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Citations de Emma Becker (224)


J'ai toujours cru que j'écrivais sur les hommes. Je ne peux relire mes livres sans m'apercevoir que je n'ai jamais écrit que sur les femmes. Sur le fait d'en être une, et sur les milliers de formes que cela prend. Et ce sera sans doute l'oeuvre de ma vie, me tuer à vouloir décrire ce phénomène, accepter l'impression d'avoir en quelques centaines de pages avancé d'un demi-centimètre. Et m'évertuer à être satisfaite de ce demi-centimètre comme d'une découverte majeure. Ecrire sur les putes, qui sont une telle caricature de femmes, la nudité schématique de cet état, être une femme et rien que ça, être payée pour ça, c'est comme examiner mon sexe sous un microscope.
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"Tu crois que les choses qui ne fonctionnent pas dans ta vie vont, dès la frontière, se remettre à marcher comme par magie ? Rien ne change en fuyant, Alice, rien."
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Quel est ce moment où les filles deviennent des femmes et les garçons des hommes, comme ça, sans prévenir, sur une chanson des Pink Floyd ?
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Il s’était penché sur elle, attendant son accord pour effleurer du bout des ongles la courbe de sa cheville, jusqu’au creux du genou.
«Tu serais étonnée de réaliser qu’un effleurement aussi infime peut t’exciter. C’est un exercice, bien sûr. Ça demande de l’abandon, et Dieu sait que ce n’est pas facile lorsqu’on fait ton métier. Mais ça pourrait te réconcilier avec la douceur. Tu as besoin de douceur, Hildie, comme toutes les autres.»
Hildie n’y avait pas accordé d’attention. Elle craignait, au fond, de découvrir qu’il existait une autre forme de sensualité qu’elle était obligée de dédaigner et qui l’aurait beaucoup plus épanouie.
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Se voir neuve, fraîche dans ces yeux sombres est comparable à une ivresse nouvelle. Elle avait oublié le frisson qu’il y a à regarder un homme qui vous regarde et ne sait pas s’il vous aura. Qui l’espère. Qui prend son élan, tapi dans l’ombre. Un homme qui n’envisage pas qu’il y ait eu, juste un peu plus tôt, un moyen autrement plus expéditif d’en venir au fait.
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J’en ai un peu ras le cul de faire le Gainsbourg de service. J’aimerais bien être la Jane Birkin de quelqu’un, pour une fois. C’est trop demander, putain, un type qui me regarde comme s’il n’avait jamais rien vu de plus beau ?
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Avant, disent-ils, elle adorait le sexe. Avant, on passait des nuits entières à baiser. Avant, aucun de ses orifices ne m’était inconnu. Avant, elle me suçait. Avant.
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Ma vie n'est pas intéressante, ça n'est rien qu'une vie parmi des milliards d'autres, la différence, c'est que j'ai la présomption de penser qu'elle mérite d'être racontée. Ma raison d'être sur cette terre se résume toute entière à ce culot. Sans ça, je ne suis rien qu'une petite bonne femme percluse de doutes, et ces doutes sont la façon la plus agréable que j'aie trouvée de gagner ma croûte.
Mes histoires sont de la littérature parce qu'elles existent sous forme de papier, derrière une couverture sur laquelle il y a mon nom, ça donne l'impression que je sais de quoi je parle. C'est tout. Et la raison pour laquelle j'écris si lentement, c'est que je ne peux pas pondre une page sans devoir penser aux Grand Ecrivains Français et me souhaiter la confiance d'un homme blanc médiocre. Il faut que je m'en souvienne chaque fois que la tentation me prend de me dire que mes histoires n'intéressent personne d'autre que moi. Si on les laisse aimablement représenter le regard universel sur ce monde, pourquoi douterais-je une seconde de l'intérêt qu'ont mes histoires de fesses ? Pourquoi n'aurais-je pas le droit d'être aussi anodine, particulière et égoïste qu'eux ? Qu'est-ce qu'ils savent, eux, des empreintes qu'ils laissent dans nos mondes piétinés, pour en extraire la substantifique moelle ? Le prix de leurs incursions dans ma vie ? Si on les laisse cracher quatre cents pages sur le plaisir qu'ils prennent, sur la façon dont le contact des femmes les transforme, alors qu'on me laisse aussi parler du gâchis, des attentes, des grands emportements [...]
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Pour expliquer ce que je fuis en essayant de fuir Lenny (à part peut-être la sensation d'appartenance à quelqu'un, à un lieu), il faudrait que j'explique comment c'est d'essayer d'écrire des choses sur soi, des choses graves et intimes, prise en tenaille entre les cris du Petit et le regard du père, de supporter le pouvoir qu'on s'accorde sur votre corps et sur votre tête juste parce que vous vivez là et que vous ne pouvez pas y changer grand-chose, les demi-accords pour garder une bonne atmosphère, les dix minutes de levrette sur le canapé après avoir couché le Petit et avant de se coucher soi-même, la tête dans l'oreiller, à transformer sa haine en corvée, et entendre le sifflement de générations et de générations de femmes, comment on a fait, nous, comment on y a survécu, pourquoi ton statut d'écrivain te protègerait-il d'une vie de femme tout ce qu'il y a de plus banal, la bouffe, le ménage, les exigences sans fin, et quand la journée est finie, une autre journée commence, une demi-journée où il faut faire rentrer le boulot et la réplétion de l'homme puisque rien n'est gratuit ici-bas, tout a un prix, ton travail a un prix, ta tranquillité a un prix, et la tranquillité des femmes passe toujours par un de leurs trous, sur les trois il y en a forcément un que tu peux céder à moindre coût vers vingt-deux heures, presque morte de fatigue, et que tu aies dit "c'est fini entre nous" au fond n'importe pas, le fait est que tu vis encore ici, tu manges ici, il y a de l'argent que tu peux donner pour t'en acquitter et la marchandise que tu dois livrer ici chaque soir, que tu devrais livrer en tout cas, et les soirs où tu y échappes on ne manqueras pas de te le faire remarquer, regarde ma patience, mon indulgence, je sais que tu me voles mais tu me rembourseras à un autre moment, j'attendrai, chaque fois que tu passeras la porte les bras chargés de courses je serai là et j'attendrai mon heure, parce que mon heure vient toujours, et lorsqu'elle ne vient pas c'est là que je m'énerve, c'est là que je dis en frappant les murs qu'il faut que tu partes, ma vie est un enfer, tout est de ta faute, sans toi je me déteste mais tout pourrait s'arranger avec une pipe, avec une pipe j'oublie que rien ne va dans ma vie et j'oublie jusqu'à l'avoir dit, je ne le pensais pas, ce que je voulais dire par là c'est que j'aimerais que tu me suces, même si tu n'en as pas envie, tu as fait ça pendant trois ans contre de l'argent, tu n'as qu'à imaginer que tu te paies quelque chose en me prenant dans ta bouche, on pourrait dire que c'est un fantasme, mais si tu tires la gueule à cette idée je peux aussi te rappeler qui t'héberge ici.
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… Peut-être que j'ai tout confondu depuis le début, peut-être que c'est eux qui ont raison, il faudrait ne rien en faire, ne rien espérer de plus que cette demi minute pendant laquelle c'est toujours l'été, où la peau tire sous les tissus légers, la nature est pleine d'endroits où on s'allongerait si cette minute était réelle. Parce qu'il n'est pas réel, ce rêve. Il n'existe pas, cet homme qui habite dans mon désir et dans le désir duquel j'habite … (p364)
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Peut-être est-ce le traitement que l'on réserve aux femmes de ma classe sociale ? Encore une considération que je me promettais de garder pour moi, mais maintenant que j'ai l'écume aux lèvres, comment résister à la touche de couleur qu'ajoute le mépris de classe au portrait de ce mythe qui se paraphrase ? ça me vient comme un renvoi, comme un éclat de rire. (p.333)
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- Non, je veux dire, qu'est-ce qui t'a donné l'envie de m'écrire ça, précisément ?
Vincent était coincé, ça l'ennuyait. Il aurait bien voulu faire rentrer tout le mail, cette phrase, et les embêtements qui s'ensuivaient - dont moi ici, chez lui -, dans le même panier de trucs à la con qu'il aurait fallu ne jamais entreprendre, je l'avais vu au mouvement avorté de sa main.
"Ah, tu veux dire ...?
- Oui, Pourquoi ça, en particulier ? avais-je répété, mortifiée derrière ma fausse curiosité de connaisseuse pour qui les mots importent plus que le fond.
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... Il sourit, et je souris aussi, tandis qu'une vague de tristesse immense s'enfle en moi comme un orage (p. 241)
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ll faudrait vraiment être bête comme seuls les hommes peuvent l'être pour imaginer qu'une fille qui s'évapore est forcément dans une mauvaise passe - c'est le contraire. Elle était radieuse.
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Quelle genre de fin je peux créer, à partir d'une fin aussi piteuse ?
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Il s'est dressé sur ses bras pour me regarder comme on regarde un rubik's cube.
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Les hommes qui lisent. Il existe tout un univers qui ne tourne qu'autour des hommes qui lisent, qui se plongent et se noient fans cette rêverie éminemment féminine et, mon Dieu, ce charme qu'ils ont. Ce charme qu'ont ces doigts qui tournent des pages, en cornent d'autres, qu'ont ces grands yeux qui tressautent et aspirent chaque caractère, chaque ligne, chaque mot. L'abîme que l'on devine derrière ces fronts plussés au-dessus du papier jauni.
[...]
A travers ces lectures, je lui prêtais un bagage nimbé de mystère - ce mystère des hommes plus âgé et des promesses qu'ils font sans même ouvrir la bouche.
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Quelques années plus tard, il semblerait que nous ayons été épargnées, mais parfois continue à se balader sur le visage d’Odile la suspicion d’avoir chopé au contact l’une de l’autre quelque chose de peut-être plus grave encore qu’une maladie sexuelle : l’indifférence aux garçons.
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« Je me sens investi d’une mission obscure, qui n’est pas de la sauver parce que Alice est forte, elle se perd et se sauve très bien toute seule. Mais je la connais tellement bien, je la connais mieux que personne, mieux qu’elle-même, et c’est pourquoi je ne suis jamais tranquille. Jamais en paix avec ce que je connais d’elle. Je l’aime, quoi, et je l’aime comme j’aimais à vingt ans : cette nana tellement forte et fragile aussi dans sa sexualité exacerbée, curieuse de tout, n’ayant que mépris pour ces conceptions judéo-chrétiennes du couple que je vomis moi-même – je devrais l’aimer comme mon égale, comme ma sœur, mais je l’aime comme la première femme dont on tombe amoureux, férocement, jalousement, avec un égoïsme stupide de paysan, avec une dévotion de médecin qui voudrait pouvoir guérir tout le monde, et de quoi ? Lorsqu’elle est là, sous mes yeux, dans mes parages, je me sens suffisamment fort pour aimer comprendre et pardonner ce que je me pardonne à moi-même, ses fantasmes, ses infidélités sans doute, la vie en elle, impossible à discipliner. Et quand elle n’est pas là, je ne supporte pas l’idée d’autres mains sur son corps, d’un plaisir qui ne viendrait pas de moi. Quand elle n’est pas là, je ne l’imagine que se faisant sauter par une horde de mecs, affamée comme elle l’est de séduction et de sensations. Et si je l’ai quittée tant de fois, si je ne parviens pas à l’installer chez moi, c’est que je sens par à-coups cette précarité qui me fait me dire te voilà face à cette jeune femme intelligente, perdue, n’ayant peur de rien ou de si peu de chose, une femme comme tu les as rêvées toute ta vie, et la seule chose qui t’éloigne d’elle, c’est sa part immense d’inachevé parce qu’elle est si jeune, si encombrée de doutes que rien ne satisfait vraiment, tellement adulte et ! pourtant, de façon irrationnelle, toujours en prise avec l’amour de ses parents – de ses parents ! Voilà devant toi cette jeune femme qui ne prétend pas se connaître, et qui se hait et s’aime, qui hait et aime tout le monde avec une spontanéité de femme qui n’aura jamais le mauvais goût de te reprocher tes manifestations d’instinct de vie, avec qui tu ne t’ennuieras jamais…
…/… « Je l’aime et je ne pourrai jamais réduire le chaos qui règne en elle, même si elle le veut très fort, même si j’en ai envie. Je ne serai jamais en sécurité avec Alice. Elle a fait naître en moi des idées de foyer et de gamins, moi qui n’ai jamais voulu aucun des deux – cette souris complètement cinglée, survoltée par ses hormones et sa propre imagination, torturée par le sens de sa vie, m’évoque précisément ce que toutes les autres femmes avant elle avaient tenté de m’arracher en vain : lui donner mon nom, lui faire des gosses, avoir une maison dans un coin campagne ridiculement bourgeois, vouloir faire d’Alice une femme respectable – et m’y casser les dents.
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* Est-ce que j'ai décidé d'être écrivaine parce que j'ai senti, très tôt, que cette faim de poésie ne pourrait jamais être comblée que par moi? Que les hommes, dans leur immense majorité, sont inaptes à la générosité affective? Entre Monsieur et ce livre qui commence, rien n'a changé, j'en suis toujours à inventer des mondes pour les hommes que j'aime, où ils se promènent en héros ; et sous ces latitudes même mon mépris, mon dépit finissent en élégie. J'aimerais pas écrire sur autre chose, pour une fois, que mon cul et ma tête jamais assez remplis, jamais satisfaits ? Je me connais, même s'il me poussait la créativité nécessaire pour pondre un roman d'horreur, je trouverais quand même un moyen d'y placer une petite nana tremblante d'amour pour un abruti qui ne le mérite pas. Elle sera toujours là, tapie dans un coin, vexée de n'être le totem de personne.

* Je n’appréhende la douceur et la violence des hommes que de cette façon, en reniflant leur peau ; on pourrait trouver cette quête totalement creuse, reste que je me sens plus proche d’eux ainsi qu’en m’émerveillant de leur intelligence ou de leur héroïsme, tout comme ça me suffit de ne connaître de Foucault que ses blousons en cuir, ses orgies en sauna et l’amitié qu’a eue pour lui Hervé Guibert, je me sens plus proche de la vérité en parlant de leur bite que de leurs combats, peut-être parce que leurs combats sont compliqués et vains et trompeurs, alors qu’une bite ça ne sait pas mentir. Parler de leur bite, c’est les faire tenir dans le creux de ma main.

* J’en conclus que sucer un homme équivaut à lui faire baisser sa garde, à l’amener à un niveau où je peux le comprendre, où il n’est plus aussi impressionnant – un niveau où j’existe pour lui, où je suis donc perméable. Le problème, c’est peut-être ça, qu’il en soit des hommes de ma vie comme des hommes qui écrivent. Prendre leur queue dans ma bouche, désarmer la bombe qu’ils représentent, sauver ma peau.

* Il faudrait que je puisse vivre sans ce constant regard masculin, que je puisse me définir par moi-même, ma liberté, ma capacité d’agir. Qu’est-ce que je m’encombre de cette cohorte d’imbéciles qui me pompent mon temps et ma force vitale ? Qu’est-ce qu’ils ont à m’apprendre sur moi que je ne connaisse pas déjà ? Pourquoi ai-je l’impression de leur devoir ma carrière ? Ce n’est pas suffisant, un fils dont m’occuper ? Est-ce qu’il faut en plus que je consacre l’essentiel de mes journées à penser à eux, à pourquoi ils n’ont pas agi, à ce qui les a poussés à agir contre toute attente, pourquoi faut-il, en partant de chez eux, que je passe le reste de la journée dans leur tête, dans leur appartement où je ne suis plus ?

* Écrire et vivre sont deux choses distinctes. Oui, mais pas quand on écrit comme moi. Pas quand on vit dans
la perspective d’écrire. A moins qu’on n’écrive pour donner un sens à cette pitoyable petite existence, et que chaque micro-évènement ne soit motif à des centaines de pages. C’est du bluff, ça n’est que ça. Ma vie n’est pas intéressante, ça n’est rien qu’une vie parmi des milliards d’autres, la différence, c’est que j’ai la présomption de penser qu’elle mérite d’être racontée. Ma raison d’être sur cette terre se résume tout entière à ce culot. Sans ça, je ne suis rien qu’une petite bonne femme percluse de doutes, et ces doutes sont la façon la plus agréable que j’aie trouvée de gagner ma croûte.
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