*Cette critique concerne les tomes 3 à 5*
Avant de rentrer dans le vif du sujet, petit rappel concernant Shaman King et cette Star Edition. Ce titre fait partie des petits classiques du début des années 2000, dont j’entendais personnellement pas mal parler par mes amis lecteurs de mangas, aux côtés de Naruto et One Piece. Le titre a réussi à se tailler une belle petite réputation, réussissant à rester dans l’esprit de nombreux lecteurs et lectrices au fil des ans. C’est d’autant plus évident que dès que j’en parle sur les réseaux sociaux, je remarque beaucoup de commentaires nostalgiques et touchants de la part de fans de la première heure. Un aspect un peu générationnel, ou tout du moins communautaire qui est je trouve vraiment agréable, car j’ai le sentiment que mon enthousiasme concernant la série est partagé.
Ainsi, cette Star Edition est l’occasion pour la série de toucher un nouveau public, tout en proposant une édition de fort belle facture aux fans de la première heure qui souhaiteraient rafraîchir leur collection, ou simplement se procurer le dernier tome qui propose une nouvelle fin plus dense, que l’auteur avait du rusher à l’époque pour cause d’un succès qui s’est estompé trop rapidement. De ce fait, le dix-septième et dernier tome (en volume double) du manga est déjà disponible, je le précise car en discutant sur les réseaux, j’ai constaté que certains fans de la première heure n’étaient pas au courant.
Pour finir sur le rappel, les deux premiers tomes m’avaient bien plu par leur côté classique et modeste, avec des petites intrigues relativement autonomes qui construisaient surtout les rapports entre personnages et l’univers général du titre, très plaisants par ailleurs. Mais à partir de ce troisième tome, on entre dans le vif du sujet avec les premiers combats du Shaman Fight, l’enjeu principal du récit étant de remporter ce fameux tournoi pour devenir le Shaman King, tout simplement. Ceci étant resitué, nous allons pouvoir aborder ces trois nouveaux tomes.
Le Shaman Fight est donc au cœur du récit, moyen extrêmement commode d’enchaîner les combats, d’autant plus que ce tournoi se mêle harmonieusement avec la découverte de l’univers et une aventure au sens large. Ce que j’entends par là, c’est que non seulement les personnages doivent se battre, mais ils ont aussi des épreuves à passer qui peuvent être plus cérébrales ou tout du moins leur demander de se déplacer. Une construction relativement classique, qu’on a pu déjà voir dans l’arc de l’examen de Hunter de Hunter x Hunter ou l’examen Chunin de Naruto par exemple. Mais le classicisme n’est pas une mauvaise chose en soi si c’est bien fait, et fort heureusement, c’est le cas ici.
Pour commencer, Shaman King se révèle clairement dans cette partie comme un manga que je qualifierai de « character driven ». J’entends par là que l’intrigue en elle-même est, pour le moment, assez basique (mais certains éléments qui arrivent dans le tome 5 laissent à penser que les choses vont se densifier), et que c’est vraiment de l’écriture des personnages que vient la sève du récit. À ce titre, les héros introduits dans les deux premiers volumes ont droit à des développements bienvenus, je pense notamment à Yoh, Manta et Tao Ren qui vont s’étoffer, le dernier passant d’antagoniste à ami des héros. Mais il y a aussi de nouveaux personnages introduits avec panache.
Et sur ce point, il y a clairement un nouveau personnage qui s’impose d’emblée : Faust VIII. Ce nécromancien allemand à l’histoire tragique est introduit par une séquence particulièrement réussi, dévoilant directement le charisme impressionnant et frémissant du personnage. Et son affrontement contre Yoh est vraiment mémorable de par la cruauté de Faust (je ne vous en dirai pas plus, mais il va faire quelque chose d’assez chaud dans le cadre d’un shonen à mes yeux). Par ailleurs, tout ceci est particulièrement bien soutenu par un travail de character design vraiment réussi sur le personnage (tout comme sur les autres d’ailleurs). Concernant ce personnage, j’ai cru comprendre qu’il avait d’ailleurs une bonne cote auprès des femmes, ce que je comprends sans peine, ce qui a surement pesé dans la décision de Kana de publier en mars 2021 le roman centré sur ce personnage.
Ainsi, ce genre de personnage permet d’enrichir l’univers, d’autant plus qu’il s’inclut dans une culture différente, élément qui semble central dans le récit. Car en plus des amérindiens, des japonais, des ainous et des chinois, nous avons donc ce personnage allemand, et un anglais va se joindre à la fête. Ces différentes nationalités et cultures sont intégrées à la façon de se battre des personnages, tirant partie d’une forme d’imaginaire lié à ces ethnies, et cela fonctionne fort bien ma foi.
Mais cet aspect character driven n’est pas là pour cacher une intrigue ou un fond trop faible, car après quelques affrontements, on aura tout loisir de voir davantage de lieux et de situations. Tout d’abord avec la famille de Tao Ren (qui m’a un peu rappelé la famille Zoldik d’une certaine façon) qui apportera une sous-intrigue vraiment réussie. Mais également avec la suite de l’histoire principale et du shaman fight. Que ce soit dans les développements de Yoh ou dans l’introduction d’une figure qui semble l’antagoniste principal, le récit s’étoffe avantageusement, devenant de plus en plus addictif tant tous les ingrédients se retrouvent savamment dosés pour proposer une belle aventure.
Car c’est ça la force de Shaman King à ce stade, l’assimilation très réussie des codes du shonen nekketsu, nous permettant de vivre une belle aventure aux côtés de personnages charismatiques qui finalement forment une belle bande de potes, le tout rehaussé par des combats vraiment impressionnants et réussis, du fait d’un système d’énergie simple mais maîtrisé. Ainsi, si je ne trouve pas d’élément réellement original au titre, il déborde tellement de personnalité et est tellement généreux que je ne peux qu’être de plus en plus investi dans l’intrigue et les objectifs des personnages.
Et c’est finalement à ce stade ce qui me plait le plus, l’idée de découvrir un titre vers lequel je ne serai pas forcément allé de base, de peur d’être déçu, et qui aura su faire taire toutes mes craintes au fil des tomes en étoffant intelligemment son univers et ses personnages, en me touchant par son écriture et en finissant de me conquérir avec son humour gentiment enfantin et désuet (blagues zigounettes et prout au programme, et Dieu sait que j’aime cet humour !).
En bref, oui Shaman King est très classique dans ses codes. Oui, on fait actuellement des titres plus denses et complexes. Cependant, il nous prouve que la simplicité a parfois du bon, et qu’une intrigue classique mais bien construite et faite avec soin sont clairement une vertu. Me concernant, c’est cette simplicité et ce soin que Takei apporte à son titre qui aura su me conquérir au bout de quelques tomes, alors même que je n’arrête pas de dire que le nekketsu me désintéresse de plus en plus. Ainsi, volume après volume, Shaman King s’impose de plus en plus comme une série particulièrement attachante à mes yeux.
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