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Critiques de Ismaïl Kadaré (257)
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La Pyramide

J'ai été un peu déçue par ce livre, je ne m'attendais pas tout à fait à ça. Le style est lourd, ce qui correspond bien à ce que l'auteur veut transmettre, mais ça ralentit pas mal la lecture. On n'a pas de mal à imaginer que cette pyramide à fait couler beaucoup de sang, tout comme le régie albanais à l'époque de l'écriture de ce livre. Les régimes totalitaires se ressemblent tous.
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La Pyramide

Pyramide, Pyramide, que n'es-tu restée à l'état de maquette!



Après le Général de l'Armée morte et Doruntine, voici la troisième figure de l'immense Ismail Kadaré dont Horusfonck fait la connaissance: La Pyramide...

Mais pas n'importe quelle pyramide! C'est la plus haute, la plus célèbre, la merveille du Monde: La Pyramide de Chéops.

Avant même sa longue érection, l'amoncèlement de pierres va instiller le doute, les complots et la terreur! Les Égyptiens sont trop heureux, le peuple se relâche, prospère... La pyramide, tombeau et œuvre de mort, va engloutir vingt années de la vie égyptienne: Tous au boulot, et que ça saute et que ça pousse et que ça fouette et que ça meure sur les plans inclinée où s'acheminent les pierres venues des carrières parfois lointaines!

Cette Pyramide d'Ismail Kadaré, c'est son expression d'un pouvoir absolu, égaré et obtus d'un pharaon que ses conseillers flattent et encouragent dans sa mégalomanie... À l'image qui se perpétue de cette lointaine antiquité jusqu'à notre brûlante actualité d'une lignée de monarques, potentats et dictateurs mégalomanes... Ces chefs d'orchestre macabre d'une démesure généreuse en vies humaines sacrifiées, saccagées.

La Pyramide et son aura de mort va faire des petits, parfois horrifique, telle celle de Timur Le boiteux, constituée de têtes humaines coupées!

Je sors de cette lecture, plein de la poussière de ces pierres ajustées une à une, avec chacune leur lot de victimes.

La Pyramide est dans ma tête, désormais, comme une leçon à ne pas oublier.
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La Pyramide

Livre écrit par Ismaïl Kadaré, faisant référence au temps où l’Albanie était soumise à la dictature d’Enver Hoxha, c’est un pamphlet politique présenté sous forme de fable ou de conte moral. Prenant l’image de la construction d’une pyramide dans l’Egypte antique, l’auteur explique qu’un bon moyen pour asservir un peuple et lui ôter toute idée de révolte, c’est de l’occuper à un travail qui ne sert à rien, mais mobilise toutes les ressources du pays. C’est ce qui arriva en Albanie, où furent construits des milliers de bunkers dans tout le pays, pour se protéger d’un agresseur qui n’existait pas.

Le style est très alerte et imagé, l’allusion politique transparente. D’une manière plus générale, c’est une analyse très précise de certains mécanismes de la dictature, avec par exemple les méthodes fondées sur la délation et la peur. La leçon est toujours valable dans notre monde actuel.

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La ville du sud

Un recueil de nouvelles qui nous donne une idée de la vie Albanaise pendant la seconde guerre puis au début du régime communiste.

Pas de misérabilisme, tout est factuel, ou plein de tendresse voire d'une pointe de comédie.

La plus longue et la plus belle des nouvelles donne son titre au livre. La ville du Sud c'est Gjirokastër cette magnifique ville de pierre avec sa citadelle accrochée à la montagne. Par le yeux d'un enfant on suit la vie quotidienne dans une maison traditionnelle, puis les péripéties de l'occupation italienne, puis allemande. Moment magique lorsque l'enfant s'éprend d'une belle locataire de son grand-père. Moments intenses lorsque la cave de la maison devient capharnaüm en servant d'abris contre les raids aériens, ou lorsque la citerne trop pleine menace l'équilibre de l'habitation. Moments presque comiques lorsqu'un vieil artilleur tente en vain d'abattre des avions italiens ou lorsque la famille tente de se protéger contre les sorts jetés par des voisines.

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La Ville sans enseignes

La ville sans enseignes est le premier roman d'ismail Kadaré. Ecrit en 1959, publié par bribes, interdit à l'époque par Moscou et resté dans l'oubli pendant près de quarante ans. Il sera intégralement publié en 1991.

L’histoire en est simple, et s’inspire de l’expérience de Kadaré.

Un jeune professeur, Gjon Kurti, quitte la capitale de l’Albanie, Tirana, pour rejoindre son poste dans la ville de N...en province.

Un voyage en autocar de seize heures l’y amène et après une nuit agitée à l'hôtel Métropole, il rejoint le lycée le lendemain.

« Regardez un peu ce mec comme il est swing » entend-il sur son passage.

La première journée est décevante, accueil froid du proviseur, nostalgie de Tirana, chagrin de sa séparation avec Klara, regrets sur les feuillets de sa thèse de philologie, inachevée.

A nouveau dans les rues de la ville. L’arrivée du car de Tirana, celui par lequel il est arrivé la veille, est l’événement marquant de la journée à N.

Il fait désormais partie de ceux qu’il a qualifié d’autochtones hier, et regarde avec envie les nouveaux arrivants de Tirana, découvrant dans leurs yeux les mêmes surprises que les siennes hier.

«...ce soir, après une nuit passée en ce lieu, lui-même était devenu à leur image un «autochtone » entouré des mystères de la province. »

Kadaré apprivoise sa jeune écriture et apprivoise son lecteur, il jouit de sa capacité à jouer avec des boucles de pensées : je me perçois aujourd’hui, comme je percevais des étrangers hier ; suis-je aujourd’hui le même Gjon qu’hier ?, j’ai la même perception de Tirana, la capitale que ces provinciaux qui me paraissaient énigmatiques hier, etc....

Au hasard de ses déambulations, dans les bars de la ville, il retrouve un collègue, professeur de chimie, Mentor Rada, (en lui donnant ces prénom et nom - Mentor, le précepteur de Télémaque, et Rada qui en langue slave signifie conseil - Kadaré place Gjon sous la houlette de celui qui sera une sorte de guide), et un poète du nom de Eugjen Peri.

Ils deviendront ses amis, et dès lors, aucune page du roman ne verra Gjon seul sans ses deux acolytes.

Gjon, Mentor et Eugjen, se découvrent des centres s’intérêt communs, les filles, les bars, les soirées de Tirana, les bals de l’école normale. Leur amitié naissante les séduit, ils boivent avant tout à sa santé.

Ses deux amis trouvent un logement. Il quitte l’Hôtel Métropole. Ils le rendent familier de la ville de N, lui font parcourir ses rues et lui montrent les lieux où des écrivains et des poètes célébrés ont vécu.

N abrita, Dino Cico un savant incompris, Qimo Papa, le débauché, les poètes, Jorgo Senica, connu pour ses oeuvres érotiques, et Kethe Spiri, auteur d’une histoire en vers du PCUS (parti Communiste de l’Union Soviétique) et des conclusions des deux plénums du parti du Travail d’Albanie.

Sa logeuse est «...une femme d’un certain âge, vêtue de noir, comme c’était l’usage à N...», elle lui a réservé une chambre au deuxième étage d’où il verra, la route de Tirana, le pont qui enjambe le torrent, et la grande maison italienne où, autrefois, était installé un bordel.

Les scènes de la vie à N, le cinéma, les bars, la fête avec Luiza, Eratulla et Roza, les trois vendeuses des grands magasins, les enregistrements pour rire au magnétophone, pourraient se passer dans n’importe quel pays d’Europe à la même époque, ne seraient les dérapages grotesques que l’auteur instille à petites doses pour donner une couleur au système absurde du pays où la ville de N se trouve : le vice-président du comité exécutif, le trafiquant notoire surnommé «la bascule», la fermeture de la salle après le début de projection, le film à l’affiche (quand passe les cigognes), les spectateurs vociférant, le poète simplet mais respecté....

La vacuité de ce que vivent les héros de la ville sans enseignes, rapportée avec finesse et humour par Kadaré, illustre le paradoxe des systèmes politiques mis en place dans les satellites de l’union soviétique.

Censés oeuvrer pour l’élevation spirituelle, intellectuelle, économique, sociale... que sais-je encore, de la société ; et créer l’homme nouveau, celui qui atteindra le bonheur parfait, ces systèmes, par les dispositifs de contrôle qu’ils ont développés pour vérifier l’atteinte de leurs objectifs, ont rejeté les citoyens à l’extérieur de tout ce qui conditionnait leur vie :

la politique, hors du parti point de salut, l‘économie, sans l’étatisation rien n’est possible, le social, les classes laborieuses avant tout, l’éducation, la parole du chef est irremplaçable, la religion orthodoxe tolérée mais réduite aux manifestations de son apparat...

Les héros du roman sont préoccupés de choses qui échappent à la main mise du pouvoir, mais subissent son incapacité : l’avortement de la petite amie malencontreusement engrossée, la syphillis de Gjon, les soirées alcool-musique, le magnétophone comme outil de libération de la parole, l’attrait de l’occident, de sa musique, de ses moeurs.

Mais leur amitié, aussi factice qu’elle a été rapide à se créer durera-t-elle dans cet environnement de faux semblants. Gjon en doute. Il se demande à quoi cette amitié pourrait servir, si ce n’est les aider à sortir de ce sytème mortifère, un système qui ment chaque jour sur la réalité ; pour cela il décide de proposer à ses amis de créer une vérité nouvelle à partir d’un mensonge.

Leur marge de maneuvre est limitée, au fonds, ils ne diffèrent pas des autres habitants de la ville, (les maquereux, les trafiquants, les filles vénales), dans leur tentative de trouver une solution pour ....fournir...une contribution plus importante à la société...

Solution qui leur permettra, c’est surtout vrai pour Gjon, de quitter N, et de retrouver la capitale Tirana.

Mais, peut-on répondre à un mensonge par un autre mensonge. Les amis débattent de ce sujet, ils prétendent qu’ils «....seront coupable au regard de la Vérité abstraite, mais tout à fait innocents vis à vis de notre patrie.»

Ce projet finira par couter à Gjon l’amour de Stella, la fille de ses propriétaires, peut-être l’amitié de Mentor et Eugjen, mais il persiste.

Un livre crû, sans complaisance pour les personnages, qui préfigure dès 1959 l’écroulement des sociétés communistes, une oeuvre visionnaire à l’image de toute l’oeuvre d’Ismail Kadaré.


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Le concert

Le roman, foisonnant, polyphonique, mêle burlesque et tragique, individuel et collectif, satire et émotion en un stupéfiant mélange.
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Le concert

Roman, ou alors livre d’histoire déguisé en roman, «Le Concert» est un livre majeur, une plongée, une révélation dans les conflits internes du camp communiste. L’Albanie occupa longtemps, avec les Khmers rouges, la place d’honneur sur le podium de l’horreur, rôle repris aujourd’hui par la Corée du Nord. Sous la dictature ubuesque d’Enver Hodja (de 1946 à 1985), l’Albanie rompit successivement avec la Yougoslavie, l’URSS et la Chine, et se retrouva pure et dure, mais isolée et pauvre parmi les pauvres. Lors de mon voyage en Albanie à cette époque où j’ai rencontré Kadaré, les rues de la capitale n’étaient pas toutes pavées, les rares autobus, aux vitres cassées, avaient été rachetés d’occasion aux Algériens, la possession d’une voiture particulière était interdite au point que le large boulevard principal ressemblait à un piétonnier désert, et il n’y avait qu’un seul feu rouge dans le pays, pour bloquer la circulation devant le siège du parti communiste !



Ismaïl Kadaré est un témoin majeur de cette époque, au cœur du système, quand la littérature de l’Est tentait de faire croire à l’idéalisme d’un bloc uni par une théorie marxiste que la Chine a délaissée aujourd’hui au profit de richissimes capitalistes. «Le Concert» est un témoignage de l’intérieur, comme d’autres œuvres de Kadaré, par exemple «Le Temps des querelles» et «L’Hiver de la grande solitude». Ce livre évoque de manière pittoresque, presque à la Daumier, la rupture avec Pékin à travers le quotidien de plusieurs personnages. Il la compare avec la rupture précédente, avec le Kremlin, et décrit aussi la lutte entre les factions chinoises, la liquidation par Mao de Lin Piao, son successeur désigné accusé de trahison, et l’emprisonnement de la veuve de Mao, à la tête d’une autre faction, la fameuse Bande des Quatre. Trop puissant car s’appuyant sur l’armée, Lin Piao est officiellement mort dans un accident d’avion qu’on a jamais cherché à éclaircir, mais dont Kadaré donne une version précise. Son livre évoque surtout la répercussion au quotidien, en Albanie, de cette lutte pour le pouvoir qui se passe loin, en Chine. Le titre du livre se réfère à un concert qui se passe à Pékin, où des Albanais tentent de déchiffrer ce que cachent les absences de certains officiels au concert, et les préséances dans la loge officielle, pendant que Mao est proche de la mort (chapitre 13).



Écarté du pouvoir par le parti communiste à cause de l’échec catastrophique de sa politique de «Bond en avant», Mao avait réussi à reprendre le pouvoir au parti en s’appuyant sur les Gardes Rouges et sur l’armée, rivale du parti, lors de la Révolution Culturelle. Un ministre albanais en visite à Pékin se voit alors suggérer de faire de même avec une action symbolique, et de retour dans son pays, l’Excellence en question fait encercler une réunion de province du parti par des blindés, comme suggéré par les Chinois. Quatre des six officiers, fidèles au parti, refusent d’exécuter l’ordre, sont exclus de l’armée par le ministre, et emprisonnés avec interdiction sous peine de représailles de révéler la raison de ces sanctions, même à leur famille. Mais la lutte entre les factions fluctue comme une girouette, les officiers sont libérés et on va même jusqu’à fantasmer que «La Chine doit être balayée de la surface du globe». Sur la sellette, le ministre cherche à sauver sa peau et félicite même les officiers de lui avoir désobéi dans une scène d’un grand comique. «Il devait absolument trouver quelque chose à dire, présenter les choses comme… le résultat d’un aveuglement politique provoqué par des insuffisances dans l’étude du marxisme-léninisme» ou mieux encore, détourner la colère sur son collègue, ministre de l’économie, vu la situation calamiteuse du pays. Ou encore se rappeler qu’Enver Hodja, au cours d’une réunion du Bureau politique, avait demandé au ministre de l’Intérieur : «Pourquoi, jusqu’ici, les complots ont-ils toujours été découverts par le Parti, et jamais par la Sécurité d’État ? – et qu’à cette question, le visage du ministre était devenu livide».



Finalement, le ministre est emprisonné et le meilleur chapitre du livre, le chapitre 17, est un véritable morceau d’anthologie où le ministre et ses exécutants se livrent à une surenchère d’autocritique à la phraséologie stéréotypée et ridicule dont Kadaré se moque avec délectation.



Longtemps, les journaux affichent une unité de façade entre la Chine et l’Albanie, mais une multitude de petits faits alimentent les rumeurs. Soudain, les bateaux chinois chargés d’apporter des équipements subissent des retards. Le traducteur Ekrem ne reçoit plus de textes chinois à traduire, avant d’être réapprovisionné quand le vent tourne à nouveau. Un contrat est annulé sans explication. Des étudiants chinois rentrent au pays. On démonte l’antenne qui retransmet les nouvelles de Chine. Un Albanais marche involontairement sur le pied d’un Chinois dans un autobus. La presse chinoise s’en empare, on brandit des radiographies et on rappelle le Chinois en question à Pékin pour l’exhiber avec le pied dans le plâtre. Et comme tous ces petits épisodes croqués sur le vif ne suffisaient pas, on invente la mort héroïque d’une personne qui n’existe pas et qu’on propose comme modèle aux masses (voir citation).



Il y a aussi une gigantesque opération paranoïaque où de faux ramoneurs et de faux plombiers posent des milliers de micros-espions dans les maisons et les vêtements des personnes à surveiller, mais le matériel est défectueux et des milliers d’écoutants n’entendent au mieux, entre les grésillements, que des banalités ou des propos d’alcôve, et lorsqu’on s’aperçoit qu’un micro était dans la veste d’un tué lors d’un accident de la route, il faut aller déterrer le cadavre quelques semaines plus tard, en pataugeant dans la boue et par une pluie battante. Tout le livre est ainsi d’un humour grinçant.



Une chose m’a frappé, l’obéissance aveugle aux ordres les plus absurdes. Comme Eichmann, des gens sont pris dans une idéologie qui annihile toute réflexion personnelle. On tue sans état d’âme parce que l’ordre vient d’en haut. Kadaré introduit souvent des allusions à Shakespeare (Macbeth et Duncan par exemple) et aux classiques grecs. C’est que le sort des Albanais se fait et de défait sans eux et loin d’eux, à Pékin, tout comme dans les tragédies grecques, les hommes ne sont que des marionnettes aux mains des dieux qui se disputent entre eux comme dans l’Odyssée d’Homère. Et les hommes subissent sans comprendre.

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Le concert

Me voilà à mi-roman et, autant le dire, ce fut ardu. Personnages qui tergiversent, pensées obsessionnelles retournées sous toutes les coutures de l'anxiété... et acteurs que l'on rencontre pour avoir une information... que l'on obtient jamais. Ca reste vague, c'est frustrant mais apparemment ça contente. Sauf le lecteur. Plus de 200 pages avant d'avoir une légère idée de ce qui se trame et ça continue de tirer en longueur. Il est bien possible que je me sois habituée à des récits plus dynamiques, à la sauce de notre époque mais j'ai adoré des romans lents que je trouvais fins, bien écris, intéressants. Celui-ci me tue d'ennui.
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Le Crépuscule des dieux de la steppe

J’avais découvert à travers ce livre simple et facile d’accès les relations franco-albanaises et la vie dans les pays de l’est. En même temps il réside dans ce livre un étrange sentiment d’universalité. Pas un grand livre mais un bon moment
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Le Crépuscule des dieux de la steppe

Une espèce d'autobiographie de l'auteur durant son séjour à Moscou après la mort de Staline, au coeur de la littérature soviétique qui émerge pendant la présidence de Kroutchev, et donc juste avant la mise à l'écart de l'Albanie.

L' écriture caustique, riche, décapante d'un grand écrivain, qui au delà de ses intrigues amoureuses plutôt cocasses et savoureuses, nous documente sur le contexte socioculturel de l'époque.

A noter que l'édition récente de cet ouvrage chez Laffont, avec deux autres romans parus ultérieurement "L'hiver de la grande solitude" et "Le concert" semble être la seule disponible maintenant.

Un très beau livre très solide et maniable avec un papier proche du papier-bible.
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Le Crépuscule des dieux de la steppe

Récit d'un écrivain albanais en Union soviétique, qui fréquente une femme russe jusqu'au refroidissement des relations entre Albanie et Russie. La splendeur du titre désigne les dirigeants soviétiques, que l'on n'entrevoit qu'à la fin, distants et figés. le roman n'est pas exaltant, reflétant une vie morne et contrôlée, celle des écrivains communistes des pays frères à Moscou. On y perçoit d'une façon feutrée la critique du régime, sans apprendre grand chose.
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Le Crépuscule des dieux de la steppe

Si ce n’est vraiment pour ses qualités romanesques, ce livre mérite et même vaut d’être lu pour son aspect documentaire sur la vie intellectuelle dans l’URSS stalinienne (je sais que Staline était déjà mort, mais je vous assure que la vie de tous les jours était encore bien stalinienne) par quelqu’un qui tente de dire les choses sans émettre en même temps son jugement. C’est très intéressant.
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Le Crépuscule des dieux de la steppe

"Le crépuscule des dieux de la steppe" est un excellent roman sur le dilemme de l'écrivain derrière le rideau de fer à la fin des années cinquante qui serait peut-être difficile a suivre pour le lecteur qui ne connait pas le contexte. Il plaira certainement à ceux qui connaissent l'œuvre de Boris Pasternak, Joseph Brodsky, Milan Kundera, Alexandre Soljenitsyne, Bohomil Hrabal, et Joseph Skvorecky. Si on ne connait déjà deux ou trois auteurs de ce group, on aura beaucoup du mal a suivre "Le crépuscule des dieux de la steppe".

Le roman qui est autobiographique décrit les expériences de Kadaré entre 1958-1960 quand il a été inscrit à l'Institut de littérature Maxime-Gorki à Moscou. Pendant cette période Kadaré fréquentait surtout d'autres étudiants étrangers qui comme lui qui étaient là pour apprendre à écrire dans le style du réalisme-socialiste exigé dans les pays communistes.

Ces étudiants pour la plupart trouvaient la situation stressante. Ils se méfiaient mutuellement parce qu'ils savaient qu'il y avaient beaucoup d'espions parmi eux. En plus les Russes ne leur faisaient pas confiance. Les loisirs proposés (les randonnées du ski par exemple) étaient souvent des calvaires surtout pour ceux qui n'avaient jamais vu de neige afin d'arriver en Russie.

Malgré les inconvénients, le protagoniste qui est l'alter ego de Kadaré accepte assez bien la situation. Il veut faire la carrière dans un pays communiste et son seule passe-temps est de courir après les jupes. Il est troublé néanmoins par la peur qu'il va commettre une trahison à un moment critique.

Peu à peu son enthousiasme pour l'URSS s'effrite. Il n'aime pas que les Russes lui dit comment écrire. Convaincu que Homère était Albanais, il ne croit pas que la culture Russe est supérieure à la sienne. Quand il tombe sur une version samizdat (clandestin) du docteur Jivago de Boris Pasternak, il commence à poser des questions sur la censure Stalinienne.

Peu après, le comité Nobel accorde son prix littéraire à Pasternak et le régime monte une compagne féroce de salissage contre Pasternak. Quand ses amis se mettent à dénoncer Pasternak, le protagoniste est outragé. En même temps il a peur qu'il sera forcé à ajouter sa voix aux autres qui attaquent Pasternak.

À ce moment on annonce que le régime Albanais d'Envers Hoxha a décidé d'effectuer une rupture avec l'URSS et se l'allier avec la Chine populaire. On convoque le protagoniste à l'ambassade Albanais où on lui dit qu'il devra quitter l'URSS dans les plus brefs délais et de renoncer immédiatement à tout rendez-vous avec des filles russes .

Le protagoniste pense à une jeune fille qu'il avait beaucoup aimé mais qu'il perdu à cause de sa manque de maturité. Il décide de la voir pour une dernière fois afin de faire ses excuses convenablement. Pourtant dès qu'il la voit, il se souvient de ses ordres de ne pas rencontrer des filles russes. Il coupe court la rencontre et fuit. Ainsi, il effectue la trahison dont il avait eu longtemps peur.
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Le Crépuscule des dieux de la steppe

J’ai eu la chance de rencontrer Ismaïl Kadaré en Albanie à l’époque communiste. Le traducteur Arben Leskaj m’avait organisé une rencontre pour prendre le thé avec lui et sa femme sur la plage de Durrës. J’avais déjà lu plusieurs de ses livres, dont l’extraordinaire Avril brisé, et j’ai admiré alors le côté prudemment sarcastique qu’on retrouve dans ses livres, mais je ne pouvais pas encore deviner son brillant parcours ultérieur. Ses écrits sont traduits dans 29 langues. Il a souvent été cité pour le prix Nobel de littérature sans jamais l'obtenir, mais a obtenu quantité d’autres prix, et aujourd’hui, à 85 ans, est Grand Officier de la Légion d’Honneur. Son livre Le Crépuscule des Dieux de la steppe, au titre subtilement provocateur comme tout son œuvre, annonce la rupture entre l’Albanie et la Russie, mais pas encore la rupture avec le communisme puisque Enver Hoxha s’est ensuite allié à la Chine contre l’URSS. Un moment, cette situation lui a permis une certaine liberté dans la critique du système soviétique, mais plusieurs de ses écrits ont été interdits et, se sentant menacé, Kadaré a été contraint de s'exiler, et a obtenu l'asile politique en France.

Après le lycée, il avait obtenu une bourse pour l'institut Gorki de littérature à Moscou, passage obligé pour tout intellectuel des pays satellites qu’il faut russifier à la fois sur le plan linguistique («Ce Letton n’a pas encore renié sa langue, mais on y travaille» (p. 117) et idéologique, en formatant la pensée car il n’y a qu’un seul parti communiste, le «parti père». Les autres sont des «partis fils» (p. 186). Il fallait aussi éradiquer le folklorisme, le conformisme, le stalinisme, le nationalisme bourgeois le chauvinisme des petits républiques, etc. (p. 59). Et gare aux dirigeants des pays satellites qui s’écartent du chemin, comme le hongrois («C’est avec ces ongles qu’il voulait écorcher la Russie, mais nous les lui avons arrachés» (p. 207).

Kadaré étudie donc ce qu'il ne faut pas écrire, mais fera le contraire. Le Crépuscule des dieux de la steppe relate précisément ce séjour à l’Institut Gorki, et une idylle entre le narrateur albanais et une Russe. La fin du livre annonce sarcastiquement la rupture entre les deux pays: l’ambassadeur d’Albanie à Moscou convoque de toute urgence les étudiants albanais pour leur dire simplement que les relations entre les deux pays étaient bonnes (p. 198), et chacun comprend d’autant mieux le contraire que les étudiants sont invités à cesser tout contact avec les jeunes filles russes «pour éviter les provocations».

Pendant ce séjour, le Prix Nobel de Littérature est décerné à Boris Pasternak pour Le Docteur Jivago. Khrouchtchev avait chargé les écrivains de dénoncer les crimes de Staline, mais après un moment, ça s’était retourné contre Pasternak. «La radio, de cinq heures du matin à minuit, la télévision, les journaux, les revues, jusqu’aux publications pour enfants étaient remplis d’attaques contre l’écrivain renégat. On publiait des télégrammes, des lettres, des déclarations de kolkhoziens, d’unités militaires,... » (pp. 143-144) «Après une lettre envoyée par la population d’une certaine région de Qipstap,… le speaker lut la déclaration du clergé de Tachkent» (p. 151). La campagne continuait avec «une déclaration… émanant peut-être des pêcheurs de baleine de la mer du Nord» (p. 152), puis la campagne s’interrompit brutalement et sans explication, on parla plutôt des succès des kolkhoziens de l’Oural, de la pèche, et d’une poétesse cinghalaise (pp. 170-171).

Ce livre est fort intéressant car c’est un témoignage sur le fonctionnement du système soviétique de l’intérieur, au quotidien, et je terminerai par une dernière citation typique : «Ces derniers temps… on avait vu des comités centraux évincés, des groupes se livrer à une lutte implacable pour le pouvoir, des complots, des manœuvres de coulisse, et rien de tout cela, ou presque, n’état évoqué… On n’y trouvait que le bruissement des bouleaux » (p. 151).

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Le Crépuscule des dieux de la steppe

Ce diptyque, s’il vante la résistance de Hodja aux pressions internationales, est aussi pour Kadaré un prétexte pour peindre le quotidien d’une dictature. Les héros, nombreux, y sont ballottés au gré des vents d’une histoire qu’ils ne contrôlent pas du tout.
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Le dîner de trop

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Le dîner de trop

Que s'est-t-il passé ce soir là au fameux diner réunissant la famille du docteur Gurameto aux soldats allemands .

Le docteur Gurameto a-t-il réellement invité ce soir-là son ancien ami le colonel von Scwabe ?

Ou peut-être s'agit-il d'un rêve , de ceux qui l'ont fait quand l'histoire nous dépasse .

L'auteur utilise la dérision pour nous faire un tableau de l' Albanie pendant toute cette période troublée qui va de la seconde guerre mondiale à la période communiste , il nous entraîne avec allégresse dans un petit village albanais où les revirements de l'histoire font tourner la tête des habitants , il évoque le fameux complot ' des blouses blanches ' , un des derniers méfaits de la paranoïa de Staline .

C'est un auteur que je ne connaissais pas et j'ai beaucoup apprécié le style de l'écriture et le thème du roman , la vie sous le régime communiste .

Un auteur que je relirai .
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Le dîner de trop

Voici une lecture difficile. Je l'avoue je n'ai pas compris où l'auteur voulait aller et il y a beaucoup de questions que je me suis posées durant ma lecture qui n'ont pas trouvé de réponses.

Le style est ardu (Est-ce parce que c'est une traduction venant de l'albanais ? Je ne connais absolument rien de cette langue, je ne sais rien de sa grammaire ni de sa syntaxe). Les phrases étaient complexe et leurs structures peu conventionnelles ce qui n'a pas facilité ma tâche.



Ce que j'ai aimé : le thème de l'histoire. Un point de vue sur la seconde mondiale peu répandu.

Ce que j'ai moins aimé : la mise en forme de l'histoire trop difficile et complexe voire alambiquée pour moi.
Lien : http://jenta3.blogs.dhnet.be..
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Le dîner de trop

Farce à l’Albanaise que ce live, c’est ainsi que je découvre cet auteur qui par moment a un petit coté Sciascia caustique et gouailleur, gouleyant c’est à dire frappé. Ce qui ne m’étonne pas. Un albanais c’est un peu un italien (oui ils s’en défendent surtout coté religion) et un italien c’est un peu un sicilien édulcoré d’où... je vais éviter de conclure...



Farce tragi-comique mais farce à demi et critique, plus ou moins bon enfant, des ses concitoyens Je pensais naïvement que Clochemerle était essentiellement français et inimitable et bien non il y a aussi Gjirokastër

qui fait aussi bien et pendant des temps troubles les rumeurs vont bon

train

Quitte à faire la guerre sans la faire et sans savoir avec qui et contre qui, l’Albanie étant essentiellement un lieux de passage pour les troupes alliées mais lesquelles, l’activité principale reste le commérage. Surtout deux médecins homonymes de nom Gurameto l’un surnommé le grand l’autre le petit en font les frais



L’affaire du dîner (sans Jacques Villeret pour détendre l’atmosphère: il a le chic pour le faire même en Führer dans «papy fait de la résistance») de Gurameto avec les allemands et les otages. Une mystérieuse invitation d’un mort qui effectivement viendra bien manger



Réalité? Légendes? Eh bien les deux docteur!



Puis Kadaré passe a des choses moins frivoles et narre l’après-guerre



Après guerre avec le communisme, une paranoïa va s’emparer de la ville qui n’aura pas «son jour de gloire» Le petit père des peuples demande des comptes et exige des purges: la guerre n’a pas assez tué

Les comploteurs traîtres et alliés des allemands, les juifs comploteurs planétaires, les nationalistes royalistes.

Arrestations arbitraires, règlements de compte, «les dessous de l’Affaire des Dames» interpellées courtoisement «camarades» et qui en payerons le prix



Enfin Kadaré sur un registre plus angoissant aborde «le dernier chapitre»



Il nous parle du déroulement des purges staliniennes et luttes contre la conspiration ainsi que des procès fréquents à l’époque en URSS et dans les pays satellites Celui d’Artur London connu par son livre «l’aveu» restera célèbre.



Il met bien en scène ce processus de dégradation des individus interpellés: mécanisme impitoyable de broyage physique et psychologique des individus, d’auto-accusation forcée, manipulation, huis clos et tortures dans les geôles, sadisme des exécutants même les lettrés, pratiques courantes pendant la guerre froide.



Rien n’est simple chez un auteur de la Mitteleuropa d’Adriatique On croit avoir tout compris puis un petit quelque chose interpelle et voilà le doute à n’en plus finir

Kadaré évoque donc son pays qui a subit les régimes ottomans avec ses nuées de juges surnuméraires zélés, le régime fasciste du Duce, l’amitié douteuse de l’Allemagne nazi et le communisme et pour «un peuple qui manque de nerf» ce n’est pas évident.

C’est pour moi une agréable découverte. Un esprit comme je les aime.

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Le dîner de trop

Si je ne devais retenir qu’un mot à la fin de ce livre, ce serait celui-ci : difficile. Cette lecture m’a poussé au bout de mes retranchements ; ce fut un combat, un corps à corps où j’ai failli perdre plusieurs fois mon souffle.

L’histoire se déroule dans une ville d’Albanie où un des principaux sujets de commérages est celui de l’opposition entre les deux docteurs Gurameto. La tranquillité de ce petit bourg est perturbée par l’arrivée des Allemands, considérés comme des envahisseurs en ce temps de guerre. Le docteur Gurameto organise un dîner somptueux pour le colonel Fritz von Schwabe, un de ces anciens camarades. Et c’est là où le récit prend tout son ampleur. L’auteur nous entraîne dans un flou artistique qui mêle humour, fantastique, rêve, complots et dénonciations : on ne sait plus distinguer la vérité des mensonges, les commérages des faits réels, les coupables des innocents. Ce dîner a-t-il réellement eu lieu ou n’est-ce qu’un songe, une hystérie collective ? Que s’est-il passé lors de ce repas ? Que reproche-t-on aux docteurs Gurameto ?

L’auteur dénonce la politique répressive qu’il y a eu en Albanie ; les multiples tortures et emprisonnements politiques parfois injustifiées. Mais la structure du livre est tellement complexe qu’on perd parfois de vue le but de l’auteur.

Le style d’écriture est riche, teinté d’ironie et de sarcasme. Le ton oscille entre la tragédie, l’humour et l’absurde. Il y a des passages magnifiques, notamment celui du dialogue avec Vehip l’aveugle que j’ai trouvé particulièrement beau.

C’est le premier roman que je découvre de cet auteur. Malgré cette note passable, je pense que je suis passée à côté de quelque chose. Une expérience à renouveler avec un autre livre ?
Lien : http://leslecturesdehanta.co..
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