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Citations de Georges Navel (87)


Sur ces montagnes des Basses-Alpes, du Vaucluse, les nuits, les étoiles sont plus belles que partout ailleurs, la cigarette du soir plus douce auprès du feu sous la marmite. On se sent haut. L'odeur de lavande toujours on la respire, elle se mêle à celle de la paille, du blé en gerbes et des troupeaux. On dirait que l'odeur de la terre monte jusqu'aux étoiles. Quand on arrive aux hautes terres dans un village reculé, dans un hameau, dans une ferme au-delà des hameaux loin de tout, à la nuit, on se dit à mesure qu'on grimpe:"Si je reste par là un mois, quand je descendrai je ne serai plus le même." On gagne à chaque mètre un peu plus de sérénité. On devient pareil à ce qu'il y a d'immense, de reposant autour de soi. Si l'on est seul on a envie de chanter doucement, comme les insectes le font, d'être de l'amour, d'être de l'été. (folio, p. 231)
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J'admirais les terrassiers, assez fiers de leur métier pour en porter le costume en ville. De la poche de leur colletin dépassait un journal, l'Humanité le plus souvent, le Populaire, le Libertaire.
Ils habitaient la plupart en banlieue, parce qu'on s'y loge à meilleur compte qu'à Paris et qu'ils pouvaient avoir un bout de jardin, trois poireaux, deux poules, une caisse à lapins. Ils venaient de la ceinture rouge. Ils élisent des maires et des députés communistes. Ils les nomment par leur prénom. Leurs représentants sont pour eux non des chefs mais des copains. S'ils ont la bosse de l'admiration, elle s'allie au penchant à l'égalité. Je ne vois pas devant qui aurait pu baisser le regard, l'ancien marin notre délégué. Il aurait tutoyé le pape s'il l'avait rencontré. C'est une conviction chez eux que l'homme n'est jamais qu'un homme sous n'importe quel costume. Le beau parler ou les discours les éblouissent, ils ne sont pas sans reconnaissance pour la musique des paroles. Mais si l'on en tire trop vanité, si on se met au dessus d'eux, ils retrouvent leur fond. Ils savent qu'eux aussi, en allant aux écoles, auraient pu faire figure plus avantageuse. Ce ne sont pas des humiliés. Quand on leur porte mépris, ils peuvent le rendre.
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Je me dis que notre but est un monde plus fraternel mais que pour la fraternité il faut tuer, combattre, que la vie a de drôles d'exigences.

( p.199)
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Elle était sérieuse, jolie, grande, blonde, élancée, simplement mise, fichu, blouse noire, sabots. Trop belle pour sa rue à querelles d'ivrognes. Je craignais d'offenser sa vertu par le simple aveu de mes sentiments .( ...)
Le langage me manquait pour le lui dire avec des mots qui n'auraient jamais servi.

( p.92)
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Je vivais dans un climat où l'enfance doit mûrir plus vite qu'à l'ordinaire.

( p.53)
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Il y a une tristesse ouvrière dont on ne guérit que par la participation politique
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J'étais devenu compagnon, je commençais à mieux gagner ma vie (...)
Je continuais à me bourrer de lectures. De la sorte, je vivais en rêve. La vie autour ne me semblait pas encore la vraie vie. Je croyais n'être enfermé que dans du provisoire. J'espérais voyager, en connaître une autre, la vraie, sortir des pays industrialisés. En attendant il y avait celle des jours de fête et du dimanche, les sorties des jeunesses libertaires. (p.56)
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J'étais un morceau d'usine pour l'éternité. Elle imprégnait de sa crasse mes vêtements de ville. Je n'étais pas à ma place assis sur un banc du Luxembourg, mais mieux à Ménilmontant. J'aurais pourtant voulu vivre éveillé, être heureux devant les fleurs, partager la gaieté d'Anna qui supportait mon ombre grisâtre. (p. 108)
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J'ai plus appris avec les livres de la bibliothèque de l'école, les Jules Verne et les Erckmann-Chatrian que me prêtait Monsieur Joly, notre instituteur, que sur les bancs de sa classe. J'ai du moins appris, en lisant, l'orthographe et le sens des mots, -- insuffisamment, mais plus encore que si j'avais été un bon élève jusqu'au certificat d'études. On m'a, pour m'apprendre peu de chose, inutilement retranché, pendant les meilleures heures de la journée, du monde où je vivais avec ma mère, les champs, les jardins, monde où je me développais physiquement, pour un autre où je me ratatinais sur un banc, l'esprit plein d'ennui.
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Bernard Groethuysen

(..) Il ressemblait à Verlaine, à Kropotkine, à Socrate, mais j'aurais bien vu, en regardant son très beau front, sa barbe et ses cheveux gris, sa tête, sur les épaules d'un Père Éternel, plus fraternel et moins chef de tribu. Dieu, en ressemblant davantage à Groeth aurait gagné en humour .
En rencontrant Groeth, j'étais comme admis près d'un Dieu le Père, sensiblement amélioré, pour lui raconter au jour le jour ma vie, m'y reconnaître. C'était un esprit sans limites, sans barrières, d'une infinie bonté. Son intelligence était généreuse, contagieuse, enrichissante. Rien d'humain ne lui était étranger.(...)
Il n'était pas nécessaire d'être un grand ceci ou un grand cela, d'avoir du galon littéraire pour lui prendre son temps, obtenir son audience affectueuse. Manoeuvre ou ambassadeur, on était dans la société du grand esprit un autre esprit aussi détaché des distinctions sociales qu'une âme après la mort.
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La floraison des fruitiers est tardive chez nous, en montant le coteau j'avais vu les cerisiers en fleurs, cassé une branche pour sentir la sève, humé fort comme pour saisir un secret.Les fleurs pour Dieu, les fruits pour les hommes, tout ce que je voyais me semblait offrande.
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Il y a une tristesse ouvrière dont on ne guérit que par l'action politique. Moralement, j'étais d'accord avec ma classe
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En cueillant, je forçais pour être toujours éveillé, jamais inconscient. La vie est un don. Je voulais toujours être à la fête. je m'occupais à donner à mes mains le maximum d'habileté, ne faisant aucun geste sans que l'attention n'y participât. (p.220)
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C'était beau la nuit, l'éclairage, les parties d'ombre, des lumières isolées, un homme seul à sa machine. La vie était plus lente, les compagnons sympathisaient davantage, se voyait. Nous redevenions là des êtres humains. Le hall malgré ses vitres, ses murs, communiquait avec la nuit, le grand repos de la terre. Mieux que dans la journée, je savais que j'étais au monde, bien présent, avec une certaine douceur à penser à la mort, plein de souvenir qui se réveillaient, tout en ayant plein contact avec le moment. La beauté ou l'étrangeté de la vie m'apparaissait. Je jouissais des mouvements de mon corps, à travers lui du privilège de vivre, présent à la perceuse, au bruit de la mèche s'enfonçant dans la fonte, ramenant en tournant de la poussière grise, à la pression que j'exerçais, la main sur le volant poli de la perceuse, heureux d'être éveillé, d'être un corps qui travaille et qui songe.
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Il y avait sur la colline de Mousson, un château féodal tout en ruine, un château du temps des seigneurs, comme on dit là-bas. En tournant la tête, je le voyais de l'usine en me demandant parfois si nous étions pas mieux en ce temps-là. Pour avoir une paire de brodequins, un pardessus, quelques chemises, une paire de souliers fin le dimanche, pour avoir un abri et manger des potées de choux aux lard ou des lentilles, boire un peu de vin, élever aussi de enfants qui reproduiraient leur vie, les hommes du feu, des hauts fourneaux, les démons noirs, les mouleurs, trimaient plus durement que les serfs au profit des barons du fer, nos nouveaux maîtres. le courage à vivre de toute une lignée de serfs dont j'étais le chaînon aboutissait à cette vie d'usine, tout le sang de la famille était du sang d'usine, et les enfants d'Adrien continuaient là la vie de leur père et de leur grand-père. Jamais je ne voudrais avoir le courage de fabriquer du sang pour l'usine. je songeais ainsi en démontant une machine en plein air, dans la torture du froid, quand la clé à molette ou le levier gelés brûlaient les doigts. l'hiver est rude chez nous.
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Trois religieuses en cornettes blanches habitaient dans leur village. Elles étaient aimées. Elles avaient provision de remèdes pour soigner les brûlures, les coupures, les contusions des enfants, les panaris des adultes. C'étaient de douces créatures sans âge défini, au visage empreint d'une grande sérénité. Il aurait fallu, pour remplacer l'effet moral de leur présence, bien plus qu'une rangée de beaux tilleuls en fleur toute l'année.
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Chez Bernard Groethuysen la grande santé russe s'était saisie de l'intelligence.Il échappait à la neurasthénie dont sont plus ou moins touchés les représentants de la conscience.Je ne l'ai jamais vu maussade ou déprimé. Il paraissait quitte des misères humaines, ennuis, lourdeurs, maladies.Les veilles et l'usure épuisante d'une activité cérébrale soutenue ne le marquaient jamais de fatigue.
Il irradiait de bonheur à sa manière tout autant qu'un jeune athlète qui rentre des sports d'hiver renouvelé par le soleil et l'air de la haute montagne, mais son bonheur ne semblait pas animal.
Il habitait son corps comme une âme un nuage; une énergie douce , spirituelle, ensoleillée y circulait.J'aimais le voir aller et venir, marcher à petits pas d'inspiré.Il semblait sans poids, il pensait en s'aidant de ses jambes, il méditait de la tête aux talons, noble et bonhomme.
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Je me trouvais dépaysé, depuis la veille je me parlais seul à seul, j'avais le sentiment d'habiter mon corps comme une araignée le vaste grenier d'une maison abandonnée.

( p.133)
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Je marchais vite. Je respirais avec bonheur.J'aurais voulu être là un arbre avec des cigales qui chantaient la joie de vivre pour l'écorce et pour les feuilles, pour la terre et ses racines.

( p.133)
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L'espace profond m'ouvrait au sentiment de l' infini.En tête à tête avec le tout, la vie me semblait merveilleuse, et drôle d'y figurer dans une peau d'homme.La tête peuplée d'étoiles, ça m'amusait d'être assis là , d'avoir des bras, des mains, d'exister en forme humaine.

( p.140)
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