AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Christophe Masson (61)


J'étais parti, la tête farcie de rêves d'aventures, avec l'espoir de devenir quelqu'un ici, quand je n'étais personne là-bas, et je m'imaginais alpiniste mutilé mais glorieux, comme Herzog, comme Terray. A mon retour, on m'attendrait avec ferveur au pied de la passerelle du Junker, et les jeunes filles insolentes m'aimeraient enfin
Commenter  J’apprécie          30
Comment les choses se mettaient-elles en ordre de bataille dans notre cerveau ? Quel dieu farceur s'amusait ainsi à nous égarer avant de nous remettre soudain sur la bonne voie ? Quand, au lieu de se combattre, la logique et l'instinct unissaient enfin leurs forces et dégageaient un chemin dans une forêt obscure.
Commenter  J’apprécie          30
Rien ne sert de lutter contre le courant. Bombay, la ville où Jules était mort ; l'admiration de Claire pour son grand-père et son amour des bijoux ; et maintenant cette "Étoile de Bombay" qui avait donné son nom à une marque de gin, Bombay Sapphire. Lequel servait de base à la confection d'un cocktail qui, lui, me ramenait à Adèle ... L’Étoile de Bombay : 60 ml de dry gin, 15 ml de sirop de sucre de canne, 6 cubes de cantaloup à écraser à l'aide d'un pilon, un blanc d’œuf et des glaçons. C'était presque trop. Même les dates concordaient : Jules mort en 1919, un an avant le mariage des Brad Pitt-Angelina Jolie du cinéma muet. Jusqu'à cette Étoile de Bombay qui usurpait son nom, extraite en réalité d'une mine au Sri Lanka.
Commenter  J’apprécie          30
Très tôt, j’avais accepté l’idée que mon existence soit placée sous le signe d’une étincelante médiocrité. Dénué de tout talent, je n’espérais rien de miraculeux et, de ce point de vue, la vie ne m’avait pas déçu. D’abord hanté par un rêve de jeune homme - coucher avec toutes les femmes de la terre et n’en aimer qu’une seule -, j’avais dû vite en rabattre. Je m’étais alors nourri de maigres espoirs, obtenant des résultats en exacte proportion, et sur le plan sentimental avais entretenu des passions paisibles, qui jamais ne vous brûlent.
J’avais ensuite abordé le second versant de l’existence, d’abord en pente douce puis guettant avec une anxiété croissante les signes annonciateurs qui me feraient dégringoler vers l’abîme. Je rédigeais mes biographies et réduisais nos Classiques avec de moins en moins d’allant mais cette déperdition d’énergie me semblait naturelle, « dans l’ordre des choses ». Quant au sexe, j’avais encore des contacts avec une ou deux vieilles copines qui m’invitaient de moins en moins souvent à dîner avec elles et ne me gardaient plus dans leur lit que pour les grandes occasions, un Noël ou un jour de l’An cafardeux, un anniversaire solitaire, l’attente angoissante des résultats d’un examen médical. Nos mises en train se révélaient bien laborieuses et leur conclusion relevait moins de l’extase que du soulagement d’en avoir fini. Autant dire que rien ne me préparait à affronter l’ouragan Adèle.
Commenter  J’apprécie          30
- Oui, dit Ashok.
- Ou alors cette rue-là ?
- Oui, répéta l’Indien, le regard fuyant.
Depuis notre arrivée à l’aéroport de Bombay, il semblait aussi perdu que moi au milieu de cette fourmilière de vingt millions d’habitants. Comble de malchance, notre taxi prépayé devait être le seul à la sortie de Chhatrapati Shivaji à ignorer où se situait le quartier touristique. En pantalon et dhoti blancs, la barbe et les cheveux blancs coupés court, il demanda trois fois son chemin et finit par avouer : « First day driving ! » avec la candeur réjouie du chauffeur débutant qui n’en revient pas de conduire une Hyundai neuve noire et jaune, le plastique encore sur les sièges claquant au vent quand la voiture prenait de la vitesse. Ram Singh pilotait le buste droit, tel le capitaine d’un boutre fendant les flots de la mer d’Oman qui miroitait par instants sur notre droite.
Commenter  J’apprécie          30
"J'y crois parce que je veux y croire."
Commenter  J’apprécie          30
Si le garçon qu'il était à vingt ans lui apparaît aujourd'hui comme un double lointain dont il appréhende mal le caractère, les élans et les rêveries, celui qui s'élança la même année sur les routes américaines, et avec lui tous les Christophe qui ont frémi d'excitation, de peur et d'enthousiasme sur les chemins du monde, sont des frères qui vivent en lui pour toujours.
Commenter  J’apprécie          30
Mrs Wang en convalescence, nous mîmes la musique à fond, "Hollywood Nights" de Bob Seger et "Hot Blooded" de Foreigner. Sur le petit matin, ses ongles m'écorchant le dos, Manuela m'exhorta à lui faire un enfant. Déjà soucieux des problèmes de surpopulation de la planète, je jugeai plus judicieux, Manuela s'étant égarée un instant sous les draps, d'en profiter pour lui jouir dans la bouche.
Commenter  J’apprécie          20
Désormais, seule l'écriture me poussait à partir. J'avais ainsi du mal à profiter de l'instant présent et retirais plus de satisfaction "après" que "pendant", "d'y être allé" plutôt que "d'y être". Et ce ne serait qu'une fois transformé en fiction romanesque que le voyage m'apparaîtrait plaisant et peuplé de bons souvenirs.
Commenter  J’apprécie          20
Je débutais toujours mon petit laïus d'introduction en évoquant le jeu de mot persan "Esfahan Nesf-e Jahan" qui faisait d'Ispahan "la moitié du monde", un des joyaux de l'univers, notre ville-jardin, "la rose fleurie du paradis", une oasis verdoyante perchée à plus de quinze cents mètres, dominant l'immense plateau désertique iranien. Capitale des Safavides au dix-septième siècle, la ville avait alterné destructions et renaissances, au carrefour des routes commerciales entre la Chine et l'Europe, le golfe Persique et la Russie.
Commenter  J’apprécie          20
Je ne voyais plus grand-monde désormais. Sentant que je ne lui proposerais jamais de raffermir nos liens, par nature distendus avec un garçon aussi peu engagé que moi, ma petite Valérie avait demandé sa mutation dans un lycée du Cher pour être plus proche de sa mère malade. Dans son volume de poésies Urban Melancholia, mon vieil ami londonien, Peter Chambers, évoquait la fin d’une histoire d’amour pour cause de « missing engagement ring », la bague que je ne passerais jamais au doigt de Valérie. Nous nous étions promis de nous revoir à l’occasion mais, les mois passant, celle-ci ne se présenta pas – un petit gâchis de plus dans ma hotte déjà bien garnie - et je jetai peu à peu les rares objets témoignant de son bref passage dans ma vie : une brosse à cheveux, une boîte pour lentilles de contact, une petite culotte de rechange, une paire de mules roses. Il me fallait bien l’admettre, je ne serais jamais doué pour les romances, trop indépendant, trop épris de solitude. Me revenait alors en mémoire une phrase de Montherland : « Vive celui qui m’abandonne : il me rend à moi-même. » Je ne ressentais aucune motivation à l’idée de nouer une nouvelle relation, devoir égrener une fois encore – une dernière fois ? - les étapes d’un parcours qui ne cessait de s’allonger avec le temps, s’abandonner à la frénésie sexuelle des débuts et glisser peu à peu vers une conjugalité de confort, passer par-dessus les défauts d’une autre, tout en faisant accepter les miens. Ma mécanique sentimentale avait du plomb dans les rouages.
Commenter  J’apprécie          20
-(... )Et vous, comment est votre canard?
De la pointe de son couteau, Mark souleva un morceau de viande d'un air dubitatif.
- Mort. C'est le plus important, non? En espérant qu'il n'était pas porteur du H7N9...
- Sous-marin coulé!
- S'alimenter est devenu une aventure périlleuse. Vous verrez, ni vous ni moi n'en sortirons vivants....
Commenter  J’apprécie          20
Je me glisse entre tes draps blancs
Café Noir
Tu es belle à croquer
Chocolat Noir
Choisir entre ce boudin blanc
Et la peau noire (non !)
Tes courbes profilées
La grâce d'un Renoir
Commenter  J’apprécie          20
Ce grand écart entre ivresse et fragilité finit par pousser Christophe à la faute.
(...)
François, qu'il a déçu à New York, sait avoir la dent dure, qui le décrit en " baba cool de droite", épinglant ce nonchalent qui, sous des allures libres, ne remet rien en cause.
Commenter  J’apprécie          20
- Pendant les actes sexuels, vous avez utilisé un préservatif ? demande Sylvie Galley, très attentive aux détails car, on le sait, c’est là que réside le diable.
- Oui.
- Vous aviez emporté une boîte avec vous, dans votre valise ?
- Oui.
- Qu’en avez-vous fait après usage ?
- Je les ai jetés dans les W.-C.
- Les W.-C. ont été explorés, on n’a rien retrouvé.
Coincé. Une autre image vient alors à l’esprit, celle du taureau dans l’arène, harcelé par les banderilles plantées par le matador.
- Vous avez aimé Narumi ? reprend l’avocate de sa voix douce, enveloppante.
- Oui, sa disparition me fait de la peine.
- Elle n’est toujours pas morte pour vous ? Qu’est-ce qu’elle fait alors depuis cinq ans et demi, Narumi ?
- Croyez-moi, j’aimerais aussi le savoir.
- Vous lui avez fait quoi, à Narumi ?
- Nada. Rien.
- Les cris, deux minutes, puis un silence, et à nouveau deux minutes de cris, puis un silence, puis deux minutes de cri… Six minutes, Monsieur Zepeda, c’est long pour mourir.
- Je n’ai rien entendu de tout cela.
Un temps de silence.
- Six minutes…, répète Sylvie Galley en faisant signe qu’elle en a terminé.
Commenter  J’apprécie          10
Lorsqu’ils ne se détestent ou ne se jalousent pas, des affinités, des sympathies peuvent naître entre écrivains. Séparément, et parfois ensemble pour des récits de voyage à quatre mains, Christian Garcin et Éric Faye parcourent le monde, puisent leur inspiration et leur énergie dans les histoires et les paysages d’un ailleurs lointain. Au gré de nos écrits, l’Argentine, le Japon, la Chine ont pu nous réunir. Mais un thème souterrain nous relie, comme une obsession lancinante. Dans Des femmes disparaissent, le détective privé de Christian se lance sur les traces de ces jeunes Chinoises vendues par leur famille à des paysans frustes et brutaux en manque d’épouses. Éric, dans ses Éclipses japonaises, décrit le destin tragique de ces Japonaises enlevées à la fin des années 1970 par les services secrets nord-coréens pour servir de « formatrices » aux espions de la dynastie Kim et leur apprendre la langue et les coutumes de leur pays.
Pas moins de quatre de mes romans tournent autour d’une histoire de disparition. À ce niveau-là, cela ne relève plus du simple hasard. Il est vrai qu’il s’agit d’un ressort romanesque imparable. Quelqu’un est là, plus ou moins proche de vous, et le temps de tourner la tête, il ou elle a disparu, créant un gouffre sans fond. Benoît, dans La Grande Vague, se rend à Kyoto à la recherche de Yuko, son amoureuse de la Sorbonne, dont il n’a plus de nouvelles après le tsunami de 2011. Des hommes en quête de femmes qui ont disparu en Asie. Et me voilà écrivant sur Tiphaine et Narumi.
Commenter  J’apprécie          10
Au début, Grandet m’accompagna inspecter des rizières. Là, je regardais des femmes à chapeaux coniques, pantalons retroussés sur les cuisses, repiquer des jeunes plants trop à l’étroit dans leur premier enclos ; les buffles tiraient la charrue puis, avec la moisson venait le temps des touffes de riz liées en gerbes, des grains battus et vannés avec des mouvements lents et aériens de danseuses khmères. A l’ombre sous un appentis, devant une citronnade, Grandet me racontait des histoires de la colonie.
Commenter  J’apprécie          10
Christophe Masson
Je gardais toutefois les romans d’Antoine Blondin, l’homme qui m’avait donné envie de devenir écrivain. Je l’avais rencontré dans sa retraite du Limousin, où nous avions passé la journée à boire et à évoquer le souvenir de ses années parisiennes et de ses amis morts – de quoi remplir une belle Pléiade de l’amitié : Marcel Aymé, Roger Nimier, Paul Morand, Céline… J’avais alors vingt-cinq ans et Antoine soixante. Et voilà qu’à mon tour, la boucle bouclée, j’avais soixante ans et un faux-fils de vingt-cinq ans prénommé Antonio. Mes admirations de jeunesse – Blondin mais aussi Johan Cruyff et David Bowie – étaient tous morts à soixante-neuf ans, emportés par un cancer. Il n’en fallait pas plus pour me persuader que j’étais entré dans ma dernière décennie. Cela tombait bien, je ne tenais pas à devenir, tel le narrateur de Monsieur Jadis, « un de ces vieux messieurs qui ont gardé le cœur jeune ».
Commenter  J’apprécie          10
Et vous, comment est votre canard?
De la pointe de son couteau, Mark souleva un morceau de viande d'un air dubitatif.
-Mort. C'est le plus important, non? En espérant qu'il n'était pas porteur du H7N9...
- Sous-marin coulé!
- S'alimenter est devenu une aventure périlleuse. Vous verrez, ni vous ni moi n'en sortirons vivants...
Commenter  J’apprécie          10
Les hommes ont besoin qu'on leur raconte des histoires pour tromper l'atroce banalité de la vie.
Commenter  J’apprécie          10



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Auteurs proches de Christophe Masson
Lecteurs de Christophe Masson (44)Voir plus

Quiz Voir plus

Les romans de Christophe Masson (quiz un rien mégalo)

Son premier récit autobiographique s'intitule

Françoise et Christophe
Pascale et Christophe
Joelle et Christophe
Nadine et Christophe

10 questions
5 lecteurs ont répondu
Thème : Christophe MassonCréer un quiz sur cet auteur

{* *}