Citations de Hervé Jaouen (275)
La marine ne laisse pas ses gens se baguenauder vêtus comme l’as pique…
Tous les garçons naissent couverts d’écailles, comme les poissons, sauf que ce sont les écailles du vice. Presque tous les perdent une à une au fur et à mesure qu’on leur inculque la morale, mais chez certains elles s’incrustent dans la chair et leur font une deuxième peau, invisible sous leurs beaux costumes de gens bien. Mais à qui sait voir et écouter, leurs actes et leur grande gueule prouvent qu’ils ont été mal écaillés.
La flamboyance et la tragique grandeur, souvent, des amours de cinéma, relevaient encore d’un cran la hauteur de ses aspirations : ce serait le coup de foudre ou rien !
Elle aimait tous les films, qu’ils soient destinés à distraire ou à émouvoir. Bon public, elle était gênée quand des filles de l’atelier disaient d’un film : « Quel navet ! » Par analogie avec la couture, elle nourrissait en son for intérieur une théorie du respect du travail. Ce n’était pas parce qu’une robe ne plaisait pas à tout le monde qu’on devait prétendre qu’elle était ratée. Pareil pour un film. Un tas de gens s’étaient creusé la cervelle pour le tourner, on ne devait pas leur jeter la pierre s’il était plus ou moins réussi.
On ne reçoit pas une carte de bonne année sans remercier.
Vaut mieux être sur un cuirassé que cuirassier.
Le marin d’État était l’incarnation du héros odysséen, et le fier chagrin le doux état d’âme de sa femme entre deux lunes de miel : loin des yeux, près du cœur…
Un mousse, comme un soldat à l’instruction, est un roseau qui ne pense pas. Il plie sous les engueulades et les menaces de punitions et ne se redresse qu’aux ordres, et encore le garde-à-vous n’est-il qu’une autre façon de ployer. La réflexion est proscrite, l’esprit doit rester entièrement disponible à l’acquisition d’automatismes qui l’empliront à ras bord. On appelle cela la discipline.
Réfléchis, mais pas trop. Quand on réfléchit trop, des fois, on perd la boussole et on prend la mauvaise direction.
La première chose à faire, avant de bâtir sa maison, c’est de creuser de bonnes fondations. Toi aussi tu vas avoir ta vie à bâtir. Il faut la construire sur le dur. Tu aimes la mer, tu nages comme un phoque, tu es agile et costaud, tu es loin d’être bête puisque tu as eu ton certificat d’études haut la main, ils te prendront tout de suite à l’École des mousses…
La beauté ne se traduit pas en chiffres. On ne regarde pas un tableau en pensant à sa valeur, ou bien alors on ne mérite pas de le posséder.
Pour les gens d’ici, un con de touriste, c’est un type qui n’arrête pas de dire sorry aux portes contre lesquelles il se cogne.
Le caractère irlandais, a philosophé Magali. Ils se figurent que la nature est inépuisable. Ils n’ont pas que des qualités, mais au moins ils ont le charme de leurs défauts. On ne peut pas en dire autant de tous les pays.
Quand bien même il y avait du poisson partout dans des eaux « libres », le saumon et la truite de mer des Anglais étaient autrement savoureux. On avait l’impression de se rembourser sur la bête de tout ce que l’occupant avait volé à l’Irlande.
Le tutoiement m’a fait tiquer un peu. J’aurais préféré garder mes distances avec cette fille. Mais se tutoyer, entre Français du même âge, n’était-ce pas naturel ? À quoi bon chercher midi à quatorze heures ?
Allons ! Nous sommes en Irlande, mon cher ! Vous n’avez pas remarqué ? Aucune maison n’a de volets. On ne craint pas les voleurs. Peut-être que ça changera un jour, mais pour l’instant la plupart des gens ne ferment même pas à clé quand ils vont se coucher.
Inutile d’ameuter tout le patelin. Ça se saura assez vite, que vous êtes le nouveau châtelain.
Le verbe anglais to celebrate sonnait plus agréablement à l’oreille que la trivialité de son équivalent français, « arroser ». Il s’agissait de célébrer, de fêter mon nouveau statut de nanti et d’irlandais putatif.
La technique avait tué l’émotion, avec des filles faciles qui font l’amour comme on se brosse les dents…
C’est pas parce qu’on n’aime pas qu’on ne respecte pas.