Sa grand-mère, chez qui il a vécu pendant la rupture de ses parents, est morte maintenant. Il n'y a pas un seul jour où il ne souffre pas de cette absence. Elle disait que, si elle avait pu tout recommencer, elle ne serait jammais remontée dans la voiture. Elle serait restée et se serait prostituée plutôt que de rentrer. Neuf enfants, elle a mis au monde. Quand il lui a demandé ce qui l'avait poussée à remonter dans la voiture, elle a répondu : "L'époque l'imposait. C'est ce que je croyais. Je pensais ne pas avoir le choix." Sa grand-mère est morte, mais il a vingt et un an, il habite un endroit sur terre, il a d'excellentes notes à Harvard, il marche sur une plage au clair de lune sans aucune restriction de temps.
Là où il y a un secret, dit-elle, il y a de la honte, et nous n’avons pas besoin de honte.
"On peut se délecter de l'histoire. Les événements récents sont d'une autre nature et douloureux à la mémoire."
De petits trucs, telle est l'utilité des pères, à ce qu'elle peut voir. Des détails pratiques.
- Voilà, dit-elle.
- Maman dit qu'il faut que je change de culotte tous les jours.
-Et qu'est-ce qu'elle dit encore, ta maman ?
-Elle dit que vous pouvez me garder aussi longtemps que vous le voulez.
A ces paroles, elle rit et me démèle les cheveux avec la brosse, et reste silencieuse. Les fenêtres de cette pièce sont ouvertes et dans leur encadrement je vois une étendue de gazon, un jardin potager, des plantes comestibles qui poussent en rangées, des dahlias rouges hérissés, un corbeau avec quelque chose dans son bec qu'il casse lentement en deux et mange, une moitié puis l'autre.
Un très beau roman, bref mais poétique. Un petit bijou.