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Citations de Dolores Redondo (268)


Après l'ouragan Katrina

Mais immédiatement le Zodiac se mit à reculer vers le nord. Ils se regardèrent avec étonnement et saisirent les rames. L'eau atteignait le niveau des toits de la plupart des maisons de la rue et cachait les plus basses dont on ne voyait que le haut de la toiture. Le courant venait de River Road : l'eau boueuse du fleuve avait envahi la rue du même nom, tourbillonnant à l'endroit où les deux voies se croisaient. Il était impossible de ne pas songer aux familles qui avaient peut-être résisté dans ce quartier sans penser à leur sort et à cette boue marron provenant du fleuve qui conservait encore, pour l'heure, son odeur minérale et commencerait à empester dès que monterait la température.

Mais quand ils arrêtèrent le moteur, ils prirent conscience, avant tout, du silence, ou plutôt du nouvel ordre du son, de la façon dont les ondes se déplaçaient sur l'eau, de la manière dont ils avaient perdu leurs références visuelles et aussi auditives. Pendant le trajet, ils avaient levé la tête, alertés par le passage imminent des hélicoptères des garde-côtes qui survolaient la ville dans toutes les directions. Rien d'autre. Lorsqu'on y prêtait attention, on parvenait à entendre une rumeur lointaine, comme celle qu'on perçoit d'une colline aux environs d'une grande ville. Une rumeur qui indique qu'il y a une vie quelque part mais si légère qu'un susurrement, le clapotis ou le moteur du Zodiac la faisait disparaître , comme si cela n'avait été qu'un écho, une illusion ou un souvenir de ce que le monde avait été.

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La Nouvelle Orléans - Louisiane avant l'ouragan

Et hormis aux abords immédiats du commissariat, il n'y avait personne. Elle aperçut la moitié du visage d'une femme à sa fenêtre, derrière un rideau en dentelle qu'elle tenait comme un éventail ouvert pour espionner à travers. Sa mémoire vola jusqu'à Elizondo, la rue de Santiago et le millier de fois dans sa vie où elle avait vu faire ce geste à une fenêtre. Elle était sûre que les vitres teintées de la voiture empêchaient la femme de la voir, pourtant, obéissant à une loi universelle, quand la voiture passa, la femme lâcha le rideau et recula pour se cacher.

page 146
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Amaia sourit aux souvenirs des légendes que lui avait racontées tante Engrasi dans son enfance. Il n’était pas étrange, au milieu de cette forêt, de croire à l'existence de ces créatures magiques qui avait forgé la culture ancestrale de la région. Toutes les forêts sont puissante, certaines redoutables car profondes et mystérieuses, d'autres sombres et sinistres. Dans le Baztán, la foret est fascinante, d'une beauté sereine et ancestrale qui symbolise malgré elle son visage le plus humain, le plus éthéré et enfantin, celui qui croit aux fées merveilleuses qui vivaient dans la forêt, et qui dormaient toute la journée pour sortir à la tombée de la nui afin de coiffer leurs longs cheveux dorés avec un peigne d'or qui conférait à son possesseur le don de voir ses réaliser n'importe quelle faveur. Faveur qu'elles accordaient aux hommes qui, séduits par leur beauté, leur tenaient compagnie, sans être épouvantés par leurs extrémités palmées. Amaia sentait dans cette forêt des présences si tangibles qu'il était facile d'y accepter l’existence d'un monde merveilleux, un pouvoir de l'arbre supérieur à l'homme, et d’évoquer le temps ou, en ces lieux et dans toute la vallée, êtres magiques et humains vivaient en harmonie.
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Si vous voulez y comprendre quelque chose, arrêtez de vous demandez si c'est logique et commencez à admettre que c'est réel, que la foi a des conséquences dans la réalité et qu'il y a des gens prêts à mourir et à tuer au nom de ce qu'ils croient.
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L'histoire de l'humanité est l'histoire de ses peurs. Mais les mythes pour les définir, les nommer et tenter de les contrôler sont différents.
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Ce que la chenille appelle fin, le reste du monde l'appelle papillon.
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Engrasi plia soigneusement sa serviette en disant :
-James, la douleur est parfois si profonde et enkystée qu'on souhaite et qu'on croit qu'elle va rester là, cachée et muette, qu'on refuse d'admettre que celles que l'on n'a pas pleurées et expiées en leur temp puissent revenir régulièrement dans notre vie tels les vestiges d'un naufrage. Elles échouent sur la plage de notre réalité pour nous rappeler qu'il existe une flotte fantôme immergée, qui ne nous oublie jamais et qui reparait progressivement pour nous réduire en esclavage à vie. Ne reproche pas à ta femme de ne pas t'en avoir parlé. Je ne crois pas qu'elle y ait songé elle-même aussi clairement une seule fois depuis la nuit où c'est arrivé.
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Oublier est un acte volontaire. Plus on essaie de laisser quelque chose derrière soi, plus cette chose vous poursuit.

WILLIAM JONAS BARKLEY
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La vérité ne vaudrait-elle que lorsqu'elle nous montre ce que nous voulons bien voir? Quand elle nous apporte un soulagement face aux ravages de l'incertitude? Et si, au lieu d'un baume qui vient apaiser nos blessures, la vérité n'était qu'un autre acide, plus virulent encore?
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«  Lire était une défense, un bouclier pour pallier ses difficultés à communiquer.
Mais écrire était infiniment plus que cela. L’écriture était un palais, un gigantesque labyrinthe dont il arpentait, pieds nus et le sourire aux lèvres, les pièces secrètes où il s’arrêtait pour caresser des trésors . »
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Tu sais ce que je crois, Flora ? Je crois que tu fais partie de ces femmes dévouées qui se consacrent corps et âme à soutenir une famille, dans le seul but de disposer d’une bonne dose de culpabilité et de reproches dont elles peuvent accabler les autres, jusqu’à ce qu’elles se retrouvent avec leur abnégation et leurs récriminations mais plus personne autour d’elles pour en entendre parler. Voilà ce qui t’arrive, Flora. En fin de compte, dans ta tentative de moraliser, de diriger et de mener tout le monde à la baguette, tout ce que tu obtiens, c’est de faire le vide autour de toi. Personne ne t’a demandé d’être une héroïne ou une martyre. 
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Quand Amaia Salazar avait douze ans, elle se perdit dans la forêt pendant seize heures. On la retrouva à l'aube à trente kilomètres au nord de l'endroit où elle avait quitté le chemin. Évanouie sous une pluie battante, les vêtements noircis et roussis comme ceux d'une sorcière médiévale rescapée d'un bûcher. En revanche, sa peau était blanche, propre et froide comme si elle venait de sortir de la glace.

Début du prologue
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Dans le Batsan, la nuit était obscure et sinistre. Les murs du foyer délimitaient depuis toujours le périmètre de sécurité, et, en dehors, tout était incertain. Il n’était pas étonnant que cent ans au plus tôt à peine, neuf habitants sur dix au Baztan aient cru à l’existence des sorcières, à la présence du mal se tenant aux aguets dans la nuit et aux incantations magiques pour tenir les uns et les autres au respect.
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Des terroristes détruisent le World Trade Center et le pays bascule dans le malheur, mais quand une ville entière à forte population noire disparaît sous l'eau, qu'est-ce que ça peut faire ? Aurait-on trouvé normal que quatre jours après la destruction des tours jumelles l'aide ne soit toujours pas arrivée ?
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La loyauté, ce n'est pas tout se dire, c'est se dire l'essentiel.
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Ce jour-là, il plut sans discontinuer. Depuis presque deux semaines qu’il était en Galice, il avait appris à ne pas se fier aux promesses d’un ciel dégagé qui, en quelques heures, pouvait se couvrir au point d’anéantir tout espoir d’amélioration, mais il avait aussi assimilé le savoir propre aux gens d’ici qui leur permettait d’identifier les journées où il ne cesserait pas de pleuvoir. La pluie madrilène était nerveuse, rapide et impétueuse. Imprégnée de la saleté des trottoirs, elle filait vers les égouts et disparaissait de l’atmosphère lorsqu’elle cessait de tomber. Ici, en revanche, la terre absorbait l’eau, l’accueillait comme un amant avide et, quand la pluie s’arrêtait, sa présence demeurait dans l’air comme un spectre palpable susceptible de se matérialiser à nouveau à tout instant.
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Elles descendirent l'escalier en silence, percevant l'ambiance étrange que l'on respirait dans la maison en l'absence de la tante. Les meubles, les plantes, les innombrables bibelots, semblaient assoupis sans elle, comme si, sans leur propriétaire, toutes ces choses avaient perdu leur authenticité et qu'elles étaient devenues un peu floues, les contours qui les maintenaient dans la réalité s'étaient dissipés.
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Elle avait peur et n'aimait pas ça du tout. Elle n'était pas idiote, savait que la peur maintient les policiers en éveil, vigilants et prudents, mais celle qu'elle éprouvait n'était pas du type qui accélère le pouls quand on arrête quelqu'un d'armé ; c'était l'autre, la peur ancienne et intime, celle qui pue l'urine et la sueur, la vieille peur dans l'âme qu'au cours de la dernière année elle avait pu tenir à distance et qui, à présent, réclamait son territoire. Le territoire de la peur. Elle l'avait déjà connue, savait dès le départ qu'elle ne pouvait pas gagner contre, et que la seule sagesse était de l'affronter, encore et encore.
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Lire était une défense, un bouclier pour pallier ses difficultés à communiquer. Mais écrire était infiniment plus que cela. L'écriture était un palais, un gigantesque labyrinthe dont il arpentait, pieds nus et le sourire aux lèvres, les pièces secrètes où il s'arrêtait pour caresser des trésors.
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Quand on décide qu'on aime tellement quelqu'un qu'on renonce à tous les autres, on ne devient ni aveugle, ni invisible, on continue de voir et d'être vu. On n'a aucun mérite à être fidèle quand on n'est pas tenté par ce qu'on voit, ou quand personne ne nous regarde. La véritable épreuve se présente quand apparaît quelqu'un dont on tomberait amoureux si on n'était pas en couple, quelqu'un qui est à la hauteur, qui nous plait et qui nous attire. Quelqu'un qui serait la personne idéale si on avait pas déjà élu une autre personne idéale. C'est ça la fidélité, inspectrice. Ne vous inquiétez pas, vous vous en sortez très bien.
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