Wajdi Mouawad interprète le rôle du juge Avishai dans le texte de
David Grossman, Un cheval entre... .
Wajdi Mouawad interprète le rôle du juge Avishai dans le texte de
David Grossman, Un cheval dans un bar. Une fiction enregistrée au musée Calvet d'Avignon, à retrouver ici : http://bit.ly/2uiEaiS
Quand on est petit, vous savez, et qu'un adulte accepte de jouer avec vous, on a toujours peur qu'il se lasse, consulte sa montre ou ait autre chose de plus urgent à faire, non?
Mais pas ma mère. Elle ne se fatiguait jamais avant moi et, quoi qu'il arrive, je savais qu'elle ne s'interromprait jamais la première.
C'est quelque chose qui vous insuffle de la force pour toute la vie, quelque chose qui vous rend heureux, hein?
Elle était très jeune, ignorant que l’on pouvait faire l’amour dans les rires. Elle ne savait pas non plus que son corps était aussi insouciant, espiègle et joyeux.
Qu’est-ce qui fait que deux êtres forment un couple ? Une étincelle ? Un attachement ? Une appartenance ? Un battement de paupières rêveur accompagnant un regard apparemment anodin ? Tout est possible. Mais le plus important : la sensation d’être chez soi.
Les familles...Tant de variables, de parenthèses, de multiplications par des puissances, toutes ces complications, ce besoin constant d'être "en relation" avec tous les autres membres de cette famille, à n'importe quel moment, de jour comme de nuit, même en rêve.
C'est comme recevoir en permanence des décharges électriques, ou vivre dans un éternel orage.
Quand les enfants étaient petits, ils adoraient étendre le linge ensemble à la nuit tombée - la dernière tâche domestique après une dure journée.
Ils transportaient la grande bassine dans le jardin, face aux champs obscurs.
Le grand figuier et les grévilléas bruissaient doucement d'une vie riche et mystérieuse, tandis que les cordes ployaient sous de minuscules vêtements, pareils à des hiéroglyphes en miniature : chaussettes microscopiques, bodys, chaussons, pantalons à bretelles, salopettes aux couleurs vives.
Je veux être prêt pour la prochaine fois que cela arrivera. Pas seulement pour pouvoir me séparer des autres sans trop souffrir, mais pour pouvoir aussi me séparer de moi-même. Je voudrais être capable d’effacer tout ce qui, en moi, menacé d’annihilation, d’avilissement, pourrait provoquer une douleur intolérable. (p.178)
Je suis convaincu qu’ils se seraient depuis longtemps levés pour partir, voire qu’ils auraient sorti le clown de scène à coups de sifflets et de huées, n’était la tentation à laquelle il est si difficile de résister : la tentation de lorgner l’enfer d’autrui.
Elle qui, chaque fois qu'elle passait de la 4e à la 3e vitesse, paniquait à l'idée d'avoir enclenché la marche arrière, voilà qu'elle donnait la vie à une autre personne !
« Un poème, c’est comme un flirt, me dit-elle en souriant dans le noir, un roman ressemble davantage au mariage : tu vis avec les personnages longtemps après que l’amour et le désir des débuts se sont éteints » (p.173)
Faire un petit pli dans la mémoire, c'est ce que signifie un secret.