
Bizarre, au fond, se dit-il, dans un pays qui fait une confiance aveugle aux mécanismes du marché, où ce dont on a le plus besoin donne aussi les meilleurs profits. Où l’offre et la demande déterminent tout.
Et pourtant, ceux qui produisent ce dont les hommes ont indiscutablement le plus besoin –à savoir la nourriture –sont incroyablement mal payés. Les paysans, les maraîchers et autres personnes patientes triment du matin au soir pour un revenu et une reconnaissance si misérables qu’il faut espérer que l’expression « le travail porte en soi sa récompense » n’est pas un vain adage. Tandis que d’autres qui déplacent des piles de papiers d’un bureau à un autre, décident quelles notes doivent être envoyées par fax, boivent de l’eau minérale avec une rondelle de citron pendant qu’ils débattent en réunion s’il faut transférer 37 % du capital en actions en yen japonais et pigeonner un fabricant de parapluies de Gdansk, se pavanent en BMW, prennent des hypothèques sur leur villa et agrandissent leur résidence secondaire.
–La vie est étrange, murmura-t-il. On a donné la priorité à tout ce qui entoure la chose plutôt qu’à la chose elle-même. Mais peut-être faut-il se retrouver sous d’autres cieux et voir les gens agir exactement de la même manière pour comprendre que quelque chose cloche ?
Le concert fut un grand succès ... en cette fin d’automne arctique... dans ce hameau qui s’obstine à être une part de la grande nature, où le ciel n’est pas comme une nuit d’octobre au Danemark un édredon moelleux mais pesant, enveloppant le monde, mais une voûte vertigineuse déployée à l’infini, où les étoiles et le croissant de lune de service brillent avec un éclat et une puissance qui vous font prendre conscience de la distance prodigieuse où elles se trouvent ...
Les difficultés ne sont pas un obstacle - au contraire : elles sont le chemin. Si l'on évite les difficultés, on n'arrive pas au but.
Au fond de l’église, les enfants jouaient à cache-cache autour du poêle et personne n’essayait de les faire taire. Les enfants étaient des enfants, ils étaient tels qu’ils étaient. Et ici il n’y avait personne qui réclamât avec irritation un peu de calme pour pouvoir se concentrer sur les mots de celui qui avait dit un jour : « Laissez venir à moi les petits enfants. »
Il secoua la tête, heureux de vivre dans un lieu où la différence entre rêve et réalité était si difficile à établir.
Si je raccrochais violemment tout de suite, elle rappellerait, tout simplement. De toute façon, on ne peut pas raccrocher violemment un téléphone portable, on peut juste appuyer très fort sur le bouton rouge. Ce qui est loin d'être aussi satisfaisant.
Les choses les plus incroyables peuvent finir par appartenir au quotidien.
... ils bavardèrent, bien agréablement de surcroît. Leurs mondes étaient différents, beaucoup de leurs opinions aussi, mais il est curieux de voir à quel point le rayonnement individuel des gens fait que leurs différences se développent en points de vue irréconciliables – voire en conflits – ou bien se résorbent dans l'acceptation généreuse qu'il faut de tout pour faire un monde.
C'est affligeant, pensa Martin, de voir les immenses blessures laissées par la scolarité, que les gens se coltinent toute leur vie. Sans s'en douter, jusqu'à ce que tout à coup quelqu'un enfonce le couteau dans la plaie.
J'ai toujours lu avec passion la Bible, le Coran et tous ces livres qui contiennent les pensées fondatrices des grandes religions, dit-il. Il a été dit et écrit des choses sages par les prophètes des différentes confessions et je trouve tout ça très raisonnablement pensé. En réalité, je crois qu'il faut être un sacré idiot pour s'imaginer qu'il y a une véritable différence entre les religions. Mais de toutes les philosophies de la vie, je crois que je préfère celle de ton grand-père. Car celle-là n'a jamais été à l'origine d'une guerre.