis une féministe. je le revendique. Je n'en ai pas honte. Ce n'est pas une maladie

Extrait tiré d'un entretien avec La Cene Littéraire à Genève le 09 mars 2019.
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Tu te grattes les tempes au niveau où les mailles de ton bonnet de nuit ont dessiné des arabesques. En ôtant ton fichu, en t'en servant pour t'essuyer le visage, tu as l'impression d'entendre le rire sarcastique d'un homme prendre le dessus sur l'agitation de tes pensées. Tu ne sais plus distinguer entre ce que tu vois et ce que tu entends. Tout te mêle. Tout te malmène.
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On ne peut réinventer l'amour. On prend celui qu'on nous donne, comme on nous le donne et quand on nous le donne. Et c'est bien là l'ironie de l'amour. p25
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Mais la haine, comme l'amour, est semblable à de l'eau de cruche: elle n'est pas fraîche tous les jours.
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Nous nous regardons sans dire un mot. Je crois, je sens, je ressens que, toutes les deux, nous sommes traversées par la même envie de pleurer, les mêmes craintes au sujet de la suite, la même volonté de faire que les choses ne soient plus comme hier. C’est certainement pourquoi toutes les deux nous ne pleurons pas. Et nos silences et notre joie anxieuse se rejoignent, comme une conspiration intime et profonde à rattraper le temps perdu.
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La loi condamne la violence, elle ne fabrique pas des hommes bons.
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