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Critiques de François Roux (226)
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Tout ce dont on rêvait

Il est difficile parfois d’entretenir la flamme d’une fresque telle celle qu’avait allumée François Roux dans son roman "Le bonheur national brut". Après les années 80, l’auteur renouvelle l’expérience avec la décennie suivante, sans y insuffler, cette fois-ci, le souffle romanesque du premier. Brouillon, empâté, le récit n’arrive pas à donner corps à des personnages qui deviennent caricaturaux.



Entre Adèles, « petite bille de ressentiment », révoltée contre le monde que lui laisse ses parents, et Justine la désabusée aux prises avec « une colère assourdissante, incontenable et silencieuse », il n’y a pas beaucoup de place pour la nuance.

Extrême gauche ou extrême droite semblent mués par un même combat, celui de la haine. La haine d’un système qu’il ne faudrait surtout pas changer...

Vision manichéenne, centrée sur une causalité psychologique des événements, rétrograde selon moi.

Je préfère passer mon tour, pour cette fois.



Abandonné en avril 2019.
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Le Bonheur National Brut

De rêves adolescents en compromis adultes



Le Produit Intérieur Brut est un indice économique déterminant la richesse d'un pays. le bonheur national brut, une captivante fresque politique et sociale évaluant notre capacité à être heureux aujourd'hui.



Lorsqu'en ce 10 mai 1981 apparaît progressivement sur toutes les télés le visage du nouveau président français, c'est grâce à de subtiles innovations technologiques responsables de ce procédé. Après un quart de seconde d'hésitation devant le visage pixelisé, François Mitterrand vient de remporter l'élection.

Une joie intense va alors se libérer, déchaînant parfois des réactions proches de l'hystérie.

« On pouvait encore rêver ». le sentiment est donné que tout devient possible, pour toutes et ceux qui attendaient ce changement, mais aussi partagé par certains de ces opposants.

Rodolphe Lescuyer est euphorique. Il est militant des Jeunes Socialistes.

Tanguy Caron y voit une bonne d'occasion d'être ivre, pour se donner le courage de conquérir des coeurs et des corps qui paraissaient jusque-là encore inabordables.

Paul Savidan jouit, seul dans sa chambre. Il ne regardait pas le même écran, tout absorbé à apprivoiser et accepter sa sexualité cachée. Paul est homosexuel. Sa vie n'est pour lui que « mensonge et dissimulation ». Il préfère se considérer comme « hors champ des événements marquants du monde ». C'est un « maudit » comme dans la chanson de Véronique Sanson qu'il écoute sans cesse : « Tu es prisonnier de ton secret, Mais ta douleur efface ta faute ».

Benoît, le quatrième de la bande, jauge le monde de ces sentences « cool » ou « pas cool » : rêveur tout en gardant les pieds sur terre.

Sa terre, leur terre : la Bretagne. Et même si certains seront amenés à la quitter, elle restera toujours dans leurs pensées, les liant ensemble à jamais.



1981 était l'année de leur bac et de tous les possibles, trente ans plus tard, où en sont-ils ?

Tout a changé : leurs personnalités, mais leur pays aussi. La France n'est plus la même.

Mais avant d'en venir là, c'est tout un pan de notre société qui est décrypté dans ce roman fleuve aux accents de saga d'aujourd'hui.

Sentimentale, sociale ou politique cette fresque emporte tout sur son passage. Nous les avons connus avec l'avènement de François Mitterrand, nous les retrouvons juste avant celui de François Hollande. François Roux réussit un véritable exploit romanesque en nous capturant pendant plus de 700 pages à travers l'histoire personnelle de ces quatre amis et l'évolution de notre pays.

Les rêves de réussite économique, affective sont passés au crible entre « les chaudes espérances de l'adolescence » et la réalité du monde adulte : les désirs avortés, l'argent qui aliène, les amours déçues ou les maladies injustes, et toujours « l'irréductibilité de ses origines sociales ». C'est quoi le bonheur, finalement ?



Lu en janvier 2019.



Ma chronique complète sur le conseil des libraires Fnac :




Lien : https://www.fnac.com/De-reve..
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Tout ce dont on rêvait

Une histoire somme toute assez banale qui pourrait ressembler à notre histoire ou celle du voisin ou d’un proche. François Roux dépeint la descente aux enfers d’un couple suite à des événements de la vie de tous les jours.



Justine s’éprend au départ d’Alex, un grand séducteur instable et coureur de jupons. Quand elle se fait évincée pour une autre, elle va s’attarder sur son frère aîné Nicolas, plutôt gentil, attentionné, stable et attachant. De cette idylle, un couple va se former de manière très aléatoire car Justine n’est jamais satisfaite, elle court d’hommes en hommes. Pourtant deux enfants arriveront de cette union et les années finiront par passer. Chacun y trouvera son compte, son épanouissement dans des boulots épanouissants. Jusqu’au jour où Nicolas est licencié de son poste de directeur pour cause de restructuration. Malgré ses compétences, Nicolas peine à décrocher un nouvel emploi. Quarante-neuf ans, certains trouvent cet âge trop vieux... La descente est annoncée. Le décalage entre Justine surchargée de boulot et Nicolas vide de tout travail, la confiance qui s’étiole, les amis qui s’éloignent, le couple qui prend l’eau. Tout ce dont rêvaient ces deux-là étaient pourtant d’être heureux mais le bonheur n’est pas monnaie courante quand le pessimisme ouvre s’est grands yeux.



Ce roman dessine très bien les contours du couple et du quotidien. Son bémol est qu’il est raconté à la troisième personne, et surtout, d’une manière très factuelle et détachée. Difficile de s’attacher aux personnages. Il y a peu de dialogues ce qui est dommage car ceux-ci permettaient de rentrer davantage en contact avec les personnages. Un ton un peu trop neutre et descriptif à mon goût, j’aurai préféré plus d’émotions et plus de subtilités. Sinon cela n’en reste pas moins une histoire fluide et intéressante pour son côté réaliste.

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Le Bonheur National Brut

De François à François, trois décennies. Mitterrand en 1981, Hollande en 2012. Dans ce laps de temps, on suit quatre amis Benoit, Rodolphe, Tanguy et Paul. A quelques semaines de leur bac, les choix se dessinent, trente ans plus tard que sont devenus leurs rêves, leurs ambitions ?

Roux (François lui aussi) nous offre un énorme pavé de près de sept cent pages. On suit le parcours de ces hommes dans leur vie professionnelle et sentimentale. De retrouvailles en longues absences, Roux dissèque le cœur de ces hommes. Réflexion sur le pouvoir, la reconnaissance, les choix politiques (peut-on-être de gauche et vivre dans le luxe ?, comment prendre des responsabilités sans trahir ces idéaux ?), le sentiment amoureux etc., le roman aborde de nombreux sujets avec un égal bonheur.

Chacun des personnages nous touche car François Roux a su donner profondeur et complexité à chacun d’eux. On imagine aisément l’adaptation du roman tant l’écriture de Roux m’a paru cinématographique.

Roman générationnel brillant et passionnant, on le referme le cœur serré, déjà fini! Sniff, sniff !

Un grand merci aux Editions Albin Michel et à Babélio et à François Roux pour ce très très bon moment de lecture.
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Le Bonheur National Brut

Nous sommes le 10 mai 1981, le destin de la France est en train de se jouer. Paul nous raconte ce qu’il a fait ce jour-là car il ne se sent pas vraiment concerné par l’évènement, n’ayant pas l’âge de voter alors que son ami Rodolphe, socialiste convaincu a pu le faire pour la première fois. Ils se retrouvent tous les deux ainsi que Tanguy, le troisième larron, et Myriam pour fêter cela en fumant un joint.

On retrouve le 6 juillet. Ils viennent de réussir leur bac, les uns brillamment tel Rodolphe, Paul rattrapé à l’oral au grand dam de son père, et se retrouve au café pour fêter cela. Tout le monde se réunit chez Tanguy et on fait la connaissance de Benoît le dernier de la bande, le seul qui a raté le bac. « Benoît était le quatrième et dernier élément de notre bande, que les mauvaises langues du lycée avaient surnommée « Le Loup est ses Trois Petits Cochons », le rôle de l’affreux carnivore revenant évidemment à Rodolphe ».

Déjà, on perçoit leurs relations : Rodolphe, redoutable orateur qui réussi brillamment avec mention très bien, sans avoir vraiment travaillé, Tanguy, élève brillant peste contre sa mention bien, il s’estime aussi brillant que Rodolphe, donc pour lui c’est un échec : « Il voyait le nom de Rodolphe en tellement grand, et le sien, en dessous tellement plus petit »

Tous ont une idée de ce qu’ils vont faire en septembre, sauf Paul qui essuie la colère et le mépris de son père, gynécologue, qui a décidé de l’inscrire dans une école privée à Paris pour préparer le cours de médecine. Il a tout prévu, le logement, l’inscription, et à aucun moment, il ne se soucie de ce que désire son fils.

Ils se retrouvent en Grèce pour les vacances, où Paul rencontre un garçon pour une courte et brutale expérience qui va lui permettre d’accepter son homosexualité. « Ce fut le fin de les angoissants questionnements et peut-être le plus beau jour de ma vie »

Nous allons suivre notre quatuor du 10 mai 81 au 6 juin 2012, leurs études, leurs métiers, leurs vies amoureuses…



Ce que j’en pense :



C’est Paul qui joue le rôle du narrateur de ce roman et il nous raconte ses souffrances d’enfant, méprisé par son père, qui le rabaisse sans cesse, mais qui finit par trouver sa voie (sa voix pourrait-on même dire). Le fait de s’éloigner de chez lui, et d’habiter Paris lui permet une certaine liberté. C’est le personnage le plus attachant, car il est humain, sensible, et n’essaie pas d’écraser les autres.



Rodolphe embrasse la carrière politique, on le sent venir très vite par sa rencontre avec Gabriel militant qui lui permet d’approcher Jean-Christophe Cambadélis qui le fascine (on est dans les années quatre-vingt) et dont il va copier les attitudes. Son père étant communiste, il a côtoyé la politique dès l’enfance, « Sur les genoux de son père, il avait appris à déchiffrer l’alphabet dans les manchettes de L’Humanité… »



Tanguy, obsédé par le travail jusqu’à l’addiction comme il a pu l’être dans les études, sans cesse en mouvement, boulimique de tout, la sexualité débridée, qui cherche à satisfaire un père décédé trop tôt et qui a une révélation en voyant Tapie à la télévision.



Benoît, qui a perdu ses parents tôt et a été élevé par son grand-père à qui il voue une vénération immense. C’est un artiste qui photographie les paysages, les gens et qui trouve sa voie.



Ce livre m’a énormément plu. Il nous parle de l’ambition ; on ne peut s’empêcher de penser à Rastignac « à nous deux Paris », mais lui se limitait à Paris bien-sûr, pour ces jeunes là, il faut New-York, le monde entier à leurs pieds.



Il retrace les espoirs, les illusions, désillusions de ces années qui ont vu émerger, les écoles de commerce avec leurs lois implacables qui poussent parfois les gens au suicide en leur demandant toujours plus de résultats au bénéfice des actionnaires, au détriment de l’humain.



On retrouve aussi au passage, les films, les chansons de l’époque, avec les vinyles, tout ce qui semblait léger tandis que dans l’ombre montait la bête immonde sous la forme vicieuse du SIDA, et ses conséquences funestes, les médicaments, la mort.



L’auteur a choisi de raconter l’histoire de quatre copains, et le rôle des femmes est limité : ce sont des épouses, des mères, avant tout et elles auraient pu occuper une plus grande place, même si elles ont du caractère, telle Alice fille d’un gros entrepreneur pas très honnête, Madame Ziegler la logeuse de Paul, ou Julia riche américaine, elles n’occupent pas le devant de la scène que l’auteur a désiré laisser à son quatuor.



Il y a des scènes hilarantes, comme le premier casting de Paul ou la façon dont il s’empêtre dans sa vie sentimentale, ou Tanguy interrogé sur "la sexualité des pots de yaourt"



l’analyse géniale de l’auteur, que j’ai adoré ce livre qui n’a pas eu le succès qu’il méritait à mon avis.



Tout est bien, l’histoire, l’étude de la société, le style, l’écriture. Un bon livre, un pavé de 679 pages que l’on ne lâche plus quand on l’a commencé, avec des phrases, des réflexions qui m’ont beaucoup plu.

Note : 9/10

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Tout ce dont on rêvait

Je suis bien contente que Babelio ait pensé à moi pour découvrir ce livre en avant première !

Je les remercie, ainsi que les éditions Albin Michel.



Je suis heureuse, parce que ce roman m'a beaucoup plu !



L'immersion au sein de la famille que composent Justine et Nicolas est très aisée.

Il est assez naturel de s'identifier à au moins l'un des personnages.

J'aime particulièrement cela dans mes lectures. Me sentir concernée, un peu comme si j'étais prise en otage par le déroulement de l'histoire.

Les événements qui se produisent sont d'actualités, font état de notre société.

C'est le quotidien de nombreux français.

Réaliste et criant de vérité.



Justine et Nicolas sont mariés et parents de 2 grands enfants, lorsque monsieur perd son emploi à l'aube de ses 50 ans.

Il ne réalise pas tout de suite, l'impact que ce bouleversement aura sur sa vie et celle de sa famille, de ses proches.



Tout ce dont on rêvait, c'est l'histoire d'une descente aux enfers, d'un combat aussi...

Un combat face à la conjoncture actuelle,

un combat face au regard des autres,

contre l'image que l'on renvoie,

contre soi,

surtout,

la baisse de l'estime et de la confiance en soi....



Comment surmonter une telle épreuve ?

Comment faire face quand on est confronté à cette situation ? Qu'on ne se sent plus utile à rien ?

Où trouver la force d'avancer et de conserver le peu qu'il nous reste ?

L'essentiel, sans aucune doute,d'ailleurs...



François Roux nous immerge au sein de cette famille, assez commune et nous plonge dans leur quotidien semé de doutes, de questionnements, de découragements, mais aussi d'espoir, d'envie... tout cela avec brio.



J'ai combattu avec lui,

j'ai tenté de comprendre et d'épauler avec elle,

j'ai soutenu et me suis révoltée aussi,

exprimé mes idées et balancé mes 4 vérités !

Et je me suis surtout posé de nombreuses questions... sur ma vie, mes à priori, mes convictions, ma situation, mes envies...

et... sur MA vie, oui... Ce qu'elle est et ce que j'ai envie d'en faire.



Vous l'aurez compris, ce roman m'a un peu secouée...

Je vous invite à le découvrir dès sa sortie, le 04 janvier 2017.
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Tout ce dont on rêvait

Tout ce dont ils rêvaient et pourtant le bonheur de ce couple n'est pas au rendez-vous.

Justine en quête du grand amour rencontre Alex. Mais pour Alex, Justine n'est qu'une passade, une fille de plus. Par défaut, elle finira par se mettre en couple avec Nicolas, frère de. Nicolas est l'opposé, droit, serein, travailleur, sûr de lui.

Le père de Justine est du genre vieux con aigri par la société, les parents des frangins sont morts dans un accident d'avion. Nicolas se sent coupable, il a tout géré.

La vie de ce couple va basculer le jour où Nicolas perd son emploi de directeur financier. Toute cette jolie façade va s'écrouler pour révéler les traumatismes liés à l'enfance.

Je ne connais pas les personnages de l'histoire mais immanquablement ils nous entourent, on connaît tous des Nicolas, des Justine et tous les autres.

Un roman qui sonne vrai par tous les événements qui servent de toile de fond : mai 1968, l'attentat de Charlie Hebdo, les restructurations industrielles … Mais surtout ce couple qui n'est qu'un exemple de ce que bien d'autres traversent.

La famille qui sert de havre de paix se déchire, se réconcilie, s'oppose, se rapproche ou s'éloigne.

La plume de François Roux dépeint à merveille cette histoire, nous pousse à découvrir la suite, malheureusement nous sommes en terrain connu.

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Tout ce dont on rêvait

"Tout ce dont on rêvait", le titre du roman sauf que Justine, mon personnage préféré, ne rêvait à rien.

On la rencontre jeune tout à fait perdue dans les désillusions, détruite par un père négatif à son égard, loser, révolté. Elle vit une vie débridée, dégoûtée par les hommes, et elle rencontre Nicolas, le frère de celui qu'elle convoitait.

Ils se marient, ont deux enfants. Nicolas dirige un service financier dans un palace, Justine est infirmière en psychiatrie.

Elle veut se rendre aussi utile que son père a été inutile.

Justine montre une face extérieure rassurante et cache une face intérieure tourmentée.

C'est un personnage étonnant.

Je ne dévoile pas la suite, ce serait gâcher le plaisir du lecteur.

J'ai beaucoup apprécié le style de l'auteur qui analyse en profondeur les personnages et la société dans laquelle ils évoluent .

J'ai par exemple beaucoup aimé la scène où Justine se rend à une réunion de l'extrême droite avec son père pour observer l'auditoire. C'est plein d'empathie pour ces personnes déçues par la société .

François Roux n'est jamais ennuyeux même quand il aborde les conversations politiques à travers la bouche de Joseph, le grand-père, et Adèle, la petite-fille.

Il est très réaliste, il me semble.



Je remercie Babelio et les éditions Albin Michel pour m'avoir permis de découvrir l'auteur et son livre.
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Le Bonheur National Brut

Qu'ont ils fait de leurs rêves et de leur amitié?



Au printemps 1981, l'avenir de la France s'est teinté de rose et les années-lycée s'achèvent pour Paul, Rodolphe, Tanguy et Benoit. Bac en poche (ou pas), les quatre copains vont suivre leur propre chemin, tenter de trouver leur voie selon leurs capacités et de leurs ambitions.



La première partie est le type même du roman d'apprentissage, dans le décor social d'un pays et d'une époque. Par une narration joyeusement provocatrice et virevoltante, entremêlant les quotidiens d'adultes en devenir, les personnalités se dessinent et s'affirment, portées par l'insolence de la jeunesse, la compétition, la réussite, les sentiments amoureux, la compréhension et l'acceptation de soi.



Leur sera-t-il possible de conserver intimité fraternelle et innocence, d'échapper au désenchantement en entrouvrant les portes de la politique, de l'entreprise et de la culture?



Du lendemain d'une élection qui porte les espoirs d'une génération et durant les 30 années suivantes, c'est un pays décortiqué par ses multiples aspects: convictions et combats politiques, pouvoir de l'argent dans les domaines de l'art et des affaires, mondialisation, compromissions, contraintes économiques, évolution des mentalités, classes sociales.

Le tout en forme de tragédie sociétale, aux accents de réquisitoire.



Pas un instant d'ennui dans ce gros bouquin de 700 pages, pas de baisse de régime dans la peinture d'une société française bien radiographiée, traitée par une vivacité de plume, fluide, ironique et humoriste.

J'ai aimé accompagner les personnages, entre désillusions et éternelle quête de satisfaction professionnelle et de bonheur personnel. Bien qu'un peu stéréotypés pour les besoins narratifs, ils sont denses, crédibles, fidèles.

Ils s'opposent, se complètent, ont bien des difficultés à vivre en accord avec eux-mêmes, et sont les miroirs tristement navrants des rouages de notre XXIème siècle.



Etre heureux est une course de fond....

Excellente lecture!

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Le Bonheur National Brut

Un roman très, très puissant, sur la place écrasante et dominante que prend notre père dans notre vie. Les quatre jeunes gens qui passent leur bac au moment de l'élection de Mitterrand en 1981, qu'on retrouve ensuite dans les années qui précèdent l'élection de Hollande, connaissent des destins aussi dissemblables que possible et aux issues tout aussi variées ; mais ils sont tous écrasés par leur père d'une manière ou d'une autre.



Car le père, c'est toujours le soleil de notre vie, qu'il nous éclaire ou nous aveugle, qu'il nous réchauffe ou nous brûle. Dans le monde du Bonheur National Brut, toutes les configurations du rapport au père existent.

Il y a le père écrasant, méprisant, dogmatique et aveugle à tout ce qui fait la singularité des êtres qui l'entourent. Avec un tel père, se construire, c'est forcément le rejeter. Mais au prix de quelle amputation ? Il y a le père modèle, obstiné, qui a poursuivi un idéal toute sa vie et aurait voulu le transmettre à son fils. Avec un tel père, comment réussir en se différenciant ? Faut-il lui être infidèle, le peut-on, y a-t-il une seule façon de lui être fidèle ? Il y a le père absent parce que mort, qui devient alors le mètre-étalon ultime de toutes les ambitions et de toutes les décisions, qui peut être incarné par un grand-père blessé. Comment survivre, comment ne pas décevoir ?



Les fils font ce qu'ils peuvent, comme nous tous, avec ces conditions que la vie leur a faites. On comprend que les réussites sociales éclatantes peuvent cacher un puissant sentiment d'avoir déçu, que les échecs apparents peuvent se révéler fidélité profonde à ce que le père désirait, ou encore que les ruptures mutilantes n'empêchent hélas pas la culpabilité inoculée par une "autorité vampirique et intarissable". Comme dans la vie, on s'en rend bien souvent compte quand il est trop tard, trop tard pour le lui dire, trop tard pour qu'il le sache, trop tard pour le lui reprocher, trop tard pour le remercier. La vie nous blesse, mais si nous voulons vivre la nôtre, et pas celle d'un autre ou celle voulue par un autre, nous devons l'accepter.



C'est somme toute le travail de l'inconscient qui s'exprime et traverse tout le livre... Mais si aucune des critiques que j'ai lues sur ce livre n'en parle de ce point de vue, c'est parce qu'une de ses grandes forces est de ne pas chercher ostensiblement à démontrer quoi que ce soit sur le poids des déterminismes familiaux : c'est avant tout une grande fresque générationnelle, au travers du destin particulier de quatre jeunes à la fois proches et différents, qui, exactement comme dans la vie, comme dans nos vies, grandissent, conquièrent leur liberté et leur autonomie adultes, cherchent le bonheur et l'amour, en se débattant avec les conditions que leur a léguées leur enfance.



Oh là là, quel grand livre... quelle passion dans ces pages, quelle justesse dans l'analyse des destinées humaines... et en même temps, quel grand souffle, quelle précision dans la restitution de l'ambiance et des espoirs d'une époque... François Roux crée des héros et donne à la génération qui avait 18 ans en 1981 le livre dans lequel on retrouve tout ce qui a constitué sa jeunesse, son âge adulte, ses espoirs, ses désillusions et ses réussites. Tous ses grands repères, et toute sa diversité aussi. Ce n'est pas ma génération, mais j'avais quand même déjà onze ans en 1981 et j'ai retrouvé au travers de plusieurs personnages des souvenirs de ma propre enfance. Si vous êtes passé à côté de ce livre jusqu'à présent, lisez-le. C'est vraiment un de mes gros coups de cœur de 2018, et les trésors qu'il contient sont tout à la fois propres à une époque, et intemporels.
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Tout ce dont on rêvait

Au travers de l’histoire d’une famille parisienne, bien contemporaine, l’auteur nous parle des plaies de notre époque : le couple, le chômage, les enfants qui grandissent, la famille…



On a un couple étrange, Justine ayant épousé Nicolas alors qu’elle était tombée amoureuse de son frère, Alex, lors de sa période alcool, boîtes de nuit, sexe à tout crin. Un couple où a priori tout va bien, l’argent entre à flots, l’appartement douillet… les enfants poussent bien, le dernier étant hyperactif sans que cela semble trop perturber tout le monde.



Mais, une ombre surgit sur ce tableau idyllique, un peu trop nombriliste : le chômage brutal de Nicolas qui se fait licencier, pour cause de doublon et trop vieux (49 ans), par un jeune homme dont les dents rayent le parquet ; du jour au lendemain il se sent devenir inutile alors que sa femme Justine est surchargée de travail.



Le personnage de Justine est intéressant : son père, Joseph, hyper autoritaire, pervers, et frontiste, (qui se dit artiste mais vit aux crochets de sa femme qu’il traite comme une servante), l’a rabaissée durant toute son enfance et adolescence, ce qui a provoqué bien sûr une estime de soi au ras de pâquerettes, qu’elle va tenter de sublimer par des études d’infirmière psy (pour fuir au plus vite la maison familiale) et reprendre des études de psychologie pour s’occuper de… personnes atteintes d’addictions diverses. Ce que j’appelle « le syndrome de Mère Térésa ».



« Contrairement à Joseph, Justine voulait être utile, donner du sens à ses actions et, pour y arriver, il n’y avait pas meilleur chemin à ses yeux que de s’engager dans une activité à caractère médical. » P 80



Le chômage va mettre en évidence ce qui était latent dans leur couple, les non-dits, les vieilles jalousies, les culpabilités enfouies ; de ce fait, la communication va devenir de plus en plus difficile.



Une mention spéciale pour le pseudo stage de réinsertion bidon, oups, pardon, on parle de « outplacement » !!!! avec son cortège de winners, killer… « vous n’êtes pas licencié, vous êtes sorti de l’entreprise. Vous n’êtes pas en recherche d’emploi, vous êtes en repositionnement professionnel »



François Roux décrit très bien la société urbaine actuelle, son nombrilisme, ses valeurs bien peu affirmées, enfermée dans métro boulot dodo et qui ne voit pas la détresse des laissés pour compte, des campagnes.



J’ai bien aimé, même si elle est souvent insupportable, le personnage d’Adèle, la fille de Justine car elle s’engage, elle ne reste pas passive devant l’évolution de la société (crise de la banque HSBC, attentat de Charlie Hebdo, la marche où on voyait trôner des dictateurs…), sans tomber dans la violence.



J’ai passé un bon moment avec ce livre mais j’ai moins accroché qu’avec le précédent de l’auteur : « Le bonheur national brut », probablement car il parlait des années 80 donc plus proche de ma « jeunesse », avec un idéal politique alors que celui-ci m’a irritée par son côté autocentré, mais aussi désenchanté, branché fric et subissant sans espoir. Ceux qui ont un travail deviennent addicts et ne comptent plus leurs heures et les autres se sentent inutiles et perdent toute confiance en eux.



Une fracture entre deux mondes qui est le reflet de notre société et fait réfléchir… forcément on se sent responsable quelque part… « tout ce dont on rêvait », le titre sied à merveille….




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Le Bonheur National Brut

Un des grands romans de la rentrée littéraire à mon sens.

Ce roman nous attache à un groupe de quatre amis, dont nous suivons l'évolution de 1981 à nos jours.

Il y a Rodolphe, qui rêve de se lancer dans la politique et qui fera une carrière rapide grâce à l'aide de son beau-père entrepreneur qui a des appuis non négligeables dans le monde de la politique.

Il y a Benoît, le moins loquace de la bande, au tempérament d'artiste, qui lui, va se faire une réputation mondiale dans le domaine de la photographie.

Tanguy ensuite, jeune homme ambitieux qui va passer par une école de commerce, pour se retrouver patron de la filiale française d'un grand "lessivier".

Et enfin Paul, le narrateur, certainement le personnage le plus proche de l'écrivain.

La trajectoire de Paul est certainement la plus complexe. Issu de la bonne bourgeoisie bretonne, il va vite "monter" à Paris pour commencer des études de médecine. Etudes qu'il va vite abandonner pour mieux vivre sa passion pour le théâtre. En même temps il va vivre difficilement au début sa condition d'homosexuel et va se retrouver en rupture avec sa famille.

Ce roman est très attachant pour de nombreuses raisons. Le côté historique d'abord. Le contexte est bien rendu, l'auteur a même interviewé des hommes politiques comme Manuel Valls alors qu'il était seulement député, ceci pour mieux rendre le côté politique des personnages du livre.

Authenticité des personnages ensuite: on suit leurs démêlés et surtout leurs difficultés à régler leurs "histoires" avec leur famille et leur passé.

Certains des personnages arriveront à faire la paix avec leur famille et à trouver leur place parmi elles, condition essentielle pour commencer à être heureux.

Un beau récit d'"apprentissage" qui nous fait parfois penser à Dickens.

Une belle fresque où tout s'entremêle: les réussites, les échecs, les désillusions, les remises en cause.

Il n'y a plus qu'à se laisser emporter.
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Le Bonheur National Brut

Ils venaient d’avoir le bac, Mitterrand était entré à l’Elysée. Trente ans plus tard et des poussières, quatre amis font le compte de leurs désillusions tandis que Hollande devient président de la République française.

On le voit venir, non? Effectivement, il vient, le pitch à 10 balles, avec ses gros sabots. Soit un socialiste mou, un libéral honteux, un artiste reconnu vaguement engagé et un artiste médiocre totalement dégagé. Soit un homme à femme (mais pas la sienne), un hommes à femmes, un époux fidèle et un homo sentimental. Mixez les ingrédients. Alternez les couches. Tartinez de compromis. Osez un doigt de compromission. Servez tiède, maintenant que la fougue de la jeunesse et les idéaux politiques se sont fracassés sur l’impitoyable-réalité-des-lendemains-qui-déchantent-et-des-zamours-faut-il-qu’il-m’en-souvienne. Tandis que chacun des quatre copains rate consciencieusement sa vie, empêtré qu’il est dans sa relation avec son père sur-moïque, la France déchoit de Mitterrandie en Hollandie, manque de bol généralisé et non pas de symbole.

Je ne cracherai pas dans la soupe (populaire), c’est facile à lire, assez bien vu, totalement convenu, ça brosse les gens qui ont mon âge dans le sens du poil, qualité France sans mauvaise surprise, ni bonne, on l’aura compris.

Après, hein, au milieu de l’incertitude généralisée qui est notre quotidien, un bon gros bouquin sans surprise, ça en devient presque alléchant.

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Le Bonheur National Brut

10 juin 1981, la France est coupée en deux. La droite et la gauche se sont affrontées dans une lutte acharnée pour finalement assister à l’avènement du parti de gauche avec l’élection de François Mitterrand. Tout le pays est en émois, personne n’osait y croire. Avec cette victoire, les gens reprennent confiance et rêvent d’un avenir meilleur. Mais pour Paul Savidan et ses amis de toujours, c’est aussi et avant tout l’année du baccalauréat. Si Benoît n’a pas d’autres prétentions que de rester dans sa Bretagne natale et se consacrer à sa passion pour la photo, Rodolphe et Tanguy, eux, ont une revanche à prendre sur la vie. Le premier rêve d’embrasser une carrière politique et de se détacher des valeurs transmises par son père, un ouvrier communiste particulièrement engagé. Quant au second, responsable très tôt de l’entreprise familiale, il rêve de prouver au monde sa valeur et de gravir l’échelle sociale. Seul Paul, empêtré dans son mal-être d’adolescent et la dissimulation de son homosexualité, peine à trouver sa voie…





A travers le destin de ces quatre amis, dont les routes vont se séparer après le bac, François Roux nous livre le portrait d’un pays en plein bouleversement, aussi bien économique que social et culturel. Enfants des Trente Glorieuses, Paul, Rodolphe, Tanguy et Benoît représentent cette jeunesse pleine d’espoir en quête permanente de bonheur et de reconnaissance, rêvant d’enrichissement rapide et de gloire. Une jeunesse en pleine effervescence, mais qui subira les désillusions d’un monde en manque d’idéaux, frappé de plein fouet par la crise, le chômage et la mondialisation…





Si Paul est le narrateur du récit, les quatre compères tiennent néanmoins une place relativement égale, chacun se succédant au fil de la narration. L’histoire par ailleurs se déroule en deux temps. Elle s’ouvre donc en 1981, sur l’élection de François Mitterrand, jusqu’en 1984 pour ensuite faire un bon dans le temps jusqu’en 2009. Une ellipse de 25 ans, qui permet de retrouver des personnages mûris, changés tout en restant fidèles à eux-mêmes… Si certains rêves se sont réalisés, d’autres demeurent à jamais perdus et c’est avec une certaine nostalgie que l’on découvre les conséquences des choix d’une vie.





La force du « Bonheur national brut » réside dans l’attachement que l’on a pour les personnages. L’écriture est particulièrement agréable et en fait un roman captivant et difficile à lâcher ! François Roux dresse avec talent le portrait d’une époque, d’une nation et de ses mœurs. A travers le récit tendre et fort d’une amitié, il aborde la question de l’importance des racines que l’on est tenté de fuir, parfois, mais que l’on n’oublie jamais… Bref, vous l’aurez compris, j’ai eu un gros coup de cœur pour ce texte magnifique et bouleversant !
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Tout ce dont on rêvait

« Tout ce dont on rêvait » , voilà un titre qui promet beaucoup mais j’ai été déçue, car il s’agit du quotidien d’un couple dont l’un perd son travail. Bien sûr je résume beaucoup mais cette histoire est malheureusement tout à fait banale. Je rencontre dans mon travail des tas d’histoires semblables. La seule différence c’est qu’elles me touchent bien plus car je vois les gens et ressent leur détresse et leurs attentes . Ici dans ce livre , seul Nicolas a su m’interpeller un peu mais je suis restée la plupart du temps distante à l’histoire de cette famille.

Ce livre n’est pas désagréable à lire mais n’a pour moi que peu d’intérêt. Plusieurs thèmes sont abordés, le chômage, l’amour, les attentats, mais aucun n’est traité avec suffisamment de force pour m' interpeller . Est-ce la faute des personnages qui ne sont pas assez charismatiques ? ou pas assez attachants ou encore pas assez détestables ? est-ce l’enchaînement de tous ces thèmes qui empêche d’en approfondir un? Je ne sais pas, mais ce roman ne m’incite pas à lire « le bonheur national brut » qui est pourtant chez moi depuis un certain temps. Il attendra donc encore un peu avant de descendre de son étagère…

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Tout ce dont on rêvait

Après "Le bonheur national brut", François Roux continue d'ausculter des personnages lambda confrontés à la violence de notre époque (la crise de 2008 jusqu'aux attentats commis contre Charlie Hebdo en toile de fond). Ici un couple, Justine et son mari Nicolas tout les deux solidement installés socialement qui voit son équilibre menacé par la perte d'emploi de Nicolas à l'approche de ces 50 ans. Si les sujets abordés font écho à nos angoisses, notamment sur le chômage et tout les traumatismes que celui-ci engendre, le livre perd de sa force lorsque François Roux s'intéresse à la déliquescence du couple, le désir et la routine qui s'installe fatalement dans une relation au long cours. L'autre défaut majeur vient du regard pas forcément empathique pour ces personnages. Bien en deçà de son précédent roman pour ma part.
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Le Bonheur National Brut

10 Mai 1981-6 Mai 2012,le parcours de quatre amis bretons,Paul,Tanguy,Benoit,Rodolphe.Quatre garçons de milieux différents,et de familles à structures et caractères divers,ayant 18 ans lorsque débute le récit.Ils sont tous sauf un fraîchement bachelier et a l'heure des choix décisifs pour la suite de leur vie.Ils sont gonflés d'espoirs,d'illusions et d'envies,bref veulent réussir leur vie,être heureux.Trois quitteront leur Bretagne natal,l'un restera au village,que nous suivrons dans la première partie jusqu'en 1984.Dans la deuxième partie,on les retrouve vingt-cinq ans plus tard,quadragénaires,avec des trajectoires complètement différentes ,un peu perdu dans leur quête du bonheur.

A travers cette fresque romanesque trés riche,Roux touche un peu à tout:survole l'évolution sociale,économique et historique de la France et du monde environnant,de ces trente dernières années,pose des questions existentielles("Comment faire pour vivre en accord avec soi-même?"-Rodolphe-,"De quoi bordel ai-je réellement envie?"-Benoit-)et morales,et fait une brillante analyse de la nature humaine avec toutes ses contradictions,ses complexes,ses doutes,ses peurs...Les femmes bien qu'en retrait ont la part belle comparées aux hommes,en primadonna Alice mais aussi des figures comme Madame Ziegler,Ancha ou Beverly,des femmes fortes,intelligentes.

C'est un très bon roman qui nous fait réfléchir sur la question essentielles "Qu'est-ce-que réussir sa vie?".Beaucoup aimé !
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Le Bonheur National Brut

Dans un paysage littéraire français trop volontiers voué à l'autofiction (les meilleurs romans de ces derniers mois en témoignent peu ou prou, de Reinhardt à Salvayre en passant par Carrère et Foenkinos), un grand merci à François Roux de respirer "large" dans son Bonheur national brut, en écrivant le roman d'une génération, née aux rêves de grandeur au soir d'une élection présidentielle de 81, et totalement désillusionnée 31 ans plus tard, lors de l'arrivée au pouvoir d'un nouveau candidat de gauche. D'un François à un autre, le temps avait fait son oeuvre et usé jusqu'à la trame l'espérance d'une vie heureuse et accomplie. Le bonheur justement, quelle est donc cette bête curieuse, si ardemment recherchée ? "Depuis trente ans, nous naviguions à vue, perplexes, indécis, vers un but que ce monde, lui-même déboussolé, nous a clairement désigné en le survendant : être heureux malgré tout et son corollaire -réussir sa vie." Le livre de François Roux est extrêmement bien agencé : deux parties historiques distinctes (de 1981 à 1984 puis de 2009 à 2012, correspondant aux 20 ans puis à la pré-cinquantaine des ses protagonistes), des racines fortes en Bretagne, quatre jeunes garçons "dans le vent" aux caractères et ambitions différents mais qui, à l'exception d'un seul, vont devenir "quelqu'un", en politique, dans le monde de l'art et dans celui de l'entreprise, succès professionnels pourtant fragiles et accompagnés de failles terribles. Le bonheur national brut n'est pas loin de devenir trop insistant dans sa démonstration que l'argent et la notoriété ne font pas le bonheur (on s'en doutait déjà un peu) mais l'auteur a su donner de la profondeur à la psychologie de ses personnages et son style, coulé dans un classicisme qui ne la ramène pas, crée un sentiment de proximité avec son quartet breton, humanisant chaque personnage dans sa recherche de paix intérieure et d'équilibre. Le narrateur, le quatrième homme, en quelque sorte, à la vie plus excentrée et moins "performante", a pour rôle de fédérer les liens entre ces amis de lycée. François Roux est moins convaincant en la matière, le livre étant finalement plus la somme de destins individuels, certes parallèles, qu'une oeuvre chorale. Ici, pas ou peu de scènes de groupes comme dans les meilleures comédies italiennes (Nous nous sommes tant aimés, Mes chers amis), références en la matière. Paradoxalement, d'ailleurs, le caractère le plus remarquable du livre est celui d'Alice, pourtant le moins "exploité". Mais n'est-ce pas son mystère qui la rend ainsi passionnante ?
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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Le Bonheur National Brut

Un roman à quatre voix magnifique, grand oublié de cette rentrée littéraire. Quatre jeunes qui passent le bac en 1981, leurs rêves, leurs envies, leurs doutes, leurs espoirs. Trente ans après, un François a succédé à un autre François, le bilan de leurs vies, de leurs réussites, de leurs échecs, dans la tourmente du souvenir de ces trente années qui ont vu des golden boys s'emparer des rêves, des politiques écraser les utopies, de l'argent se nourrir des désenchantements de l'âme et des coups fourrés devenir monnaie courante. Un style remarquable, une épopée, une réflexion sur les illusions perdues. A lire!
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Tout ce dont on rêvait

Difficile de faire plus contemporain que ce livre qui se termine quelques mois après l'attentat de Charlie Hebdo. C'est toute une famille qui passe au scalpel, une famille normale, peut-être vous, vos voisins, vos amis.

François Roux passe presque tout en revue des dernières décennies: mai 68, le socialisme, puis la crise, le chômage, la radicalisation, la pollution, la frontière entre trois générations, l'une engagée, la deuxième désabusée, affaiblie par tous ces messages médiatiques qui nous sautent à la figure, et une troisième qui apparaît plus sûre d'elle, unie par les réseaux sociaux et un nouveau modèle d'engagement.

Heureusement, ce roman n'est pas juste un kaléidoscope de ce qui a fait les années 90 et 2000; Justine, Nicolas, leur fille Adèle existent réellement dans ses mots et souffrent, pensent, changent, espèrent, se dépatouillant tant bien que mal dans ce monde moderne étriqué. Bien que commençant par Justine, c'est la perte d'emploi de Nicolas qui devient le sujet principal du roman. le sujet n'est sans doute pas nouveau, mais la manière dont l'auteur nous mène à considérer la lente chute de Nicolas et de son couple est tout simplement bouleversante. Pas d'exagération, de trémolo ni de pathétisme dans ces quelques années qui vont peu à peu détruire le couple, seulement une étude de cas lucide et déprimante.

Et puis il y a le père de Justine, aigri, devenu fasciste et qui n'a jamais eu un mot encourageant envers sa fille; sa mère, qui accepte de sacrifier sa vie à cet homme repoussant. Il y a Adèle, jeune adolescente porteuse d'espoir et de maturité, et Alex, le frère de Nicolas par qui tout a commencé, séduisant et sûr de lui. Au centre de tout ça, il y a surtout Justine elle-même, révoltée, porteuse d'une colère qu'elle ne sait plus vers quoi diriger, embourbée dans la surcharge des problèmes dont nous assènent les médias jour après jour.

J'ai eu peur en lisant les premières pages du livre qui ne font pas honneur au reste, trop caricaturales et dures quand la suite est tellement plus travaillée. C'est un constat malheureusement bien déprimant de la société actuelle mais pas défaitiste ni moraliste.

Je ne sais pas si ce roman franchira les années tellement il est ancré dans une période bien précise, donc je vous conseille fortement de le lire aujourd'hui, tout de suite, parce que c'est à nous qu'il parle.
Lien : http://pourunmot.blogspot.fr..
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