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Citations de Ernesto Sabato (259)


Ernesto Sabato
Elle était très déprimée et je ne pus lui faire dire un mot de plus sur Richard. Mais je dois ajouter que ce n’était pas cet homme qui me torturait le plus, parce que j’avais fini par en savoir assez long sur lui. C’étaient les personnages inconnus, les ombres qu’elle n’avait jamais mentionnées et que je sentais cependant se mouvoir silencieusement et obscurément dans sa vie. Le pire coté de Maria, je l’imaginais précisément lié à ces ombres anonymes.
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Ernesto Sabato
Mon dieu ! J’ai voulu dire qu’il te ressemblait en un certain sens, mais non qu’il ait été identique. C’était un homme incapable de rien créer, il n’était que destruction, il avait une intelligence marquée par la mort, c’était un nihiliste. Quelque chose comme ton coté négatif.
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Ernesto Sabato
Rêve. Mais maintenant, ton visage s’interpose. Tu te tiens entre la mer et moi. Tu es calme et un peu inconsolé, tu me regardes comme si tu m’appelais à l’aide.
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Ernesto Sabato
Il suffit d’observer les familles nombreuses où se répètent certains traits, certains gestes, certaines intonations. Il m’est arrivé d’être amoureux d’une femme (sans me déclarer, bien sûr) et de fuir, effrayé par l’éventualité de connaître ses soeurs. J’avais déjà vécu quelque chose d’horrible en une autre occasion : le visage d’une femme m’avait semblé très intéressant, mais d’avoir fait la connaissance de sa soeur m’avait longtemps laissé honteux et déprimé : les mêmes traits qui chez l’une m’avaient paru admirables se retrouvaient accentués et déformés chez sa soeur, un peu comme dans une caricature. Et cette espèce de vision déformée de la première femme en sa soeur avait suscité en moi, en plus de cette sensation, un sentiment de honte, comme si j’étais en partie coupable du jour légèrement ridicule que sa soeur jetait sur la femme que j’avais réellement admirée. Tout ceci me vient peut-être du fait que je suis peintre, car j’ai remarqué que les gens ne font pas attention à ces distorsions familiales.
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Le travail nous laisse très peu d'heures de congé. Juste un petit-déjeuner rapide que nous prenons habituellement en pensant déjà aux problèmes du bureau, parce que nous vivons comme des producteurs que nous devenons incapables de nous arrêter devant une tasse de café le matin, ou quelques maths partagés. Et le retour à la maison, l'heure de se retrouver avec ses amis ou sa famille, ou de se taire comme la nature à cette mystérieuse heure du coucher de soleil (qui se souvient des tableaux de Millet ). Tant de fois qu'on se perd en regardant la télé ! Concentrés sur un canal ou en zappant, il semble que nous obtenions une beauté ou un plaisir que nous ne découvrons plus en partageant un ragoût ou un verre de vin ou une soupe de bouillon fumant qui nous relie à un ami lors d'une nuit ordinaire.

Aujourd'hui, l'humanité manque de loisirs, en grande partie parce que nous avons pris l'habitude de mesurer le temps de manière utilitaire, en termes de production. Auparavant, les hommes travaillaient à un niveau plus humain, souvent dans les métiers et l'artisanat, et pendant qu'ils le faisaient, ils discutaient entre eux. Ils étaient plus libres que l'homme d'aujourd'hui incapable de résister à la télévision. Ils pouvaient se reposer pendant la sieste ou jouer à la taba avec leurs amis. Je me souviens de cette phrase si quotidienne à l'époque : « Allez, mec, jouons aux cartes un peu, pour tuer le temps, pas plus », quelque chose d'inconcevable pour nous. Des moments où les gens se rassemblaient pour boire du maté, en regardant le coucher de soleil, assis sur les bancs que les maisons avaient avant, du côté des galeries. Et quand le soleil s'enfonçait à l'horizon, alors que les oiseaux finissaient de s'installer dans leurs nids, la terre faisait un long silence et les hommes, égarés, semblaient s'interroger sur le sens de la vie et de la mort.

Chaque enfant est un artiste qui chante, danse, peint, raconte et construit des châteaux. Les grands artistes sont d'étranges personnes qui ont réussi à préserver au fond de leur âme cette sainte candidature de l'enfance.
L'art est un don qui répare l'âme des échecs et des inventeurs. Cela nous encourage à accomplir l'utopie à laquelle nous étions destinés.
Je pense qu'il faut résister : telle était ma devise. Mais aujourd'hui, combien de fois me suis-je demandé comment incarner ce mot ? Avant, quand la vie était moins dure, j'aurais compris comment résister à un acte héroïque, mais comment refuser de continuer à embarquer dans ce train qui nous pousse à la folie et au malheur. Peut-on demander aux gens du vertige de se rebeller ? Peut-on demander aux hommes et aux femmes de mon pays de refuser d'appartenir à ce capitalisme sauvage s'ils soutiennent leurs enfants, leurs pères ? S'ils assument cette responsabilité, comment pourraient-ils abandonner cette vie ?

Dans cette tâche, l'essentiel est de refuser d'étouffer autant de vie que nous pouvons éclairer. Défendre, comme l'ont fait héroïquement les peuples occupés, la tradition qui nous dit combien l'homme est sacré. Ne pas laisser nous perdre la grâce des petits moments de liberté que nous pouvons profiter : une table partagée avec des gens que nous aimons, des créatures que nous protégeons, une marche dans les arbres, la gratitude d'un câlin. C'est comme sauter d'une maison en feu. Ce ne sont pas des faits rationnels, mais il n'est pas important qu'ils le soient.

Nous serons sauvés par l'affection.
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[...] tôt ou tard, cet humanisme devait déboucher sur un être aussi abominable que Rousseau. Face à cette attitude anthropomorphique, suffisante et superficielle, l'art abstrait de notre temps en viendrait à revendiquer une nouvelle transcendance, une nouvelle attitude religieuse à la recherche de l'absolu.
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Les hommes écrivent des fictions parce qu'ils sont des êtres de chair, parce qu'ils sont imparfaits. Un dieu n'écrit pas de romans.
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L'irrationalisme est donc un attribut spécifique du roman, et un signe indispensable de réalité.
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Je m’attache de moins en moins aux raisonnements, comme si je n’en avais plus le loisir. Ainsi que l’a dit Kierkegaard, « la foi commence exactement où finit la raison ». Aux heures où je navigue en haute mer sans me poser de questions, je ne m’inquiète ni de la pluie ni du vent. À d’autres moments, où je me raccroche à de vieilles sciences ésotériques, je trouve dans ces pages anciennes la même chaleur que m’apportent ceux qui m’entourent et veillent sur moi. J’ai honte en songeant aux vieillards qui sont seuls, à ruminer le triste inventaire de ce qu’ils ont perdu.
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Je sais que cette lettre irritera bien des gens, je l’aurais moi-même rejetée il y a quelques années quand je confondais encore se résigner et accepter. Se résigner est une lâcheté, c’est le sentiment qui justifie l’abandon de ce pourquoi il vaut la peine de se battre, c’est, d’une certaine manière, une indignité. L’acceptation, c’est le respect de la volonté de l’autre, qu’il s’agisse d’un être humain ou du destin même. Elle ne naît pas de la peur, comme la résignation, elle est plutôt un acquis favorable.
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Les valeurs sont ce qui nous guide et préside aux grandes décisions. Malheureusement, à cause des conditions de travail inhumaines, de l’éducation ou de la peur, nombreux sont ceux qui n’osent pas faire un choix conforme à leur vocation, à cet appel intérieur que l’être humain entend dans le silence de l’âme. Et tout aussi nombreux sont ceux qui n’osent pas se tromper plusieurs fois. Il n’empêche que la fidélité à la vocation, cet appel mystérieux, est le fléau de la balance où se joue l’existence quand on a eu le privilège de vivre en liberté.
Il y a des moments décisifs dans la vie des peuples comme dans celle des hommes. Nous sommes justement à l’un de ces moments, avec tous les périls qu’il entraîne. Mais tout malheur a son avantage si l’homme est capable de supporter l’infortune avec grandeur, sans trahir ses valeurs.
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Je crois que l’essentiel de la vie est la fidélité à ce que l’on croit être son destin, qui se révèle aux moments décisifs, ces croisées de chemins où nous passons un moment pénible, mais qui nous présentent les choix essentiels. Ce sont des moments très importants parce que le choix, alors, nous dépasse, on ne voit plus devant ni derrière soi, comme si un brouillard nous couvrait à l’heure décisive, ou comme s’il nous fallait choisir notre carte maîtresse les yeux fermés.
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Le monde ne peut rien contre l’homme qui chante dans la misère.
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LE PIRE, C’EST LA PRÉCIPITATION.


La précipitation ne donne ni fruits ni fleurs. Le propre de la précipitation, c’est la peur, l’homme y acquiert un comportement d’automate, il n’est plus responsable de rien, il n’est plus libre et ne reconnaît plus les autres.
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Nos vies nous apparaissent parfois comme des scènes isolées, plus ou moins proches les unes des autres, contingentes, pareilles à des feuilles légères emportées par le souffle déchaîné et gratuit du temps. Ma mémoire est composée de fragments d’existence, statiques et éternels : parmi eux, le temps ne passe pas, et certaines des choses qui se sont produites à de nombreuses années d’écart peuvent être réunies, d’autres rattachées ou amalgamées par d’étranges sympathies et antipathies. Parfois encore, elles se présentent à la conscience unies par des liens absurdes mais indissolubles, comme une chanson, une plaisanterie ou une haine commune. Le fil qui les unit maintenant pour moi et les fait surgir l’une à la suite de l’autre est une certaine férocité dans la quête de quelque chose d’absolu, une certaine perplexité, celle qui relie des mots tels que fils, amour, Dieu, péché, pureté, mer, mort.
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Je crois que Dante a vu. Comme tout grand poète, il a vu ce que les gens ordinaires pressentent avec moins d’acuité. Les gens qui le voyaient se promener dans les rues de Ravenne, maigre et silencieux, susurraient à son passage, avec une crainte sacrée : “Voici celui qui est allé en Enfer.” Tu savais cela ? Textuel. Ce n’était pas une métaphore : ces gens croyaient que Dante était allé en Enfer. Et ils ne se trompaient pas. Ce sont les autres, les petits malins, ceux qui se croient intelligents, qui se trompent.
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Ainsi tu ne seras peut-être pas l’écrivain du moment, mais tu seras un artiste de ton temps, de l’Apocalypse dont tu devras en quelque sorte témoigner pour sauver ton âme.
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Moi je vous le dis, les gars, le bonheur, faut le chercher dans le cœur, et pour ça, faut que le Christ y revienne. Nous, on l'a tous oublié, on a oublié ses enseignements, et on a oublié qu'il a souffert le martyre pour nos péchés, pour notre salut. Nous sommes qu'un tas de pauvres mecs et de salauds. Et s'il revient, ça se peut même qu'on soit pas capables de le reconnaître et qu'on se foute de lui.
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Les jeunes qui maintenant répudiaient la littérature n’avaient t-ils pas raison ? Il n’en était pas certain, tout était si complexe, mais dans ce cas il faudrait, comme disait Sabato, il faudrait aussi répudier la musique et presque toute la poésie, qui n’aidaient pas non plus à la révolution à laquelle ces jeunes aspiraient. De plus, aucun personnage véritable n’est un simulacre crée par des mots : les personnages véritables sont faits de sang, d’illusions, d’espérance et d’aspirations véritables, et semblent obscurément servir à ce que nous puissions tous, au milieu de notre vie confuse, trouver un sens à l’Existence ou du moins l’entrevoir de loin.
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Je t’ai dit un jour que les poètes sont toujours du côté des démons, même si parfois il ne le savent pas, et j’ai remarqué que tu n’étais pas d’accord… C’est Blake qui exagère ainsi, pas moi, mais peu importe, si je répète toujours ça c’est qu’il doit y avoir une raison. Je t’ai dit aussi que c’est pour cela que l’Enfer de Dante nous fascine et que son Paradis nous ennuie. Que le péché et la damnation ont inspiré Milton, tandis que le Paradis lui a ôté tout élan créateur… Oui, il n’y a qu’à voir les démons de Tolstoï, de Dostoievski, de Stendhal, de Thomans Mann, de Musil, de Proust.
[…]
Ernesto n’exagère pas, ce n’est pas toujours vrai, il peut y avoir de grands poètes qui ne sont pas du côté des démons… D’autres aussi peuvent être dionysiaques, euphoriques, se sentir en harmonie avec le cosmos… et certains peintres…
Il fit silence. Il se sentait de nouveau mécontent, comme s’il mentait, en un sens.
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Normandie : 1870

"Pendant plusieurs jours de suite des lambeaux d’armée en déroute avaient traversé la ville. Ce n’était point de la troupe, mais des hordes débandées. Les hommes avaient la barbe longue et sale, des uniformes en guenilles, et ils avançaient d’une allure molle, sans drapeau, sans régiment. […] Les Prussiens allaient entrer dans Rouen, disait-on." [...] Il y avait cependant quelque chose dans l'air, quelque chose de subtil et d'inconnu, une atmosphère étrangère intolérable, comme une odeur répandue, l'odeur de l'invasion. Elle emplissait les demeures et les places publiques, changeait le goût des aliments, donnait l'impression d'être en voyage, très loin, chez des tribus barbares et dangereuses." La débandade de l'armée française, l'occupation prussienne en Normandie, le cortège des horreurs de la guerre de 1870 servent de motif à de nombreux contes et nouvelles de Maupassant où sa férocité s'exerce avec maestria dans la plus connue et réussie de toutes dont le titre est le sobriquet de l'héroïne principale : "Boule de Suif". Mais quel est l'état-civil de Boule de suif dans le récit ? 👩‍🦰👩‍🦰👩‍🦰

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Thèmes : guerre , Guerre franco-allemande (1870-1871) , littérature , nouvelles réalistes , contesCréer un quiz sur cet auteur

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