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Critiques de Eva Illouz (92)
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Le Capital sexuel

De grands mots, mais pas "Le capital sexuel", d'Eva Illouz et Dana Kaplan

Les autrices partent de la sociologie de Bourdieu et de la définition du "capital" par Marx (une ressource produit de la richesse, la plus-value), pour définir le concept de "capital sexuel". Le capital sexuel, c'est la sexualité comme ressource en vue de gains futurs (au-delà de l’activité sexuelle.) La sexualité serait désormais régulée et réglementée par l’éco­nomie (comme si ça n'était pas le cas avant ! Un petit tour vers l'histoire des maisons closes en France institutionnalisées au XIVè s. permet d'en douter).

De plus, les ressources produites par nos sexualités formeraient une structure de classe, accumulée dans l'intimité, qui prendrait différentes formes selon le genre des individus. Ceci étant dit, le bouquin l'analyse pas tant que ça l'axe du genre.

Au final il y a 4 définitions du "capital sexuel", et au delà de termes un peu ronflants (« marchandisation du sexe », « sexualisation de la culture »), on est face à un essai d'opinion, et non face à une étude faite par deux sociologues. Pour démontrer une idée, elles se contentent parfois de citer Houellebecq !

Elles parlent marché du sex toy, recours à la chirurgie esthétique, banalisation du travail du sexe qui déborde son cadre traditionnel, avec des exemples comme les serveuses ou hôtesses non travailleuses du sexe qui doivent séduire des hommes pour les attirer.

L'idée centrale : le néoliberalisme a envahi nos sexualités... Ça pourrait se défendre, mais les autrices n'ont pas grand chose pour le prouver, et l'essai patine, patauge, déçoit.

Les seuls points intéressants pour moi, même si rien de dingue :

- le sexe n'est pas une affaire privée, elle est une zone traversée par les rapports de domination

- l'industrie du sexe permet une accumulation de capital

- la sexualité permet de se sentir bien, d'avoir confiance en soi, donc donne de l'employabilité... ça me semble encore bien généralisant et facile. L'exemple central : l'employabilité des personnes ayant une sexualité liberée dans les classes moyennes culturelles et artistiques...ce petit groupe social ne permet pourtant pas de faire de telles généralités !
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Le Capital sexuel

La sociologue franco-israélienne explore dans ses livres les liens entre le capitalisme et la condition amoureuse. Un travail qu’elle poursuit dans « Le Capital sexuel », paru en octobre, peu de temps après l’attaque du Hamas, véritable électrochoc pour elle. Déçue par une partie de la gauche, l’opposante de toujours à Benyamin Nétanyahou partage, depuis, son temps entre ses recherches et ses prises de parole sur la guerre.
Lien : https://www.lemonde.fr/m-le-..
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Le Capital sexuel

Au départ de la réflexion des deux chercheuses, il y a cette notion de « capital sexuel », qui n’est décidément pas si facile à comprendre. Globalement, les sociologues comme les penseurs de la sexualité font appel à la notion de « capital sexuel » « pour expliquer comment les acteurs tirent profit des subjectivités, expériences et interactions sexuelles – y compris les actes, les sentiments et les pensées -, que ce soit sur les marchés économiques et matrimoniaux ou dans les aventures sexuelles ». La notion de « capital », hautement marxiste, indique en effet qu’une ressource peut produire de la richesse, la fameuse plus-value. Tout le travail de Le Capital sexuel va être de montrer quelle richesse produit ce fameux capital sexuel, et en quoi il participe à la reproduction du capitalisme même.







Selon les deux auteures, il existe quatre formes du capital sexuel. Le capital sexuel par défaut (chasteté) donne une valeur, surtout à la femme, si elle n’a jamais eu de relations sexuelles. Le capital sexuel comme plus-value du corps rend compte de la transformation du corps en marchandise, et se retrouve notamment présent dans la prostitution. Le capital sexuel incarné, plus déguisé, désigne particulièrement le sex-appeal et les compétences sexuelles. Enfin, le capital sexuel néolibéral est le réel objet d’étude du livre, car il désigne le fait que le sexe est de plus en plus pensé comme un moyen de se démarquer sur un marché compétitif, spécialement sur le marché de l’emploi.







Dana Kaplan et Eva Illouz montrent ainsi qu’il existe un lien fort entre la sexualité et l’employabilité, tout en remarquant qu’il existe peu de recherches empiriques sur le sujet. Si, auparavant, le sexe appartement à la sphère privée, celui-ci aurait été peu à peu happé par la sphère économique lors de la modernité tardive (néolibéralisme). Le livre se révèle complexe souvent, et aurait gagné sûrement à être mieux illustré d’exemples ou de recherches en sociologie quantitative. Pour autant, et comme fréquemment dans les travaux d’Eva Illouz, la réflexion s’avère novatrice et ouvre des champs de réflexion à venir.
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La fin de l'amour. Enquête sur un désarroi cont..

L'immense faiblesse de cet essai, à mon avis, est que l'autrice a souhaité introduire une comparaison entre "l'amour prémoderne" et l'amour à l'époque contemporaine. Or, cette perspective comparative est assez peu pertinente à divers égards.



On peut d'emblée regretter le chapitre sur la "cour amoureuse" qui aurait été le marqueur du debut amoureux. De l'aveu même de l'autrice, la cour ne concerne qu'une partie des relations sentimentales/sexuelles de ce qu'elle appelle l'amour premoderne : elle ne s'applique que dans certaines classes sociales (les plus élevées et donc pas majoritaires) et ne concerne absolument pas la totalité des relations (viols de domestiques, recours à des prostituées...).



Quant à la certitude tant vantée de l'époque prémoderne face à l'affreuse incertitude contemporaine, elle est très loin d'être aussi systématique que l'autrice le prétend et ne concerne qu'un aspect de la relation : sa stabilisation par le mariage. Or, parler d'amour est nettement différent que de parler de mariage. Le titre aurait dû être "la fin du mariage hétérosexuel à vie". Du reste, le mariage "à vie" est loin de signifie la persistance de la relation : l'époque prémoderne étant remplie d'exemples de couples ne cohabitant même plus, quoique toujours mariés ! Par ailleurs, cette certitude réside quasi exclusivement sur l'absence de liberté des femmes, qu'on aura du mal à regretter, même si sur ce point, nous le verrons, la marge de progrès est gigantesque.



En ce qui concerne la critique de la liberté, qui se ferait au détriment de l'égalité, l'idée est assez juste dans le sens où l'actuelle "liberté" sexuelle est entièrement réduite aux carcans du patriarcat. C'est une liberté pour les hommes, qui sont globalement débarrassés de l'obligation de faire semblant de respecter les règles de respect de la parole donnée et de fidélité ; dont personne n'était dupe.

En revanche, il s'agit d'une liberté extrêmement relative pour les femmes, qui n'agissent pas sur un pied d'égalité avec les hommes sur le "marché" sexuel. Pourtant, l'argument perd de son poid à cause de cette comparaison avec l'amour "premoderne" puisque celui-ci est particulièrement marqué par les inégalités de genre. La seule distinction résiderait finalement dans l'existence d'un discours sur la liberté ayant pour objectif de masquer l'inégalité ; ce discours ayant remplacé le non moins hypocrite discours sur l'idéal amoureux de la relation unique et stable.



À ce titre, je ne peux que regretter que l'autrice, qui entend parler de la non relation amoureuse soit passer à côté du caractère politique que le refus de relationner peut contenir. Tout un courant féministe se base sur l'idée que l'égalité étant impossible dans la relation hétérosexuelle, alors il convient de refuser cette relation.

Or, refuser une relation parce que profondément inégalitaire est une marque de liberté. Et dans cette situation, la liberté se trouve impulsée par le souhait d'égalité.



L'autrice a raison de noter que le capitalisme a investi le champ du sexuel, même s'il faut bien insister sur ce point : le capitalisme n'investit ce champ qu'en ce qu'il permet la reproduction du patriarcat. Là encore, la comparaison avec l'époque premoderne n'a pas de pertinence. L'autrice explique que la cour amoureuse s'accompagnait de cadeaux, demontrant ainsi que le marché matrimonial/sexuel était déjà investi par une forme de mercantilisme. Par ailleurs, l'injonction des femmes à se rendre désirables pour compter sur le marché matrimonial ne doit rien au capitalisme. On est plutôt ici dans un continuum où l'explosion du capitalisme entraîne en proportion une explosion de son investissement de la sphère sexuelle.



Enfin, l'autrice doit se défendre à plusieurs reprises de faire le jeu des conservateurs et des réactionnaires. Cela était, à mon avis, aisément évitable en renonçant à baser sa reflexion sur une comparaison aux relents de "c'était mieux avant" dont en plus la pertinence sociologique est discutable.



Au final, l'essai contient plusieurs idées intéressantes mais un peu mal exposées du fait d'une construction critiquable de l'argumentation. Il m'aura, en tout cas, donner matière à réfléchir (et à critiquer)

Et, je reste curieuse de lire d'autres essais d'Eva Illouz, dont le champ d'investigation sociologique est résolument passionant.



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La fin de l'amour. Enquête sur un désarroi cont..

Un thème pas vraiment facile traité sous un regard sociologique : l'amour et son évolution dans les sociétés libérales et consuméristes. On pourrait dire : "L'amour à l'épreuve de Tinder", mais ce n'est pas faire honneur à la qualité de l'ouvrage. Le livre est très clair, mais sans concessions, et il comporte des détours philosophiques.



Un essai stimulant qui explore des aspects pas évidents à première vue du libéralisme. Quoique l'auteur s'en défende, le désarroi porte un certain jugement de valeur à l'égard du féminisme. Les approches psychologisantes en prennent aussi pour leur grade. Tous les -ismes ont a apprendre de la sociologie.



La liberté de ton, l'intelligence du sujet, sa maitrise et sa hauteur de vue sont rafraichissantes. Le fait qu'une femme ait écrit cet ouvrage n'est pas la partie la plus insignifiante de la "thèse". Aurais-je été aussi touché si ç'avait été écrit par un homme : probablement pas (et ça c'est de la sociologie).
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Les temps intimes - Genre, sexe et quinoa

"Les Temps Intimes" réunit les écrits de quatre auteures : Daisy Letourneur, Eva Illouz, Guénaëlle Gault et Sandra Laugier. Chacune apporte une perspective unique sur des sujets contemporains cruciaux, traitant de thèmes allant de la masculinité et la sexualité à la consommation alimentaire et l'influence des séries télévisées sur la vie quotidienne.



Daisy Letourneur se concentre sur l'évolution des masculinités dans un contexte contemporain marqué par des mouvements sociaux comme #MeToo. Sa critique pointue des masculinistes révèle un combat continu pour l'équité de genre, offrant une analyse profonde de la manière dont les normes de genre traditionnelles façonnent l'expérience masculine. Elle explore comment les représentations et perceptions de la masculinité se sont métamorphosées au fil du temps, tout en mettant en lumière les contradictions et les luttes internes de cette évolution.



Eva Illouz s'attaque à la complexité de la sexualité moderne, en établissant un dialogue entre les notions de liberté sexuelle et d'égalité de genre. À travers son analyse comparée de "L'amant de Lady Chatterley" de D. H. Lawrence et "Coïts" d'Andrea Dworkin, Illouz démontre comment les attitudes envers la sexualité ont évolué, soulignant la tension entre la quête de plaisir personnel et la recherche d'une égalité sociétale. Sa contribution est essentielle pour comprendre les nuances des débats contemporains sur la sexualité.



Guénaëlle Gault se penche sur l'orthorexie dans le contexte d'une société de plus en plus préoccupée par la qualité et la provenance des aliments. Elle explore comment cette obsession pour une alimentation saine peut révéler des anxiétés plus profondes concernant la santé, l'environnement et la durabilité. Gault met en évidence les conséquences de cette quête pour le contrôle dans nos choix alimentaires, reflétant les dilemmes éthiques et environnementaux de notre époque.



Sandra Laugier, enfin, offre une réflexion sur la place centrale du canapé dans la consommation de séries télévisées et comment celles-ci façonnent et reflètent nos vies. Elle explore l'idée que les séries télévisées ne sont pas seulement un moyen d'évasion, mais aussi une forme de "care", un moyen par lequel les spectateurs tissent des liens émotionnels avec les personnages et les histoires. Laugier met en lumière l'importance des séries dans la construction de nos expériences et perceptions quotidiennes, en particulier pendant la pandémie de Covid-19.



Ensemble, ces quatre auteures tissent un tapis riche de perspectives sur la société contemporaine, chacune apportant un éclairage différent mais complémentaire sur les enjeux actuels. "Les Temps Intimes" est un ouvrage multidisciplinaire, abordant des sujets variés avec profondeur et nuance, offrant aux lecteurs des outils critiques pour comprendre et naviguer dans les complexités de notre époque.

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Le Capital sexuel

Dans ce livre, les autrices se demandent si le néolibéralisme n’aurait pas déformé notre sexualité, à tel point que celle-ci serait devenue un moyen d’augmenter notre valeur sur le marché.
Lien : https://www.elle.fr/Loisirs/..
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Le Capital sexuel

Entre sociologie, science politique et philosophie, l’étude du capital sexuel offre la possibilité à Eva Illouz et Dana Kaplan de rappeler que le sexe ­incarne aujourd’hui pour nous – heureux hasard ! – les « idéaux même du capitalisme contemporain » : liberté, réalisation de soi, autonomisation et créativité.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..
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La fin de l'amour. Enquête sur un désarroi cont..

Eva Illouz est une sociologue dont l’œuvre est principalement axée sur les conséquences du capitalisme sur les sentiments et la culture. On lui doit plusieurs livres éclairants à ce sujet dont « Les Sentiments du capitalisme » et « Happycratie » dont j’ai déjà parlé ici.



Dans « La fin de l’amour », essai paru en 2020, Illouz dans la continuité de ses précédents travaux analyse le processus de transformation des relations amoureuses induit par le modèle de marché capitaliste consumériste. La sociologie a son mot à dire sur ce sentiment intime, cantonné souvent au champ de la psychologie.



Ce qui caractérise notre époque c’est une survalorisation des valeurs de Liberté et d' Autonomie, érigées en étendard du progrès culturel depuis la révolution sexuelle des années 60. Si Illouz salue les avancées indéniables grâce à certaines luttes, féministes notamment et se refuse tout jugement moral simpliste sur le sujet, elle veut néanmoins éclairer les mécanismes sociologiques qui font de l’amour un synonyme de souffrance, de confusion mais surtout d’une peur et d’un refus d’engagement chez les individus.



L’analyse débute par un rappel sur l'amour traditionnel, régi par les normes sociales largement partagées de « la Cour amoureuse » et qui garantissaient aux individus une certaine forme de certitude quant à leurs façons d’agir et de s’unir.

De retour au présent, l’auteur étend la notion de « consumérisme » des marchandises et des objets aux relations humaines, un consumérisme qui culmine dans ce que l’on appelle désormais le « casual sex » qui crée des incertitudes et ébranle des relations qui ne semblent désormais soumises à aucune normalisation.



C’est ici que l’auteur introduit les notions fondamentales de « capitalisme scopique » et d’« incertitude ontologique »: la valeur des individus est perpétuellement soumise au regard de l’autre. Une évaluation qui frôle la réification. Les femmes cherchent à se valoriser dans un marché où les hommes les évaluent en consommateurs. Les applications de rencontre renforçant évidemment le phénomène. S’en suit donc logiquement l’anéantissement de l’estime de soi et la mise en place de stratégies de défense teintées de méfiance et compliquant la création de liens.



C’est donc finalement une semi-liberté dont bénéficie l’individu contemporain, cet être incapable de s’engager car il diminuerait son autonomie, cet être confronté à un choix quasi illimité de partenaire, consommant de manière éphémère mais condamné à une souffrance pérenne. Cet être anxieux, sans cadre, qui ne peut plus, qui ne sait plus aimer.



Eva Illouz rappelle enfin le marché juteux que représente cet individu ontologiquement incertain pour tous les chantres de la psychothérapie et autres coachs en développement personnel.



Une lecture dense, exigeante, loin de toute réaction primaire, qui a le mérite de nous éclairer sur les ressorts inconscients de notre fonctionnement et nous pousser à nous ressaisir de notre humanité et renouer avec un amour émancipateur.

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Les émotions contre la démocratie

Comment des électeurs en viennent-ils à voter contre leurs intérêts ? Dans « les Emotions contre la démocratie », la sociologue franco-israélienne décrypte l’emprise des leaders comme Trump ou Orbán sur les psychés, et alerte sur le cas d’Israël.
Lien : https://www.nouvelobs.com/id..
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Ce que la Covid nous a appris

Lire ce livre aujourd'hui alors qu'il compile des écrits rédigé en 2020 est un peu amusant. Parce que fin 2020, nous n'avions pas encore beaucoup de recul sur cette fameuse épidémie. J'ai trouvé cette lecture plutôt récréative car elle ne demande pas vraiment à réfléchir sur notre futur puisque celui-ci s'est déjà réalisé entre temps. C'est juste amusant que ces auteurs nous partagent différents thèmes autour de la COVID, et de voir qu'aujourd'hui, avec deux ans de recul, je pense que nous avons replongé en masse dans tous nos travers avant COVID. Quelques sujets restent universellement rassurant. Il est vrai que l'humain est un "monstre" envers lui-même, mais que les situations les plus dramatiques sont souvent celles où on voit de très beaux élans d'entraide se mettre en place. Pour le reste, je crois de plus en plus que l'humain est désespérement incapable d'apprendre de ses erreurs. Le monde est trop complexe, trop mondialisé, pour que nous puissions agir. Cette lecture n'était pas forcément utile.
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Happycratie

"Le bonheur n'est pas seulement devenu un instrument idéologique d'une redoutable efficacité lorsqu'il s'agit de justifier certains des aspects les plus cruels de l'économie de marché, s'excuser ses excès et de maquiller ses folies. Il a aussi permis d'introduire de nouveaux lexiques et de nouvelles techniques qui refaçonnent profondément les notions de travail et de salariat, de manière à les faire coïncider avec les nouvelles exigences organisationnelles."



Dans cet essai éclairant sur la tyrannie du bonheur caractéristique de nos sociétés contemporaines néolibérales, Eva Illouz et Edgar Cabannas décortiquent en long et en large le discours tenu par les apôtres de la psychologie positive et leurs camarades économistes du bonheur.



Les auteurs reviennent sur les raisons idéologiques et matérielles du succès d'un tel discours mais également sur sa dangerosité. Fondé sur l'idée de la résilience individuelle, de la volonté personnelle d'être heureux et ne laissant aucune place à une critique économique, sociale et morale de la société, ce discours est surtout un puissant sédatif qui mise tout sur la responsabilité de l'individu pour forger des citoyens obéissants. Le bonheur est d'abord une affaire personnelle indépendante de tout déterminisme social.



S'appuyant sur un discours se voulant scientifique mais qui en réalité est bourré de tautologie, d'approximations et de lieux communs, le bonheur est devenu un produit rentable, engrangeant des milliards sur le dos d'individus dépassés plus que jamais par les mécanismes régissant nos sociétés. Pire encore, c'est une culpabilité viscérale qui accompagne le moindre sentiment "négatif" assimilé à un échec fatal, un dysfonctionnement ainsi qu'un épuisement inévitable à se scruter, s'analyser et vouloir s'améliorer en permanence.



"Le plaisir et la poursuite du bonheur ne peuvent l'emporter sur la réalité et la recherche du savoir, sur la pensée critique, la réflexion menée sur nous mêmes et le monde qui nous entoure... Ce sont la justice et le savoir, non le bonheur, qui demeurent l'objectif moral révolutionnaire de nos vies."











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Pourquoi lire

Mis à part ceux d’Annie Ernaux et de 3-4 autres auteurs sur les 13, les textes de ce recueil sont très exigeants sur le plan du vocabulaire et/ou de l’écriture et surtout passent souvent à côté de la question « Pourquoi lire ? », n’y revenant que dans le paragraphe final. C’est vraiment dommage car on trouve ici et là des arguments très pertinents (pas toujours en faveur de la lecture d’ailleurs).
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Happycratie

Les deux auteurs s'attachent à démonter l'idée de la "psychologie positive" comme étant plutôt un phénomène du marché du bonheur.



Difficile de trouver un point d'équilibre optimal entre l'optimisme excessif, le pessimisme excessif et le réalisme excessif. Ce livre s'attaque à la "happycratie" comme l'idéologie du bonheur. Je caricature : tout est beau, la vie est belle, il n'y a pas de problème et si on n'est pas heureux c'est parce qu'on ne regarde pas les choses du bon côté. C'est devenu le fond de commerce du développement personnel et de certaines sectes. Un vrai business.



J'adhère à la plupart des arguments. Néanmoins, il y a deux points qui me dérangent dans le contenu de ce livre.



Il y a des gens qui sont excessivement pessimistes, excessivement optimistes ou excessivement réalistes. Les "excessivement" sont, en général, des situations pathologiques. Un peu d'optimisme peut parfois faire du bien, Donc, si on enlève la partie "marché du bonheur", peut-être que la psychologie positive peut être utile à certains.



L'autre point qui me dérange, et beaucoup plus, est la mention fréquente au "néolibéralisme", presque en l'accusant d'être le coupable de l'apparition de ce marché du bonheur. Je pense que l'auteur, comme beaucoup, confond corrélation et causalité.



Il est vrai que s'il y a une demande, il y aura de l'offre. C'est un mécanisme économique archi connu, valable partout. S'il n'y avait pas des malades, la médecine n'existerait pas. C'est valable pour toute branche de la psychologie, d'ailleurs. Et aussi la psychanalyse.



Je crois voir dans les différents écrits de Eva Illouz qu'elle a une tendance politique anticapitaliste (mais je peux me tromper). Il n'y a pas de mal à être de l'un côté ou de l'autre. le problème est de ne pas laisser un biais cognitif dû à ses convictions personnelles s'insérer dans ses activités scientifiques. C'est un point très difficile à régler lorsqu'on travaille en sciences humaines, en particulier la sociologie, la philosophie et, dans ce cas, la psychologie.

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La fin de l'amour. Enquête sur un désarroi cont..

Cet essai propose une réflexion sur le « désamour » sous le poids d’une société néolibérale en pleine mutation.



Eva Illouz évoque comment la prépondérance des libertés individuelles a modifié les relations amoureuses. Elle estime que le capitalisme s’est approprié la liberté sexuelle créant ainsi une plus grande instabilité dans les relations amoureuses. Pour appuyer son propos, elle se fonde sur des témoignages et d’autres références sociologiques, littéraires, psychanalytiques ou philosophiques.



Dans « la fin de l’amour » Eva Illouz analyse les séparations, la multiplication des relations ou le désengagement pour construire une sociologie « des relations négatives » basée sur l‘incertitude. Elle explique aussi comment l’essor des applications de rencontres révèle la mutation des relations sentimentales et sexuelles.



Les passages théoriques au début de l’essai sont particulièrement ardus et ils ont manqué pour ma part de clarté. Les témoignages permettent ensuite de fluidifier la lecture. Si cet essai marque un désenchantement dans notre vision de l’amour, il pose des problématiques contemporaines intéressantes !
Lien : https://memoiresdelivres.wor..
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Happycratie

Les auteurs nous livrent une étude très instructive levant le voile sur la pseudo-science de la pensée positive qui cherche à faire de la recherche constante du bonheur individuel un objectif de vie, nous transformant ainsi, et à notre insu, en parfaits citoyens de l'ordre neoliberal.

Cet essai, malgré un style universitaire parfois fastidieux mais généralement accessible, nous pousse à une reflexion critique avant tout sur nous même et sur ces discours qui peuvent sembler attrayants mais qui nous enferment dans notre individualité et nous interdisent finalement toute possibilité d'émancipation collective.
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Pourquoi lire

Ce livre est un recueil de raisons pour lire, ou ne pas lire. Plusieurs auteurs se cachent derrière ces quelques pages où l'on découvre les raisons propres à chacun qui peuvent nous amenés à lire, à aimer le monde des lettres et qu'est-ce qu'iels en retirent dans leur vie en générale.



Chacun des auteurs y va de sa petite anecdote, de son histoire personnelle, avec son propre style, ce qui donne une lecture enrichissante et intéressante.



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La fin de l'amour. Enquête sur un désarroi cont..

Voici un essai sociologique passionnant qui aborde de façon fine et poussée les nouveaux paradigmes des relations amoureuses contemporaines. Si certains sujets sont assez connus, ils sont ici mis en scène sous un prisme sociologique (mais parfois aussi philosophique voire psychologique) qui permet de mieux en cerner les mécanismes et leurs effets sur la vie sentimentale aujourd'hui.



Eva Illouz aborde, entre autres, les situations d'incertitudes multifactorielles qui rendent les choix des relations amoureuses des individus bien plus complexes, car plus flous. Le livre explore également la question de la stabilité dans une relation, mais aussi la notion de liberté et l'influence de notre société capitaliste sur les comportements et les relations. On assiste à une mise en lumière de la dérégulation des rapports humains à travers l'exploration des mécanismes qui en sont la cause. L'essai aborde un grand nombre de sujets qui font écho à notre société contemporaine comme le ghosting, la sexualisation des corps, les applications de rencontre qui entraînent des rencontres amoureuses sous forme d'un "marché" organisé.



Si le livre peut parfois être difficile à lire en raison d'un grand nombre de témoignages d'hommes et de femmes souvent peu réjouissants, l'essai se lit de façon fluide. Il amène à se questionner sur soi et ses propres comportements, mais également sur la société dans laquelle nous évoluons et qui influe considérablement sur notre vision du "moi" et de ce qui est socialement acceptable ou non.



A noter : dans cet essai, le cadre est majoritairement donné aux relations hétérosexuelles
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Les sentiments du capitalisme

"Les sociologues ont traditionnellement pensé la modernité comme la période de l'apparition du capitalisme, du développement des institutions politiques démocratiques ou de l'idée d'individualisme. Ils ont négligé un point important : à côté des concepts bien connus de plus-value (...) la plupart des analyses globales de la modernité comportaient ainsi une autre dimension : celle des sentiments"



"Dans la culture populaire, la modernité et le capitalisme étaient jugés aliénants en ce qu'ils créaient une forme d'insensibilité qui séparait les individus les uns des autres, de leur communauté, mais aussi d'eux-mêmes et de leur moi profond"



"La vie urbaine créé un flot infini de stimulations nerveuses et s'oppose au mode de vie des petites villes, qui repose sur les relations affectives. L'attitude typiquement moderne est celle du blasé : c'est un mélange de réserve, de froideur et d'indifférence, qui est toujours susceptible de se transformer en haine"



"Le capitalisme émotionnel a redéployé les cultures dans le domaine des émotions, en sentimentalisant le Moi économique et en rattachant plus étroitement les émotions à l'action instrumentale"



"Le fait d'"écrire" une émotion l'"enferme" dans l'espace au sens où cela crée une distance entre l'expérience vécue de l'émotion et la conscience qu'on en a. Quand les émotions sont enfermées dans l'écriture, elles deviennent des objets observables et manipulables"
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La fin de l'amour. Enquête sur un désarroi cont..

A lire absolument pour enfin mettre des mots sur certaines causes de divorce.

Entre les comédies sentimentales, les romans à l'eau de roses, d'une époque puis télé réalité et sites de rencontres actuels il y a un gouffre.

Mais pour autant à chaque fois c'est comme un mode d'emploi, complètement faux.

Je me questionne encore ce qu'est au juste l'amour dans un couple, une utopie?

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