Série TV - The Terror (2018)
La première saison est ladaptation du roman "Terreur" de Dan Simmons.
Au commencement était le verbe. Puis arriva le traitement de texte, et leur foutu processeur de pensée. La mort de la littérature s’ensuivit.
Mr Thorne m'aurait apporté le journal du matin sur le plateau, mais j'avais appris depuis longtemps que la lecture des folies et des scandales de ce monde ne sert qu'à profaner le lever du jour.
Les mots sont les objets suprêmes. Ce sont des choses dotées d'esprit.
Les animaux avaient refait leur apparition en même temps que le soleil et la mer, dans le ciel comme dans les eaux. Durant les longues journées de l'été arctique, où l‘astre du jour demeurait au-dessus de l'horizon presque jusqu'à minuit et où les températures montaient parfois au-dessus de zéro, les cieux s'emplissaient d'oiseaux migrateurs. Franklin lui-même parvenait à distinguer les pétrels des sarcelles, les eiders des mergules et les petits macareux des autres oiseaux. Autour de l'Erebus et du Terror, les chenaux de plus en plus larges grouillaient de baleines franches qui auraient pu faire saliver un baleinier yankee, sans parler des morues, harengs, et autre menu fretin (...).
Si notre société devait un jour opter pour une dictature à la George Orwell, le meilleur instrument d'oppression serait sans doute le sillage laissé par la carte bancaire. Dans une économie sans espèces, avec un marché noir de troc réduit à l'état de curiosité historique, les activités d'un individu pourraient être pistées en temps réel par la simple étude du sillage monétaire tracé par sa carte universelle. Il y a des lois très strictes sur la protection des libertés individuelles, mais les lois ont la mauvaise habitude de s'effacer ou de se faire abroger chaque fois que la pression sociale se transforme en poussée totalitaire.
Même privé de lanterne, Crozier se déplacerait sans peine dans ces ténèbres infestées de rats; il connaît chaque centimètre carré de ce navire. Parfois, et notamment la nuit, lorsque gémit la glace, (...) Crozier comprend pour de bon que le HSM Terror est son épouse, sa mère, sa promise et sa putain. Cette intimité avec une dame faite de chêne et de fer, d'étoupe et de lest, de toile et de cuivre, est le véritable mariage qu’il connaîtra jamais.
Sous les yeux de Crozier, les champs de glace fracturés qui entourent le bateau virent au bleu, puis au violacé, pour devenir aussi verts que les collines de l’Irlande du Nord de son enfance. À près d’un mille côté tribord, l’immense montagne de glace flottante qui dissimule l’Erebus, le sister-ship du Terror, semble, l’espace d’un instant trompeur, rayonner d’une couleur intérieure, d’un feu glacial brûlant dans ses entrailles.
Crépuscules fragiles passant du violet au fuchsia puis au pourpre au-dessus des silhouettes de papier crépon des arbres qui prolongent la perspective de la pelouse au sud-ouest. Le ciel, que ne trouble aucun nuage ni aucune trainée de condensation, a la transparence délicate de la porcelaine de Chine. Silence présymphonique de la première lueur de l'aube, suivi du coup de cymbale du lever de soleil dont l'orange et le roux s'illuminent d'or. Puis c'est la longue et froide descente vers le vert : ombres des frondaisons de cyprès et de saules pleureurs, feutre vert des clairières.
Tous, nous représentons aussi bien des îlots de temps que des océans distincts de perspective.
Sur l'ancienne terre, au XXe siècle, une chaîne de restauration rapide a fait fortune rien qu'en vendant à ses clients de la vache morte frite dans de la graisse, assaisonnée de produits cancérigènes et emballée dans de la mousse à base d'hydrocarbure.