Avec Jean-Noël JEANNENEY, Sandrine TREINER
A l'occasion de la publication des ouvrages : Elie Barnavi, Confessions d'un bon à rien (Grasset) ; Jean-Noël Jeanneney, le Rocher de Süsten. T.2 : Mémoires (1982-1991) : de Radio France au bicentenaire de la Révolution (Le Seuil)
L'un comme l'autre ont choisi des vies d'historiens, ils sont à cet égard, dans leur domaine, des références incontournables. L'un comme l'autre ont choisi d'être, outre des chercheurs, des intellectuels, et n'ont pas hésité à prendre des responsabilités politiques lorsque l'occasion ou la nécessité leur ont proposé des bifurcations provisoires. Cependant, leurs origines nationales et familiales se situent aux deux extrêmes de l'Europe, qui par ailleurs, les réunit. Venus de mondes très différents, ayant vécu sous des latitudes également différentes, ils se sont confrontés aux turbulences, et parfois au tragique de l'époque. Elie Barnavi et Jean-Noël Jeanneney publient leurs mémoires et c'est l'occasion d'un dialogue sur l'Histoire, le présent et sur la vie, en somme.
Sandrine Treiner
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La religion ajoute à la guerre une dimension unique, qui la rend particulièrement féroce et inexpiable : la conviction des hommes qu’en la faisant ils obéissent à une volonté qui les dépasse et qui, par cela même, fait de leur cause un droit absolu.
La guerre d’Ukraine est une agression pure et simple qu’aucun motif de défense ne peut justifier. Elle est imposée par un autocrate qui envahit pour l’anéantir un pays voisin dont il pense que l’existence même n’est pas légitime (...) cela ne s’est pas vu en Europe depuis le nazisme. Pour moi, ce ne sont pas simplement des images de télévision mais un écho de ce qui a façonné ma vie, même si je n’ai pas vraiment vécu en ces lieux depuis toujours chargés de sang et de malheur, et pas seulement pour les juifs (...)
Dans l'interminable concurrence en reconnaissance d'amour paternel que se livrent les religions, la guerre sainte offre l'occasion de se montrer "meilleur" croyant.
La guerre de religion est celle dont la seule fin concevable est la soumission totale ou la disparition de l'adversaire. Voilà pourquoi Ben Laden ne parle jamais d'Israéliens et d'Occidentaux, catégories politiques abordables donc par la raison politique, mais de juifs et de croisés.
Le 23 mai 1618, des nobles protestants de Bohême se rendent au Hradschin, le château royal de Prague, où ils rencontrent des conseillers du roi Matthias [...], ils se plaignent que Matthias, sans héritier direct, ait choisi son cousin Ferdinand, archiduc de Styrie, pour lui succéder à la tête du royaume de Bohême. Or, ce Ferdinand est connu pour être un catholique intransigeant [...]. Le ton monte et on finit par en venir aux mains. Deux conseillers et un domestique sont jetés par la fenêtre.
Les Anglais ne faisant, comme il est de notoriété publique, rien comme tout le monde, il en fut de même pour leur Réforme. Partout ailleurs, elle est partie d'en bas, de la prédication savante et populaire, pour remonter vers le sommet de la pyramide sociale et de l’État. En Angleterre, ce fut l'inverse : Henri VIII décida qu'il lui fallait se séparer de Rome pour créer une Église d'Angleterre dont lui serait "Supreme Chief".
Le relativisme culturel n’est pas mauvais en soi. Il a permis de voir l’homme derrière l’étranger, plutôt que l’étranger derrière l’homme, autrement dit de concevoir l’humanité
Si tous les peuples anciennement colonisés, opprimés, humiliés, massacrés, s’adonnaient au terrorisme international, la vie sur cette terre serait invivable
Croyant, il vous faut savoir comment la foi peut faire de certains des assassins; Mécréant, il faut que vous compreniez ce à quoi vous ne croyez point.
Pour parvenir à innerver nos sens blasés par l'avalanche incessante de mots et d'images, un meurtre dois se présenter comme une tuerie, une tuerie comme un massacre, un massacre comme un génocide.