Je ne suis pas contente des mensonges que j'ai racontés à Chris,mais ce sont des mensonges habituels,et le malaise que je ressens est tout à fait supportable car il ne conduit en aucun cas à ce que ma mère appellerait un "incident".
Ils voudront savoir de quoi parlait M.Barlow en criant dan l'église,st si nous voulons que rien ne détruise la Faille de la Deuxième Chance il faut que ma mère et moi réfléchissions à ce que nous allons dire.
Cette solitude me ronge. Elle me dévore comme un cancer ; elle envahit mes pensées et me donne l’impression que je deviens folle. Je me sens seule car je ne suis jamais autorisée à parler de l’accident dans la Famille de la Deuxième Chance, même s’il a réellement eu lieu, et je ne peux rien changer au fait que cela fasse partie de mon histoire. Je suis si désespérément seule, c’est même pire qu’avant l’accident. Mais sur le sujet de la solitude, il est préférable de ne rien dire.
C’est une belle femme, indéniablement. Mais ce que j’ai remarqué avant tout était sa douceur, son attitude posée, comme si elle était pleine d’assurance. Elle ressemblait à de la porcelaine ; je n’en revenais pas d’avoir autant de chance.
Le silence pesant, tendu, habituel qui règne dans la voiture pendant que maman nous reconduit à la maison signifie que j’ai une petite chance de me ressaisir, car elle déteste les pleurs. C’est le genre de silence que nous partageons souvent, ma mère et moi. Elle serre si fort le volant que ses articulations sont blanches. Quand j’essaie de lui parler, elle me fait taire et me dit qu’elle a besoin de réfléchir.
La « stérilité inexpliquée » existe. C’est une dénomination officielle en dépit de ce que l’expression a de peu officiel, et c’est ce dont je suis affligée. Ce n’est qu’une fois la trentaine passée que mon mari Richard et moi l’avons compris. Jusque-là, avoir des enfants était une préoccupation qui passait après nos carrières et les voyages.
Nous avons alors essayé la fécondation in vitro mais, après trois tentatives, nous avons renoncé. Mère porteuse : une solution qui ne m’emballait pas ; je n’en avais pas le courage. L’adoption : même raison. De toute façon, avec les problèmes d’alcool de Richard, ce ne serait désormais plus possible.
L’énergie que produisent deux joueurs de piano peut être galvanisante. C’est comme un numéro de funambule pour contrôler la puissance, la tonalité et la dynamique, car tout doit être parfaitement équilibré. Cet après-midi, nous en étions loin, nous étions fatigués, et fâchés l’un contre l’autre de devoir répéter dans la chaleur étouffante de l’été ; mais ce soir, nous sommes brillants. C’est fluide, beau, et nous sommes tous les deux parfaitement en accord avec la musique. Je dois bien admettre que ce n’est pas toujours le cas. Ça n’arrive pratiquement jamais.
En fait, je fais tellement corps avec la musique que je n’entends tout d’abord pas crier, et ne pas entendre crier signifie que je ne me rends pas compte que ce début est déjà la fin.
Quand vous n'avez pas d'enfant, les gens ont tendance à vous confier des choses dont vous devez vous occuper. Je pense qu'ils croient que vous manquez d'exutoires pour satisfaire votre supposé instinct maternel, de quelque nature qu'il soit.
Mais personne ne mérite jamais rien. Nous vivons tous avec l'illusion de mériter ce qui nous arrive. (p. 466)
- Non ! ai-je hurlé : un cri, le hurlement d'un animal sauvage, que seule une mère peut pousser quand elle voit sa progéniture lui être enlevée par un prédateur.