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Citations de Jacques Lacarrière (282)


LICHEN IV



                    Graphide ou Lichen-écriture

Calligraphie des herbes : tourbières de l'épopée,
chronique des sphaignes, palimpseste des mousses.
Et sur ton écorce, la signature des corbeaux !

Calligraphie des steppes : toundras de l'élégie,
éphéméride des nuages, parchemin des buissons.
Et sur ton écume, les runes de la mer !

Que traces-tu le long des arbres ? Paraphes de tige,
devoirs de sève ou la dissertation des vents, cette
mue de lignes en ma vie ?

Qu'incises-tu le long des troncs ? Cahiers de
gnome, textes de fée ou la rédaction des insectes,
ce charroi de signes en ma vie ?
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LICHEN III



Horizontal émoi des mots. Lichen. Écrin du clair matin
des tourbes. Lichen. Faim des cervidés, anfractuosité du
froid. Lichen. Rosace du doigt sur le roc, rosaire des gra-
nits. Lichen. Le pourquoi du peu qui perdure, le pourquoi
du rien qui demeure. Lichen. Épine de questions, ronce
du ciel. Lichen. Broussaille en fenaison, buisson de
déraison. Lichen. Apatride du Temps au clair matin
des tourbes. Lichen.
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Regardons le portrait saisissant _ou plutôt l'image saisissante _ qu'en à donné Theophanos le grec au XIV siècle dans l'église de la Transfiguration de Novgorod. Sur le visage de l'ascete, brûlé par le soleil et par les vents, voilé de long cheveux, aucune angoisse, aucune joie, rien qui rappelle l'homme de chair et de désir, mais au contraire cette hésychia, cette " tranquillité de l'âme" , ce "silence du coeur et des pensées" auxquels parvient l'anachorete après des années et de jeûnes. Ce n est pas l'homme Makaire, ni l'ascete Makaire, qu'a peint Theophanos, mais une projection de l'homme interieur, l'homme éveillé qui se cache derrière l'homme "endormi" selon les termes des grands anachoretes
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L'homme est, comme l'univers, une création manquée, une imitation lamentable, une semblance d'homme, un faux homme ou, en terme anthropologique, un pseudanthrope.
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Résumons-nous : nous sommes des exploités à l'échelle cosmique, les prolétaires du bourreau-démiurge, des esclaves exilés dans un monde soumis viscéralement à la violence, les sédiments d'un ciel perdu, des étrangers sur notre propre terre.
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Chaque naissance, chaque perpétuation de la vie accroît le champ de la mort. Dans ce cercle sans fin, le simple fait de vivre, de respirer, de se nourrir, de dormir, de rêver, implique l'existence et l'accroissement du mal.
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Les spartiates furent les premiers à pratiquer systématiquement l'eugénisme, en précipitant du haut du rocher nommé "rocher des Apothètes" les enfants mal conformés ou simplement chétifs. Je me dis qu'aujourd'hui où l'on fait de véritables pèlerinages à Auschwitz ou à Buchenwald, il faudrait aussi dans les voyages en Grèce faire un pèlerinage dans la banlieue sud de Sparte,à ce fameux rocher, lieu de naissance de ce que vingt siècle plus tard, on appellera "la Bête Immonde"
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Mystère aussi que le nom des rivières qui se perd dès qu'elle se jettent dans un fleuve ( se jettent : expression qui m'a toujours absurdes, les rivières ne sont pas suicidaires, elles ne se jettent pas dans les fleuves , eussent ils des bras accueillants
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Au miroir du lac immuable…


Au miroir du lac immuable,
l’épopée dénombre ses fantômes.
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Ne demande jamais…


Ne demande jamais
où regarde l’aurige.
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Entre deux stèles …


Entre deux stèles, un asphodèle s’est fané.
Les morts soudainement se sont tus.
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En ma main …


En ma main pépie l’hirondelle :
merveille de maintenir
le printemps captif !
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Zénith et soleil …


Zénith et soleil. Soleil et vertige.
Vertige te chute.

Frissonne encore la mer,
frissonne encore la rive
où s’abîma le rêve.
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J'ai voulu photographier trois moines. En les regardant de près, tandis qu'ils prenaient leur pose, j'eus l'impression de les avoir vus - sur une fresque. Le premier y portait un manteau à damier noir et blanc. Il avait un air noble et résigné. Il tenait sa tête coupée dans ses mains. C'était un martyr. Le deuxième portait un bonnet noir, une robe noire, des souliers noirs. C'était un higoumène. Le troisième était nu. Il avait une barbe qui lui descendait jusqu'aux pieds, un air très doux, les mains jointes. C'était un anachorète. A leur conversation, j'ai compris que c'était bien eux. La photo finie, ils m'ont remercié, se sont levés, sont retournés dans leur cellule. Tels sont les habitants d'Athos. Un peuple de fresque, un peuple sans âge.
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Un silence inattendu, inquiétant au début, qui ne cesse qu’en se rapprochant du rivage en eaux basses, où la houle entrechoque les galets en une suite de sons ténus, cristallins comme du verre qu’on émiette ou comme les cris d’amour, l’été, des musaraignes. Sous l’eau, ce ne sont pas seulement les oreilles mais le corps tout entier qui entend et perçoit. C’est le corps qui ressent les vibrations et les frissons de l’onde, devenu si léger, si nouveau qu’il peut glisser, onduler, ambuler avec gestes lents de somnambule. Sous l’eau, tout devient déformé, grossi, la taille des êtres et des objets, les distances et les proportions. Le temps lui-même se modifie, la vie apparaît ralentie au cœur de ces fluidités, densités, gravités nouvelles.
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Tout passage d’une ville à une autre, d’un continent à un autre, d’un élément à un autre implique une petite épreuve et de subtiles initiation. Jusqu’aux années récentes, il suffisait pour accéder aux zones d’embarquement de montrer ses papiers pour dire qui ont était. Avec le terrorisme et les détournements, il faut dire et prouver aussi qui l’on n’est pas. Chaque fois que je franchis le portique d’un détecteur magnétique, je pense aux épreuves des anciens Égyptiens. Eux aussi devaient (après leur mort) franchir des portiques et prouver qu’ils n’étaient pas des terroristes de l’au-delà, en énumérant un à un les méfaits et les crimes qu’ils n’avaient pas commis.
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Un monde interactif est un monde où des milliers de gens bavardent, écrivent, dessinent et communiquent avec les autres habitants de la planète tout en restant chez eux, au cœur d’un rassemblement solitaire. L’écran d’ordinateur devient une sorte de hublot donnant non sur la mer mais sur un monde de mots, de lignes, de signes, de représentations qui ne proposent que des rencontres, des échanges, des voyages virtuels où l’on ne risque pas, en surfant d’ondes en ondes, d’être couvert d’embruns ! Ainsi, le moderne Internaute reste-il, quoi qu’il en pense, un promeneur solitaire, isolé dans sa sombre cabine, l’œil rivé à son hublot.
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