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Citations de Delphine Horvilleur (635)


Mon fils est rentré à la maison, un peu plus tard. Je me suis tournée vers lui, et j’ai dit :

« Tu sais ce que tu aurais de mieux à faire ? Retirer de ton cou ton étoile de David. J'aimerais bien que tu l'enlèves, quelques jours ou quelques semaines seulement, juste le temps que les choses s'apaisent un peu. Tu veux bien, dis ? »

Mon fils m’a regardée droit dans les yeux. Il s'est approché de moi tout doucement et il m’a prise dans ses bras. Ensuite, il a murmuré à mon oreille : « Pas question, maman ! Je la garde. »

Mon enfant m’a donné une leçon qui jaillit toujours à rebours dans nos histoires, la leçon qu'un fils donne à sa mère, ou que chaque génération offre à la précédente quand elle lui tient tête. Et je me suis sentie terrorisée, angoissée, bouleversée, mais incroyablement fière.

« II était une fois. .. les mères juives. »
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Voilà que les juives sont devenues des hommes même quand elles sont complètement des femmes. Vous me suivez ? Ainsi, se multiplient dans les cortèges pro-palestiniens les drapeaux de soutien des militantes féministes et de la cause LGBT, qui vont trouver des excuses, ici et là, à la violence sexuelle ou à l'homophobie du Hamas. Toute guerre n'est-elle pas d'abord une guerre des sexes ? La convergence des luttes y castre très efficacement la parole.
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« Tu n'as rien de mieux à faire ? »

Les générations sont-elles condamnées à répéter les mêmes phrases ? Apparemment oui. Ces mots entendus tant de fois dans l'enfance, je les énonce à mon tour aujourd'hui pour tenter d'affirmer la même autorité, ou presque. Dire à mes enfants qu'il y a autre chose à apprendre et à connaître dans la vie que le simple divertissement.

« Prends plutôt un livre ! »

Je suis devenue la vieille shnok qui leur dit à peu près ce qu'elle a reproché à d’autres vieux shnoks de lui rabâcher, quelques années plus tôt. C'est fou comme le temps qui passe nous rapproche de nos parents. Nos enfants les vengent, en nous transformant en eux. Implacable enchaînement des générations.

Exactement comme on me demandait, à moi, d'éteindre la télé, je menace de couper le wifi.
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... parce que là où du temps d'Albert Cohen, ou même de Wilhelm Marr, on disait toujours aux juifs d’« aller voir à Jérusalem » si on y est, de « déguerpir en Palestine » pour libérer l'Europe de leur présence... aujourd'hui, on leur hurle précisément le contraire : « Quittez Jérusalem » et « Libérez la Palestine» de votre corps, de votre histoire, ou mieux, de votre vie.
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Quand mon grand-père parlait de la France, glorieuse et résistante, il en offrait un récit de gratitude éternelle. Il devenait alors le parfait Juif français, celui qu'on appelait jusque récemment un « israélite ».

L'israélite est un patriote dont le judaïsme est affaire de discrétion absolue, et de pratique exclusivement domestique. Mon grand-père fût ce marrane de la République, un juif parfaitement assimilé, comme on n'en fait plus.
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(Papi) était aussi adroit avec les règles de grammaire que gauche avec celles de l'intelligence relationnelle. Cachez ce sanglot que je ne saurais voir.

Un jour, par exemple, après avoir lu La Nuit d'Elie Wiesel, j’ai écrit à mon Papi un bref message. Je voulais absolument partager avec lui mon émotion de lectrice, lui dire combien j’étais ébranlée par ce témoignage poignant sur la déportation.

Le lendemain, j’ai reçu une longue lettre en retour : elle m'apprenait de façon bouleversante que « génocide prend un accent aigu et non circonflexe»... Je le reconnais: la déclaration d'amour était de taille.
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(…) parfois, quand rien ne va, je me souviens des origines méconnues de cette expression quotidienne. « Comment ça va ? »

Au Moyen Age, on demandait ainsi à l'autre « comment il va... à la selle ». Tel était l'indicateur principal de son état de santé : la consistance, la fréquence ou l'odeur de ses défécations.

Notre « comment ça va » est donc une abréviation sanitaire, le résidu lexical d'une question physiologique. Bref, une question merdique !
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Tiens, tu la connais, celle-là ?

C'est l'histoire de deux juifs qui ont traversé ensemble bien des épreuves et des tragédies. Et puis la vie les a séparés. Ils se sont perdus de vue pendant des dizaines d'années. Jusqu ci ce que miraculeusement, ils se retrouvent un jour, totalement par hasard.

Le premier dit à l'autre : «Je suis tellement heureux de te revoir, Moishé, Mais, dis mol, que deviens-tu ? Comment ça va ?»

Sans trop y réfléchir, Moishé répond:

« Bien !

— Mais sérieusement, Moishé, dis-m'en davantage : comment ça va ? En deux mots.. .

— En deux mots ? ... Pas bien ! »
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Figurez-vous que chaque année, le soir, de la fête de Pâques, les juifs ont l’habitude de se réunir en famille, de s’asseoir autour d’une table et de raconter à nouveau l’épisode de la sortie d’Égypte. Ils pourraient regarder le film de Walt Dysney (le prince d’Égypte) Mais ils se racontent cette histoire du passé lointain, celle de leurs ancêtres et, au moment précis où ils s’apprêtent à raconter cette histoire , ils disent la chose suivante : « à chaque génération, chacun doit se percevoir, comme s’il était lui-même, sorti d’Égypte. ». la particularité de cette histoire du passé, c’est qu’elle n’est pas du passé. Se passé ne passe pas et cette histoire n’est plus linéaire. Ce n’est pas dans une histoire collective et lointaine, mais proche et personnelle. Je dois me souvenir, en ce jour, comment je suis sortie d’Égypte. dès lors, je dois m’interroger très concrètement. Quel est mon Égypte, où est-elle. Qu’est-ce qui dans ma vie fait parfois de moi une esclave et qui est mon pharaon ? Est-ce mon professeur principal, ma mère, ma belle-mère, ma console de jeux ? quelles sont les plaies qui s’abattent sur mon monde et me permettent de sortir de cet esclavage personnel? Quelle est ma terre promise ?
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J'ai fini par comprendre combien j'avais besoin de m'entourer de gens qui se savent hantés. Des êtres qui accueillent les fantômes de leur histoire et les font parler dans ce qu'ils disent, écrivent, composent, chantent ou construisent. J'ai besoin de m'entourer de ceux qui savent ce qu'ils doivent à leurs revenants, et qui ne font pas comme si le passé était passé.
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On ne sait pas davantage ce que ça veut dire d'"être juif" que ce que ça veut dire de "détester les juifs". On sait juste que le judaïsme, ça s'attrape par la mère et l'antisémitisme par l'amer, une aigreur terrible que rien n'adoucit ni n'explique. Va savoir si c'est contagieux, ou si ça se soigne. Pfff....
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... alors qu'ils sont morts... Les absents sont toujours plus bavards que les présents... Et c'est encore plus vrai quand l'histoire les siffle et qu'ils répondent à l'appel. Et le 7 oct 2023, y'a pas à dire, l'Histoire leur a envoyé une sacrée convocation
(p. 31)
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Des salopards voudraient nous forcer a une surdité partielle, au nom du contexte, de mémoires sélectives ou de dettes identitaires. Il faudrait n'entendre que les voix qui hurlent d'un côté ou d'un autre. Depuis les Kibboutzim du Néguev et les familles endeuillées d'Israël, ou depuis les champs de ruine de Gaza ou les villages de Cisjordanie.
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Si Jacob ne devient pas Israël, alors il devient Esaü, un homme de la force qui ne connaît qu'elle, et ne vit que par elle,un homme qui idolâtre la terre et soumet ses habitants. Moi, petite juive de diaspora, héritière des Jacobs boiteux de l'Histoire, je regarde ce pays que j'aime, et je redoute par dessus tout son "Esaü-isation". Je voudrais tant qu'il sorte de cette nuit autrement. Transformé par sa blessure.
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Ainsi, s'expose toujours la laideur du monde : eIle s'en prend au langage, avant toute chose. Elle le massacre en premier. La beauté disparait dans les mots des hommes, puis dans leur monde. Je ne sais d'où viendra le Messie et s'il a la moindre raison de venir. Il me semble qu'il ne sera ni ministre, ni général ni stratège, mais peut-être poète ou exégète, un homme ou une femme qui sait écouter les mots, jouer avec eux, et reconstruire ainsi un autre monde.
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Et si, demain, certaines espèces animales viennent à s’éteindre, ils seront évidemment les principaux coupables. Imaginez que les zèbres disparaissent, il faudra bien l’admettre : ce sera de la faute des Hébreux. Le monde est dans la mouise ? C’est la faute à Moïse !
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On ne sait pas davantage ce que ça veut dire d’« être juif » que ce que ça veut dire de « détester les juifs ». On sait juste que le judaïsme, ça s’attrape par la mère et l’antisémitisme par l’amer, une aigreur terrible que rien n’adoucit ni n’explique. Va savoir si c’est contagieux, ou si ça se soigne. Pfff…
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Je me souviens d’un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître, où pour beaucoup d’entre nous, il était clair que la lutte contre le racisme et l’antisémitisme ne faisait qu’un. On savait bien qu’on ne viendrait pas à bout de l’un sans se mobiliser contre l’autre. Je continue à penser cela, très précisément, et à refuser de choisir un combat prioritaire ou d’établir une quelconque hiérarchie entre ces haines. Mais je me sens étrangement beaucoup plus seule aujourd’hui
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On ne sait pas davantage ce que ça veut dire d’« être juif » que ce que ça veut dire de « détester les juifs ». On sait juste que le judaïsme, ça s’attrape par la mère et l’antisémitisme par l’amer, une aigreur terrible que rien n’adoucit ni n’explique. Va savoir si c’est contagieux, ou si ça se soigne. Pfff…
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Vivants, ils n’ont jamais vraiment conversé. Alors, soyons bien clairs : s’ils se parlent aujourd’hui dans ces pages, alors qu’ils sont morts depuis très longtemps, c’est uniquement parce que les absents sont toujours plus bavards que les présents. Les revenants ont la tchatche, surtout si, de leur vivant, ils n’ont pas réussi à dire. Et c’est encore plus vrai quand l’Histoire les siffle et qu’ils répondent à l’appel.
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