Citations de Guy de Maupassant (3992)
La vie est une côte. Tant qu'on monte, on regarde le sommet, et on se sent heureux ; mais, lorsqu'on arrive en haut, on aperçoit tout d'un coup la descente, et la fin, qui est la mort. Ça va lentement quand on monte, mais ça va vite quand on descend.
La seule vérité qui ne mente pas est la souffrance.
On pleure parfois les illusions avec autant de tristesse que les morts.
Je ne suis qu’un pauvre diable sans fortune et dont la position est à faire, vous le savez. Mais j’ai de la volonté, quelque intelligence à ce que je crois, et je suis en route, en bonne route. Avec un homme arrivé on sait ce qu’on prend ; avec un homme qui commence on ne sait pas où il ira.
Le voyage est une espèce de porte par où l’on sort de la réalité connue pour pénétrer dans une réalité inexplorée qui semble un rêve.
Une gare ! Un port ! Un train qui siffle et crache son premier jet de vapeur ! Un grand navire passant dans les jetées, lentement, mais dont le ventre halète d’impatience et qui va fuir là-bas, à l’horizon, vers des pays nouveaux !
Qui peut voir cela sans frémir d’envie, sans sentir s’éveiller dans son âme le frissonnant désir des longs voyages ?
Les paroles d'amour, qui sont toujours les mêmes, prennent le goût des lèvres dont elles sortent.
Mon cher ami, pour moi un homme amoureux est rayé du nombre des vivants. Il devient idiot, pas seulement idiot, mais dangereux.
Il est si profond et si triste, le silence des chambres où l'on vit seul. Ce n'est pas seulement un silence autour du corps, mais un silence autour de l'âme, et, quand un meuble craque, on tressaille jusqu'au coeur, car aucun bruit n'est attendu dans ce morne logis.
Le peuple est un troupeau imbécile, tantôt stupidement patient et tantôt férocement révolté.
Nos yeux, nos oreilles, notre odorat, notre goût différents créent autant de vérités qu'il y a d'hommes sur la terre.
Il portait en lui un petit point douloureux, une de ces presque insensibles meurtrissures dont on ne trouve pas la place, mais qui gênent, fatiguent, attristent, irritent, une souffrance inconnue et légère, quelque chose comme une graine de chagrin.
page 110 [...] Ses relations avec Julien avaient changé complètement. Il semblait tout autre depuis le retour de leur voyage de noces, comme un acteur qui a fini son rôle et reprend sa figure ordinaire. C'est à peine s'il s'occupait d'elle, s'il lui parlait même ; toute trace d'amour avait subitement disparu ; et les nuits étaient rares où il pénétrait dans sa chambre.
Il avait pris la direction de la fortune et de la maison, révisait les baux, harcelait les paysans, diminuait les dépenses ; et ayant revêtu lui-même des allures de fermier gentilhomme, il avait perdu son vernis et son élégance de fiancé.
Il ne quittait plus, bien qu'il fut tigré de taches, un vieil habit de chasse en velours, garni de boutons de cuivre, retrouvé dans sa garde-robe de jeune homme, et envahi par la négligence des gens qui n'ont plus besoin de plaire, il avait cessé de se raser, de sorte que sa barbe longue, mal coupée, l'enlaidissait incroyablement. Ses mains n'étaient plus soignées ; et il buvait, après chaque repas, quatre ou cinq petits verres de cognac.
Jeanne ayant essayé de lui faire quelques tendres reproches, il avait répondu si brusquement : "Tu vas me laisser tranquille, n'est-ce pas ?" qu'elle ne se hasarda plus à lui donner des conseils.
Elle avait pris son parti de ces changements d'une façon qui l'étonnait elle-même. Il était devenu un étranger pour elle, un étranger dont l'âme et le cœur lui restaient fermés. [...]
Le peuple est un troupeau imbécile, tantôt stupidement patient et tantôt férocement révolté. On lui dit : « amuse-toi. » Il s’amuse. On lui dit : « Vote pour l’Empereur. » Il vote pour l’Empereur. Puis, on lui dit : « Vote pour la République. Et il vote pour la République.
Ceux qui le dirigent sont aussi sots, mais au lieu d’obéir à des hommes, ils obéissent à des principes, c’est-à-dire des idées réputées certaines et immuables, en ce monde où l’on n’est sûr de rien, puisque la lumière est une illusion, puisque le bruit est une illusion.
Le boulevard, ce fleuve de vie, grouillait dans la poudre d’or du soleil couchant. Tout le ciel était rouge, aveuglant ; et une immense nuée flamboyante jetait dans toute la longue avenue une oblique averse de feu, vibrante comme une vapeur de brasier. La foule gaie, palpitante, allait sous cette brume enflammée et semblait dans une apothéose. Les visages étaient dorés ; les chapeaux noirs et les habits avaient des reflets de pourpre ; le vernis des chaussures jetait des flammes sur l’asphalte des trottoirs. Devant les cafés, un peuple d’hommes buvait des boissons brillantes et colorées qu’on aurait prises pour des pierres précieuses fondues dans le cristal.
"J'aime cette heure froide et légère du matin, lorsque l'homme dort encore et que s'éveille la terre.
L'air est plein de frissons mystérieux que ne connaissent point les attardés du lit.
On aspire, on boit, on voit la vie qui renaît, la vie matérielle du monde, la vie qui parcourt les astres et dont le secret est notre immense tourment"...
On pleure parfois les illusions avec autant de tristesse que les morts.
La parole éblouit et trompe, parce qu'elle est mimėe par le le visage, parce qu'on la voit sortir des lèvres , et que les lèvres plaisent, et que les mots séduisent . Mais les mots noirs sur le papier blanc, c'est l'âme toute nue.
" Regardez les gens médiocres; à moins de grands désastres tombant sur eux ils se trouvent satisfaits, sans souffrir du malheur commun. Les bêtes non plus ne le sentent pas."
La vie, voyez-vous, ça n'est jamais si bon ni si mauvais, qu'on croit.
Comment peut-on ne pas adorer les cloîtres, ces lieux tranquilles, fermés et frais, inventés, semble-t-il, pour faire naître la pensée pendant qu'on va à pas lents sous les longues arcades mélancoliques ?